
chemifes & des habits pour hommes & pour femmes.
Ils en tirent des fîiofcouades , on fucres bruts,
quon travaille dans les, raffineries de Marfeille ;
& quelques autres marchandifes des Itles. Ils n’em-
ployeut jamais d’argent dans ce commerce; leur
cégo ce* fe faifant par échange de marchandifes à
marchandifes.
O n ne fera pas fans doute fâché de trouver ici un
extrait de ce que monfîeur Pitou de Tournefort
rapporte du commerce de M a r fe ille , dans ia relation
de fon. voyage au Levant, entrepris par
ordre du roi en 1700 , & donné au public en 17 17 ,
& de quelques autres mémoires qui ont été communiqués
depuis la première édition de cet ouvrage.
I l y a à Ma rfeille deux intendans ; l’un qu’on
nomme intendant de marine ou des galères $ l’autre
qui eft l’intendant de- juftice , comme dans les
autres généralités de France. C’eft ce dernier qui a
infpecHon fur les affaires du commerce, & qui en
eft le juge. I l eft à la tête de la chambre du çom- ■
merce de cette ville , ainfï qu’on l’a-remarqué dans ;
ce Dictionnaire à l’article Ats chambres du commercer
Cette chambre fait une penfion de dix-huit mille
livres [ l ’édit du mois de mars.de 1669, pou r l’af-
franchiflemeuc du port de M a r fe ille , ne dit que
feize mille ] à l ’ambafïàdeur de France à-la Porte;
&- une autre de fix mille livres à l ’intendant : c’eft
elle auffi qui a foin de "payer les appointemens des
çonfuls de la nation au Le vant, & de leurs chanceliers
; elle eft pareillement tenue de tous les frais
extraordinaires qui le font, foit en préfens, foie en
avanies. L e fpnds de toutes ces dépenfès fe prend
fur les droits de confulat, & comme on l’a dit
ailleurs, fur celui de Ç o jim o , dont néanmoins
monfîeur de Tournefort ne parle pas.
Les députés de la. chambre Ont difpofé pendant
quelques années des confulats ,\ mais il y a déjà du
tems que la, cour y pourvoit , 8c qu’ils ne jugent des
affaires du commerce , qu’autant que le leur permet
le miuiftre- qui en a la fur-intendance.
Les boutiques des marchands de co ra il, les ma-
gafins des droguiftes, les raffineries de fu c re , les
manufactures des-étoffes d’or & de foie , & les fa-'
briques de favon , font voir combien eft eonûdérable
le commerce qui fe fait à Marfeille.
Il n’y a plus que dans cette ville & à G èn es,
qu’ il fe trouve des marchands de corail ; ce font
ceux dç. Marfeille qui en débitent davantage , tout
l ’Orient étant rempli de leurs colliers 8c de leurs
bracelets.
Dans les manufactures de favon on confomme
pon-feulement une partie des huiles dé Provence ,
mais encore celles que les Provençaux tirent de
Candie & de Grèce.
Le s drogues du Levant arrivent à Ma rfeille , de
Smirne, d’A le p , d’Alexandrie, &c. Celles des Indes
occidentales viennent çn droiture, ou par la voie de
Çatji*,
Enfin, â l ’égard des fucres qui s’y raffinent, Cô
font ceux des Ifles: Françoifes de TAmériqiie.
O11 fe fert a Ma rfeille pour l’achat ou la vente
de certaines marchandifes d’une forte d’écu' qui
n eft qu une monnoie • de compte, il vaut 5 livres
4 fols , ou 4 florins, en évaluant le florin â 1 {»
fols tournois. Cette monnoie eft principalement
d’ufage dans le commerce des cotons & des noix
de galle.
Les Hollandois y font un affez bon commerce,
8c en tirent quantité de marchandifes , entr’autres
des huiles d’o liv e s d e s favons blancs & marbrés ;
des eaux-de-vie; des vins mufeats de Saint-Laurent
; des olives de Saint-Chamas, qui pafïent pour
olives de Lucques ; des câpres ; des auchois ; des
raifins de Corinthe de Santen 5 du miel blanc ; des
amandes; des figues 8c des raifins fecs; du verdi
de gris; des parfums; du paftel que les Marfeillois
tirent du Languedoc ; des piqueures de Ma rfeille $
des bas de foie de Nifmes', de toutes fortes de drogues
du Le vant, du café, des foies, des cotons, filés
& en laine ; du p o il. de chèvre d’Angora, du poil
de chameau , & c .
