
les Gaules par leur négoce. L ’alliance des Romains
augmenta ce négoce, & l’on a long-temps regardé
la ville de L y o n , comme l’étape la plus célèbre &
le marché le plus fameux de l’empire Romain, &
où les marchandifes & les marchands fe trouvoient
en plus grande quantité.
L e commerce de la ville de L y o n eut le fort de
Rome fon alliée ; il tomba avec elle : mais plus
heureufo que la capitale du monde} L y o n ne fut pas
long-temps fans rétablir fon crédit & fon négoce, n’y
ayant guèrespréfentement d’endroits dans le monde
où l’on puifle porter le commerce , dans lefquels
fes habitans n’entretiennent des habitudes & des
relations.
C’eft aux Italiens que la ville de L y o n doit le
rétabliffement de fon commerce. Cette nation née
pour le n égo c e, & qui fe vante d’en avoir appris
aux autres nations toute la fineffe , profitant de la
langueur de celui des Lyonnois , vint d’abord le
partager avec eux x mais ayant dans la fuite obtenu
de grands privilèges , & ayant fait des profits im-
menfes , ils s’en emparèrent tout-à-faic. Ils devinrent
pour ainfi dire , les maîtres de la ville ; ils s’y
cantonnèrent par nation ; & on leur accorda même
la diftin&ion , de faire l’ouverture des paiemens en
foire , qui fe fait préfentement avec une grande céré- j
monie par les prévôt des marchands , & échevins de
la ville de L y o n , qu’on appelle auffi le canfulat.
On remarque que le droit d’ouvrir les paiemens ,
appartint long-temps aux Florentins ; qu’un Génois
l ’eut enfuite, & après lui un Piémontois : mais les
uns & les autres toujours avec commiffion du
grand duc.
Les Suifîès & les Allemans s’introduifîrent auffi
dans le commerce de la ville de L y o n , & y devinrent
prefque auffi puiffans que les Italiens : mais
les Lyonnois inftruits par ces diverfes nations, fe
fentant allez de forces, fe pafîerent enfin des uns 8c
des autres ; & les privilèges accordés aux étrangers ,
ayant été d’abord modérés., & enfuite fùpprimés ,
tout le négoce refta entre les mains des François,
qui en peu de temps le portèrent au point où i l eft
préfentement.
L e commerce de L y o n doit être- confidéré en
deux manières ; l’une par rapport aux pays avec
lefquels cette ville négocie ; & l’autre par rapport
aux différentes marchandifes qui entrent dans fon
négoce. L ’une & l’autre feront expliquées dans la
fuite.
Les nations étrangères , avec qui les marchands
de L y o n font le plus de commerce , font ; l’E'fpa-
gne , l ’Italie , les Suiflès, l’Allemagne , la H o llande
, l’Angleterre , les Génois & les marchands
de Marfeille , pour le Levant : enfin la Pologne.
On va entrer dans le détail.
Peu de marchands de L y on négocient directement
en Efpagne ' : le commerce qu’ils y ont , fe
fait pour la plus grande partie par l’entremife des
Italiens , fur-tout des Génois ; & par cette voie le
commerce des Lyonnois s’étend jufqu’aux Indes
Efpagnoles.
L a dorure, les draperies des Moindres qualités,
les toiles , les futaines , le fafran & le >apier, font
les marchandifes que Lyon envoyé en Efpagne.
Celles quon en tire , font des laines, des foies ,
des drogues pour la teinture, des piaftres & des lingots
d’or & d ardent.
On eftime qu il vient a Lyon cinq millions en or
& en argent ; mais il n’y en a guères que la
moitié , qui foit directement le retour des marchandifes
envoyées de Lyon en Efpagne ; l’autre
moitié y étant attirée de toutes parts, par le débit
qui s’y en trouve sûrement à la faveur de l’affinage.
Les marchandifes que la ville de Lyon envoie
en Italie qui la plupart fe fabriquent chez elle ,
montent, année commune, à fix à fept millions ;
& celles qu’elle en tire , au moins à dix millions.
