
de la maçonnerie, enfortexque ni le feu , ni les
.étincelles , ni la fumée , n aient aucun accès par
dedans.
Pour échauffer l’air intérieur d’une façon sûre
& régulière , on élève au deffus du poêle une
chambrette ou efpèce de fourneau , qu’on emplit
de cailloutages. Cette chambrette communique par
un tuyau avec l ’air extérieur , & par un autre
canal avec l’air intérieur de la ferre : celui de dehors
, qu’on laiffe entrer dans la chambrette, s’échauffe
en féjournant & en avançant au travers
de ces cailloux brûlants. On le diftribue en'telle
quantité qu’on le juge à propos dans l’intérieur de
la ferre, par un robinet que l’on gouverne fuivant
l ’avis du thermomètre, en corrigeant même, s’il
eft néceffaire , le trop grand chaud par l’air froid
qu’on eft toujours maître d’y recevoir. Dans cette
ferre règne une température d’air qui approche
beaucoup de la douceur des beaux jours d’été.
L’oranger, cet arbre fi beau qui eft couvert en
même temps dans toutes fortes de faifons , de
fleurs & de fruits , eft tellement recherché, que les
jardiniers fleuriftes s’occupent beaucoup à en élever.
Ils font' venir de Gènes ou de Provence tous
les ans de jeunes orangers, ou ils fèment en mars
fur une couche, des pépins de bigarades, c’eft-à-
dire, d’oranges amères 8c fauvages, q u i, à l’aide
d’un châffis vitré dont ils recouvrent la couche,
montent de près de deux pieds , dès la première
année.
A la fécondé année, ils les mettent dans des
pots 8c les greffent.
Comme ce bel arbre ne vient pas aufli naturellement
dans un climat froid ou tempéré que dans
les provinces méridionales , on répare la lenteur
des terres par une compofition qui y mêle à. peu
près ce qu’il trouve dans un pays plus chaud.
Cette compofition confifte dans la préparation
d’une terre mélangée de terreau de brebis , repofée
depuis deux ans , d’un tiers de terreau de vieille
couche, & d’un tiers de terre graffe de marais.
Le jardinier a eu foin de préparer une caiffe
proportionnée à la grandeur de l’oranger ; il met
au fond de cette caiffe des briques ou plâtras pour
faciliter l’écoulement des eaux ; il la remplit de
la terre préparée , & il y plante les orangers. A
fept ou huit ans, il les tranfplante de nouveau dans
des caiffes ; qui doivent avoir environ vingt-quatre
pouces de large.
C ’eft par la taille que le jardinier forme aux
orangers ces belles têtes arrondies, qui font l’ornement
des jardins. Si l’oranger fe trouve défiguré
par la grêle, les vents, ou par quelque autre accident
, il ravale l’arbre jufqü’à cet endroit, c’eft-
à-dire, qu’il coupe & raccourcit toutes les branches
jufqu’à l’endroit où il apperçoit les préparatifs de
nouvelles branches; il veille à détruire les punaifes
d’orangers qui fiieent les feuilles & les deffèchent;
il lave ces feuilles avec du vinaigre; il les arrofe
légèrement pour les tenir humides : lorfqu’ils lan-
guiffent, que les feuilles jauniffent, il les arrofe
avec un peu de lie de vin qui les ranime & leilr
donne une nouvelle vigueiir.
A l’approche de l’hiver on rentre dans une ferre
les orangers, grenadiers, lauriers, & tous les ar-
buft.es à fruit & à fleur qui redoutent le froid. 11
fuffit dans un climat doux que cette ferre foit bien
fermée , faine , 8c tournée au midi pour recevoir
la .chaleur du foleil à travers les vitres. On tapiffe
cette ferre de nattes de paille , pour garantir les
plantes de l’humidité des murs. desA.&M.)
Art de conferver les fleurs & de varier les couleurs
des fleurs defféchées.
Il y a un art de conferver les fleurs avec leur
forme, leurs odeurs 8c leurs couleurs naturelles,
& même de changer & de varier leurs nuances.
