
Après ces avantages, dont la réalité eft généralement
avouée , la chirurgie pourroit-elle méconnoî-
tre la fource des biens dont elle jouit, & nous en
refufer le partage ? Il doit nous être fans doute
d’autant plus permis d’y prétendre, que nous pouvons
profiter du jour qui l’éclaire, fans lui en
dérober la lumière, & fans nous rendre coupables
de la moindre ufurpation.
Tous les cas qui peuvent engager le chirurgien
à pratiquer l’empyème, peuvent fe préfenter au
maréchal. L’animal n’eft pas moins expofé que
l’homme à des pleuréfies, & à la péripneumonie ,
à des épanchemens de pus, à des èpanchemens
d’eau , conféquemment à une hydropifie, enfin à
des épanchemens de fang caufés par quelques
plaies pénétrantes dans la poitrine , ou par l’ou-
.verture d’une artère intercoftale : mais de toutes
ces circonftances , celles où l’opération dont il
s’agit me paroît d’une plus grande efficacité, font
apurement les bleflùres fuivies d’une effufion dans
la capacité.
Suppofons donc un épanchement de fang produit
par. les dernières caufes que je lui ai affignées.
Je reconnoîtrai d’abord la plaie pénétrante par f\
circonférence empyhfémateule, par le moyen de la
fonde & du doigt, par l’air qui frappera ma main au
moment que je l’en approcherai, par le fifflement
qui accompagnera la fortie de ce même air, par la
vacillation de la flamme d’une bougie que je lui
préfenterai , par le fang écumeux qui, pouffé au
dehors avec plus ou moins d’impétuoûté, me prouvera
encore d’une manière fenfible que le poumon
efl intéreffé, & dont la quantité m’apprendra de
plus s’il y a réellement ouverture de quelques yaif-
feaux confidèrables.
Je ferai enfin convaincu de Tépanchement, dès
qu’outre ces fymptômes j’obferverai un violent
battement de flanc & une grande difficulté de ref-
pirer. Il eft v rai, que vu l’obfervation horifontale
de l’animal, le diaphragme ne fe trouve pas ainfi
que dans l’homme furchargé par le poids de la
matière épanchée; mais elle gêne conftamment
l’aétion des poumons., qui, dans une cavité proportionnée
à leur jeu, ne peuvent que fouffrir d’une
humeur contre nature, toujours, capable, de. s’op-
pofer à leur libre dilatation.
Du reile, tous les autres lignes qui attellent
l’effufion dans le thorax humain , ne peuvent nous
être d’aucune indication relativement à un animal
qui ne fauroit nous rendre compte du fiége des
douleurs qu’il relient, & que par cette raifon nous
placerions vainement dans des attitudes différentes,
quand même nous en aurions la facilité & le pouvoir.
Quoi qu’il en foit,. l’épanchement étant certain,
& la ligature dans le cas où l’efEufion a été, provoquée
par l’ouverture d’une artère intercoftale, étant
faire, il faut néceffairement vuider le thorax.
La plaie fuffiroit à cet effet, fi la fituation étoit
telle qu’elle, fût à la partie inférieure de la poitrine ;
on pourroit alors, à l’imitation du chirurgien ; en
augmenter l’étendue, en la dilatant à l’aide de la
fonde crénelée & du biftouri, félon le befoin, &
pour faciliter l’écoulement hors de la capacité ; après
quoi on le hâteroit en comprimant les nafeaux de
l’animai , fur-tout fi les vaiffeaux du poumon
avoient été attaqués , parce que ce vifcère contenant
enfuite de cette compreffion une plus grande
abondance d’air , chafferoit avec plus de force le
fluide dévoyée ; on pafferoit de là aux injeftions
chaudes & douces, &c. mais dès que la plaie a
été faite à la partie fupérieure, il n’eft pofïible de
dégager la cavité du fang qui y nage , qu’en pratiquant
une contr’ouvrerture, & c’eft ce qu’on appelle
proprement Yempyéme.
