
’pour construire un clavecin qu’on puiffe mettre
d’accord, fans avoir recours au tempérament..
Voici comine s’exprime cet ingénieux amateur
& profond compofiteur.
Nous devons obferver que par un vice de fa
. Conitruétion , le clavecin étant borné à douze touches
dans. l?étendue d’une oétave, il eft impoftible
qu’il puiffe. rendre les vingt-un fons que la mufique
admet. .
La manière d’accordèr le clavecin, loinvde pal- ‘
.lier ce défaut, y jette un vice encore plus confi-
dèrable, èn ce qu’on efl obligé dé difeorder chaque
quinte, c’eft-à-dire, tous le fons., excepté les octaves
, jufqu’au point néceffaire pour détruire la
différence qui doit fé trouver entre,un demi-ton
majeur & un demi-ton mineur; d’où il téfulte que,
• ni les tons mêmes, ni les tierces , ni les fixtes,
ni aucun autre intervalle , ne peuvent être entendus
dans leur jufte proportion : en un mot ,
qu’aucun fon n’y efl jufte, lorfqu’il n’eft pas côn-
fidéré comme l’oélave d’un autre.
Pour parvenir à rendre le, clavecin un infiniment
tout-^-fait mufical, il eft néceffaire que le
. clavier porte autant de- touches qu’il en faut pour
. exécuter les ving: un fons diffèrens, contenus dans
l ’intervalle d’une oélavé ; & afin qu’un pareil
nombre de touches puiffe entrer dans l’étendue
du pouce au petit doigt , npus penfons qu’ il n’y
a que le moyen fuivant.
i°. Il faut ajouter deux petites touches, l’une
entre f 8c ut, l’autre entre /ni S c fa ; ce qui, avec
les. cinq petites touches que porte ordinairement le
clavier,, fera en tout fept petites touchesi
a°. On coupera en deux chacune dé ces petites
touches, afin qu’une partie puiffe rendre le bémol
■ & l’autre le diefe.
Ce font les clavecins que les Italiens appellent
brifés (fpezzati ) , & il paroît qu’on en faifoit beaucoup
plus d’ufage en Italie, lorfque les principes
de la mufique y étoient en vigueur, & que l’igno-
rance, foit des chanteurs ,foit des autres praticiens,
quant à l’intonation , n’y avoir pas pris, le: deffus.
Nous avons appris, ajoute M. de L. B ., que,
M. Chiquelier, garde des inftrumens de la mufique
du ro i, avoir fait conftruire un clavecin à
peu près dans le genre dé celui que nous pro-
pofons. Ce clavecin a été exécuté par M. Pafchal,
célèbre fa&eur de clavecins,. élève de Blanchet.
Mais outre que nous n’avons jamais vu cet inf-
trumenr, & que celui dont il eft ici queftion eft
fondé fur la divifion de Toétave , on nous- dit que
M. Chiquelier confervoit dans fon clavecin des
touches accordées félon le tempérament ; ce qui le
rend bien différent du nôtre, dont nous banniffons
pour jamais le tempérament, puifque la mufique
ne l ’admet point. C ar , ce qu’on appelle tempérament,
malgré ce qu’en ont dit dans leurs ouvrages
des écrivains célèbres , n’eft au fond qu’un moyen
mécanique r une forte d’induftrie, pour remédier
au défaut des inftrumens; fur lefquels on ne veut
pas mettre tous les fons , toutes les touches né-
ceffaires.
En employant les vingt-un fons contenus dans
l’enceinte d’une oélave, qu’a-t-on befoin de fons
tempérés & intermédiaires, pour le mince plaifir
de faire entendre ce qu’eft la mufique fur les inftrumens
à .douze fons ?
N’y a-t-il pas aflèz de ces fortes d’inftrumens
fans tâcher d’en perpétuer le vice , fur - tout
lorfqu’on eft convaincu qu’un re dièfe n’eft pas
un mi bémol? Nous ignorons d’ailleurs par quels
principes fe guide M. Chiquelier. Quant a nous,
nous ne voyons rien de plus fimple que de fuivre
ceux, de la mufique , en propofant un clavecin
purement mufical & non tempéré.
