
eft très-rare dans le marbre ; en y remettant de
la couleur à meüiire qu’elle sèche , elle devient
très-belle en moins de vingt-quatre heures & pénètre
très-avant.
Si on emploie la pâte d’orfe ille, qui eft la plante
préparée avec la chaux & l’urine fermentée, la
couleur qu’on obtiendra fera plutôt violette que
b leu e ; mais pour obtenir un v rai b le u , il faut la
délayer dans du jus de citron ; il n ’eft point à
craindre que cet acide endommage le marbre ,
parce qu’il a été émouffé en travaillant fur l’or-
feille.
O n peut former ainfi fur le marbre blanc à froid
de grandes veines bleue s , qui y produiront le plus
bel effet; mais comme cette couleur eft fujette à
s’étendre, elles ne feront point pures , ni précifes,
à moins qu’elles ne touchent immédiatement des
parties colorées a v ec le fang-dragon ou la gomme
gutte 5 auquel cas elle s’arrête. O n la contient aufli
a v e c la c i r e , foit colorée, fi l’on veu t les veinés
colorées ; foit blanches, fi l’on veut que les veines
demeurent blanches : ce qui peut s’exécuter avec
affez de précifion.
. Ce tte couleur b leu e , qui pénètre le marbre de
près d’un p o u c e , le-rend aufti pluS ten dre , ce qui
n’eft qu’un très - léger inconvénient puifqu’on
n’en parfème que quelques places ; mais elle a l’avantage
d’être folide pour durer plufieurs années,.
fans fubir d’altération fenfible. ( Ce dernier article ejl
tiré du Ditf?. de Vlndujtrie. ')
Figures en relief.
O n a aüfli trouvé îe moyen de tracer fur le
marbre des figures en relief , avec beaucoup de
facilite.
Pour cet effet,, on trace fur le marbre avec de
la craie les figures qu’on veut avoir ; on le couvre
enfuite d’une couche cîfe vernis fait avec la cire
d ’Efpagne ordinaire, diffoute dans de l’efprit-de-
v in ; après quoi on verfe fur le marbre un mélange
de parties égales d’acide de fel & de vinaigre
diftillé qui corrodent le fond , & biffent fubfifter
les figures comme fi on les eût fait graver avec
beaucoup de dépenfe.
Marbres rapportés.
O n fait avec les marbres rapportés & autres
pierres colorées , des efpèces de peintures. Au
défaut des pierres naturelles pour certaines teintes,
on y emploie des pierres faâices.
O n voit dans le château de V.erfailles de ces
tables de marbres rapportés, de la plus grande
beauté.
Lorfqu’on entreprend de ces fortes de peintures,
on a fous les y e u x un tableau peint qui guide dans
l ’emploi des couleurs.
Plus les pierres font petites, plus l’ouvrage eft
f in , dé licat, & capable de recevoir les différentes
teintes qu’on veu t lui donner.
O n a foin que ces pierres ne préfentent point
une furface trop polie ou trop luifante :'les rayons
de lumière qu’elles réfléchiroient trop vivement !
empêcheroient que l ’on ne diftinguât les couleurs
de cette efpèce de tableau.
S t u c ou M a r b r e f a c t i c e .
L e fluc eft une pierre de compofition, avec la;
quelle on peut imiter les marbres les plus fuperbes
& même les furpaffer.
O n en prépare de plufieurs manières. Le fluc
qu’en faifoit d’abord fe préparoit avec une portion
de chaux éteinte, c’eft-à-dire, amortie par l’eau
& trois parties de poudre de marbre , que l’on
mêloit avec des blancs d’oeufs & de l’eau ; mais ce
maftic fe durciffoit fi promptement, qu’on n’avoit
pas le temps de l’employer.
O n a eu recours à un autre procédé qui eft in-
finiment meilleur. Il confifte en une portion de
chaux éteinte^ que l’on mêle avec trois parties de
marbre de Tibu r réduit en poudre, que l’on pétrit
& que l’on remue enfemble avec de l’huile de lin,
Lorfqu’on a bien amalgamé ce mélan ge, on le
voit s’enfler de jour en jour en forme de pyramide
; l’eau qui eft dans la chaux s’évap ore, & on
y remet de l’huile tous les jours, de peur qu’elle
ne fe deffèche trop.
