
Les produ&ions puftuleufes qui annoncent la
p rem ière, font en quelque façon imperceptibles ;
leur petiteffe eft extrême ; elles fuppurent peu &
très-rarement; elles p rovoquent néanmoins la chute
des poils dans les lieux qu’elles occupent & qui
les environnent ; & le prurit qu’elles excitent eft
infupportable.
Les exanthèmes qui décèlent la fécondé font
toujours fenfibles ; ils font plus ou moins é le v e s ,
& paroiflént comme autant de petits abcès contigus
, d’où fuinte une matière purulente , dont le
defféchement forme la forte de croûte qui les recouvre
: dans celle - c i , le fentiment incommode
qui réfulte de l’irritation des fibres nerveufes ré pandues
dans le tiflù de la peau, n’affe&e pas aufil
vivement l’animal que dans la gale fèche , & la
demangeaifon eft beaucoup moindre.
Nous ne vo yon s point en général que cette
maladie s’étende fur toute l’habitude du corps du
cheval ; elle fe borne communément à de certaines
parties ; la gale fèche n’en épargne cependant
quelquefois aucune : mais cet évènement n’eft pas
ordinaire ; & le plus fouvent fes progrès font limités
, tantôt dans un efpàce & tantôt dans un
autre.
La gale humide attaque l’encolure, la t ê t e , les
épaules, les cuiffes; elle fe fixe auffi dans la crinière
& dans le tronçon de la queue.
D è s que la gale n’eft point univerfelle dans les
ch evau x, comme dans l’nomme, il eft affez inutile
de multiplier les divifions, & d’affigner, à l’exemple
des auteurs en chirurgie , le nom particulier
d e dartre à telle ou telle gale , fous le prétexte
d ’un mal lo ca l, qui d’ailleurs doit nous être d ’autant
plus indifférent, que toutes ces productions pfo-
riques ne fon t, à proprement parler, qu’une feule
& même maladie , que les mêmes caufes occa-
fion n en t, & dont le même traitement triomphe.
Bononius féduit par le raifonnement de quelques
é c rivains, a cru devoir s’efforcer d’accréditer
leur opinion fur le principe effentiel de cette af-
feétion cutanée. JJous trouvons dans les Tranfa fiions
philofophiqu.es, n°. 283, une defcription fingulière-
ment exa&fe des petits animaux qu’on a fuppofés
y donner lieu ; ils font repréfentés fous la forme
& fous la reffemblance d’une tortue ; ce m icrographe
fe flatte même d’en avoir découvert & d is tingué
les oe ufs; mais tous les details auxquels ils
s’abandonne, bien loin de mettre le fait hors de_
d o u te , n’offre qu’une preuve très - évidente de la
foibleffe de fes fe n s , de la force de fes préjugés.,
& de fon énorme penchant à l’erreur.
L a fource réelle & immédiate de la gale réfide
véritablement dans l’âcreté & dans l’épaiffiffement
de la lymphe : l’un & l’autre de ces vices fuffifent
à l’explication de tous les phénomènes qui affu-
rent l’exiftence de cette maladie, & qui en diffé-
rgntient les efpèces.
Si l’on fuppofe d’abord que cette humeur foit
imprégnée d’ une quantité de particules falines qui
ne peuvent que la rendre âcre & corrofive, mais
q u i, noyées dans le torrent de la circulation, font,
pour ainfi dire , dans l’inertie & fans effet ; on doit
préfumer que lorfqu’elle fera parvenue dans les
tuyaux deftinés à l’iflue de l’infenfible tranfpiration
& de la ‘Tu eu r, ces mêmes particules qu’elle y
charrie s’y réuniront en maffe ; delà l’engorgement
des tuyaux à leurs extrémités ; delà les exanthèmes
ou les .puftules.
Plus la lymphe fera ten u e , moins les exanthèmes
feront volumineux & les exulcérations poffi-
blés ; l’évaporation en fera plus prompte ; elle ne
laiffera après elle nul fédiment, nulle partie grof-
fière ; les fels plus libres & plus dégages s’exerceront
fans contrainte fur les fibrilles nerveufes;
& tous les fymptômes d’une gale fèche fe mani-
fefteront d’une manière non équivoque.
L a vifcofité eft-elle au contraire le défaut pré- ;
dominant ? les engorgemens feront plus confidé- ,
râbles, les puftules plus faillantes & plus étendues,
& conféquemment le nombre des tuyaux fanguins I
qui éprouveront une compreffion, & des canaux
blancs qui feront dilatés & forc és , fera plus grand.
