négligées. Effrayés en .apparence par la. difficulté
d’opérer le ch e v a l, & retenus véritablement par
les obftacles qu i naiffent d ’une ignorance non allez
profonde pour fe déguifer entièrement la néceffité
du favoir , les uns ne nous indiquent que des mé-
dicamens absolument impuiffans ; & les autres, en
banniffant toute méthode curative ,, telle que celle
qui dans l ’homme eft fuivie des-plus grands fu c c è s ,
ne nous propofent que la vo ie cru elle, & fouvent
pernicieufe des ligatures & des cautères'.. S i cependant
la maladie & la ftruélure des parties quelle
attaqué ne différent point effentiellement dans le
ch e v a l, il eft certain qu’on peut fe flatter de le
rétablir, lorfqu’aidé d’ailleurs des çonnoiffances
fur lefquelles lafcience d’opérer d oit, être étayée ,
on fe conformera à la pratique chirurgicale ÿ il
faut donc convenir que tous les i.nconyénieqs qu’on
pourroit en trevo ir, eu egard au régime & aux
panfemens, . ne feront qué dés prétextés frivoles ,
8c non des motifs fuffifans de ne pas tenter : 8c
c ’eft dans cette idée que je me crois obligé de tracer
quelques préceptes relativement au manuel de 1 o-
pération à laquelle le maréchal doit avoir recours.
L’ ulcère finueux & calleux dont il s’agit i c i , eft
toujours la fuite d’un dépôt queda trop grande
quantité de fa n g , fon acrimonie, fon épaiffiffe-
m en t, des coups ou des irritations quelconques
peuvent occafionner. Selon les progrès de la matière
qui fe creufe des routes dans le tiffu graiiTeux,
•aux environs de l’extrémité de l’inteftin reétum,
la fiftule reçoit des dénominations diverfes. Une
cavité percée d’une feule ouverture, forme une
fiftule fimple Sc incomplette ; fi cette ouverture
eft en-dehors, la fiftnle eft dite borgne & externe ;
& borgne & interne lqrfqu’elle eft dans 1 intérieur.
D eu x iffu e s , l’ une en-dehors & l’autre en-dedans
de l’ inteftin, la rendent complette ; & plufieurs
clapiers engagent à la déclarer compofée.
Qu elles que foient ces différences, l’opérateur
les faifrt aifement par les moyens que j’ai indiqués
en traitant de la fiftule en général. Une ^ouverture
a v e c dureté dans le voifinage du fondement, 8c
qui fournit 'de la matière purulente*, manifefte en
effet une fiftule externe dont la fonde découvre la
direction, la profondeur & les fmuofités ; & comme
l ’introduétion du ftilet*dans l’ouverture doit être
fuivie & accompagnée de f introduftion des doigts
du maréchal dans le large orifice de l’anus du cheval,
il lui eft facile de juger f i , .c e même ftilet.pénétrant
dans l’ inteftin-, la fiftule eft complette. Celles
qui font borgnes & internes ne s’annoncent point
suffi clairement, fur-tout dès que l’on n’a aucune
connoiffance du dépôt qui,peut y avoir donné lieu.
L ’écoulement du pus avant ou après les d é jeû ion s ,
en eft l’unique fymptôme, foit qu’il arrive confé-
quemment à la compreftion du foyer de l’humeur
caufée par la préfence des excrémens, foit que
cette compreftion foit produite par la contraélion
des parties qui reviennent* fur elles-mêmes & fe
refferrent lorfqne l’animal a fienté ; il elt queftion
dans une occurence femblable, de paffer les doigts
dans le reélum , à l’effet de reconnoître le lieu de
l’ouverture de la fiftule, lieu que défigne sûrement
une dureté 8c une élévation fenties & apperçues.
On doit enfuite glîffer adroitement un ftilet recour-,
bé dans l’iffue découverte , pour s’affûrer de
l’état du mal ; toutes ces recherches qui feront
précédées de la précaution d’affujettir tellement
l’animal dans le tra vail, qu’il ne puiffes’y
re fu fe r , ne conduifent à rien d’ avantageux, ftla
fiftule eft fi profonde qu’il.n e foit pas pofïlble
d’y porter l ’inflrument, fans craindre d’intérefler
des parties telles que la v e f fie , qui dans l’animal
avoifine étroitement le réé lum, ou d’ouvrir des I
vaiffeaux confidérables, tels que les artères hèmor- I
rhoïdales ; alors elle doit être regardée comme in-
curable'; mais dans tons les autres cas on ne doit I
point abandonner le cheval à fon fort. Il s’agit de I
le préparer d’abord à l’opération que l’on médite, I
par la fa ign é e , un breuvage purgatif, quelques I
lavemens émolliens, un régime humeélant, &
une diète affez févère..
