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iert pour planter des pilotis. Cet affemblage eft com-
pofé de plufieurs pièces , dont la première eft un
gros billot de bois, appelé mouton, fretté par les
deux bouts , attaché au bout de deux cordages ,
tirées & lâchées alternativement par des hommes ;
ces cordages roulent fur des poulies, 8c c’eft ce
qu’on appelle fonnettes.
Echafaud dont fe fervent les maçons dans les
bâtimens ; il eft compofé de perches, de boulins ,
attachés deffus avec des cordages , 8c de planches
ou madriers pofés deffus, & fur lefquels les maçons
travaillent à la furface des murs.
Sonde , compofée de plufieurs tringles de fer ,
félon la profondeur du terrain que l’on veut fonder
, chacune de ftx à fept pieds de long, fur
quinze à dix-huit lignes de groffeur en carré, portant
par le bout d’en haut une v is , ôc par l’autre
une douille creufée 8c à écrou, qui fe viffe avec
une efpèce de cuiller en forme de vrille pour percer
le terrain.
Une chèvre faite pour lever les fardeaux d’une
moyenne pefanteur, compofée d’un treuil, d’un
cordage, de deux leviers, d’une poulie, de deux
bras, 8c de deux traverfes. j
Cabeftan, appelé dans les bâtimens vindas, qui
fert à tranfporter des fardeaux, en faifant tourner
par dès hommes les leviers , qui entrent dans les
trous du treuil, 8c qui, en tournant, enfle d’un
côté le cordage, 8c de l’autre le défile.
Leviers ou boulins de différente longueur, à l’u-
fage des bâtimens.
Gruau d’environ trente à quarante pieds de hauteur
, fait pour enlever les pierres , les groffes
pièces de charpente, 8c toute efpèce de fardeau
fort lourd, pour les pofer enfuite fur le bâtiment ;
il eft compofé de leviers, d’un treuil, d’un cordage
8c de deux ou trois poulies.
Une grue d’environ cinquante à foixante pieds
de hauteur, fervant aufli à enlever de grands fardeaux
, 8c compofée d’une roue fermée dans fa
circonférence, 8ç dans laquelle les hommes marchent,
8c en marchant font tourner le treuil, qui
enveloppe la corde ou cable attaché de l’autre côté
à un grand poids.
Infiniment appelé louve, qui s’engage dans la
pierre que l’on doit enlever 8c pofer fur le bâtiment
, afin d’éviter par - là d’écorner fes arêtes ,
en y attachant des cordages, 8c en même temps
afin que les pierres foient mieux pofées , plus tôt,
8c plus facilement ; ce qui produit de l’accélération
néceffaire dans la bâtiffe.
Cifeau à louver, d’environ dix - huit pouces de
long.
Nous avons confultê 8c extrait, pour plufieurs des
articles précédens concernant la maçonnerie , les
excellens Mémoires que M. Lucotte a donnés fur
cet art dans l’ancienne Encyclopédie , 8c ceux qu’il
a raffemblés dans fon nouveau Traité.
M A Ç
A R T D U M A Ç O N P I S E U R .
On conçoit aifément pourquoi une coutume;
qui n’a pas pour principe une utilité réelle, peut
être circonfcrite dans une province ; mais on ne
rend pas fi facilement raifon de cette iocatilité,
fi on peut s’exprimer ainfi , quand elle tend au
bien général, foit relativement à l’économie fur
les matières premières, foit à la diminution & à
la promptitude du travail. L’art du Maçon Pifeur
dont il va être queftion, renferme ces avantages.
Cet art de conftruire en pifé fe tranfmet de génération
en génération dans le Lyonnois 8c dans
les provinces voifines , par une fucceflion non interrompue
, à remonter jufqu'aux anciens Romains
qui les habitèrent, 8c vraifemblablement l’y apportèrent
, ainfi que la culture de la vigne, &
nombre d’autres arts dans la pratique defquels on
retrouve encore 8c leurs termes 8c leur génie.
Un voyageur eft agréablement furpris quand il
approche de la ville de Lyon, de voir les collines
8c les campagnes qui l’environnent chargées de
marfons richement décorées 8c élevées à la hauteur
de deux ou trois étages, fur une étendue vafte &
proportionnée.
