
Prenez enfuite de la matière d’un cheval pu l-
moniqu e, mettez-lade même dans un v e r re , y è r fe z
de l’eau deffus, toute la matière fe délaiera dans
l ’e a u ; & rien n’ira au fond.
D ’où il eft aifé de voir que la matière glaireufe
eft un figne fpécifique de la morve proprement
d i t e , & que l’écoulement purulent eft ligne de la
pulmonie : on reconnoîtra'les difterens degrés de
la morve proprement dite , par la quantité du pus
qui fe trouvera mêlé avec l’humeur glaireufe ou la
morve. La quantité différente du pus en marque
toutes les nuances,
Pour avoir de la matière d’un cheval, morveux
ou pulmonique, on prend un entonnoir * on en
adapte la bafe à l’ouverture des n azegu x, & on le
$jent par la pointe ; on introduit par la pointe de
fentonnoir une plume , ou quelqu’autre chofe dans
le n e z , pour irriter la membrane p ituita ire, &
faire ébrouer le ch e v a l, ou bien on ferre la trachée
artère a vec la main g au ch e, le cheval touffe
& jette dans l’entonnoir une grande quantité de
matière qu’on met dans un verre pour faire l’e x périence
ci-deffus. Il y a une infinité d’expériences
for cette maladie ; mais les dépenfes en feraient
fort confidérables.
Prognoflic.
Le daHger varie fuivant le degré & la nature
de la maladie.
La morve de morfondure n’a pas ordinairement
de fuite ; elle ne dure ordinairement que dou ze ou
quinze jou r s , pourvu qu’on faffe les remèdes convenables
: lorsqu'elle eft nég lig é e, elle peut dégénérer
en morve proprement dite,.
L a morve de pulmonie invétérée eft incurable.
La mprve proprement dite cômm©nçante peut
fe guérir par les moyens que je propoferai ; lorf- .
qu’elle eft confirmée , elle ne fe guérit que. difficilement
: lorfqu’elle eft inv é té ré e , elle eft incurable
jufqu’à préfent.
L a morve fimple eft moins dangereufe que la
morve compofée ; il n’y a que la morve proprement
dite qui foit contagieufe , les autres ne le
font pas.
Curation.
A v an t que d’entreprendre la gu é rifon , il faut
être bien affuré de l’efpèce de morve que l’on a
à traiter & du degré de la maladie : i° . de peur de
faire inutilement des dépenfes , en entreprenant de
guérir des chevaux incurables; 2°. afin d’empêchér
la contagion, en condamnant avec certitude ceux
qui font morveux; 30. afin d’arracher à la mort une
infinité de chevaux qu’on condamne très -fouven t
mal-à-propos : il ne s’agit ici que de la morve proprement
dite.
La caufe de^a morve commençante étant l’inflammation
de la membrane pituitaire, le but qu’on
doit fe propofer eft de remédier à l’inflammation
pour ce t effe t, on met en ufage tous les remèdes
de l'inflammation ; ainfi dès qu’on s’apperçoit quç
le cheval eft glandé , il, faut commencer par le
Saigner , réitérer la faignée fuivant le befoin *
ç’eft le . remède^re plus efficace .: il faut enfuite tâcher
de relâcher & détendre les vaiffeaux, afin de
leur r,e,ndire la foupleffe nèçeffâire pour la circu. j
lation ; pour cet e f fe t , on injeéte dans, le nez la J
décoétion des plantes adouciffàntes & relâchantes
telles que m au v e , guimauve , bouillon - blanc
brancurfine§ pariétaire, mercuriale ,• & c . ou aveç
les fleurs de camomille, de mél.ilot & de fureau :
on fait auffi refpirer au cheval, la vapeur de cette
décodion , & fur-tout la vapeur d’eau tiède, ou
l’on aura fait bouillir du fon ou de la farine de
feigle ou d’orge ; pour cela on attache à la tête du
ch eval, un fac où l’on met le fon ou» les plantes
tièdes, I l eft bon de donner en même temps quelques.