La différence de la pofition de l’homme & du
cheval en établit une relativement au lieu où nous
devons/ contr’ouvrir. Dans le premier attendu fa
fituation & eu égard à l’inclinaifon du diaphragme,
l’humeur ftagnante fe porte en bas & en arrière,
& dénote l’endroit où l’on doit lui ffrayer une
iflùe. Dans le cheval, l’obliquité de cette cloifon
mufculeufe n’eft pas moindre ; mais elle ne fauroit
guider ainfi le maréchal; parce que l’animal étant
litué horifontalement, fa direâion eft verticale, &
que la partie la plus baffe du thorax eft fixée pré-
.cifément aux derniers cartilages des côtes & à leur
jonâion au fternum. /
C ’eft auffi cette même partie que nous arrêterons
pour opérer, en choififlant du côté affeflé
l’intervalle des cartilages de la huitième & de la
neuvième côte de devant en arrière & à cinq ou
fix pouces du lier nu m ;x car nous ne faurions nous
adreffer avec fuccès plus près de cet os , parce que
les cartilages y font trop voifins les • uns des
autres.
Remarquons ici que tout concourt à favorifer
notre entreprife. i° . Il eft certain que fans forcer
l’animal d’abandonner fa fituation naturelle, les
humeurs ne trouveront aucun obftacle à leur évacuation
, puifque leur pente répondra à l’ouverture
pratiquée. a°. Nous ne craindrons pas fans
celle d intéreffer l ’artère intercoftale en incifant,
parce que là elle eft divifée en des rameaux d’un
diamètre peu confidérable.
Commençons donc à nous faifir de la peau a
l’endroit défigné, & faifons y , avec le fecours
d’un aide, un pli qui foit tranfverfal par rapport
au corps. Coupons ce pli,; il en réfultera une plaie
longitudinale qui comprendra, les deux cartilages»
au milieu defquels nous nous propoferons d ouvrir,
car, telle doit être l’étendue de la première
incifion.
Faifons-en une fécondé dans la même direélion
à la partie du mufcle grand oblique de l’abdomen
qui eft au deffous, nous découvrirons les cartilages
des côtes & des intervalles. Incifons enfin tram*
verfalement les mufcles intercoftaux & la plevre
jufqu’à ce que noüs ayons pénétré dans la cavité»
ce dont nous.ferons affurés par l’infpe&ion de l ‘llL*
-À.Ù flUi s’écoulera, ou fi nous avions eu le mal-
heur de nous tromper, par le vuide que nous
percevrons ; car dès que la plèvre eft ouverte ,
Pair extérieur oblige le poumon à s’affaiffer fur le
champ, ce qui préferve ce vifcère des offenfes de
pinftrument dont nous nous fer vons. Cette dernière
ouverture aura au moins un pouce de largeur, à
l’effet de fournir un paffage & au fang vraiment
liquide & à celui qui fe préfenteroit en grumeau.
Du refte je ne m’étendrai point ni fur les panfe-
mens, ni fur toute la conduite que l’on doit tenir
dans la fuite du traitement.
Je me contenterai de faire obferver que le bandage
propre à maintenir l’appareil dans cette cir-
conftance, ne doit être autre chofe qu’un furfaix
armé de couffinets à l’endroit de l’opération pratiquée
, opération dont je n’ai prétendu d’ailleurs
que démontrer la poffibilité, les différences, & les
effets. \ J:/.
Opération pour lafaujfe gourme*
A la fuite de la faujfe gourme, ou de la gourme
maligne, ou autre maladie, il furvient quelquefois
une inflammation confidérable au larynx & à toute
l’arrière-bouche ; l’air alors ne fauroit fortir , ni par
les narines', ni parla bouche; ce qui fait périr le
cheval. Pour ; empêcher cette fuffocation , il faut
pratiquer une ouverture à la trachée-artère , & y
introduire enfuite une petite canule d’argent ou.de
plomb ; cette opération s’appelle bronchotomie.
Le cheval lié & attaché convenablement, l’opé-
| teur fait l’ouverture entre le troifième & le quatrième
anneau de la trachée-artère , ou bien entre
le cinquième & le fixième ; alors il introduit fa
[canule qui doit être courbée d’une huitième de
cercle & applatie, à peu près auffi large à fa fortie
i qu’à fon entrée , car en fé fervant de canulles en
forme d’entonnoir, l’air entre avec trop d’impétuo-
ffité, & va heurter les parois de la trachée-artère,
I& y occafionne une inflammation : cette canule
[‘porte deux petites anfes, auxquelles on attache
[des rubans , que l’on paffe par deffus le col : on
|doit obferver qu’il faut que le cheval refte attaché
dans l’écurie , à deux longes, entre deux piliers.