La réputation que les Chinois & lés Italiens fe
font acquife par la beauté de leurs fleurs artificielles,
qui, dansdes faifons les plus rigoureufes,
nous offrent ce que le printemps peut produire de
, plus agréable, a engagé diverfes perfonnes à s’exer-
! ■ çer dans l’art de conferver pendant long - temps
ces riches productions de la nature dans leurs formes
8c leurs couleurs naturelles , de leur conferver
une partie de leur odeur , & indépendamment de
leur teinte naturelle , de leur donner différentes
nuances pour en rendre l’éclat plus beau , plus
v i f , & en même temps plus varié 8c plus agréable.
Lorfque par la diverfité de fes couleurs & la ri-
cheffe de fes feuilles , une fleur eft jugée digne
de décorer nos autels, ou d’orner .la tête des dames,
ou d’embellir les tablés de deffert; il eft ordinaire
de lès faire deffécher én conférvant leur
fituation naturelle , & de ne point les applatir ni
comprimer.
Cependant, comme il arrive fouvent que la prétendue
délicateffe, ou plutôt la bizarrerie de nos
goûts , ne trouve point' affèz de perfection dans
ces chefs-d’oeuvre de la nature pour fatisfaire nos
caprices , l’art eft venu à notre fecours en changeant
les inimitables couleurs de la nature en des
couleurs bien inférieures , mais qui nous paroiflent
plus belles , parce qu’elles font notre ouvrage ,
en variant avec certaines drogues les nuances des
fleurs qui font fufceptibles de recevoir d’autres
nuances.
C ’eft ainfi qu’avec l’efprit de nitre on eft parvenu
à changer la couleur dés. immortelles blanches en
un beau jaune citron, les violettes en un bel incarnat
, les bleues en un beau rouge.
Comme .les fleurs defféchées ne fubiroient aucuns
des changemens qu’on voudroit leur donner ,
on fe contente de les panacher en paflant par del-
fus un pinceau trempé dans de l’eau forte , ou
bien on change totalement leur couleur en les ren-
verfant 8c en les plongeant en entier dans cet acide
fans y enfoncer leurs tiges , parce que l ’eau les
amolliroit en les bru.ant. | *
Après qu’elles ont été ainfi plongées pendant un
inftant, *on les retire pour les fufpendre & les
laifter égoutter pendant quelques momens, jufqu’à
ce qu’il paroiffe qu’elles font affez coloriées.
Quand leur couleur artificielle eft au degré qu’on
le defire, on les plonge dans de l’eau claire pour
en enlever l’eau forte, 8c on les fufpend de nouveau
pour lès faire fécher entièrement.
On doit pourtant obferver que toutes les fleurs
ne font pas propres pour cette opération, & qu’il
y en a qui le fanent entièrement lorfqu’elles font
ainfi trempées, comme l’immortelle qui eft de couleur
citron , le fouci , le bluet , l’oeillet d’Inde,
l’amaranthe, la renoncule, ôcc.
Les plantes qui peuvent Supporter cette préparation
, fe deffèchent naturellement & confervent j
leur foupleffe. Il y en a quelques-unes que l’humj- ■
dité de l’air ou de la tête qui les porte dans fes
cheveux, fait épanouir ; d’autres-que la chaleur fait
refermer , comme celles qui ont une fubftance
fèche & càrtilagineufe; d’autres qui font fujettes à
fe chiffonner, comme l’oeillet , la renoncule, ôc
celles qui font un peu charnues.
Pour éviter cet inconvénient, on les paffe au
four; mais cette opération n’a pas toujours le fuc-
cés qu’on en attend, parce que les fleurs deviennent
caffantes lorfqu’on les y expofe à nu & qu’on
ne leur ménage point une chaleur graduée.
Quelque induftrie qu’on emploie pour préparer
. les fleurs dont nous venons de parler, on ne les
conferveroit pas long-temps, fi on les tenoit toujours
expofées au grand air. •
Afin de ne pas rendre inutiles toutes les peines
qu’on fe feroit données pour cet effet , M. de.
Monti, de l’académie de Bologne , a imaginé un
nouveau procédé qui procure une plus longue durée
aux fleurs qu’on veut conferver.
