
le marc de deux livres de cochenille, cette lacque
doit être lavée & travaillée Somme les précédentes.
De la même manière vous pouvez faire une troi-
fième & même une quatrième lacque, en faifant
rebouillir le même marc, & en verfant fur la teinture
une diflolution à difcrétion ; on peut aufli ,
pour embellir la quatrième lacque, y joindre une
livre de bois de Bréfil, Fernambouc moulu , car
celui qui fe trouve haché en écailles à Paris, n’eft
ordinairement que du brèfillet que le marchand
vend pour vrai bréfil.
Il faut le faire bouillir avec le marc plus d’une
heure, pafler la teinture au tamis de crin & la
précipiter à l’alun. Mais cette lacque eft moitié
fine, moitié fauffe, & ne fe doit vendre que pour
telle.
Lacque rouge de la Chine.
Cette lacque eft fort belle ; fa couleur eft fort
fiable, même à l’ardeur du foleil, pourvu qu’elle
foit employée à l’huile.
Sa teinture foifonne extrêmement ; elle porte
jufqu’à dix livres de blanc de plomb pour une,
& elle ne participe jamais du violet ; elle eft très-
eclatante pour les draperies de velours rouge , &
pour la couleur cerife & les rofes ; elle eft fort
facile à faire, mais fon produit n’eft pas des plus
confidérables. Voici la manière de la faire.
On fait rebouillir pendant une demi - heure le
marc de vingt onces de cochenille, dont a retiré
te .^arm*n k Cliine, dans un feau d’eau de
rivière bien nette ; après quoi on paffe la teinture
à travers une toile, afin de l’avoir fort claire; on
verfe alors fur cette teinture une diftolution d’étain
en eau forte ; on la verfe goutte à goutte juf-
qu à ce qu’on voie de la couleur fe précipiter,
& qu’il ne fe forme plus de corps vifible. On arrête
alors & on fait repofer jufqu’au lendemain.
On décante l’eau qui fumage au précipité, &
on y verfe quelques féaux d’eau pure & claire,
pour laver la lacque & la dépouiller de l’eau forte
qu’elle pourroit avoir confervée.
Le lendemain on en décante encore l’eau , on
verfe la lacque fur un filtre de toile ; & lorfqu’elle
eft en pâte, on l’étend de l’épaiffeur d’un pouce
fur une planche pour la faire fécher. Lorfqu’elle
fera sèche , vous la cafterez à la main en petits
mprceaux gros comme des noifettes.
On fait rebouillir encore le marc, & on en tire
une fecpqde lacque par le moyen du même précipitant,
qu*on travaille & finit de la même manière
que la précédente.
Lacques fauffes , ainji nommées parce qu en peu de
temps elles perdent leu,r éclat, fur«tout au foleil.
Faites bouillir une ou plufieurs livres du bois
de Bréfil , véritable Fernambouc moulu, chaque
livre dans deux féaux d’eau pendant une heure
fans aucune addition ; après ce temps-là, ôtez 1«
chauderon du feu & paflez la teinture toute chaude
à travers une toile ou un tamis ferré.
Faites rebouillir votre même bois avec la moitié
autant de nouvelle eau, pendant une bonne demi-
heure ; filtrez-la comme la première fois , & mêlez
ces deux teintures enfemble ; laiffez-les refroidir
jufqu’au lendemain, la couleur fera devenue plus
claire & plus épaiffe ; verfez -y alors une leflive
bien clarifiée de deux livres de foude pour chaque
livre de bois de Bréfil, & par-deflus ce mélange
vous verferez promptement une diftolution clarifiée
d’alun de Rome ou autre,, aufli de deux livres
pour chaque livre de bois de Bréfil, dont vous
aurez tiré la teinture.
Il fe fera une fermentation aflez violente ; la.
quelle étant ceflee, vous verferez de l’eau pure
fur cette lacque pour la laver & la dépouiller de
tous fes fels. Cette lacque eft aflez belle, mais
la fuivante participe moins du violet, & eft par
conféquent préférable.