Opération du crapaud.
I On nomms fie ou crapaud une tumeur qui furvient
[à la partie inférieure du pied, elle eft à peu près de
lia nature du poireau ; c’eft une excroiffance, qui ,
! quoique mollaffe, aune -certaine confiflance ; elle
| eft infenfible & fans chai eur.
I Le fie fe divife par le bout en plufieurs filets qu’il
K facile de féparer avec le doigt.
I h y a deux efpèces de fie, l’un bénin & l’autre-
I gfave : le bénin eft celui qui n’attaque que la four- .
f ehette; le grave attaque la fourchette & la foie
I charnue.
I Les caufes du fie font l’âcreté de la lymphe, la
I faleté & les ordures dans lefquelles trempe le pied »
un féjour trop long du pied dans le fumier, la fui
des eaux des paturons, le féjour trop long du cheva
à l’écurie : les chevaux qui y font le plus fujets font
ceux qui ont les talons hauts & la fourchette petite ;
la fourchette fe trouvant alors éloignée de terre
n’efl point comprimée, l’humeur y féjourne & y
produit les fies ; au lieu que les talons bas laiflent
porter la fourchette à terre ; & par là elle éprouve
une compreffion continuelle.
Lorfqu’il n’y a que la fourchette & la foie charnue
qui foient aft’eélées , le cheval ne boite pas ; ma is
il boite lorfq.ue les quartiers commencent à fe
defloler , ce qui a lieu quand le fer gagne la chair
cannelée des talons. Lorfqu’on s’apperçoit que les
racines du fie bénin font profondes, il faut commencer
par deffoler ; il eft inutile de détruire l’extrémité
du fie , il reviendra toujours fi on n’emporte
pas les racines.
Comme le fie grave eft une maladie très-férieufe^'
qui paroît en partie caufée par la corruption des
humeurs dont le pied eft abreuvé , il eft à propos
de mettre le cheval au fon & à la paille, de lui faire
deux féton$ aux feftes & un troifième au poitrail,
pour détourner de ce côté une partie de l’humeur
qui fe porte au pied : il faut deffoler deux ou trois
jours après ; & couper le fie jufqu’à la racine.
Si l’os du pied étoit carié, il faudroit ratifier l’os ;
quand on s’apperçoit que les chairs font baveufes ,
molaffes & filamenteufes, & qu’elles fournifîent
de la férofité ( ce qui prouve que la racine du fie
n’eft pas entièrement détruite ) , 'il faut les couper
de nouveau.
Il fe trouve quelquefois des chevaux qui ont
des fies aux quatre pieds en même temps ; avant
que d’en venir à l’opération, il eft néceffaire de
les y préparer durant quelques jours ; enfuite on
opère fur deux pieds à la fois; fa voir, fur un de
devant & fur un de derrière du côté oppofé ; on
ne fera l’opération fur les deux autres que quand
les douleurs de la première feront appaifées.
Si le cheval avoit des eaux ou quelque poireau
dans le paturon , il faudroit commencer par les
guérir, parce que la férofiré du paturon s’écoulant
dans le pied empêcheroit la guérifon du fie.
Souvent on peut prévenir les fies en abattant
les talons lorfqu’ils font trop hauts,.ce qui fait porter
la fourchette à terre.
Seéiion de la queue du Cheval.
Pour couper la queue à Vahgloife, il faut jetter le
cheval par terre du côté du montoir, préférablement
à l’autre pour avoir l’aifance-d’opérer ; prendre
enfuite les dimenfions de la queue pour ne
pas faire les incifions trop près les unes des autres,
car il en réfulteroit une leule plaie & les bandesde
la peau fe déchireroient.
On fait jufqu’à cinq incifions tranfverfales-, ce
qui vaut mieux, parce que plus la queue a
I d’étendue, plus elle fe. «ecourbè &. fcmble former.