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Accorde (es lettres de permjffion adreflees aux gouverneurs
refpedtifs des deux ifles. A cet égard ou fait
le même traitement aux étrangers qu'aux Hollan-
-<iois.
L a compagnie fait peu ou point d'expéditions
pou r Ton propre compte pour les colonies Holîan-
doiles ; mais , comme tous les navires doivent revenir
nécefïài rement en Hollande avec leurs cargaisons
de retour , fans meme excepter ceux qui ont
été expédiés de quelque port d’Europe''que ce Soit
pour Curaçau , ou St. Euftache , la compagnie J e
charge à l'arrivée de ces navires en Hollande , du
foin d'en recevoir les cargaifons & d’en faire la livrai-
fon aux p ropriétaires, ou con fignat aires refpeftifs,
de qui elle recouvre & les droits qui lui appartiennent
à elle-même fur le montant des marchandifes ,
& le fret qui doit être payé au navire en vertu des
coimoifTemens , lequel fret elle remet enfuite aux
armateurs du navire, après en avoir déduit les frais
comme nous le montrerons ci-après.
Les Sociétés de Surinam & de Berbice font de leur
côté quelques expéditions aux colonies qui fe trouvent
dans leur conceflïon; la première principalement
ayant befoin cous les àns de N èg res , en fait
acheter Une partie fur les côtes d’A fr iq u e , & le
refte à Surinam même. Au refte , les particuliers
qui fuivent le commerce' de cette colonie & celui
de Berbice, de Demerari & d’Eflèquebo , font la
plupart ou propriétaires, o'u intérefîës de quelqu'une
des plantations de ces mêmes colonies.
L e commerce de St. Euftachè & de Curaçau eft
tout different : il fe fait par des négocians Spéculateurs
, foit pour leur propre compte, foit pour
compte en participation avec des étrangers. L a po-
fition de St. Euftache en particulier eft on ne peut
plus avantageufe pour ce commerce; fa proximité
des autres ifles , invitant d'un côté les habitans de
celles-ci, & d’un autre les négocians de l’Europe
qui ont des relations avec eux , à fe fervir de la
voie de St. Euftachè , fur-tout en temps de guerre,
pour fe procurer la facilité des retours , ou le débouché
le plus avantageux de leurs denrées.
En effet, quoique l'ifle de St. Euftache ne foit
pas le Seul port franc de 1 Amérique , on peut
néanmoins la regarder comme la feule colonie Européenne
de cette partie du globe , qui ne foit pas-
agricole , fon terroir étant peu propre pour la cultivation
, & d’ailleurs fort refferré, L e commerce
•eft donc fon unique ref fourcemai s refïource fé-
conde & folide qui dédommage amplement cette
ifle des autres avantages que la nature femble lui
-avoir refufés. E lle eft fréquentée de routes les na- j
(ions qui ont des pofïefiions en Amérique , 8c tant
en guerre qu’en paix , St. Euftache eft nn entrepôt
où les colonies Européennes de cet hémifphère
vont chercher les provifions qui peuvent leur manquer
, &- porter le fuperflu des denrées dont elles
pe fauroient fe défaire chez elles ou ailleurs auflï
ayamageufernent que dans cette Ifle. I l eft donc
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évident que le commerce de St. Euftache tenant dâ
fi près a celui que chaque nation fait avec fes colonies
refpeélives de l'Amérique, la connoiffance n’en
peut qu etre utile & agréable aux négocians fpéou-
lateurs : nous allons en conféquence expofer d’une
manière fuccinéte en quoi coufifte ce commerce.