La chaux réduite en mortier en recouvre les
murs, 8c lui laiffe ignorer que ces bâtimens ne
font qu’une terre pifée. La maifon du cultivateur
moins élégante 8c tout aufli folide que celle du
maître, n’en diffère que par les parois des murs
qui ne font pas crépis.
La province du Dauphiné , du côté du Pont-
de - Bonvoifin 8c des Avenières, fournit une terre
dont le grain eft fi liant, que les murs font unis
comme fi l’on avoit paffé le poliffoir par deffus.
Il eft rare, dans cette province, de trouver des
maifons enduites de mortier.
Il n’eft prefque aucun pays ou lroii ne rencontre
de la terre propre à bâtir. On jugera par ce que
nous allons .dire, combien cette méthode eft préférable
, plus économique, plus prompte, 8c plus
folide que celle qu’on emploie communément dans
les environs de Paris 8c ailleurs.
Une muraille en pifé, confidèrée dans ce qui la
caraftérife, eft un affemblage de maffes de terre
naturelle , mais de qualité particulière, rendues
compares 8c dures par l’art feul du pifeur, placées
tant bout à bout que les unes fur les autres,
conféquemment à la longueur 8c à la hauteur quon
a voulu lui donner ; portant toutes comme autant
de pierres de parpain pofées de champ, l’une «
l’autre purement, 8c formées dans la place qu’elles
occupent pelletée à pelletée, pour ainfi dire, dans
une forte de moule dont on dépouille la première
fitôt qu’elle y a pris la «forme qu’elle doit garder,
pour le difpofer en faveur de la fécondé qu011
en dépouillera à fon tour pour commencer la tr0lr
fièrae, ainfi de fuite jufqu’à fin d’cçuvre. _
* . 11 Parmi
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Parmi tous les accidens' nuifibles aux édifices J
il n’y a que ceux qui proviennent de l’eau qui
foient plus formidales pour les murailles en pifé ,
que pour celles où le mortier de chaux 8c fable
lie le moellon le plus dur 8c le mieux lié : aufli
ne fe difpenfe-t-on jamais de couvrir de bons toits
toutes les conftruâions en pifé', comme d’entre-'
tenir foignèufement l'intégrité de ces toits, comme
encore de donner à tous les murs, non-feulement
de bons fondemens en maçonnerie de chaux, fable
8c moellons durs , mais encore un foubaffement
de deux à trois pieds hors de terre de même maçonnerie
au moins que les fondemens, tant pour
les murs de refend que pour ceux de face & de
clôture, à l’effet que le pifé ne commence qu’au
deffus du niveau que l’humidité du fol 8c le re-
jailliffement des eaux pluviales peuvent atteindre.
Une maifon en pifé, conftruite félon l’art, 8c
entretenue de manière que l’eau, ou feulement une
grande humidité ne puifle pénétrer, à certaine '
profondeur, les maffes de terre qui en conftituent
les murailles , 8c dont les faces expofées aux injures
de l’air extérieur feront conftamment munies
d’un bon crépi de mortier de chaux 8c de fable,
ne durera pas moins que celle dans la conftruâion
de laquelle on n’aura admis que la meilleure maçonnerie.
On en pourrôit citer de vingt pieds 8c plus de
hauteur en pifé pur, au deffus du foubaffement,
qui font encore en très-bon état, & qui néanmoins
fubfiftent depuis plus d’un fiêcle 8c demi, fans
avoir exigé ni de plus fréquentes , ni de plus importantes
réparations que toute autre.
En un mot, les conftrüétions en pifé font effen-
tiellement durables , 8c du nombre de celles qui
nous préfervent le plus efficacement des accidens
contre lesquels on implore les fecours de î’archi- I
tefture ; 8c elles ont le triple avantage d’être promptement
terminées 8c habitables, de coûter moins
que toute autre, 8c de fournir lors de leur démolition
un engrais merveilleux pour certaines cultures.