I l vient pareillement â Marfeille quantité de
marchandifes de Hollande, particulièrement d’Amf-
terdam ; mais la plus grande partie y refte en dépôt
dans les magafins des. correfpondans des marchands
Hollandois , pour être envoyée dans les
échelles du Levant, fur des vaiffeaux & des barques
que les Marfeillois équipent exprès pour ce
.négoce.
Rien ne peut davantage faire voir la folidité , la
richeffe. & la grandeur ^u commerce des Marfeil-
lo is , que les malheurs dont leur ville à été affligée
depuis l ’année 1720 jufqu’en 172.2. Malheurs
fous lefquels toute autre que cette v ille , n’eut pas
manque de fuccomber. En effet, cinquante mille de
fes habitans enterrés en moins de deux ans, par des
maladies contagieufes ; fon port fermé , & toute1
communication interdite, tant au dedans qu’au dé-
hors du royaume ; fes vaiffeaux & fes marchandifes
brûlées par les propres mains de fes marchands ,
ou par celles des étrangers ; en un mot, tout cp
que la contagion a de plus défblant & dé plus pléia
d’horreur, n3a pas été capable de lui rien ôter de
la réputation de fon commerce ; 8c elle s’eft fi bien
rétablie en moins d’une année, que préfentemenc
le nombre des habitans y eft plus grand: qu’aupara-.
vaut, fes magafins plus remplis, & fon port plus
fréquenté qu’avant qu’elle eût éprouvé ce fléau terrible
de la colère dç Dieu,
P r i v i l è g e s accordés à la ville de Ma rfeille
en f a veu r de fo n commerce-.
P o r t f r a n c d ç M a r s e i l l e .
Bien avant que l ’empire des François fe fût établi
d^ns les Gaules , & que la Provence fut devenue
une de fes provinces, les vaiflèaux de ceffe ville
fàmeufè avoient porté fon négoce chez les nations
lès plus éloignées de l’une & l ’autre mer; & les
iiéheffes que la bonté de fon port, le nombre de
fes navires, la hardïeffe & 1 habileté de fes pilotes
& de fes matelots, & la fageffe de fon gouvernement
y avoient attirées, l’avoient rendue fi puif-
fante, que Rome déjà la maîtreffe d’une partie
ou monde, s’étoit fait un honneur de l’avoir
pour une de fes premières 8c de fes principales
alliées. '
Depuis que dans le quinziéme fiécle M a r fe ille ,
àinfi quç le refte de la Provence , eut . été réunie à
la couronne de France , les rois , pour foutenir
la réputation du commerce d’une ville fi importante,
avoient affranchi fon port de tous droits;
mais cet aftranchiffement & ces. privilèges avoient
eu le fort de la plupart des plus utiles 8c .des meilleurs
établiffemens ; 8c en 1669 } époque fi remarquable
pour le commerce & les manufactures de
Fi||nce , Marfeille étoit autant furchargée de
droits d’entrée & de fortie qu’aucune autre ville, du
royaume.
Louis X I V , qui depuis qu’il avoir pris lu i -m ê *
le gouvernement de Ion état , faifoit une de fes
principales occupations d’y faire refleurir le négoce,
penfa non-feulement à rétablit la franchife du port
.de Marfeille fur l’ancien pied, mais voulut encore,
en y ajoutant des privilèges & des avantage^ extraordinaires
, y rappeller le négoce que la fur-
chàrge de tant de droits avoit fait pafïer chez les
étrangers.
L ’édit potfr cet aftranchiffement & les lettres-patentes
en exécution font du mois de mars 1669
enregiftrées au parlement de Provence les 9 8c iz
avril, enfuivant.
