
moniques nous parle du monocorde de Fablo [
Colonna, par le moyen duquel chaque ton étoit [
divifé en cinq parties prefque égales , dont trois
faifoient un femi-ton majeur & deux un femi-ton
mineur ; c’eft ce qui fait foupçonner qu’il y a une
faute dans l’ouvrage dont on a tiré la defcription
du pentecontacorde , & que dans cet inftrument
aufli le ton étoit divifé en cinq, & non en quatre
parties.
Au refte, Merfenne dit au même endroit que
cette invention n’appartient pas à Fabio Colonna,
qui avouoit lui-même le tenir d’un autre : il ajouté
que dès l’an 153 7, on avoir commencé à fabriquer
en Italie un archi-cymbalum, où chaque ton
devoit être divifé en cinq parties.
• . i
Pfalterium, Pfalterion, ou Saltèrion. *
Cet inftrument, appelé nébel chez les Hébreux,
différoit fort peu de la harpe pour, la forme qui
reffembloit au delta grec A , ou à un triangle, dont
la bafe en jouant étoit parallèle à l’horizon, &
dont les deux côtés montans obliquement fe rèu-
niffoiént au fommet.
Dans lu ri des deux côtés,, il y avoit une cavité
ou corps fonore. L’autre côté s’appuyoit contre
celui qui jouoit. ^ : .
Les cordes partoièrit toutes du corps fonore ;
quelques-unes fe terminoient vers le fommet, &
celles qui étoient ducôté non fonore , finiffoient
toutes au fommet.
Le nombre des cordes ne paffoit pas douze.
Jufques-là il n’y avoit de différence entre les
deux inftrumens , que dans la pofitiôn du corps
fonore. Le pfalterium l’avoit en deflus & la harpe
en deffous, enforte que l’on touchoit les cordes
à rebours.
Le pfalterium fe jouoit en bas & la harpe en
haut avec le doigt, ou bien avec une efpèce d’archet.''
Le pfalterion moderne eft un inftrument p lat,
qui a la figure d’un trapèze ou triangle tronqué
par en haut.
Il eft garni de treize rangs de cordes de fil de
fer ou de laiton, accordées de quatre en quatre
à l’uniffon ou à l’o&ave , & montées fur deux
chevalets qui font aux deux côtés de l’inftrument.
Il y a des joueurs de pfalterion qui ne fe fervent
que de leurs doigts, qu’ils appuient légèrement
fur les cordes pour en tirer du fon. D ’autres
arment leurs doigts de dix petits anneaux auxquels
eft attachée une plume à chacun, & par ce moyen
ils tirent du pfalterion des fons- bien plus forts &
plus bien argentins.
Cet inftrument eft fort agréable quand il eft bien
joué , & fort ancien en France ; il en eft fort
queftiôn dans les plus anciens romans.
On touche encore le pfalterion avec une petite
yerge de fer ou bâton recourbé ; ce qui fait que
quelques-uns le mettent au rang des inftrumens de
percuflion.
La table fupéfieure du pfalterion eft faite de
fapin oü de cèdre , comme celle des clavecins ;
elle eft collée comme celle de ces inftrumens , &
percée pour placer une rofe.
Les cordes, qui font de fer ou de laiton, font
retenues par une de leurs extrémités , par des
pointes ou crochets, fichées dans un des fommiers ,
& par l’autre extrémité elles font liées autour de
chevilles de fe r , au moyen defquelles on les tend
pour les accorder.
Papias appelle pfalterion une efpèce d’orgue ott
de flûte , dont on fe fert à l’églife pour accompagner
le chant. En latin fambucus.
V I.
In s t r u m e n s a v e n t e t a t u y a u x ,
O r g u e .
L’orgue eft le plus grand & le plus harmonieux
des inftrumens de mufique.
Il forme lui feul un orcheftre par la variété des
fons qu’il produit, & par la diverfité des inftrumens
qu’il imite ; il réunit le jeu tendre de la
flûte, le cri perçant du fifre, les tons champêtres
des mufettes , des hautbois , des clarinettes, des
baffons ; le bruit éclatant des clairons & des trompettes
^ il rend les effets de l’écho; ilfemble même
emprunter les accens des voix humaines.
C ’eft pourquoi il a confervé le nom- d'orgue ,
qu’on donnoit autrefois à toutes- fortes d inftrumens
( o§f«vov), c’eft-à-dire, l’inftrument par excellence.
' *'
L’invention des orgues eft aufli ancienne que
leur mécanique eft ingénieufe.
Les voyageurs rapportent que les Chinois ont
eu long-temps avant les autres peuples, une forte
d’orgue; mais affez petit pour qu’on guiffe le porter
dans la main. - ; - r
Cet inftrument des Chinois eft compofé de plu-
fieurs tuyaux , & rend un fon fort agréable. On
prétend que le père Pereira troÜŸa lé moyen d’a-
: grandir leur orgue y & de le placer dans l’églife
des Jéfuites à Peking.
Caufeus dit que l’orgue fut porté en Europe
par un Chinois, qui étoit venu’avec des millionnaires.
Il paroît même que Caufeus a vu jouer
de cet inftrument.
Au re fte , l’Opinion la plus commune eft que
le premier que l’on ait Vu en France fut accompagné
d’un fameux orgânifte, & envoyé en pré-
fent en 757 par Conftantin Copronyme au roi
Pépin , qui étoit alors à Compiègne , & qui en
fit don à l’églife de faint Corneille de cette ville.
Charlemagne, fils de Pépin, en reçut un autre
de l’empereur Michel. C ’é toit, fuivant Eginard,
un orgue hydraulique où le vent étoit excité par
une chute d’eau»
Mais l'orgue pneumatique, dans lequel le vent
eft fourni par des foufflets, a prévalu, & c’eft le
feul dont on faffe ufage.