Lacque du Bréfil.
Tirez du bois-de Bréfil, de Fernambouc moulu,
une forte teinture en la faifant bouillir deux fois
de fuite, comme dans l’opération précédente, fans
aucune addition. Le lendemain verfez deflus une
diftolution bien clarifiée d’alun toute chaude ; la
quantité dépend de la force de la teinture & de
l ’envie que l’on a d’avoir une lacque claire ou
foncée*
Tout ce que l’on peut dire pour l’intelligence
de l’artifte, eft que s’il met aflez d’alun pour rendre
l’eau rouge toute blanche, qu’alors fa lacque fera
pâle - rofette & fort abondante ; au contraire ,
s’il en met très - peu, comme, par exemple, une
livre d’alun fur la teinture d’une livre dudit bois,
la lacque fera alors très - foncée & d’un rouge
brun, qui fait un bel effet & un fort beau rouge
employé avec le blanc de plomb.
Cette connoiflance fervira de règle & de guide
pour faire la lacque claire ou foncée , ordinairement
on met deux livres d’alun par livre de bois,
lorfqu’il eft de bonne qualité ; on obtient alors
une lacque moyenne, ni trop foncée ni trop ro*
fette, &. aflez abondante. On la dave & on 11
finit comme les lacques précdentes.
Autre lacque fauffe tres-èclatante.
Tirez du bois de Fernambouc découpé ou moulu
une teinture forte , comme dans l’opération précédente
, en ia faifant bouillir deux fois de fuite
dans une quantité d’eau un peu ménagée; filtrez
cette, teinture à travers une toile; jete z -y alors
par livre de bois une once d’alun, & laiffez repofer
la teiature jufqu’au lendemain ; tirez - la au
clair, foit par le fiphon, foit en la décantant.
Mêlez cette teinture à froid avec une partie du
corps blanc prefcrit ci-devant, après avoir bien
battu ce blanc pour le liquéfier. Plus vous mettrez
de cette teinture, plus foncée fera votre lacque;
mais ayez foin de les bien incorporer en les rem
u an t avec une fpatule ou cuiller de bois ; puis
paflez le tout fur une toile tendue à travers un
tamis de crin , qui féparera les petits grumeaux du
fcorps blanc, qui pourroient .avoir refté indiflous & fans teinture. g 0 | i t
Lorfque l’eau fera bien egouttée & la pâte de
lacque en due confiftance , vous trochifquerez
comme dans les opérations précédentes ; car cette
! lacque n’aime pas à être lavée ; mais en revanche
le corps blanc doit être dépouillé de toute acrimonie
ou goût defel ; car, fans cette attention, votre lacque
tireroit fur le violet, & poufleroit de fon centre une
blancheur faline qui faliroit l’éclat de cette lacque,
au lieu qu’en opérant comme il vient d’être dit,
on aura une lacque v iv e , foncée, de couleur de
; -feu fort éclatante.
Lacque rofette de Troie.
[ Faîtes bouillir cinq livres de bois de Bréfil, de Fer-
nambouc moulu , dans cinq grands féaux d’eau.
Paflez cette teinture, après une heure de cuite,
à travers une toile , & faites rebouillir le même
| bois encore pendant une heure dans pareille quan-
Itité d’eau ; paflez cette teinture fur la première,
& faites rebouillir ce bois pour la troifième fois,
f encore pendant une heure dans trois bons féaux
d’eau ; paflez cette teinture fur les deux précédentes
: elle fera entièrement extraite du bois.
Mettez toutes ces teintures dans un grand chauderon
, & faites évaporer au feu le tiers de fon
volume; délayez avec cette teinture toute chaude
[ du blanc de Troie ou de Mendon, autrement dit le
J blanc d’Efpagne ; traitez ce blanc en rouge comme
| on traite le ftil de grain jaune de Troie.
