fois la facilité, l’activité et la vogue, sa production a été
plus copieuse que ne le ferait supposer l’âge où il s’en est
allé (r). Que de jolies choses nous lui devons, depuis son
jeune portrait de 1876, jusqu’à cet insigne à double face
que portèrent à leur boutonnière les jurés de l’exposition
de 1900. Bien que Dupuis n’ait pas été spécialement
portraitiste, ce sont de vivants profils que son Luc Olivier
Merson, fondu à Rome en cire perdue (1873), son
Garnier Pages, son Cardinal de Bonnechoseet surtout
Madame Dupuis mère, pieux, hommage de l’amour
filial'. Pa rmi ses premières compositions allégoriques, on
peut citer Expédition du Talisman ( i 883), Récompense
a u x Artistes français ( i885), Médaille commémorative
de rExposition universellede 1889, et les multiples
têtes de République, dont tant d ’exemplaires, petits ou
grands, sont encore distribués chaque année à toutes
sortes de lauréats. C’est d ’ordinaire un genre un peu
ingrat que l’emblème officiel ; mais Daniel Dupuis a toujours
réussi à en éluder la froideur, à force d’élégance et
de virtuosité. A l’imitation des grands vignettistes du
XVIIIe siècle, il savait tirer des anatomies enfantines
tout ce qu’elles comportent de variété, de :fraîcheur- et
de poésie ; et il était arrivé à en posséder à ce point la
technique qu’il n’en est pas déplus exquises que celles qui.
dans ses dernières années, furent à ma demande presque
improvisées; tel, derrière La Source, le petit amour ailé
qui trempe si gentiment sa menotte dans l’eau delà cascade;
et tel aussi le petit génie porte-lumière qui,dansune
(i)'L a nomenclature insérée par M. F. Mazerolle dans la première livraison
de Ià G ale tte numismatique de 1898 comprenait déjà"'33o numéros.’ La
collection la plus complète des oeuvres de D. Dupuis est celle qu’il a léguée à
sa ville natale et qui se trouve exposée dans une des salles du château de
Blois.
autre pièce, s’appuie contre le vieux balancier historique
de la Monnaie de Paris. Ce jeton de circonstance, commandé,
à la veille de la dernière exposition, porte, sur
l’autre face, une jeune Histoire occupée à inscrire sur le
livre des siècles le millésime igoo; et nul, assurément,
ne reconnaîtra en elle l’austère Clio, muse des Tacite ou
des Bossuet : c’est plutôt l’éphémère chronique. Mais
elle est si charmante et si bien mise que l’on ne songe pas
à lui reprocher ce que sa silhouette a d’un peu frivole.
Daniel Dupuis a su, d’ailleurs, quand il le fallait,
imprimer sur la figure humaine toute la gravité et même
toute la tristesse voulues, témoin cette Madone debout
qui, faisant de ses bras un berceau à l’Enfant-Dieù,
semble déjà pressentir les angoisses du Golgotha.
Si Dupuis a été le Racine de la médaille contemporaine,
on peut dire que Chaplain en a été le Corneille (i). Sôn
talent est essentiellement viril. Même ses portraits de
femmes en font foj : Mme Claude, Mm0 Gustave Simon,
M116 Henzey, Mme Raphaël, Mme Rose Caron, Mlles de
Brancovan, la princesse Bibesco, Jeanne-Julia Bartet,
Mme de Vogué... Mais ce sont surtout ses portraits
d’hommes qui l’immortaliseront, immortalisant avec lui
les privilégiés qui furent ses modèles. Nul n’a poussé plus
loin que Chaplain, cette analyse et cette synthèse du
masque humain, qui permettent d’idéaliser la nature sans
la déformer. Il assurait d’abord, scrupuleusement, la
ressemblance, puis y ajoutait ce je ne sais quoi de supéè
rieur qui s’imposera au respect de la postérité. Plus d’une
fois, connaissant la médaille et connaissant l’homme, il
(1) Né à Mortagne, le 12 juillet 1839, Jules-Clément Chaplain e stm o r fà
Paris le i 3 juillet .1909. Le salon des artistes français de 1910 contient la
collection presque complète de ses oeuvres,, dessins et bustes compris.