On dit que cet orgue de Charlemagne imitoit
à la fois, le bruit du tonnerre, le fon de la lyre
& de la cymbale.
Muratori remarque que, dans ce même temps,
il y avoit des orgues en Italie, & aflùre qu’on
préfenta à Louis le Débonnaire, un prêtre vénitien
nommé G eorge, qui, ayant offert d’en conf-
truire u n , fut envoyé par l’empereur à Aix-la-
Chapelle pour l’exécuter.
Volftan fait la defcription d’un orgue qui avoit
deux planchers ', quatre cens tuyaux, cinquante-
deux foufflets , & qui exigeoit foixante-dix hommes
pour les faire jouer : cela reffemble à un
conte, ou cela indique une conftruâion très-compliquée
& très-imparfaite.
Dans les interdits des églifes, on fufpendoit la
mufique des orgues.
L’orgue le plus célèbre à Rome, eft celui de '
faint Jean de Latran , fait par Luc Blazi de Pe-
roufe, par ordre de Clément VIII.
Il y en a un très-renommé à Trente , & un
fameux à Orviette.
Au refte, il ne faut pas croire que l’orgue ait
été porté tout de fuite au degré de perfection où
nous le voyons!
Dans le commencement, l’orgue n’ayant qu’une
oCtave d’étendue , on ne toucha le clavier que
de la main droite.. On l’étendit enfuite du côté
des baffes, alors on fe fervit des deux mains.
Les premiers claviers à la main n’avoient que
depuis neuf touches jufqu’à treize, & étoient de
cinq pieds fix pouces de longueur, chaque touche
ayant cinq à fix pouces dé largeur, qu’on ne pou-
yoit enfoncer qu’à coups de poing.
Un nommé Bernard dit l’Allemand, très-habile
muficien de Venife, fut le premier qui augmenta
les, jeux de l’orgue; il inventa vers 1470 lès pédales,
qu’il faifoit jouer par des cordelettes.
Le premier regiftre fut imaginé par Timothée,
faCteur d’orgue hollândois, vers 1615.
Depuis quelquës années on a beaucoup perfectionné
les orgues de Paris, qui l’emportent maintenant
fur tous les autres.
Fabrication de Porgue.
Un fadeur d’orgues ne peut bien y travailler,
qu'en fachant les principales règles de la mécanique
& de la ftatique.
Il doit aufli être habile dans la menuiferie.
La mécanique lui donnera les moyens d’augmenter
les forces dans les machines.
La ftatique lui enfeignera les lois de l’équilibre.
Et la menuiferie lui fera néceffaire pour les principaux
affemblages qu’il faut employer dans certaines
pièces de l’orgue.
Un fadeur doit connoître tous les différens tuyaux
& jeux de l’orgue; il doit en favoir faire le dia-
pafo.n ou la figure triangulaire, qui fert à trouver
les longueurs & les largeurs convenables de ces
tuyaux.
Enfin , il faut qu’il fâche parfaitement les différentes
pièces qui compofent l’orgue, & comment
le tout fe correfpond.
L’orgue eft compofé d’un buffet de menuiferie
plus ou moins enrichi de fculpture, qu’on appelle
fû t ; de deux fommiers fur lefque-Is font arrangés
les tuyaux d’étain, de plomb, ou de bois ; il eft
garni d’un ou de plufieurs claviers.
On donne le vent aux tuyaux par plufieurs
grands foufflets , & il eft conduit aux fommiers
par des tuyaux de bois , qu’on appelle porter
vents.
Les matières qui compofent un orgue, font le
bois, l’étain & le plomb, auxquelles on peut ajouter
le. cuivre pour la fabrique des anches , & le
fer qui fert à plufieurs ufages, comme dans toutes
fortes de machines.
Ainfi , avant d’entrer dans la defcription plus
détaillée de la faéture de l’orgue, il convient de
faire connoître l’apprêt des différentes matières
qui le compofent.
Commençons par le bois.
Le bois dont on fe fert dans la fabrique des
orgues eft de deuxjfortes, par rapport aux différens
emplois qu’on en fait.
Celui deftiné pour faire les tuyaux de bois J
les fommiers, les claviers, les abrégés, doit être
du chêne , connu fous le nom de bois de Hol-.
lande, parce que les Hollândois en font le commerce.
Le plus parfait ne fauroit être trop bon ,
principalement pour la fabrique des tuyaux & des
fommiers.
L’autre forte de bois dont on fe fert dans la fabrique
des orgues, eft connu fous le nom de bois
de Vofgès ; c’eft aufli du bois de chêne , mais
moins parfait que celui de Hollande. On s’en fert
pour faire le buffet & quelques parties-de l’orgue,
qui ne demandent point du bois fi parfait, comme
, par exemple, les tables des foufflets.
Lé cuivre employé dans la fabrique des orgues,
eft du -laiton réduit en tables de différentes épaif-
feurs & en fil.
Le fer fert à faire les pattes des rouleaux d’a-,
brégé, & à divers autres emplois.
On fait ufage de l’étain fin d’Angleterre. On
peut cependant, à fon défaut, en employer d’autre.
Le plomb eft le plomb ordinaire.
On réduit ces deux métaux en lames ou feuilles
minces, longues & larges autant qu’il eft befoin;
ce qui fe fait de la manière fuivante.
Manière de couler les tables d?ètain ou de plomb,
qui fervent à faire les puyaux d'orgue.
On prépare une table de bois de chêne1, aufli
longue & aufli large qu’il eft befoin ; on fait en-
G ij