Difons d’abord que le commerce de St. Euftache
a pour objet de fournir aux ifles qui l’avoifinent
en Amérique, une partie des provifions dont elles
ont befoin , & d’acheter d’elles le fuperflu de leurs
denrees. Nous obferverons enfuite,que ce commerce
par la même raifon qu’il eft indépendant de celui
que l ’on fait dans les établiflemens Européens dans
cette partie de l’Amérique, connue fous- le nom
d’i/?£j A n t il le s , ou C a ra ïb e s , eft fujet à des révolutions
fubites & inattendues,, qui le plus fouvent
trompent l'attente du fpéculateur ; indépendamment
de ce la , comme en certaines circonftances on peut
y faire des profits confîdérables , ces profits encouragent
les fpéculations, qui en forçant le commerce,
ne peuvent manquer de lui nuire. Mais, quoi qu’il
en foit , tout commerce eft bon lorfque l'on fçait les
moyens de le faire avec avantage , & celui de St.
Euftache offre toujours au fpéculateur prudent une
carrière brillante, dans laquelle il n'exerce fes talens
& ne déploie fes facultés , que lorfqu’il voit lès affaires
dans un jufte équilibre*
L e commerce de St. Euftache fe divife naturellement
en commerce d ’allée & en commerce de retour.
L e premier confîfte à y envoyer des provifions
fraîches & falées , & quelques marchandifes feches.
L e dernier confifte à en faire venir divèrfes denrées
& marchandifes de l'Amérique»
On entend par provifions fraîches & falées, des
farines , des pois , des haricots , du vin * de l'eau
de vie, du genièvre ou eau de vie de grains, du
vinaigre , de l’huile d’olive , de la viande de boeuf
falée , du lard & de la viande de cochon , des jambons
, du faumon en fanmure , des harengs faléS.,
du beurre , des chandelles de fu if , des bougies de
cire 8c plufîeurs autres choies.
Les marchandifes feches le plus demandées pour
St. Euftache , font des colets ou toiles d’Ofnabruck,
dites autrement toiles à la rofe, des toiles de
Warendorp, de Siléfie, de Brabant, de Ho lland e
& de Ruffie, desPlatilles royales, Bretagnes, Crées
ou Morlaix véritables & contrefaites , toiles écrues
de Mortagne , dé Vimoutier, de Dinan, brins' &
grosfort de divers longueurs , toiles de La va l, toiles
voile de Ho lland e & de Ruffie , bafins, fils
d’ épreuve véritables & contrefaits, coutils , ferviettes
& napage de France; mouchoirs de Siléfie, de
Rouen, de Saumur & de Béarn-; mouchoirs & robes
de Cholet , bas de fil tricotés blancs , fil de Rennes
gris ; indiennes pattenas, perfes des Indes , chitz,
firfaca, gingas, guingans, hamans, baffêtas,, mouchoirs
des Indes, nankins ; mouffelines unies , à
fleurs, brodées, à..raies & à carreaux , chemifes de
foldats; doux de fer afîbnis, verres à boire & go-j
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belefs blancs , fayénçe de^Rouen ; des houis ; ferpes
& haches ; des chaifes en paille ; planches de fa-
pin, cordages & fila voile , & divers autres articles.
C’eft du choix de tous ces articles que dépend le
plus fouvent le bon ou le mauvais fuccès des fpéculations.
On doit fur-tOuc prendre bien garde à la
bonne -qualité des provifions, qui’ plus qu’aucune
autre marchandife, font fufcepcibles de détérioration,
auffi-bien pendant la traverfée d’Europe en Amérique
, qu’en Amérique même, dont les chaleurs font
funeftes à tous les comeftib’les. On donne la préférence
dans cet hémifphère aux farines de France
8c d’Angleterre fur celles de Hollande. Celles-ci
fervent feulement à faire du bifcuit ; & l’on fait du
pain avec celles-là. Les falaifons d’Irlande font tout
ce qu’il y a de mieux dans ce genre pour l ’Amérique
» Elles font mieux préparées fe confervént davantage
, & les qualités en font fupérieures à celles :
des falaifons qu'on fait en Holland e & en d’autres !
pays. L a viande falée de boeuf, celle de cochon 8c
le lard de Corke , de Waterford & de Limmerik font
fort eftimés à St. Euftache & dans les autres ifles. L e
hareng falé eft un article fur lequel il y a des dangers
à courir. Celui de H o lla n d e , quoique reconnu
pour le meilleur, eft trop gras & ne fe conferve
pas long-temps. Celui de Suède, lorfqu’il a été bien
conditionné , rifque moins de fe gâter, fe vend couramment
8c à des prix q u i , quoique plus bas que
ceux qu'on paie pour les harengs de H o lla n d e ,
donnent néanmoins plus de bénéfice que ces~ derniers.