Toute votre teinture étant employée, verfez j par deflus une diflolution d’une livre huit onces
1 d’alun , après cependant avoir pafle cette lacque,
dans fon état liquide , à travers un tamis : tout
fermentera & l’opération fera finie. Vous aurez
I une lacque rofette plus ou moins foncée, fuivant
F ia quantité de petits pains de blanc que vous avez
1 employés.
I Lacque plate de Venife, fuivant la méthode angloife.
J Prenez cent livres pefant de bois de Campêche
I moulu ; féparez-les en deux parties ; mettez - en
| cinquante livres dans un tonneau ordinaire à vin 1 de Bourgogne ou autre équivalent, & cinquante
I livres dans un autre tonneau : les tonneaux ne
1; doivent avoir qu’un fond*
| Ilempliffez-les avec de l’eau, 8c laiflez-y trem-
. per le bois pendant vingt-quatre ou trente heures;
I enfuite ayez un feau ordinaire, rempliflez - le de
» chaux - vive.
I Diyifez cette quantité en deux ; mettez-les fé- I parément dans deux autres féaux ; arrofez cette
chaux légèrement, d’eau afin de la fufer; couvrez-
la , elle s’échauffera par degré. Lorfqu’elle fera
toute ardente & fumante 8c avant qu’elle foit
toute éteinte, jetez cette chaux dans un de vos
tonneaux; c’eft-à-dire, que dans chaque tonneau
il y ait là moitié d’un feau de chaux-vive.
Remuez bien le tout, & laiffez repofer vingt-
quatre heures ; enfuite tirez par un trou ou par
un fiphon de cette teinture claire, & portez - la
dans un grand baquet que vous remplirez environ à
la moitié ; verfez alors par deflus cette teinture ,
une certaine quantité de la diflolution de blanc
d’Efpagne, préparé de la manière fuivante.'V
Rempliflez d’un tiers ou environ un baquet d é 1
bois aflez profond, avec de petits pains de blanc
d’Efpagne concaffés très-groflièrement en les frap-‘
pant l’un contre l’autre dans la main; achevez de
le remplir d’eau très-claire.
Remuez deux à trois fois par jour avec un rable
de bois; la diflolution s’en fera promptement, &
le fable fe précipitera au fond.
Avant de vous en fervir, remuez de nouveau
& Iaiflez précipiter un petit quart-d’heure.
Par ce moyen, vous aurez un blanc fin & délayé
en forme de lait.
Verfez donc feau à feau de ce blanc fur votre
teinture , jufqu’à ce qu’en remuant vous voyiez
que la couleur vous convient.
Verfez-y alors peu à peu une diflolution d’alun
en petite quantité , pour l’éclaircir 8c former la
précipitation.
On apperçoit qu’il y en a aflez lorfque la couleur
tourne, s’écaille ou fe maronne , & que l’eau ,
de rouge qu’elle étoit, devient blanchâtre, & fe
trouve chargée de la couleur qu’elle portoit.
Suivant plufieurs expériences, il faut fept livres
d’alun fur toute la première teinture de cent livres
dudit bois ; lix livres pour la fécondé teinture ,
cinq livres pour la troifième , 8c ainfi toujours
par diminution d’une livre jufqu’à la fin.
Laiffez repofer alors pendant vingt-quatre heij-
res ; tirez ou décantez l’eau furnageante.
Verfez cette pâte fur une toile tendue fur un
châflis , pour la faire égoutter.
Quand elle fera en confiftance moyennement
épaiffe, mettez-la fur des pierres de plâtre ou de
craie , qui boiront en peu de temps l’eau fura-
bondante; ôtez cette pâte des pierres , mettez-la
dans un feau dont le fond foit fort & folide, &
battez-la avec un bâton en forme de pilori ; cela
la rendra unie & plus liquide.
Etendez-la alors fur une planche , environnée
d’un rebord qui l’excède d’un bon pouce.
Lorfque cette pâte eft un peu durcie , on la
découpe avec un couteau, le long d’une règle , en
carrés de quatre pouces de long fur trois de large,
8c on achève de les faire fécher.
Pour continuer cette opération & en tirer tout
le fruit poflible, on verfe fur le bois qui a déjà