
E A U - D E - V J E. Liqueur fpiritueufe &
inflammable, qui fe tire du vin & d’autres liqueurs.
U eau-de-vie diftillée une fécondé fo is , s’appelle
efprit-de-vin • & refprit-de-vin purifié encore par
une ou plufîeurs autres diftillations , eft ce qu’on
nomme efprit-de-yin, rectifié.
Pour éprouver la bonté de l’elprit-de-yin reèrifié.
i l faut voir fi étant allumé, il fe cojifommé tout
entier , lans laifler aucune immondice5 ou , eéqui.eft
plus fur ;,;fî ayant mis un peu de poudre à canon au
fond de refprit-de-vin qu on éprouve , la poudre
s’enflamme, quand l’efprit eft confommé.
A l’égard de; Y eau-de-vie , ceux qui en font,
commerce, la choififlent blanche, claire & de,bon
goût ; & comme ils difent , d’épreuve, c’eft-à-dire ’
telle' qu’en la verfant dans un verre , il fe forme 1
une petite moufle blanphe, qui en diminuant falfe
le cercle , que les marchands d eau—de—vie appel-
lent le chapelet ; n’y .ayant que Veau-de-vie bien
déflegmée & où il ne relie point trop d’humidité
à qui-le chapelet fe-forme entièrement.
Il fe diftiile' en France des eaux-de-vie partout
où il fe recueille des vins J & on y employé
également du vin pouffé , ou du vin de bonne
qualité. ' -
Le s eaux-de-vie q u i ‘ fervent au commerce avec •
les étrangers , &. que,les Hollandois, fur-tout yien-
nent enlever en très-grande quantité , font celles
de Bordeaux , la Rochelle , Cognac , Charente ,
l ’ifle de. Rhé , Orléans, le pays Blëfois , le Poitou \ ■
la Touraine , l’Anjou , Nantes la Bourgogne &
Champagne.
s II fe fait aufli des. eaux-de-vie en Provence * qui
s’y vendent au quintal.
De toutes les eaux-de-vie Françoifes , celles de
Nantes & de Poitou, qui font de fémblable qualité,
font les plus eftimées , parce quelles font.d’un I
meilleur g o û t , qu’elles font plus fines., plus vigou- ■
reufes, & qu’elles confervent plus long-temps l’épreu- 1
ve du chapelet. Ce font de celles-là dont il va plus j
'grande- quantité à l’étranger.
Le s eaux-de-vie d’Anjou , de Touraine , d’Orléans
, &c. particulièrement celle'- d’Anjou', s’en-
voyent plus ordinairement à Paris & en Flandres
par la rivière de Loire. Elles ne font pas de fi bonne,
qualité que les Poitevines & les Nantoifes, quoiqu’elles
foient auflï très-bonnes.
Ce font les marchands épiciers-droguîftes , qui
font à Paris le plus grand commerce u eau-de-vie
foit en gros , foit en détail. Quelques marchands
merciers , aufiï-bien que les limonadiers les vinaigriers
& les diflillateurs d’eaux-fortes 8c eaux- ,
de^vie , eh font aufli quelque négocë ; & les maîtres
de ces deux dernières communautés , ont droit d’en
brûler , & d’avoir chez eux tous les uftenfiles ,
chaudières, alambics & autres vaifleaux , foit de
cuivre , de t-efre , ou de verre , propres à cette
aiftillation. Il eft -au contraire défendu à tous caba-
retiers , taverniers, & autres vendans vins en détail,,
d en djftiller, ni .même de tebir chez èux aucuns vaif-
feaux diftillatoires.
Outre les deux corps de la mercerie & de l’épicerie..,
& ces trois communautés des arts & métiers
qui ont droit par leurs ftatuts de faire à Paris le
commerce des eaux-de-vie , il y a encore quantité
de pauvres gens de l’un & de l ’autre fexe , qui y
fubfiftent par le détail qu’ils en font. Ils fe nomment
vendeurs & vendeufes S eau-de-vie. Ce- font
des efpèces ,de , regrattiers , mais fans lettres , qui
chaque jour dès le matin , & lorfque les boutiques
.commencent a s’ouvrir , & .que les manoeuvres
& artifans vont & fe mettent au travail , ëta-
bliflent ces petites boutiques aux coins des ru e s ,
oir parcourent la ville , en portant tout, le cabaret.,
bouteilles , verres 8c mefures , dans une petite
manne pendue a leur col. Ce font les femmes qui
font, fédentaires , les hommes qui vont criant leur
marchandife.