La lymphe arrêtée dans ceux - c i , oc fubiffant
d’ailleurs un froiffement réfultant du jeu & de l’of-
cillation de ceux-là, acquerra inévitablement plus
ou moins d’acrimonie ; elle corrodera les vaiffeaux
qui la contiennent : cette corrofion fera fuivie du
luintement d’une matière purulente, q u i , jointe à
beaucoup de parties fulphureufes, fera bientôt det-
féchée par l’a ir , & ces mêmes parties embarraffant
les fels & s’oppofant à leur a â iv it é , leur impreflion
fera plus légère^ C ’eft ainfi que la gale humide fe
forme & fe montre avec tous les lignes qui la
caraâérifent.
Le virus pforique eft contagieux ; il fe communique
par l’attouchement immédiat, par les couvertures
, les harnois , les étrilles , les broffes, les
épouffes, & c. D e quelque manière qu’il foit porte
à la furface du cuir d’un cheval fa in , il s’y unit,
il s’y attache, foit par l’analogie qu’il a avec 1 humeur
perfpirante , foit par fa ténuité & fa. difpo*
fition à s’introduire dans les pores. A peine sy
eft-il infinuê , qu’il fomente l’épaifliffement de la
matière qu’il y rencontre ; il y féjourne néanmoins
quelque temps, fans s’y développer fenfiblement,
mais la chaleur naturelle & le mouvement des
vaiffeaux artériels excitant enfuite fon aétion, nous
appercevons bientôt des puftules qui fe renouvellent
& fe rëproduifent, félon qu’il a pénétre dans
la maffe. Nous devons donc regarder les parties
falines exhalées du corps du cheval galeux par »
tranfpiration & par la fueur , ou contenues dans
l’humeur fuppurée qui flue des exanthèmes, comme
la caufe prochaine externe de la maladie dont
s’agit. I .
T o u t ce qui peut troubler la dépuration des lu
v ita u x , donner lieu à la corruption des humeurs,
& leur imprimer des qualités plus ou moins per
nicieufes , doit être mis au rang de fes eau t
~ éloignéeséloignées
: ainfi de mauvais fourrages, qui ne four- 1
niffent qu’un chyle cru & mal digéré ; des travaux
qui occafionnènt une diffipation trop forte ; le
défaut des alimens néceffaires à la réparation des
fluides & à l’entretien de la machine ; un air humide
& froid qui ralentit la marche circulaire ;
l’omilîion du panfement, & en conféquence le fé-
jour d’une craffe épaiffe qui o b ftrue '& bouche les
pores cutanés , font autant de circonftances auxquelles
on peut rapporter ces différentes éruptions.
Quoiqu’elles nous indiquent toujours un vice
dans la maffe, elles ne.„préfagent néanmoins rien
de dangereux ; & les fuites n’en font point fu-
neftes, pourvu que le traitement foit méthodique,
& que l’on attaque le mai dans fa fource & dans
fon principe.
Il eft quelquefois critique & falutaire ; car il dé-
barraffe le fan g de quantité de parties falines &
hétérogènes qui auroient pu donner lieu à des
maux plus formidables : nous remarquons même
rrès-fouvent dans les chevaux qui n’ont jeté qu’im-
’■ parfaitement, que la nature cherche à fuppléer &
■ iiipplée en effet par cette vo ie à l’infpuiffance dans
s laquelle elle a été d’opérer une dépuration entière
& néceffaire, par les émonâoires qui dans l’animal
fernble particuliérement deftinés à l’écoule-
[ ment de l’humeur & de la matière dont le flux
pdécèle communément la gourme.
[ La gale fèche éft plus rebelle & plus difficile à
dompter que la gale humide ; des fucs âcres &
■ lixiviels ne font point aifément d é la y é s , corrigés ,
emportés : elle attaque plus ordinairement les chevaux
d’un certain âge & les chevaux entiers, que
îles chevaux jeunes & que les chevaux hongres ;
[ les premiers à raifon de la prédominance des Tels,
[ de la-plus grande force & de la plus grande r.i-
■ gidïté de leurs fibres ; les féconds conféquemment
pians doute au repompement de l’humeur fémina le,
I qui, paffant en trop grande abondance dans le fan g ,
| peut l’échauffer & exciter l’acrimonie , lorfqu’ils ne
[ fervent aucune jument ; ou à raifon de l’âcreté qui
[ eft une fuite de l’appauvriffement de la maffe ,
l lorfqu’ils en fervent un trop grand nombre. Nous
[ dirons auffi que dans la jeuneffe elle cède plus ra-
icilement aux remèdes , parce qu’il eft certain qu’a-
Ilors la tranfpiration eft plus lib re, les pores de la
[peau plus ouverts, & les fibres plus fouples.
