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taires verroit Tes revenus accrus par le retranchement
fur les dépenfes ftériles, & n’auroic d’autre,
emploi à faire de l’excédent de fes richefies , qu’à
l ’entretien & à l’amélioration de fes fonds. Enfin, la
clafîe ouvrière & commerçante éprouveroit elle-
même une épargne fur le prix de fes achats & de
fes confommations , ce qui deviendroit une nouvelle
fource du bon marché des falaires & des ouvrages.,
C ’eft ainfi que par une progrefiion infenfible, Vex-
tinclion dès corps & communautés produiroit dans,
l’intérieur l’accroiffement de la culture , de la population
& de l’aifance générale.
2°. Par rapport au commerce étranger, elle doit
augmenter la malfe des exportations, en rappro- '
chant le prix de nos ouvrages du prix des ouvrages
• de toutes les nations concurrentes. L a diminution
des frais du commerce reftitueroic à la France'toutes
les ventes que le renchériffemenc aéluei lui a fait
perdre. T e l eft l’ état refpe&if des nations commerçantes
de l’Europe, que le moindre furhauffement
de p rix met hors d’état d’entrer dans la concurrence
f énérale 5 c’eft aux furchargesimpofées fur les agens.
u commerce & de l ’induftrie, que l’on doit imputer
le fuccès des efforts de la Suifle, de l’Angleterre
& de • la Hollande , pour faire pencher la
^balance en leur faveur, Sc obtenir fur nous une préférence
décidée dans plufieurs branches importantes
du commerce. L e plus petit bénéfice fuffit pour
attirer l’acheteur quife détermine par le bon marché.
•C’eft donc le bon marché qu’il faut fonger à rétablir
pour ranimer le commerce d’exportation ; o r , quelle
voie plus dire&e , que la fiippreffion d’un impôt de
13 millions, qui fe lève fur lès étrangers comme fur
les nationaux ? Tandis que d’un côté l’économie générale
des travaux & des dépenfes, produite par la
ceflation du monopole & des furcharges , nous remettra
au taux général de l’Europe ; de l’autre,
l ’émulation produite par la concurrence obtiendra
pour nos manufactures une préférence toujours
affûtée , lorfque le bon marché viendra fe joindre à
la perfection de la main d’oeuvre. Deux biens ré-
fulteront de cet accroiffement de notre commerce
extérieur.Le premier, de rétablir l’égalité dans nos
échanges avec les nations voifines & rivales, & de
nous affiner l’avantage dans la balance du commerce.
L e fécond plus [important encore, d’augmenter
l’emploi des matières premières, de procurer par
eonféquent le débit des productions nationales.
D e - là , l’encouragement de la culture, & par elle
l ’accroiffement des riche fies & de la population,
3°. Enfin , le fouverain doit trouver lui-même un
très-grand avantage dans la fupprejjion des j u randes.
L e prince éft par lui-même & par fes
agens le plus grand confommateur de fon royaume.
T ou t ce qui diminue fes dépenfes lui procure une
épa*gne fur fes revenus. De cett^e fur charge de 13
millions, dont les ouvriers & commerçans s’indem-
nifent par la répartition qu’ils en font fur le prix
de leurs falaires & de leurs ventes , il faut compter
que le prince en fupporte. au nioiqs un fixiéme -par
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l’augmentation progreflive de fes dépenfes de toute
nature. Ce ne font pas feulement fes confommations
perfonnelles qu’il- faut confîdérer , ni même celles de
tous ceux qui vivent directement à fes dépens. Qui
pourroit évaluer les reflets & les contrecoups d’une
pareille charge fur toutes les dépenfes de la puiflànce
publique ! Salaires, penfîons , appointemens , gratifications
, foldes , gages , • autant de canaux par
lefquels les richefles du prince fe répandent fur la
fociété ; or il n’y a pas une feule de ces fources
| vivifiantes , qui né doive s’accroître, & qui ne
s’accroiffe en effet dans la proportion de l’accroif-
fementjies befoins & du renchériflement des denrées
& des frais du commerce.
Autre caufe de diminution de dépenfes pour le
fouverain ; combien de frais n eft-il pas obligé de
faire pour l’adminiftration des corps & communautés
, pour les commiflions <3ç les bureaux établis, pour
les appointements de cette foule d’infpeCteurs ré-
pandus dans toutes les provinces , de tous les commis
& prépofés à l’exécution des réglemens ! L a
liberté & la concurrence difpenferont le gouvernement
de la plupart de ces foins aufli onéreux que
fuperflus. Les inconvéniens & les abus difparoîtront
avec la çaufe qui leur a donné l ’être.