Ces médicamens généraux adminiftrés, & le I
corps de l’animal étant fuffifamment difpofé, on I
le vuidera exaélement une heure ou deux avant I
d’opérer, & on lui donnera .un lavement. On le I
placera, enfuite dans le t ra v a il, avec le même foin I
que l’on a eu lorfqu’il n’a été queftion- que de le I
fonder. Sa queue fera fermement relevée à une I
des traverfes de la charpente dans laquelle il fera I
renfermé.
L ’objet que doit fe propofer le maréchal,eftd’ou* I
vrir la fiftule & d’emporter toutes les callofités. I
Il eft néceffairement aftreint de rendre complettes I
celles qui ne le font pas. Ainfi l’ouverture eft-elle I
externe, il y introduira un ftilet d’une groffeur pro- I
portionnée, 8c dont l’extrémité pénétrante ne fera I
point aiguë. Il le gliffera auffi près qu’il pourra de I
l’inteftin, dans lequel fes doigts feront introduits, I
8c lorfqu’il en fentira la pointe., il le pouffera avec I
affez de force .pour percer cet inteftin , ce qui fe
pratique facilement. Il l’obligera enfuite d’entrer
plus a v an t , 8c il le pliera pour ramener & p011*
faire fortir par l’anus celui des* bouts qui fe fera I
fait jour dans le reétum, de façon que la fiftule
fe trouvera comme embrochée par cet infiniment,
& contenue entre fes deux extrémités. Si l’ouver*
ture eft interne, i l examinera s’il n’eft point extérieurement
aucun endroit où la matière purulente
s’annonce par une légère fiuéluation , mais il aura
attention dans le même inftant de boucher 1 orifice
fi tué dans l’inteftin, de manière que la comprefliou
faite aai-dehors, ne puiffe déterminer cette matière
à fluer par cet orifice intérieur. Dès que l° flf
dulation fe fera fait fen tir , il pratiquera une ou
verture à la peau , par le moyen de laquelle il
muniquera du dehors en dedans de la fiftule ! 111
8c à défaut d’une fiuéluation reconnue , il P0[ f .
•fon ftilet recourbé, à l’effet de l’infinuer dans o
verture interne, 8c de faire une incifion à 1 en X
du tégument , fous lequel l’extrémité recourbée
rampante lui défignera le trajet du finus. Cette
incifion faite, il maintiendra le f tile t , ainfi que
dans le premier t a s prévu. Quant à la fiftule com-
plettë, l’ introduélion de cet inftrument n’eft point
aufli pénible, 8c le procédé eft plus fimple, mais
l’opération eft: la même , de quelqu’efpèce qu’elle
puiffe être.
Le maréchal faifi des deux extrémités du ftilet qu’il
tiendra jointes 8c u nies, emportera a vec le biftouri
toute la portion contenue dans l’anfe ; il coupera
même au-delà, afin de comprendre dans la partie
enlevée, toutes les callofités du canal fiftuleux. Il
confidérera enfuite , en portant le doigt dans la
[-plaie , s’il en eft quelques-unes encore ; il les d é truira
: il obfervera de plus , fi quelques finus
fuintant de la matière ne lui ont point échappé ;
[il les.ouvrira avec les cifeaux o u ïe biftouri, s’ils
| ne font pas profonds : 8c dans le cas où ils appro-
t cheroient de l’inteftin , il coupera l’inteftin même ;
[en un mot, il s’attachera à former une plaie exac-
[ tentent fanglante dans toute fon étend ue, 6c en-
[ fièrement dénuée de clapiers 8c de duretés. Il ne
I doit pas oublier auffi de vifiter foigneufement le
t reftum. Souvent la matière en rongeant les graiffes
K circonvoifines , en opère la dénudation. Alors
Ion l’incifera, 8c les levres dans le lieu incifé fe
I confolideront avec les parties prochaines, fans
K quoi le vuide qui fubfifteroit dans le fon d , feroit
I un obftacle à la réunion.
I Cette opération fa ite , on remplira la plaie de
I charpie , 8c on conduira le cheval à l’ écurie. L à ,
Ion l’entravera du derrière, 8c on le captivera de
I telle forte dans la place qui lui eft deftinée , que
I le maréchal puiffe faire fon panfement tranquille- 1 ment & fans danger. Il confifte à garantir cette
I même plaie très-exaélement, pour que les matières
K ny faffent aucun amas. Une quantité proportionnée K de charpie brute qu’il fubftituera à celle qu’il a
Ip la c é e l’animal étant dans le tra v ail, fuffiraàcet
■ effet; mais il évitera de tamponner, c’eft-à-dire,
I de comprimer trop fortement. Le dehors de la
I plaie fera couvert d’un plumaceau , 8c le tout fera
I maintenu par un emplâtre agglutinatif, fur lequel
I on mettra quelques compreffes ou de la filaffe.