• Ç1? aPPeflequelquefois Yeau-de-vie , brand'evin; ihais ce terme n’eu guères peuple 8c le foldat. en ufage que parmi le
Les vaifleaux, ou futailles, dans lèfquels fe met-
tént & fe tranfportent les eaux-de-vie de France ,
ont différens noms , fuivant les différences provinces
où elles fe font & d’où on les tire. Les plus
communs font les bariques , les pipes, les tonnes,
tonneaux , & les poinçons.
I l y aufli des baricauts j -mais ces derniers font
petits j & ne fervent guères que pour une efpèce
de detail d eau-de-vie, qui, fe fait dans le dedans-
du royaume-, particulièrement pour des préfens-
ôu des provifions bourgeoifes.
Les eaux-de-vie, qui fe tirent du pays Blefoi's
font en poinçons; celles d’Anjou,Poitou & Nantes.,
en pipes & en tonneaux ; & celles de Bordeaux ,
Cogna c, la Rochelle , l’ifle de Rh é , & autres lieux
circonvoifins ,, en bariques;
Quoique la barique foit en plufieurs lieux véritablement
une futaille d’une certaine continence, &
d un jaugeage réglé , on la peut néanmoins .regarder
dans 1e commerce des eaux-de-vie , fur le pied
d une mefure dévaluation , qui fert à déterminer
les achats qu’en font les étrangers.
Cett.e barique/ d’évaluation n’efl pas égale par«
tou t , & contient plus ou moins de veltes , ou verges
, fuivant les lieux. A Nantes l’on donne zp
veltes pour la barique ; à la Rochelle, Cognac &
l ’ifle de Rhé , 2,7 ; & à Bordeaux, 3Z ; ce qui doit
s’entendre , que fi la futaille contient moins que le
nombre de's veltes, fur lefquelles l’acheteur fait fon
marché , le vendeur lui tient compte, de ce qui manque
fur le pied de l’achat ; 8c que fi au contraire
il y a de l’excédent, comme il arrive prefque toujours
, y ayant des p ip es, des poinçons^. des tonneaux
& des bariques, depuis ço jufqu’à 60 veltes,
c’eft à l’acheteur a en tenir compte au Vendeur ;
enforte que fi la p ip e , vendue à Bordeaux , où la
barique d’évaluation efi^ fur le pied de 3 z veltes,
en contient 48 , l’acheteur la payé pour une bariÎ[
ue & demie ; & ainfi à proportion dans les autres
ieux.
La‘ velte , fur quoi s’évalue la barique , contient
trois pots ; le. pot deux pintes ; & la pinte pèfe un
peu moins de deux livres & demie. Quelques-uns
eftiment- la velte fur le pied de quatre pots : mais
apparemment ils fe trompent, ou le pot fur lequel
ils mefurent la velte ,8 éft moindre que de deux
pintes.
Il faut remarquer que les pièces d’eau-de-vie ,
comme on vient de le dire, n’étant pas bornées à
contenir un nombre de veltes limité ; & le veltage
( c ’eft ce qu’on appelle ailleurs jau gea ge ) des
pip es , poinçons & tonneaux I étant depuis ço juf-
qu’à po veltes , ce qui eft au-deflùs de 50 veltes ,
s appelle 'excès , que les commis des bureaux établis
fur les ports où le vin s’embarque , font payer
à raifon de tant par veltes , outre les droits de
forties des 50 verges/-, qui eft le pied ordinaire du
tarif pour chaque, barique.
L a barique a Amftèrdam & dans les autres villes
de Hollande, s’évalue à peu près comme en France,
& prefque fur le pied de la barique de Nantes ,
c ’eft-à-dire , qu’elle contient trente viertclles , chaque
vierteîle de fix mingles, & le mingle pefant deux
livres un quart.