Accordeurs.
Ce font ordinairement les fa&eurs de clavecins
qui emplument & accordent ces inftrumens dans
les maifons ; & ce n’eft pas le point le moins in-
téreffant de leur art, lorsqu’ils veulent donner un
emplumage léger, tranchant-, 8c par-tout égal.
I I.
Instrumens a cordes ET A' MA nivelle:.
V i e l l e .
La vielle eft un infiniment à cordes, compofê
de deux parties principales ; la table & le manche,
fur lequel font les chevilles qui tendent les cordes.
. Çes chevilles ont été primitivement au nombre
de quatre feulement ; deux d’un des côtés du
manche, deux de l’autre côté.
Il n’y avoit. que quatre cordes non plus, deux
defquelles s’appeloient les bourdonsqu’on mettoit
à l’uniffon ou à l’o&ave.
Les deux autres cordes- s’étendent tout le long
du manche, 8c font la- fonélion du monocorde ,
rendant toutes fortes de fons par le moyen des
marches.
On peut, multiplier dans la vielle le nombre des
cordes , des touches & des marches-, tant que l’on
voudra..
Si l’on a fix bourdons q.ui faffent l’oélave, la
douzième, la quinzième, la dix- feptième, & la
dix-neuvième, on variera l’harmonie à l’infini, en
appliquant ou approchant ceux qu’on voudra de
la roue qui fert d’archet aux bourdons & aux
autres cordes-.
11 faut que cette roue-archet.foit bien polie , &
frottée de colophane..
Chaque marche du clavier de la vielle a deux
petits morceaux de bois perpendiculaires ; on les
nomme touches*
Les- touches fervent à toucher deux cordes à-la-
fois ; ces deux cordes font à l’uniffon : les touches
font preffées en deffous du-clavier par les doigts
de la main gauche ; & appliquées à l’archet ou à
la roue * la main droite conduit la manivelle*-
Lorfque les doigts ceffent de pouffer les touches;
elles s’éloignent d'elles-mêmes des cordes , retombent
8c ne les preffent plus.
Le clavier, dans fon entier, reffembîe à une
petite caiffe élevée fer la table ; cfeft dans éette
caiffe que font logées les branches des marches &
leurs touches. Elle eft entée & collée fur la table
fous laquelle eft le corps concave;.un couvercle
la .couvre 8c cache le .clavier ; "la- roue a aufli le
fien.
Il y a un chevalet proche de la roue ; il a fes
coches un peu plus baffes que la furface fupé-
rieure de la roue ; deux autres chevalets placés
de côté , fervent à limiter la longueur des cordes
de bourdon. .
Çet infiniment a fon ouie placée à l’extrémité
inférieure à l’un des angles ; les cordes portent de
petits flocons de coton à l’endroit où elles touchent
la roue : c’eft un moyen d’adoucir le' frottement
& le fon.
La manivelle de la roue éft à l’extrémité de
l’ inftrument^ oppofée au chevalet. •
La roue eft fufpendue, partie dans le corps
concave de Finftrument, partie hors de ce corps.
Les inftrumens à vent ont leur coup de langue ;
les inftrumens à archet leur coup d’archet ; la vielle
fon coup de poignet, qui fe .donne fur la première
c,roc,^e c*e deux en deux s les notes d’agrément
s’exécutent fur le même tour de roue, de la valeur
de la note avec laquelle elles font liées.
Dans les cas où la ronde forme la mefure il
y a deux tours de roué pour la ronde, ou quatre
tours ; les tours de roue varient felbn la mefure
le mouvement, le caraélère de l’air, & la nature
des notes qui fe trouvent dans le courant de lar
pièce.
Il y a des vielles faites én corps de luth , &
d’autres en corps de guittare; les premières ont
plus de force; les fécondés ont plus de douceur.