Cette balance paroît d’abord défavantageùfe "aux
Lyonnois ; l’avantage du commerce reliant ordinairement
du côté de celui qui reçoit plus de retour
en argent : mais cette maxime, ne peut avoir lieu
en cette occafîon 5 les fabriques de Lyon• ayant
abfolument befoin des foies d’Italie & de l’argent
d’Efpagne, qui lui viennent par les Italiens à aflez
bon compte ; & qui étant mis en oeuvre par fes
manufacturiers, lui produifent un profit, qui la dédommage
bien de l’inégalité qu’il y a dans le nombre
des marchandifes qu’elle reçoit d’Italie , ou
qu elle y envoie.
L e commerce de Lyon avec les Suiffes , fe fait
principalement avec les villes de Zurich & de Saint-
G a i : il s’étend néanmoins jufqu’à Berne , à 'Balte, à
Schaffoufe & aux foires de Zurzach.
Toutes ces villes fourniffent à Lyon , des foies
& fleurettes fabriquées à Z u r ich , des toiles , des
fromages & des chevaux : elles en tirent en échange
beaucoup de draperies groffières' , des chapeaux,
du fàfran, des vins , des huiles , du favon , & de la
mercerie. On prétend que tout ce que Lyon fournit
à la Suiffe, ne va pas à un million de livres par
an ; & qu’au contraire, on en tire , année commune,
pour plus de quinze cent mille livres , en
toiles & en fromages; & pendant la gue rre, encore
un million en chevaux ; enforte que ce „commerce
paroîtroit plus onéreux qu’utile au royaume : mais
on fçait que ces anciens alliés de la France font
confidérés par des endroits plus importans, que celui
du négoce.
Dans le commerce que les Lyonnois entretiennent
avec plufîeurs des plus grandes villes d\Alle-
magne , ils y envoyent les mêmes marchandifes
qu’en Sùifle ; & encore des étoffes de foie or &
argent & beaucoup de dorures : on y fait même pafo
feir tout ce qu’il y a de plus beau dans cette efpeee ;
les Allemands fe piquant de goût & de magnificence
pour la pairure'.
Ce commerèe;iéff • tr-ès-avahtàgeux à Lyon ,• les
envois des Lyonnois, montant à plus de quinze cent
mille livre?; & les. retours ne montant pas au quart
Je cette Comme, en étain, en cuivre, en fer b lanc, |
& en quantité de mercerie.
Ontiroitautrefois de Nuremberg, beaucoup de
faux trait : mais les nouveaux droits d’entrée, qu on
a mis fur cette marchandife , en a fait tomber le négoce
, par rapport à la France.
I l faut remarquer , que les François vendent à
crédit & les Allemands toujours au comptant.
L e plus grand commerce que la ville de Lyon
faffe avec les Hollandois, confifte en remifes d argent
, & en négociations de lettres, de change. Sa
principale correlpondance à cet égard eft avec Amf-
terdam & Roterdam. Elle ne laiffe pas de tirer des
draps de Le yd en , & des toiles de Harlem.
Les marchandifes que Ton envoie de Lyon en
Hollande , ne montent pas à cinq cent mille livres,
en taffetas noirs, & en étoffes de fo ie , d’or & d’argent
; encore ces envois font-il$ bien diminués , depuis
qu’ils ont imité nos manufactures. On y envoie
auffi quelques fruits de Provence, & des graines de
jardin de Languedoc. ♦
On tient qu il fe tire de Hollande pour Lyon ,
deux fois plus de marchandifes qu’il ne s’y en envoie.
Lyon fait auffi un aflez grand commerce avec?
l ’Angleterre, particulièrement avec les villes de Londres,
d’Excefter & de Plimouth; avec Londres,
pour fes draps ; avec Excefter , pour fes ferges ; &
avec Plimouth , pour de l’étain & du plomb. On en
tire auffi des b a s , quelque mercerie, du poivre ,.
des drogues pour la teinture , comme noix de galle
&';bois de campêche ; & quelquefois des foies; mais
ce n’eft que quand toutes ces chofes manquent à
Marfeille.
Les envois de Lyon pour l’Angleterre, font des
taffetas luftrés , la plupart noirs ; des étoffes de
foie & des brocards d’or &. d’argent. L e commerce
des taffetas^y eft fi bon, que fouvent en une feule
foire de L y o n , il en fort pour plus de deux cent
mille écus.
