
tablature eft-elle la clé de cet infiniment pour en
connoître les vraies pofitions & leur complication,
vu la quantité de notes femblables que l’écolier
iroit peut-être chercher fort loin, lorfqu’elles font
fous fes doigts ; ce qui empêche alors la liaifon
des fons , & met de la féchereffe dans le toucher.
,
De la tablature.
On fe fert de lettres ou de chiffres pour noter
les airs ou accompagnemens. Cette méthode ,
quoique ancienne, s’eft confervée pour cet infiniment
, par la commodité dont elle efl pour la
bonne grâce de la main, l’arrangement des doigts,
la beauté du fon, l’harmonie, & la facilité dans
l’exécution : à moins qu’on ne fe propofe de faire ,
pour le moins , autant d’étude de cet inflrument
que du clavecin, il n’efl guère pofïible de faire ■
fur le champ le choix des pofitions dé la main fans
une grande habitude.
En France, on fe fert des onze premières lettres
de l’alphabet , depuis Va jufqu’à l , fur chaque
corde, pour les dix touches^qui produifent. onze
femi-rons, à partir de la corde à vide au fillet,
c’efl-à-dire, fans mettre de doigt de deffus, & qui
fe marque par un a ; la première touche par un
b y & les autres fucceflivemeut.
On fe fert encore d’autres fignes pour les doigts
des deux mains. Ceux de la main gauche, dont
l ’exécution fe fait fur toute la partie du manche,
font les tirades '— qui fe font lorfque les doigts
étant pofés , il faut couler d’une note a l’autre
en defcendant ; les chûtes ?—s ,, lorfqu’il faut couler
les notés en montant ; ce qui fe fait en biffant
tomber les doigts fur la corde avec affez de force,
pour que le feul tac du bout des doigts lui faffe
produire le fon ; les miaulemens ou plaintes * qui
fe font en appuyant & balançant le doigt fur la
corde pour augmenter la durée du fon; les trem-
blemens ou cadences), qui fe font en battant avec
le doigt plus ou moins vite fur la corde, en empruntant
un ton ou un femi-ton au deffus de la
note du chant ; les barres courbes ( , pour avertir
qu’il faut coucher le premier doigt fur toutes les
cordes , pour former , pour ainfi dire , un fillet
ambulant de touche en touche.
Les fignes de la main droite qui tient lieu d’archet
, & dont l’exécution fe fait dans la partie de
la table de la guittare font les petites barres
droites |, ou demi-cercles , que l’on place fous
la lettre qui doit être touchée du pouce ; lesjjpoints
• \ v .r que l’on place fous celles qui doivent être
touchées du premier, du fécond & du troifième
doigt; & enfin, la manière d’annoncer quand on
doit battre ou relever les accords en batterie, qui
fe fait en plaçant immédiatement après l’accord
marqué par les lettres, les notes entre la première
& la fécondé ligne de la portée, la queue en bas
ou en haut; en bas, pour frapper des doigts de
haut en bas; & en haut, pour frapper en relevant
de bas en haut, & l’on fait durer plus ou moins
la batterie, en dépliant fucceflivement les doigts
fuivant la valeur de la note.
Quant aux notes des lettres que l’on doit pincer
, on les place au deffus & hors de la portée
où font les lettres.
Cette portée a cinq lignes repréfentatives des
cinq rangs de cordes de la guittare.
Quand il y a plufieurs lettres de fuite de même
valeur, on fe contente de mettre une feule note
fur la première , par exemple , une feul croche
pour toute une mefure , & même plufieurs me-
fures , dont les notes feroient de même valeur
jufqu’à ce qu’il leur fuccède une autre note de
plus ou moins de valeur. On fe fert à cet égard
des mêmes fignes ufitès pour la müfique , tant
pouç les notes que pour lés foupirs.