Le clavier eft compofé de treize toiiches noires ,
& de dix blanches ; fon étendue ordinaire eft do
deux oélaves-, du fo l à vide au fol d’en haut,
L’inftru ment s’accorde en C fo l ut 8c en G re fol;
les deux feuls tons daiis lefquels il joue.
Pour l’accorder en C fo l ut, majeur ou mineur,
on met les deux chanterelles à l’unîffon , 8c leur
fon eft un fo l; la trompette s’accorde à la quinte
au deffous des chanterelles, & le fon qu’elle rend
ell ut ; la mouche s’accorde à l’oélaye au deffus
des chanterelles , & à la quarte au deffous de la
trompette, & donne fo l; le petit bourdon s’accorde
a 1 oétave au deffous de la trompette , & à la
quinte au deffous dé la mouche, & fonne ut : ôn
■ I g fert pas du gros bourdon en C fo l ut.
Pour 1 accorder en G re fol^ majeur ou mineur j
les deux chanterelles fonnéront fo l; la trompette
tonnera re, quinte de fol ; la mouche comme en
Jr J°) utf J? gr°s bourdon, le feui dont on fe fert,
lonne l ’oélave fo l au deffous de la mouche, &
la double oélave au deffous des chanterelles.
On appelle chanterelles, les deux feules cordes
qui paffent dans, le clavier; les autres cordes ne
font que pour l’accord.
La trompettç eft la corde pofée fur un petit chevalet
, à laquelle efl attachée une autre petite corde
très - fine , répondante à une petite cheville que
l’on tourne plus-ou moins , félon qu’on veut faire
battre la trompettç.
La mouche efl la corde au deffus de la trompette.
Le petit bourdon eft la corde filée en laiton la
plus fine; le gros;bourdon ou la groffe mouche
la corde filée en laiton'la plus groffe.
On donne fix cordes filées en laiton aux vielles
, en corps de luth, & quatre aux vielles en corps
de guittare.
: Pçur l’accord des fix cordes de laiton, les deux
: premières ou les plus fines, fonnéront l’iiniffon
des chanterelles ; les deux moyennes , la tierce air
j deffous des fines ;• & les deux groffes, la quinte
au deffous1 des fines, & la tierce au deffous des'
moyennes.
Pour l’accord des quatre cordes de laiton, les'
deux fines fourniffent l’uniffon des chanterelles ÿ
la moyenne, la tierce au deffous des fines ; & la-
? groffe, la. quinte'au deffous des fines , 8c la tierce
! au deffous de la moyenne. %
Le-, mouvement de la roue feftivife en un tour
entier , en deux demi-tours , en deux quarts &
un demi-tour , en un demi-tour & deux quarts ,
; en trois quarts lié s , en trois quarts détachés, et»
quatre iquarts , en huit huitièmes , en trois tiers
! égaux, & en deux quarts & ïin demi : divifion qui
a rapport aux valeurs des notes.
Les coups de poignet dépendent fou vent du ca-;
raélère de la pièce & du. goût du muficien.
Les cadences fe font toutes du premier doigt
qui bat la note au deffus de celle fur laquelle la
cadence.eft marquée, & qui eft touchée par le
fécond doigt.
Les. autres agrémens fuivent les lois ordinaires
; des autres inftrumens. Voye^, pour les figures & la
tablature de la vielle, la planche Vdes Infrumens
de Mufique, tome I I I des gravures. '
Archiviçle.
C’eft une efpèce de clavecin auquel on a adapté-
|un jeu .de vielle qu’on accorde avec lé clavecin,
& qu’on fait aller par le moyen d’une roue 8c.
d’une manivelle*
I I I .
H A R M O N £ C A.
Uharrnonica eft: un inftrumenr qui rend des fons
harmoniques.
Il y en a de deux, fortes.
La pj-emière eft une planche, lohguç de trois
pieds & large de dix-huit ponces, fur laquelle on
range & on affure des gobelets de verre de différentes
grandeurs.
C ij