Lorfqu’on a employé cette compofition , elle fe
deffèche, fe du rcit, & forme un corps très-folide
& varié en couleurs.
Les anciens , fuivant Palladius, pour faire leur
f tu c , prenoient de la chaux éteinte depuis longtemps.
O n repaffe fouvent à la truelle la première
couche ; quand elle commence à fécher , on en
remet une fécondé , puis uife troifième ; on les
recrépit avec une poudre de marbre un peu grof-
f iè re , gâchée de manière qu’elle ne tienne plus à
l’inftrument néceffaire pour la remuer.
Qu and cette couche commence à fécher, on
en met une autre de poudre plus f in e , & on polir
le tout.
Mais il eft une autre manière de travailler le
f tu c , qui eft bien fupérieure à celle-là , car on en
fait des morceaux fi b e a u x , qu’ils imitent les plus
* belles peintures. O n fait avec ce ftuc des payfages;
& on a vu à une des expofitions du fallon, un
tableau de fleurs de la plus grande beauté, où
toutes les couleurs étoient nuancées comme fi elles
euffent été placées au pinceafu. Il eft vrai qve la
manière dont on travaille ces morceaux, peut être
regardée comme une copie de peinture en ftuc,
ainfi qu’on v a le vo ir par le procédé.
Le ftuc ou marbre faétice dont on fait de &
beaux ouv rag e s , eft une compofition dont le plâtre
fait toute la bafe. La dureté qu’on fait lui donner,
les différentes couleurs que l’on m ê le , & le P®“
dont il eft fufceptible, le rendent propre à repre-
fenter prefqu’au naturel les marbres les plus prfe
deux .
Xa dureté que le plâtre peut acquérir étant la
(qualité la plus effentielle à cet a r t , c’eft aufli la
.première à laquelle les ouvriers doivent s’appli- I
qyer. Elle dépend abfolument du degré de calcination
que l’on doit donner au p lâtre, & comme
la pierre qui le produit eft fufceptible de quelques
petites différences dans fa qualité intrinfèque, fuivant
les différens pays où elle fe rencontre, il
faut tâtonner & étudier le meilleur degré de calcination,
pour que le plâtre qui en viendra prenne
le plus de dureté qu’il eft poffible.
On ne peut, donner ici des notions fur cette
méthode, qu’en ce qui regarde le plâtre de Paris; ,
ce fera l’affaire des ouvriers d’effayer de calciner
plus ou moins les pierres gypfeufes des autres
pays, afin de trouver le plus grand degré de dureté
où puiffe atteindre le plâtre qu’elles produiront.
On caffe les pierres à plâtre de Paris avec des
marteaux en morceaux , à peu près gros comme
un petit oeuf ou comme une groffe noix. O n enfourne
ces morceaux dans un four qu’on a fait
chauffer, comme fi on vouloit cuir du pain ; on
bouche l’ouverture du four.
Quelque temps après, on débouche le four pour
en tirer un ou deux des petits morceaux de plâtre que
l’on caffe avec un marteau. Si l’on s’apperçoit que la
calcination a pénétré jufqu’au centre du petit morceau
, de façon cependant qu’on y remarque encore
quelques points brillans, c’eft une marque que la
calcination eft à fon point de perfection, & alors
on retire du four promptement tout le plâtre par
le moyen d’un rable.
Si dans la caffure on remarquoit beaucoup de
brillans, ou qu’on n’en remarquât point 'du tou t ,
ce feroit une preuve dans le premier cas que la
pierre ne feroit point affez calcinée , & dans le
fécond cas qu’elle le feroit trop.