En effet, cette terre reftée dans une inaâion
prefque abfolue pendant une longue fuite d’années,
péanmoins pendant tout ce temps d’ex-
alaifons animales, perd bientôt au grand air., par
e fecours des pluies, des rofées , des gelées fur-
tout, fa dureté artificielle, 8c s’erapreffe de déve-
opper les fels dont elle eft reftée pourvue, ainfi
que ceux qu’elle a acquis,'comme d’en abforber
e nouveaux, 8c de les tranfmettre aux végétaux
ont on lui a confié la nourriture. Elle fait fur-
t°u,t des merveilles dans les vignes 8c dans les
ferres à froment.
maçon pifeur doit (avoir tout ce que fait le
c®nftruâeur en pierres, 8c de plus tout ce
qui ait objet de ce Mémoire ; il faut aufli qu’il
c u P0Prvu de tous les inftrumens qu’exige la ma-
3 nerie en général, 8c en fus qu’il foit muni de
Aru fr Métiers, Tome IV. Partie I.
M A Ç 32r
Ceux que nous allons décrire. Voye^ la Planche de
l'art du Maçon Pifeur, tome 111 des gravures.
L’efpèce de moule dans lequel on forme chaque
maffe en particulier, eft plus ou moins long, depuis
cinq pieds 8c demi jufqu’a treize. On ne pafle
pas cette dernière mefure, par la raifon unique que
le moule deviendroit trop difficile à manier.
L’ouvrage eft plus tôt expédié quand on ufe des
plus longs moules ; mais la diftribution des maifons
ne le permet pas toujours ; quelquefois même
elle demande qu’on en faffe au deffous de cinq
pieds. 8c demi de longueur, en faveur de certaines
parties.
Pour fixer notre imagination, n’envifageons ici
qu’un moule de huit pieds : c’eft le plus ufité, fi
ce n’eft quand il s’agit d’enclore les champs.
O r , pour un moule de huit pieds de longueur,1
il faut quatre lançonniers.
Le lançonnier (A f i g. 4 , PI. du maçon pifeur) eft
bout de chevron de coeur de bon chêne , ou de
quelqu’autre bois fort 8c liant à un degré fupérieur,
de trois pouces d’écarriflage, long de trois pieds
deux pouces au moins, traverfé de part en part
près de chacun de fes bouts , d’une mortaife de
fept pouces de long en deffus 8c de fix pouces trois
lignes en deffous, à caufe de l’obliquité de la paroi
la plus voifine du bout ; enfin , large d’un pouce,
entre deux joues d’un pouce d’épaiffeur chacune.
Ces mortaifes laiflent en arrière d’elles quatre
pouces de talon mefurant deffus, 8c quatre pouces
neuf lignes mefurant deffous , 8c entre elles deux,
feize pouces de corps.
Tout eft exécuté carrément, à la réferve feule
du biais des parois voifines des bouts ; mais tous
les angles font abattus 8c arrondis , principalement
ceux de l’écarriffage.
Plus le moule eft long, plus il faut de lançonniers
, en raifon de quatre pour huit pieds ; en
quelque nombre qu’ils foient pour chaque équipage
, ils doivent tous être égaux entre eux , 8c
femblables dans leur forme. Us portent chacun deux
aiguillés.
Les aiguilles ( B fig.y ) forment comme les deux
montans d’un châffis, dont le lançonnier ferait la *
traverfe inférieure. Ce font autant de bouts de
chevrons de même bois 8c de même écarriffage que
les lançonniers , de trois pieds 8c demi de Ion- -
gueur j terminés par le bas en tenons d’un pouce
d’épaiffeur 8c de fix de longueur, entre deux épau-
lemens d’un pouce de faillie ou d’un-demi-pouce
feulement, vu qu’on peut, fans inconvénient, réduire
à deux poupes d’épaiffeur des aiguilles.
Ces tenons deftinés à traverfer les mortaifes des
lançonniers, n’en rempliffent jamais que la largeur;
mais on y introduit un coin entre talon 8c tenon ,
pour maintenir celui-ci dans le point d’éloignement
de celui-là, qu’exige 1 e gros-dé-mur déterminé :
o r , c’eft pour que ces coins portent à plein-joint
fur la paroi en talon, par une de leurs faces d’é-
paiffeur, tandis que l’oppofée appliquée à l’aiguille