
MA R C H A N D S DE FER.
( Art des )
I t n’y a point de métal plus utile à la fociété
que le fer ; il n’y en a pas qui foit auffi commun
& aufîi généralement répandu dans toutes les parties
du globe.
L'Amérique , qui a long-temps paffé pour être
^dépourvue de ce métal, en renferme plufieurs mines
très-riches. Le fer eft fur-tout très - abondant
en Europe. Il y a des mines de fer de toutes les
efpèces, en France, en Allemagne, en Angleterre,
en Norwège, en Suède, &c.
Nous avons décrit, dans une certaine étendue, 1’Art du Fer, dans le tome II de ce Diftionnaire
des Arts. Nous renvoyons à cet article pour tout
ce qui concerne l’exploitation , le travail & la
fabrique de ce métal. Il nous fuffic ici de donner
une notion générale du commerce du fer.
Tout l’art des marchands de fer confifte à con-
noître les bonnes qualités de ce métal, & à le tirer
des meilleures forges.
En effet, les différens fers ont différentes qualités
, qu'un oeil exercé peut juger à la caffure.
Il y a des fers aigres oc des fers doux.
Le fer aigre eft celui qui fe caffe aifément à
froid. On le reconnoît facilement en ce qu’il a le
grain brillant & gros à la caffure. Cette efpèce de
fer eft tendre au feu , & ne peut fupporter une
grande chaleur fans fe brûler , c’eft-à-dire , qu’il
eft alors fujet à perdre fa qualité métallique & à
fe réduire dans l’état de fcories & de chaux.
Le fer doux paroît noir dans fa caffure. C’eft à
ce coup-d’oeil qu’on le diftingue. Il eft malléable ,
même à froid ; il eft tendre à la lime, mais il eft
fujet à être cendreux.
Lorfque le fer paroît gris-noir à la caffure & tirant
fur le blanc, il eft beaucoup plus roide que
le précédent ; c’eft celui que préfèrent les maréchaux
, les ferruriers, les taillandiers & tous les ouvriers
en gros ouvrages ; mais il feroit difficile de
s’en fervir pour les ouvrages qui doivent être polis
, parce qu’on lui remarque des grains que la-
lime ne peut emporter.
Il y a des fers qui, à la caffure, paroiffent mêlés
d’une partie blanche & d’une autre partie grife
ou noire. Le grain en eft gros , fans l’être trop.
Les fers de cette forte font les plus eftimés ; ils font
faciles à forger, & prennent très-bien le poli fous
la lime. Ils ne font fujets ni à des grains , ni à
des cendrures , d’autant qu’ils s’affinent à mefure
qu’on les travaille.
Le fer qui a le grain petit & ferré, comme celui
de l’acier , eft pliant à froid & bouillant dans la
forge, ce qui le rend difficile à forger & à limer.
D ’ailleurs, il fe foude mal ; il n’eft guère bon qu’à
fabriquer des outils d’agriculture.
Le fer que les ouvriers nomment rouverain, eft
un fer fujet à plufieurs défauts , comme d’être
pliant, malléable à froid, & caffant à chaud. Cette
forte de fer eft reconnoiffable à des gerçures ou
découpures qui traverfent les carrés des barres. Ou
lui trouve fouvent des pailles & des grains d’acier
fâcheux fous la lime. C’eft le défaut ordinaire des
fers d’Efpagne.
C ’eft donc à la caffure principalement que l’on
reconnoît la bonne ou la mauvaife qualité du fer.
La nature de ce métal fe diftingue auffi a la
forge , & l’on peut dire en général que tout fer
doux fous le marteau eft caftant à froid ; & s il
eft ferme, on peut conjecturer qu’il eft pliant.
Les fers fe vendent comme on les tire des forges
, en barres carties , rondes ou plates, en carillons
, en bottes, en courçon, en cornettes, en plu-,
ques, en tôles.
Il a été rendu plufieurs édits & arrêts qui ordonnent
de ne fe fervir du fer aigre que dans les
ouvrages dont la rupture ne peut caufer aucun
accident, & au contraire de n’employer que du
fer doux dans.tous les autres ouvrages.
Et afin que le public ne fût pas trompé dans
l’achat de cette marehandife, il fut ordonné, pat
les lettres-patentes de Charles VI du 30 mai i4!î>
que le fer provenant des mines feroit marqué ; que
pour cet effet, il feroit payé le dixième de fa valeur
; que ce droit domanial feroit annexé pout
toujours à la couronne, & qu’il feroit partie de la
ferme générale des aides.
En 1628, le fer mis en oeuvre & apporté des
pays étrangers & celui des forges du royaume,
furent déclarés fujets à cette marque, & duren
être conduits & déchargés aux bureaux pour J
payer les droits.
En 1636 , la quincaillerie fut aflujettie à payer
les mêmes droits pour le même objet.
Ces droits furent fixés par l’ordonnance de 1680
à 13 fols 6 deniers par quintal de fer; à dix-hui
fous par quintal de quincaillerie groffe &
à ao fous pîtr quintal d’acier, & à 3 fous 4 ^.niC
par quintal de mine, le quintal valant 100 Uvr
poids de marc, pour le diftinguer de celui des
forges qui eft beaucoup plus fort.
perfonne n’eft exempt de ces droits , & les fers
deftinés pour lp fervice du roi y font également
3 l i s fers font également fujets à des droits d’entrée
& de fortie , ainfi qu’il a été réglé par arrêt du
confeil du 2 avril 1701.
Les marchands de fer font du corps de la mercerie,
& le principal objet (Je leur commerce eft
la vente des différentes fortes de fer. Le duvet ou
les plumes à lit font auffi du commerce des marchands
qu’on nomme marchands merciers-ferronnier s ,
mais plus communément marchands de fer. ;
Les trieurs de vieux fer, ferrailleurs, compofoient
une communauté qui ne fut érigée en corps de
jurande qu’après le milieu du dix-feptième fiçcle.
Cependant, dès l’année 1693 » fe trouvèrent en
état de payer au roi 3000 livres de finance, pour
l’union & incorporation des charges des jurés créés
en titre d’office au mois de mars 1691 pour tous
les corps & communautés de Paris. Cette communauté
fupporta auffi les nouvelles finances pour
l’union de tant d’autres charges, dont les beloins
de l’état, fur la fin du règne de Louis XIV, rendirent
la création auffi excufable que néceffaire.
Vingt-quatre maîtres compofoient ce corps. Ils
ne faifoient aucun apprenti ; mais lorfqu’il y avoit
des maitrifes vacantes ou autrement, ils remplif-
foient le nombre par aflbciation ou élection de
nouveaux maîtres.
Les jurés, comme dans les autres communautés,
étoient chargés de veiller à leurs privilèges, d’indiquer
les affemblées & de faire le rapport des
faifies. ■ ■
Il n’âppârtehoît qu’à ceux du nombre des vingt-,
quatre d’aller par les rues le fac fur le dos , crier :
Qui a de vieilles ferrailles à vendre ?
Enfin, la peine d’une amende, de la faifie & de
la confifcation de la marehandife étoit ordonnée
contre ceux qui, n’étant pas de la communauté ,
s’ingéroient de crier & d’acheter, ce que les lettres-
patentes de ces crieurs leur avoient réfervé.
Mais par l’édit du 11 août 1776, cette communauté
a été fupprimée, & la profeffion de ces
crieurs peut être exercée librement par les frip-
piers - brocanteurs , achetant & vendant dans les
rues, halles & marchés & non en place fixé. Ils
doivent feulement être inferîts fur les regiftres de
la police.
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