On fait fécher au foleil, dans un poêle ou dans
une étuve, du fable de rivière le plus pur ou du
fablon fin ; on le tamife pour en rendre le grain
égal ; on couvre le fond d’un bocal, d’une caiffe
de bois ou de fer-blanc étamé, & d’une longueur
médiocre, de l’épaiffeur de trois ou quatre doigts
de ce fable ; on y enfpnce la queue des fleurs, de
forte que fans fe toucher, elles fe tiennent droites
& à côté les unes des autres , en prenant garde
de déranger leur fituation naturelle ; on remplit de
fable tous les interftices qu’elles laiffent entre elles,
& on couvre le tout d’une couche du même fable
a 'a hauteur de deux ou trois doigts.
La caiffe ou le bocal étant exa&ement rempli,
on les expofe au foleil , ou , ce qui vaut encore
mteux , on les met dans un endroit échauffé par
nn poele, ou dans Un four où la chaleur foit de
trente à trente-fix degrés , 8c on les laiffe jufqu’à
ce que ces fleurs foient bien fèches ; ce qu’on re-
connoît par la fleur qu’on a mife au haut du vafe
pour fervir d’effai. Cette opération ne dure, tout
au plus, que fix heures de temps.
Quand ce font des tulipes qu’on veut conferver
dans ce goût, il faut couper adroitement le piftil
qui renferme la graine, 8c remplir de fable le vide
que cet enlèvement a laiffé.
Lorfque ce font des amaranthes , après que le
pain a été tiré du four, on les y met à nu & fans
fablon.
Comme cette déification ternit leur couleur, on
la leur rend en les plongeant dans de l’eau chaude
8c en les faifant fécher à l’air.
On fe fert auffi de la même méthode pour deffécher
plufieurs fruits , comme ceux de l’églantier
8c autres.
Lorfqu’on veut chamarrer des fleurs que l’art ou
la nature ont defféchées, on les trempe dans une
eau de gomme épaiffe , & on les faupoudre en-
fuite de diverfes couleurs avec le carmin, le vermillon
, la lacque, l’azur, la cendre bleue , le tour-
nefol liquide, la gomme-gutte liquide, Sc la poudre
d’or.
Dès que les fleurs font faupoudrées des couleurs
qu’on juge à propos de leur donner, on les trempe
de nouveau dans une eau de gomme arabique ,
ou dans un vernis de blanc d’oeuf, édulcoré avec
quelques gouttes de lait ou de tithymale.
L’exemple que nous ont donné les Napolitains
de conferver à leurs fleurs artificielles les mêmes
odeurs qu’ont les naturelles , en cachant dans le
calice de la fleur artificielle un peu d’huile effen-
tielle de chaque plante mêlée avec du fucre, nous
a fait porter les expériences de cet art jufqu’à pouvoir
fixer Todeur des fleurs naturelles 8c vives ,
en arrofant le terreau où elles doivent croître d’un
vinaigre ambré 8c mufqjLié, avant d’y femer leurs
graines ou oignons qu’on a eu foin de faire macérer
auparavant dans cette même liqueur.
Fleurs artificielles.
L’art d’imiter les fleurs , les feuilles , 8c les plantes,
offre à nos yeux ce que les belles faifons de
l’année 8c tous les climats produifent de plus agréable
; il feriible fixer ces'ornemens fugitifs de la
nature ; il les reproduit 8c les multiplie pour ne
| plus changer.
Cet art, très-ancien à la Chine 8c en Italie, où
la plus grande partie de la nobleffe l’exerce avec
honneur, eft moderne en France 8c peu pratiqué
encore avec toute la délicateffe 8c la perfeéfiorTque
ce genre de travail exige.
Ceux qui compofent ces bouquets grofliers, qui:
ne reffemblent à rien moins qu’à des bouquets de
fleurs, 8c qui ne font qu’un affemblage bizarre de
plumes mal teintçs 8c de feuilles mal afforties , ne
méritent pas de porter le nom de fleuriftes, qui
ne convient qu’à celui q u i, dans la compofition
des feuilles & des fleurs artificielles , les fait pa-
roître fi naturelles, qu’à peine diftingue-t-on l’ouvrage
de l’art de celui de la nature.