C h a p i t r e I
D e s moyens de fupprimer les corps &
communautés.
Les profeflions de commerce & communautés
d’arts & métiers qui fubfiftent dans toute l ’étendufe
du royaume, fe divifent en trois çlaffes.
L a première comprend les communautés dont l’é-
tabliffement a été autorifé par lettres patentes en-
regiftrées dans les cours, & qui forment corps de
jurande.
L a deuxième comprend les communautés qui ont
des ftatuts & réglemens. émanés des juges de po lice
ou des feigneurs , qui font foumifes à toutes les
formalités de l’apprentinage & de la maîtrife , & qui
n’ont cependant aucune exiftence légale , faute
d’avoir obtenu des lettres patentes ou des ftatuts
duement homologués.
L a troiftéme comprend les profeflions abfolument
libres, qui n’ont aucun titre d’établiffement , aucuns
ftatuts, &Tqui s’exercent fans apprentiftage &
fans maîtrife.
Cette dernière claffe eft, très - peu nombreufe.
Dans prefque toutes les villes & même dans les
gros'bourgs , les communautés qui n’ont point de
lettres patentes fe font fait autorifer par des fen-
tences de po lice ;, elles ont dreffé des ftatuts &
adopté des réglemens particuliers , qui ont été-confirmés
par les feigneurs, par les baillis ou féné-
chaux. Elles fe font établies d’elles-mêmes, furie
modèle des corps de jurande , & fe gouvernent de
la même manière; elles ont d’ailleurs été impofées
4' toutes les taxes des communautés ; les .parlemens
ne
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ne reconnoiflent point cependant letir exiftence.
Toutes les fois qu il s’eft agi de prononcer dans les
cours fupérieures, fur la validité des obligations
qu’elles avoient contractées, ou des failles qu’elles
avdient faites par le miniftère de leurs prétendus
fyndics & jurés ', la. nullité en a „été prononcée,.
fauf à elles à fe .pourvoir, pour obtenir des lettrésr
pateptes par devers le ro i, dont Taütorité fouve--
raine peut feul, Tonner un corps dans l ’état. I l y
a un grand, nombre d’ arrêts: qui ont jugé d’après ce
principe' de droit public , que les communautés qui
n’étoient point autorifées pat lettres du prince, ne
formoient; point corps ni jurande ,. & qui leur ont
mêmç fait défenfes de prendre la qualité de corps
& communautés.
, Il eft vrai que ces mêmes:arrêts leur ont réferv.é
la faculté d’acquérir; l’ être civil par l’autorifationdu
prince. Aufli la plupart;ont-elles formé leur demande
au confeil (où. elles font des démarches rui-
neufesr,' & s’épuifent en frais, pour folliciter l’obtention
des lettres, p.our Taire rédiger des ftatuts,&
parvenir i.à leur homologation. Il éft abfolument
indifpenfable de fixer- l ’état incertain de ces diffé-r
rentes ^communautés , qui fe chargent »tous les jours
de: nouvelles dettes. C ’eft . ce qui a été l’objet des
arrêts du confeil qui ont paru à. ce fujet; ils n’ont
été rendus que pour fervir de iréglement aux pro-
fèflions de commerce, arts & métiers qui ne font
point en jurande. Mais en même-temps ils préfen-
tent des difpofitions favorables au retour de la l i berté
générale, & qui font allez connoîtfe que les
yues du gouvernement ne font-pas contraires au
but que l’on s’eft propofé dans' cet ouvrage. On
ne fait que généralifer l’exécution d’un plan que le
légiflateur lui-même a déjà tracé. Les termes de ;
l’arrêt du 30 août 1767 , ne font point équivoques;
ils annoncent le delfein formé de fupprimer.
les jurandes & de rendre la liberté au commerce; Sa
majefté déclare qu’elle a ju g é convenable â?expliquer
f e s intentions , • afin de préparer p a r 'd e s
■ régies f ix e s 6* invariables , le fuc cè s d’un p la n
q ui en ramenant les corps & communautés à.
leur vrai principe de lib e r té , ne p eu t être qu’ é-
galenïent utile au commerce & à l ’é ta t , & dont
elle f e propofe d’accélérer l ’exécution , & de la
Tendre générale.
