méridionale, pays de l’Artémis éphésieïme et où les
colons grecs vivaient côte à côte avec une population
asiatique dont la monarchie lydienne de Sardes représente
l’épanouissement suprême et qui devait, plus tard,
constituer encore le principal point d'appui de la domination
des Perses Achéménidessur l’Asie Mineure.
IV.
Le statère Jameson est intéressant non seulement à
ces divers points de vue, il l ’est encore sous le rapport de
l’histoire de l’art. Si vous faites abstraction de la figure
humaine, vous serez frappes de la remarquable structure
du reste de l’animal. Le corps du taureau est modelé
avec une habileté consommée, la souplesse, des mouvements
est rendue avec un naturel dont la raideur glacee
des monstres ninivites demeure bien éloignée ; la vérité
anatomique est traduite avec une science d’observation
et une exactitude qui n ’ont plus de progrès à souhaiter.'
C’est en quoi ce taureau est un remarquable échantillon
de l’art ionien, si florissant aux VIIe et VIe sièeles.
Il convient de présenter ici une double observation.
D’abord, les anciens ont toujours et de très bonne heure
représenté les animaux avec une remarquable perfection
plastique. Les gravures des cavernes préhistoriques
l’attestent avec une éloquence qui nous surprend, tout
aussi bien que les gemmes gravées, crétoises et mycéniennes,
ou les cylindres cbaldéens, comme celui de
Sargon l’Ancien, sur lequel se trouvent deux taureaux
affrontés, devenus célèbres dans l’histoire de l’art. Mais
dès qu’il s’est agi de traduire la figure humaine, les
artistes anciens ont témoigné longtemps d une singulière
inexpérience. Cela est vrai non seulement pour 1 Orient,
mais pour l’art crétois et mycenien (î) ; cela, est vfài
aussi, beaucoup plus tard, pour l’art ionien, dans lequel
d’admirables animaliers ont pitoyablement échoué lorsqu’ils
ont voulu interpréter la physionomie d’un visage’,
ou même la structure et les. souples mouvements du
corps humain. Tandis que l’art grec, pour figurer les
dieux, ne sait encore que dresser des xoana ou ébaucher
ces grossières statues aux jambes accolées et raides, aux
bras soudés le long du corps, comme par l’engourdissement
de la mort, au visage figé dans un sourire béat et
sans vie, comme par un enfant qui s’essaye a manier le
ciseau, nous constatons, au contraire, que les formes
animales sont rendues au naturel avec une aisance et
une expérience consommées.
Dans l’art monétaire, il est remarquable que les plus
anciennes monnaies ne nous présentent aucune image
humaine. Elles ont, toutes, pour types, des animaux
divers, très habilement gravés sur les coins, dès le premier
jour : tortue, lion, bélier, taureau, cerf, abeille,
phoque.dauphin,cheval .griffon, hippocampe, sphinx, etc.
Les plus anciens profils d’hommes ou de femmes sur les
monnaies paraissent, un peu plus tard, timides et rares:
ce sont des divinités, et la gaucherie de leur image forme
un singulier contraste avec les figures d’animaux que je
viens de rappeler.
Voyez la tête de femme, sans doute Aphrodite, sur un
statère d ’argent (Pl. XXIX, io) qu’on classe, sans de
bien bonnes raisons, en tête, de la série de Cnide (2) ; son
style rude, la forme globuleuse de l’oeil, la dimension et
la disposition barbare de l’oreille rappellent^ la tete de
(1) G. P e r r o t , Histoire de l’art dans l’antiquité, t. H, p . 555.
(2) B a b e lo n , Traité. Descr. hist., 1 .1, p l. XVIII, 9.