Les eàux-de-vie de France fe vendent à Âmfter-
dam par livres de gros , plus ou moins , fuivant
leur qualité, avec un pour cent de remife , fi c’eft
argent comptant. Celles qui font de trois quints , ou
de trois cinquièmes, & que les Hollandois appellent
V e r lô o p t, fè vendent deux tiers plus que les
communes. A l’égard du courtage, il fe paye ordinairement
fur le pied de j z fi par^pièce , moitié
par l’acheteur 8c moitié par le vendeur. Qn ne dit
point ici ce que c’ eft que de vendre de- Veau-de-vie
au baflin, on en parlera, à l’article des vins de France,
qui fe vendent à Amftèrdam.
Les marchands de la Rochelle , de Nantes, de
Rouen , &c. tranfportent eux - mêmes une aflez
, grande quantité de leurs eaux-dé-vie, dans les pays
etrangers : & il ne s’y fait point de chargement ,
particulièrement pour les ifles Françoifes, le Canada,
Cayenne , les côtes d’Afrique & les pays du Nord,
que 1 eau-de-vie de France ne faflè une partie de
la cargaifon : cependant ce commerce n’eft rien en
comparaifon de celui qui fè fait avec les étrangers
qui viennent les qu'érir dans ces mêmes ports & fur-
tout à Bordeaux.
L e nombre des vaifleaux étrangers, qui arrivent
en temps de paix dans tous ces ports & qui s’y
chargent en partie d'eau-de-vie , eft prefque incroyable
: on y en voit de toutes les parties de
l’Europe. Nantes leur en fournit près de fept à huit
mille bariques ; Bordeaux au-delà du double de
Nantes ; les autres lieux à proportion.
Ceux des étrangers qui en enlèvent le p lu s , font
les Anglois , les Ecoflois, les Irlandois , les H o llandois
, les Flamans & les Hambourgeois ; mais il
eft certain que les Hollandois tous feuls en font
prefque autant de lev ées, que tous les autres en-
fembie ; non-fèulement pour leur propre confom-
mation , qui eft tr'ès-confidérable , mais encore pour
en faire commerce dans tous les états de l ’Europe
& dans l’Amérique.
En temps de guerre entre la France, l’Angleterre
8c la Hollande ; les Danois , s’ils font en
neutralité, & quelquefois aufli les Suédois , fe' joignent
aux Hambourgeois , & font avec eux le commerce,
des eaux-de-vie , dont ces peuples fè paflènt
difficilement.
Hambourg ën confommé feule plus de 4,000 bariques
; Lubeck , environ 400 ; Konifberg, feulement
100; la Norwùge., plus de'300 ; Riga , Revel,
Neirva, de même qu’à Konifberg ; leDanemarck,
plus que Lubeck : à Archangel , fuivant qu’il eft
permis d’y en porter , y ayant quelquefois des dé-
fenfes générales & fevères'd’y en vendre , ni d’y en
acheter : à Dantzick peu, & qui encore n’eft bonne
que pour la Prufle.
On ne met point la Pologne & la Suède au nombre
des pays du N o rd , où il fe confommç des eau x\
de- vie de France : non pas que ces peuples foient
plus réfervés que les autres fur cette brûlante
boiflon ; mais parce que préférant les eaux-de-vie
de grains aux eaux-de-vie de vin , ils ont chez
eux de quoi en faire de celles qui font le plus à leur
g o û t , 8c qui leur coûtent beaucoup moins , que ne
reroient celles de France- : aufli à peine faut-il cent
bariques d*eau-de-vie de France pour la provifion
de Stockholm.
« Les droits d’entrée en France pour les ea u x -
» de-vie , réglés par le tarif de 16 64 , ne font que
»’ de zç fi par barique, & les droits de for tie, de
» 3 1. aufli par barique ; à la réferve néanmoins ae
» celles qui fortent par l’Anjou , Thouars , le
» Maine, & la Châtellenie de Chantonceaux , qui
» payent i z 1.
, » A l’égard de la douane de Lyon , ces droits
I » font de 1 6 fi le quintal.
» L ’ordonnance des aides de 1680 , art. 1 & 2
» du titre des droits fur Y eau-de-vie , règle ceux
» qui doivent être levés à l’entrée de la ville &
» fauxbourgs de Paris, à 45 1. par muid , mefure de
» Paris, foit que lle y arrive par ea u , foit qu’elle