Pourquoi fufpendre plus long-temps une opéra-
-tion fi utile ? Pourquoi laifïer fubfifter ces diftinc-
tions bifarres entre les différentes, communautés
d’arts & métiers? N e poyrroit-on, par une loi générale
, établir dès-à-préfent dans tous ces corps
une parfaite uniformité , & les fixer irrévocablement
dans un état de liberté , dont ils ne fe font
écartés que par les' fuites d.’une adminiftration, abu-
five? On a é t e retenu'jufqu’ic i , fans doute, p a r la
crainte des obftacles ; mais ;ces obftacles font-ils donc
infurmontables? On- verra dans un moment que la plupart
des difficultés s’évanouiflent à l’examen , & ne
font formées que par le préjugé. A l ’égard de celles
4jui ont quelque réalité , le gouvernement peut les
Commerce. Tome I I . P a r t . II'.
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écarter par des moyens fort fimples; Le plus important,
eft de déterminer avec jufteffe les mefures à
prendre pour l’exécution du nouveau plan , &,c’eft
par la manière même de fupprimer les jurandes ,
qu’il faut prévenir les inconvéniens qui ppurroienc
ré.fulver de leur fuppreflîon.
Ce changement ne peut s’opérer que par un réglement
général, qui enveloppe dans fes difpofitions
toutes les profeffions de commerce , arts & métiers ,
tarit celles qui font en jkr'anàef oyiÇ. celles qui
n’ont point de titre., d’ér.eérion f ou qui font ablo-
: lument libres ; d l’égard des communautés qui ne ■
1 font1 point' autorifées ,, le,ur établiflèment puremenc
arbitraire'ne flibfîftè pascaux yeux de la loi , il ne
s^agit q'u;e -d’elV prori:bhcèt la riüllité. Par rapport à
Celles qui: ont un titré "reconnù .& vérifié , la loi
doit en pronôricér la^diifoliïtion, les dépouiller de
l’être civil, ne leur laifler aucune exiftence propre,
les déclarer incapablesde pofféder aucun bien, d’intenter
aucune aérien en juftice, & de procéder, fous
quelque préte'itë. que cé ,foir, èn qualité de corps
& communauté: Le feul moyen de .prévenir le retour
du monopole & del’exclufif, c’eft de divifer
les ouvriers & lés artiftes pour réunir les arts &
métiers', de fupprimer toutes les barrières qui fé- •
parent les différentes profeifioüs, de lies lier toutes
entr’elles par un principe de fraternité, & de ne
faire de-tous les agens du' commerce & de l’induftrie
qu’un feul'& même corps.
Seroit-il. donc poffible qu’il ne fubfiftât aucune
forte de-diftinérion entre les différens arts & métiers,
& que. toutes les profeffions demeurafîènt entièrer-
ment confondues ? A ne confulter que l’intérêt du.
commerce, on ne voit pas que cette réunion générale
pût avoir le moindre inconvénient ; les diftinc-
tions convenables feroient établies par le fait;
celles de droit font indifférentes au fervice du public.
A-t-on jamais cru néceffaire que les négocians
fuffent c.laffés dans toute l’étendue, du royaume, félon
le genre de leur négoce ? Les- marchands eux-mêmes
pe le font pas dans les villes maritimes , telles que .
Bordeaux, où fans aucune diftinérion de corps , ils
peuvent faire toute forte de commerce de quelque
nature qu’il foit, autant que leurs facultés le leur
permettent. Ce n’eft que fous un point de vue de
police générale qu’il peut être important de dijfcerner
les états. Les arts doivent jouir fans doute. _de là plus
grande liberté; mais il fer oit dangereux .queceux
qui les exercent, s’attribuaflënt une indépendance
abfolue : il. eft eflentiel au contraire qu’ils demeurent
fournis à l’infpeérion du gouvernement, & qu’il
puiffe avoir une connoifïànce exaâe de tous ceux
I qui: exercent chaque profeffion. L’intérêt même du.
I commerce peut l’exiger à certains égards. L^ loi
I doit remplir deux objets. Le premier, de faire dif-
:paroître tous les privilèges exclufifs. Le deuxième ,
I de rendre gratuite l’entrée & l’exercice de toutes
Iles profeflions. Il s’agit de trouver les moyens de
l concilier ces deux points fondamentaux avec les
F f f f f