lavemens rafraîchiffans , pour tempérer le I
mouvement du fan g , & l’empécher de fe porter
avec trop d’impétuofité à la membrane pituitaire. I
O n fetranche le foin au ch e v a l, & on ne lui fait I
manger que du fon t ièd e , mis dans un fac de la I
manière que je viens de dit©- : la vapeur qui s’en I
exhale adoucit, relâche & diminue admirablement I
l’inflammation. Par ces m o y en s , on remédie fou*
vent à la morve commençante,
Dans la morve confirmée, les indications que I
l’on a font de détruire les ulcères de la membrane I
pituitaire. Pour ce la , o n met en ufage les déterfifs I
i un pçu fprts : on inje&e dans le n e z , par exemple, I
la décodion des feuilles d’ariftoloche , de gentiane I
& de centaurée. L orfque, par le moyen de ces I
injeâions-, l’écoulement change de couleur, qu’il I
devient b lan c , épais & d’une louable confiftance, I
c’eft un bon figne ; on injeéte alors de l’eau d’orge, I
dans laquelle on fait diffoudre un peu de miel rofat j
enfuite , pour faire cicatrifer les u lc ères , on injefle
l’eau fécondé de chaux , & on termine ainfi la I
guérifon, lorfque la maladie cède à ces remèdesi
Mais fouvent les finus font remplis de pus, &les I
injeérions ont de la peine à y pénétrer ; elles n’y
entrent pas.en affez grande quantité pour en vider
le pus , & elles font infuffifantes ; on a imaginé
un moyen de la porter dans ces ca vité s , & de les
faire pénétrer dans tout l’intérieur du nez ; c’eft le
trépan , c’eft le. moyen le plus sûr de guérir la |
morve confirmée.
Les fumigations font auffi un très-bon remede;
on en a vu de très-bons. effets. Pour faire recevoir
ces fumigations , on a imaginé une boîte dans la*
quelle on fait brûler du fuere ou autre ^matière
déterfive ; la fumée de ces matières brûlées elt
portée dans le nez par le moyen d’un tuyau long»
adapté d ’un coté à lja. b o îte , & de l’autre aux n1*
i zeaùx. ‘ J u ,,
Mais fouvent ces ulcères font calleux & rebelles»
. ils réfiftent à tous les remèdes qu’on vient dindiquer
; ilfaudroit fondre ou détruire ces; calloiites,
I cette indication demanderoit les cauftiques- : e
injeftions fortes & corrofives rempliroient cette
intention , fi on pouvôit les faire fur les parties
afïeftées feulement ; mats comme elles arrofent les
parties faines, dè même què les parties malades,
elles irriteroient & enflammeroient les parties qui
ne font pas ulcérées , & augmenteroient le mal ;
delà la difficulté de guérir la morve par les cauf-
tiques., : -v
Dans la morve invétérée , où lès ulcères font err
grand nombre, profonds & fameu x, où les vaif-
feaux font rongés , le s fos & les cartilages carrés ,
& la membrane pituitaire épâifiie & endurcie il
j ne paraît pas qu’il y ait de remède ; le meilleur
parti eft de tuer les ch e v au x, de peur de faire des
dépenfes-inutiles * en tentant la guérifon.
i Tel. eft le réfultat des découvertes de MM. de
| la Foffe père & f i ls , telles que eelui-ci les a pu-
I bliées dans une differration préfentée à l’académie
I des fciences , & approuvée pat fes commiffaires.
Auparavant il y a voit ou une profonde ignorante ,
I ou une grande variété de préjugés fur le fiége de
I cette maladie ; mais pouf le reconnoître, dit M: dé
I la Foffe j il rie faut qu’ouvrir les yeux. En effet j
K que voit-on lorfqu’on ouvre un cheval mdryeux
proprement d it , & uniquement morveux.3 O n voit I la membrane pituitaire plus ou moins affectée ;
I les cornets du nez & les finus plus ou moin rem-
I plis de pus & de m o rv e , fuivant le degré de la
1 maladie , & rien de plus ; on tfojive les vifcêres
I & toutes les autres parties du corps dans une par-
I faite fanté. Il s’agit d’un cheval morveux propfè-
I ment dit, parce qu’il ÿ a une autre maladie à qüi
I on donne m a l-à -propo s le nom de mofre ; d’un
I cheval uniquement m o rv eu x, parce que la morve
I peut être accompagnée de quelqu’autre maladie qui
I pourroit affe&er les autres parties.