L e meilleur moyen de prélever le hareng d’une
prompte corruption , c’eft de le laver, le refaler,
le mettre en de bons barils avec le plus de couches
de fel qu’il eft poflible , & enfuite cercler & fermer
foigneufement les barils avant de les envoyer à bord
du navire ; l’on doit également veiller à ce que les
barils ne iouffrent pas de mauvais arrimage.
On peut fe promettre du bénéfice , & même un
grand bénéfice du ccftnmerce de l’Amérique, moyennant
qu’on le fafTe avec prudence & circonfpeâiion.
Cependant la fpéculation la mieux combinée peut
avoir un mauvais fuccès. Dans ce cas, le fpéculateur
doit-il fe rebuter ? Non : au contraire , il doit faire
un fécond & même un troifiéme effai avant de renoncer
à un commerce que quelques circonftances
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momentannées auroient rendu mauvais, fans qu'il le
fut par lui-même» Comme il y a des fpéculateurs
timides qui fe découragent dès qu'un premier eflai
leur a été malheureux, ou feulement peu favorable
, & qui perdent ainfi les profits qu’ils auroient
pu faire s’ils euflent continué leurs fpéculations j
d’une autre part il y en a d'autres q u i , plus avides*
ou moins prudens, forcent dans un article qui aura
bien rendu la première fois , fans prévoir que leur
gain même aur'a engagé plufîeurs autres fpéculateur»
à le faire dans le mêmè article-, dont la trop grande
abondance, comme en toute autre chofe , avilit le
p r ix , & doit néceffai rement caufer de la perte a a
fpéculateur qui s’y eft livré aveuglément, au lieu
du profit dont il s’étoit vainement flatté. Ces deux
extrémités font également à éviter dans tout com»
merce quelconque , fpécialement dans celui de l’A mérique
, où le meilleur moyen de bien réuflîr
dans fes entreprifes eft de n’en faire que de petites,
mais répétées & choifies. Au furplus , quelque foie
l ’article fur lequel on fe propofe de fpeculer, Feu»
doit mettre la plus -grande attention à prévoir les
circonftances qui en peuvent rendre la vente prompte
& favorable ; car il y a bien.des articles fujets à fe
gâter promptement à St. Euftache, >à caufe des grandes
chaleurs qui y régnent ordinairement, & ceux-ci
doivent y être vendus fur le champ , foit avec bénéfice
, foit avec perte. On conçoit aifément que ces
articles font principalement les falaifons : les farines
courent -auffi à peu près le même rifque ; mais i l
n’en eft pas ainfi des marchandifes feches, qui à h t
vérité font d’un débit plus lent & peut-être moins
avantageux que celui des provifions de bouche en
général, mais q u i, d’ün autre côté, rendent toujours
à l’habile fpéculateur , qui fçait's’en procurer
de bons affoïtimens de la première main, un bénéfice
honnête , capable de ,contenter fon ambition.
Nous devons à préfent placer de fuite les c.ompt-es
du coût d’une pacotille expédiée $ Amfterdam à St.
Euftache.; de la vente qui en fut faite d.ans cette
ifle ; de l’achat d’une partie de fucre & d’un autre de
café pour former les retours de la pacotille , & du
rendement que ces retours ont donné à Am f ie r dam.
Cela fuffira, ce nous femble , pour donner une idée
du commerce attuel de St. Euftache.
Comptes d ’achat de divers articles g u i ont formé une p acotille p o u r V ij ll de St. Eu/ lâch e ,
fça v o ir :
î° ° barils de farine de Ho lland e pefant,
Brut p7, y oo fc
Tare , 8,joo
—................. ... Net 8p,ooo ft. à-p fl. les io o ife fl. 8,oio
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