La gale humide réfifte moins à nos efforts : fa
I Principale caufe confiftant dans l’épaiflîffement, &
| non dans un v ice capable d’entretenir un le v a in ,
I nne fahire qui pervertit les_nouveaux fucs à me-
Hure qu’il en aborde & qu’il s’en forme : fi les
| jeunes chevaux y font réellement plus fuje ts, c ’eft
[quen eux le tiffu dés folides eft moins fort &
moins propre à atténuer les fluides.
Nous obferverons encore que . toute maladie
‘ exanthèmateufe prife par contagion , qui n’adhère
. . furface du corps , & qui n’ a pas pou ffé, s’il
' me/t permis de m’exprimer ainfi , de profondes
acines 9 n’eft point auffi opiniâtre que celle qui
■ dns 6* Métiers. Tome IV. Partie II.
doit fon exiftence à la dépravation du fang & des
humeurs ; & l'expérience prouve qu’une gale récente
eft plus fufceptible de guérifon qu’une gale
ancienne & invétérée.
Pour ne point errer dans la manière de traiter
l’affeâion cutanée dont il eft q ue ftion , il eft important
d’ en confidérer i’efpèce , & de n’en pas
perdre de vue la caufe & le principe.
| Dans la gale fèche notre objet doit être d’adoucir
, de b r iie r , d’évacuer les f e ls , de relâcher le
tiffu de la peau. Dans la gale humide nous devons
chercher à atténuer les particules falines & fulphureufes
dont elle fe ch arg e, à favorifer enfin la
tranfpiration. Si la maladie participe en même
temps & de l’épaiffiffement 8c de l’acrimonie , le
maréchal y aura égard & tiendra un jufte milieu
dans le choix & dans l’adminiftration des médi-
camens.
Son premier foin fera de féparer le cheval malade
des autres ch e v au x, & de le placer dans une
écurie particulière : non que j ’imagine que le virus
pforique foit affez fubtil pour s’étendre de lui-même
d’un lieu à un au tre, .& pour fe communiquer ainfi;
mais cette précaution devient effentielle, lorfque
l’on réfléchit fur la facilité de la contagion par les
harnOis & par les couvertures , & fur la pareffe
ainfi que fur l’imprudence des palefreniers.
La faignée eft néceffaire dans tous les cas ; elle
fera même répétée dans le befoin : dans tous les
cas auffi on doit tenir l’animal au fon & à l’eau
blanche, & jeter dans cette même eau une décoction
émolliente faite avec les feuilles de mauve „
de gu imau ve , pariétaire, & c .
C e régime fera obfervé plus long-temps par le
cheval atteint d’une gale fè ch e , que par celui qui
fera atteint d’une gale humide : on purgera enfuite
l’animal une ou plufieurs fois avec le féné , l’alo è s,
Yaquila alba ou le mercure doux , après l’avoir
néanmoins préparé à cette purgation par des la-
vemens émolliens : on en reviendra à l’ufage de
la déco&ion émolliente ; & s’il s’agit de la première
efpèce de g a le , on humeâera foir & matin
le fon que l’on donnera au cheval , avec une ti-
fane comp ofée , dans laquelle entreront les racines
de patience , de chicorée fauvage , d’althæa, &
les feuilles de feabieufe , de fumeterre, & c . S’i 1
refufe de manger le fon ainfi humeété, on pourra
lui donner cette boiffon avec la corne : j’y ai plufieurs
fois heureufement fubftitué des feuilles de
groffe laitue que je trempois dans du la i t , & que
l’animal mangeoit avec avidité.
Dans la circon fiance d’une^gale humide , on
mouillera le fon avec une décoction de gayac &
de falfepareille , en mêlant à cet aliment des fleurs
de g en e t , & une demi-once de crocus metallorurn.
Le loufre , le cinnabre naturel, l’æthiops minéral,
les poudres de vipères , de c loportes, de chamædris
& de fumeterre, donnés à temps & adminiftrès
avec circonfpeélion , font d’une très - grande ref-
fource contre toutes fortes de gales : celles qui
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