On diflingue deux manières de jouer de cet
inflrument, qui font en batterie ou pinces» Plufieurs
affeélent l ’une plus que l’autre : d’autres fe
fervent agréablement des deux, & c’efl le meil-,
leur parti qu’on ait à prendre.
La plus étendue & la plus fufceptible d’exé-
| cut-ion., efl le pincé. m
Les batteries font plus harmonieufes, parce que
toutes les cordés font en jeu ; mais il faut bien de
la légèreté , de la douceur dans la main droite ,
& de la fermeté & de la jufteffe dans la pofition
de la main gauche, r pour qu’elles produifent un
bon effet : car, rien n’eft fi facile qùe de faire de
çet inflrument, dont l’harmonie efl très-douce &
agréable, un vrai chauderon.
Les pincés fe font entre la rofe & le chevalet ^
mais les batteries doivent fe faire „entre la rofe &
la dernière touche du manche, c’efl-à-dire, vers
le milieu de l’étendue des cordes, pour éviter la
dureté qui réfulteroit du voifinage du chevalet r
qu’on ne maîtriferoit pas auf£ aifément qu’en pinçant.
Des Cordes*
Le choix des cordes demande une grande a t tention
pour la jufteffe & la proportion , fur-tout
pour les uniffons.
Les bourdons filés ont deux inconvéniens, l’un
d’ufer & de couper les touches ; l’autre plus grand
efl de dominer trop fur les autres cordes, & d’en
faire* perdre le fon final par la durée du leur, prin-
: cipalement dans les batteries.
Il efl des accords où ils peuvent bien faire l
c’eft lorfqu’ils produifent le fon fondamental ; mais
comme cela n’arrive pas le plus Couvent, il vaut
mieux s’en tenir aux bourdons fimples, à moins
qu’on ne veuille que pincer..
V i fé , célèbre maître de guittare fous Louis XIV,
n’en mettoit point au cinquième rang ; mais il y
perdoit l’oélave du la -y & par confisquent une
demi-o&ave..
Elle s’accorde par quartes, à l’exception de la:
fécondé & de la troifième , qui n’ont entre elles
qu’un intervalle de tierce.
Observations fur la figure du manche.-
Lé nom des notes efl pofé fur le manche à l’en-
dfoit même où il faut pofer les doigts , le plus
près de la touche qu’il efl pofïible, mais jamais
deffus la touche.
Il ne faut pas pofer de doigt près le fillet qui
fe marque par un a , parce que le fon des cinq
cordes y efl déterminé par leur pofition ; c’efl ce
qu’on appelle fonner les cordes à vide* C ’eft-là l’accord
de la guittare.
Dans la progreflîon des femi-tons du diapafon,
on ne trouve point de bémols marqués. On s’efl
déterminé à ne marquer que des dièfes, pour ne
point faire de confufiôn. Mais ce qui efl la dièfe
fera f i bémol quand il le faudra, parce qu’il fe fait
au même endroit, le ton du ta au f i naturel fe
trouvant partagé également par la touche. Ainfi
des autres.
Quant à la forme 'des lettres, la plus ufitée efl
la bâtarde, un peu plus penchée qu’à l’ordinaire,
à-caufc des lettres à queues qui pourroient s’entrelacer
, & embarraffer les autres lettres & les fignes
dont on fe fert.
Les b fe font comme des 6; les c comme des r?
dont le jambage droit efl un peu raccourci & le
trait circonflexe un peu alongé.
On leur donne cette forme pour éviter que la
ligne fur laquelle les c font pofés, ne les ferme
par en haut, & ne les- faffe prendre pour des e*
On ne fauroit mettre trop de netteté dans cette
manière de noter , bien moins avantageufe pour
la vue que les notes de mufique ; mais cette méthode
efl propre & commode pour cet inflrument 9
quand on ne peut y donner affez de temps pour
acquérir l’e grand ufage des pofitions.
T A B L E A U DU MA N C H E DE LA GUI T TARE.
Manière de noter en tablature, 6» rapport des lettres avec tous les tons du diapafon.