Quoique le plâtre devienne très-dur lorfqu’il eft
calciné à fon p o in t , fa furface fe trouve cependant
remplie d’une infinité de pores, & les grains
font trop faciles à en détacher pour qu’il puiffe
prendre le poli comme le marbre. C ’eft pour remédier
à cet.inconvénient, que l’on prend le parti
de détremper le plâtre avec de l’eau dans laquelle
on a fait diffoudre de la colle , q u i , rempliffant
les por'es & attachant les grains les uns aux autres,
permet q u e , pour ainfi d ire , on puiffe ufer
& emporter la moitié de chaque grain , ce qui
forme le poli.
Cette colle eft ordinairement de la colle de
Flandre. Il y én a qui y mêlent de la colle de
poiflon & même de la gomme arabique.
C’eft avec cette eau chaude & collée , que l’on
détrempe le plâtre ; mais comme le peu de folidité
du plâtre , fur - tout lorfqu’il n’eft point ap puyé ,
demande-qu’on donne une certaine épaiffeur aux
ouvrages ; pour diminuer la dépenfe , on fait le
corps de l’ouvrage ou le-noy au avec du plâtre
dont on vient de pa rler, en lui donnant une ligne
demie, ou deux lignes d’épaiffeur,
Lorfque l’ouvrage eft fuffifamment f e c , on travaille
à le polir , à peu près de la même façon
que le véritable marbre. On emploie ordinairement
une pierre qui eft affez difficile à trouver. C ’eft
une efpèce de cos ou pierre à aiguifer qui a des
grains plus fins que ceux du grès , & qui ne fe
détachent pas fi facilement de la pierre.
La pierre - ponce peut aufii y fervir. On frotte
l ’ouvrage avec la pierre , d’une main, & l’on tient
de l’autre une éponge imbibée d ’e a u , avec laquelle
on nettoie continuellement l’endroit que l’on vient
de frotter^ afin d’ôter par le lavage à chaque inf-
tant ce qui a été emporté de la furface de l’ou vrage.
Pour cet e f fe t , il faut laver l’éponge de
temps en temps & la tenir toujours remplie d’eau
fraîche.
O n frotte enfuite avec un tampon de lin g e , de
l’eau , de la craie ou du tripoli. O n fubftit»ue à
cela du charbon de faule broyé & paffé très-fin ,
ou même des morceaux de charbons entiers, pour
mieux pénétrer le fond des moulures , en employant
toujours l’eau avec l’éponge qui en eft
imbibée.
O n finit par frotter l’ouvrage avec un morceau
de chapeau imbibé d’huile & de tripoli en poudre
trè s-fin e, & enfin avec le morceau de chapeau
imbibé d’huile feule.
Lorfqu’on veut un fond de couleur , il fuffit de
délayer la couleur dans l’eau de colle avant de
s’en fervir à délayer le plâtre.
Il femble qu’on pourroit ajufter les pierres à
polir dont on vient de parler, à des morceaux de
bois faits en façon) de varlopes ou d’autres outils
de menuifier ; les furfaces de l’ouvrage en feroient
mieux dreffées, & les moulures plus exaétes ; mais
il faut fe fouvenir de la laver toujours à mefure
que l’on frotte.
Lorfqu’on veut imiter un marbre quelconque
on détrempe avec l’eau collée chaude dans différens
petits po ts, les couleurs qui fe rencontrent
dans ce marbre ; on délaye avec chacune de ces
couleurs un peu de plâtre ; on fait une g a le t te ,
à peu près grande comme la main , de chaque
couleur ; on met toutes ces galettes alternativement
l’une fur l’au tre , en mettant celles dont la
couleur eft dominante en plus grand nombre ou
plus épaiffes. O n tourne fur le côté ces galettes
qui étoient arrangées fur le plat ;' on les coupe par
tranches dans cette fituation , & on les étend en-
fuite promptement fur le noyau de l’ouvrage où
on les applatit-.
C ’eft par ce moyen que l’on vient à bout de
repréfenter le deffm bizarre des différentes. couleurs
dont les marbres font pénétrés.
Si l’on veut imiter les marbres qu’on appelle des
breches, on met dans la compofition de ces galettes
, lorfqu’on les étend fur le n o y a u , des morceaux
de différentes groffeurs de plâtre délayé avec
la couleur de la brèche ; & ces morceaux venant
à être applatis, repréfentent très-bien la brèche.
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