Par cet éd it, le port 8c le havre de la ville de
M arfe ille font premièrement déclarés fra n c s 8c
■ libres'-â tous marchands & négocians ,& pour toutes
fortes de marchandifes, de quelque qualité &
nature qu elles foient : fa. majefté entendant que
tous étrangers & autres perfonnes de toutes nations
& conditions puiffent y aborder & entrer avec
leurs, vaiffeaux, bâtimens & marchandifes; y chais
e & décharger , _y féjourner , magafiner , entre-
pofer & en fortir par mer librement quand bon
leur femble, fans être tenus de payer pour lefdites
marchandifes & vaiffeaux entrans & fortans par
mer aucuns droits d’entrée & de fortie ; fadite ma-
jeité iuppnmant à cet . effet tous droits , tant à elle
apparteilans , qu’à la ville & aux particuliers; même
en reduifant les marchandées de contrebande à un
nombre bien moins confidérable que celui porté par
le tarif de 1664. r • r
Secondement, toutes marchandifes qui font tranf
portées, par mer, de la ville de M a r fe ilU , hors du
royaume, font pareillement déclarées exemptes de
tous droits fans que les bâtimens & vaiffeaux qui
loueut de fon p o r t , foient tenus de raifonner au
burêâu des foraines & douanes qui y font établis $
ce qui s’entend aùffi des marchandifes , qui par violence
du temps , par la crainte des corfaires, même
par fortune de naufrage, ou pour réparer les vaiffeaux
, feroient mifes à terre ; à la charge néanmoins
pour celles-ci, & dans tous ces ca s, d’en
avertir les commis, 8c d’en faire le chargement fur
d autres vaiffeaux en leur préfenee, dans le terme de
deux mois pour tout délai.
En troifieme lieu , non-feulement i l eft permis à
tous marchands étrangers d’entrer par mer dans lef-
dits ports & havres , y charger, décharger 8c for-
tir leurs marchandifes fans payer aucuns droits ,
quelque le jour quils y aient fait; mais encore ils
font déchargés de tous droits d’aubaine ; 8c leur décès
arrivant, leurs enfans.., héritiers & ayans caufe ,
peuvent recueillir leurs biens & fucceffions mobi-
liaiïeS', comme s’ils étoient vrais & naturels François
; étant auffi déclarés exempts de tous droits de
repréfailles, en cas de rupture & de déclaration de
guerre entre la France 8c les- états dont ils font fu-
jets ; auquel cas il leur eft accordé trois mois pour
tranfporter en toute liberté , leurs effets, biens 8c
facultés hors du royaume.
Enfin, pour engager les marchands étrangers à
venir s établir a M a r fe ille , il eft déclaré que tout
etranger qui y prendroit parti , qui épouferoit une
nlle de la v ille , ou qui y acquerroit une maifon
dans l’enceinte du nouvel'aggrandiffement, du-prix
de dix mille livres & au-deflus, qu’il auroit habitée
pendant trois ans, ou de cinq cent livres jufqu’à dix
mille livres, dans laquelle il auroit pareillemen t
fait fa demeure durant cinq années; même ceux
q ui, fans y avoir acquis de biens ni de maifons , y
auroient établi leur domicile, & fait un commerce
I affidu pendant douze années confécutives , feroient
cenfes naturels François , & réputés bourgeois de
M a r fe ille , & comme tels, participeroient à toutes
les libertés , droits , privilèges & exemptions attribues
aux bourgeois , excepté feulement pour les
charges municipales, à l ’égard defquelles les anciens
reglemens feroient exécutés.
■ Au t r e s p r i v i l è g e s contenus dans les
mêmes édit & lettres - paten te s du mois de
mars 16 6 9 , & Varrêt du confeil du 10 ju il le t
l7<>3-
Ces privilèges font :
i ° r L a fupprefiîon de toutes fortes de droits , fore
quils fe levaffent pour le r o i , foit qu’ils appartinf-
fent a la v ille , foit que les particuliers en euffent la
joumance.
Les principaux de ces droits fuppnmés, furent les
droits de demi pour cent, levés pour la penfion de
lambaliadeur de France à Conftantinople, & autres
affaires de commerce.