Les marchandifes de Lyon pour l’Angleterre ,
. vont à trois millions de livres par an; & cellés d’Angleterre
pour L y o n , feulement à fept à huit cent
mille livres ; en forte que la balance de ce commerce
eft d’un quart contre trois quarts, que les
Anglois paient en argent, ou en lettres de change.
À l ’égard du commerce de Levant , que les
Lyonnois font par la voie de Marfeille ou de Gèn
es , on tient qu’ils y font intérefleS pour environ
quinze cent mille livres par année.,
Pour celui de Pologne , c’eft peu de chofe. Il
y a cependant une fociété de marchands de dorure
à L y o n , qui a' un magafin à Varfovie : mais les
étoffes qu’on y envoie, ne font que de médiocre
qualité.
L e commerce que la ville de Lyon fait dans l’intérieur
du royaume, n’eft pas moins confidérable
que celui qu’elle entretient au-dehors avec les étrangers
: mais fans entrer dans le détail, il foffira de
route la plus aifée , elle fort, pour ainfi dire, a réunir
remarquer, que cette ville fe trouvant par fa fitua-
tion prefque au milieu de la F ran c e, & dans la
le négoce des diverfes provinces , qui viennent
y aboutir; & qu’ainfi non-feulement elle envoie de
part & d’autre les marchandifes qui font comme de
fon c ru , & qui fe fabriquent dans fes manufactures
,* mais encore q u e lle enrichit fon commerce
de toutes celles qu’eue raflemble, & qu’elle tire
de quantité d’autres lieux ; enforte qu on y voit
fans celle paffer les huiles & les fruits fecs de Pro-
[ vence; les draps, les vins & les eaux-de-vie du Languedoc
; les faffrans de Guienne ; lés petites étoffes
de Champagne ; les toiles de Picardie, du Maine ,
de Normandie & de Bretagne ; les bleds de Bourgogne
, & les chapeaux de prefque toutes les manufactures
du royaume.
L ’on ne dit rien ici des quatre foires franches de
L y o n , non plus que des paiemens en foires, qui
rendent cette ville fi célèbre dans toute l’Europe , &
qui y attirent tant de marchands, q u i, pour ainfi-
dire , y viennent en refpeCter la police & les ufà-
ges. L ’on n’entre pas non plus dans le commerce
des foies , dont L y o n eft comme l’étape générale
par rapport d la France. Enfin, on omet tout c e
qui peut regarder l ’établiffement des bafins en F ra n ce
, qui ont commencé par L y o n ; le grand commerce
qui s’en faifoit, & la chute de ce commerce ,
pat rapport aux Lyonnois ; toutes ces matières devant
être traitées plus convenablement ailleurs.
C ’eft par la même raifon que l’on ne parlera pas
pareillement, ni de l’affinage de l’or & de l’argent,
qui fe fait à L y o n par quatre affûteurs du r o i , qui
y attire une fi grande quantité de ces riches matières
; ni du commerce de l’.or filé , qui s’y fabrique
mieux qu’en aucun lieu de l’Europe, & dont il fe fait
de fi grands envois, tant au-dedans du royaume, qu’au
dehors ; ni de la communauté & du trafic des tireurs
& efcacheurs d’or , qui font ce commerce.
E nfin, on fe contentera d’ajouter à ce qu’on a
dit jufqu’ici du commerce de L y o n , qu’on eftime
qu’il y entre environ pour onze millions de matière
s , tant foie, qu’or & argent , qui s’emploient
dans les manufactures de cette ville : que la préparation
de ces matières, & la façon des dïfférens ouvrages
qu’on en fabrique, montent à plus de trois
millions : que la vente qui s’en fa it , tant par les
marchands de L y o n , que ceux des autres villes du
royaume , qui les tirent d’eux , produit encore au-
delà de trois millions : & que dés dix-fept millions ,
& p lu s , qui compofent le total de ces trois forames
, les étrangers en paient bien environ le tiers ;
ce qui s’entend des temps de paix , & lorfque le
commerce fleurit dans le royaume.
C O M M E R C E D E L A G É N É R A L I T É
DE MO N T A U B A N .
Il fe,recueille danscettt. généralité chaque année,
depuis douze jufqu’à quinze cent quintaux de laines
de toutes qualités , qui avec beaucoup dé laines
\ étrangères, font emploiées en diverfes manufactures*