I 1 out cet appareil fera maintenu par un cuir coupé
I en quarré, aux quatre pointes duquel feront bre-
■ aies: de folides attaches. D eu x d’entr’elles abou-
I liront fupérieurement en paffant fur la croupe à
I îjn furfaix où elles feront fixées 8c arrêtées : les
■ ûeux autres qui pafferont entre les cu iffe s, 8c qui
I dans leur trajet ne gêneront ni les tefticules ni le
I ourreau, répondront inférieurement à ce même
I nrraix dans lequel elles feront engagées O n pour-
I ra encore y fixer le bas de la queue de l’animal,
[ 9Ul j tirée en deffous , fervira d’un fécond foutien.
[ n des plus confidérables inconvéniens qu’entraîne
£ette opération, eft l’obligation de panfer l’animal I ?a!?ue /°is qu’il a fienté , mais cette obligation
elt point d’une nature à préférer la perte du che-
Arts 8* Métiers.. Tome IV. Partie II»
Val à la fatisfaâion de fe refufer aux peines qu’ elle
peut caufer. D ’ailleurs le régime auquel fa fitua-
tion le condamne, doit être affez févêre pour que
les excrémens ne foient pas abondans ; car dès
les premiers jours , le fon , l’eau blanche, la farine
de froment dans fon fe au , doivent être fes feuls
alimens. Q u ant aux autres panfemens , l’état de
la plaie guidera le maréchal. Il employera les médicamens
digeftifs, qu’il mêlera fur la fin de la
cure , avec de légers confomptifs , à l ’effet de réprimer
des chairs fongueufes, toujours embaraf-
fantes dans le traitement du ch ev a l, 8c plus promptes
à fe produire dans des ‘parties ou la graiffe
domine ; il s’efforcera enfin 8c dans le tems, de
procurer par cette vo ie la cicatrice.
Fijlule Lacrymale.
La fiftule lacrymale eft proprement un ulcère
calleux 8c finueux, dont le fiége eft à l’angle in terne
de l’oeil.
Si l’on confulte d’une part la difpofition des parties
fur lefquelles cette maladie s’exerce, 8c de l’autre
les caufes qui y donnent communément lieu ;
malgré la déférence due aux auteurs qui ont travaillé
à l’hiftoire des maux auxquels le cheval eft
fujet, on fe perfuadera difficilement'que cet animal
en a toujours été e x em p t , 8c qu’ il ne fauroit en,
être atteint. Ruini qui a confacré quinze chapitres
de fon ouvrage à l’expofition des infirmités de
l’ organe dont il s’a g i t , 8c qui parmi celles qu’ il décrit
comp te, outre la fluxion lunatique , Xépiphora ,
c’eft-à-dire un écoulement continuel de larmes,
accompagné d’inflamation, de rougeur 8c de picotement
, n’en fait m ention que très-imparfaitement:
tous les écrivains connus , qui l’ont précédé 8c
qui l’ont f u iv i , fe taifent entièrement fur ce point;
leur filence naîtroit-il donc de l’impoffibilité réelle
de l’exiftence de cet ulcère dans le ch e v a l, ou la
difficulté de le reconnoître à des fignes certains
8c très-fenfibles, leu r .en a-t-elle dérobé la préfence
? C ’eft ce qu’ il eft important d’approfondir.
Cette eau limpide , filtrée par la glande la c ry male
, 8c à qui la cornée doit fa tranfparence ,
ainfi qu’à l’humeur aqueufe , n’étoit pas moins
néceffaire à l’entretien de la n e tte té , de la mol-
leffe, 8c de la mobilité des yeu x du cheval que de
l’homme. Ceu x de l’un 8c de* l’autre en font
également pourvus ; elle eft verfée lentement
& fans-ceffe entre le globe 8c la furface interne
de la paupière fiipérieure. Le fuperflu ' de cette
lymphe lacrymale, qui n’eft pas toujours dans une
jufte proportion, pouffé dans une efpèce de can al,
qui réfulte de la forme 8c du concours des bords
des paupières, eft déterminé vers le grand angle.
Là elle frappe contre la caroncule lacrymale, 8c
ne pouvant furmonter l’obftacle que lui oppofe
cette d ig u e , elle eft renvoyé e à quelques lignes
du même an g le , vers les orifices des points lac ry maux
qu’elle enfile, 8c qui font chargés de la re