K Mais le témoignage des y e u x s’appuie de preuves
K tirées du raifonnement.
I m ^ y a dans lé chenal & dans l’hohime dès
I plaies & des abcès qui riorrt leur fiégè què dans
I jlne partie ; pourquoi rien feroit il pas de même de
I la mérvé ?
I .^0‘ , y a dans i’hômme des chancres rongëanS
I aux lèvres & dans le nez ; ces chancres n’ont leur I ^ue ^ans *es liv re s ou dans le nez ; ils ne
I donnent aucun ligne de leur exiftence après lëtir
I guérifon locale. Pourquoi rien fe'roit-il pas de même
I de la morve dans le cheval è
I Pu^mon^e ou la foppuratién du poutnOh,
f . <lue k poumon; pourquoi la morve n’àf- I taùe^1"6^6 Pas uniquement la membrane pitui-
I i ^ I ^ morve riétoit pas lo ca le , o u , ce qui eft
I a,menie chofe , fi elle venoit de la corruption gé-
I uerale des humeurs r pourquoi chaque partie du
I o°r^iS ’ mo^ns celles qui font d’un même tiffu IUC a membrane pituitaire, c’eft-à-dire, â’iiri tiffu
I le0U ’ Va^cu^eilx & glanduleux , tels quel e ce rv e au ,
I fero’>Um0n ’ paucréks* la raté J* & c . ne
I lent-.elles pas affectées de même que la membrane
pituitaire ? pourquoi ces parties ne feroient-
elles pas affe&éès ; plufieur’s & même toutes à-la-
fo'is , puifque toutes les parties font également
abreuvées & nourries de la maiffe des humeurs ,
& que la circulation du fan g , qui eft la fourcè de
toutes les humeurs, fe fait également dans toutes
les parties ? O r , il eft certain que dans la morve
proprement dite-, toutes les parties du corps font
pàrfaitëmeht faines , excepté la membrane pituitaire.
Gela a été démontré par un grand nombre
de diffeéfions.
ç°. Si dans la morve la maffe totale des humeurs
étoit v ic ié e , chaque humeur particulière qui en
émane, le feroit âü ff i, & produirôit des açcidens
dans chaque partie ; là morve feroit dans le ch ev a l,
ainfi que la v érole dans l’homme, un eômpofé de
toutes fortes de maladies ; le cheval màigriroit,
foüffriroit, languiroit, & périroit bientôt ; des humeurs
vfciéès rie peuvent pas ëntrëtenir le corps
eh fanté. O r , on fait què dans la morve le cheval
ne fouffre point ; qu’il n’a ni f iè v re , ni aucun mal;
excepté dans la membrane pituitaire ; qu’il boit Sc
mange comme à l’ordinaire ; qu’il fait toutes fés
fondrions avec aifance ; qu’il fait le même fervîcé
que s’il n’aVoit point de mal ; qu’il eft gai & gras ;
qu’il â le poil li f f è , & tous les fignes de la plus
parfaite fanté.
Mais voici des faits qui ne laiffent guère de Heu
au doute & à la difputé.
Premier Fait.
Sotivem la riforve riaffedle la membrane pituitaire
que d’un côté du nez * donc elle eft locale ;
fi elle étôit dans là maffe des humeurs, elle devroit
au moins attaquer là membrane pituitaire des deux
côtés.
ÎP Fait,
Les coups viole ns for le nez produifent lâ morve;
Dira-t-Oii qü’üii coup porté fur le riez a v ic ié là
maffe des humeurs $ .
IIP Fait.
La léfrdn de la membrane pituitaire produit la
morye. En 1759» au mois de novembre , après
avoir trépané & guéri du trépan un c h e v a l, U
devint mo rv eu x, parce que l'inflammation fe continua
ju fqu ’à la membrane pituitaire. L ’inflammâ-
tidri d’une partie ne met pas la corruption dans
toutes les humeurs.
IV* Fait.
Uri cheval fain devient morveux prefque fur le
champ i fi on lui fait dans le nez des injections
âcres & corrofiveS. Cès injeftions ne v icient pas la
maffe dès humeurs.
V* Fait,
On guérit la morve par des remèdes topiques.
M. D e sb o is , médecin de la faculté de P a r is , a>