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Une autre branche du commerce, font les bestiaux,
tant boeufs & vaches, que moutons & chevaux.
L ’on comptoit, avant le traité d’Utrecht, que
dans les feules châtellenies Sujettes à la Fran c e ,
( c e qui fe juftifioic par les regiftres du Vaclage) il
y avoit, année commune, de quatre-vingt-huit à
quatre-vingt-dix mille boeufs , ou vaches , au-deflus
de deux ans, & de trente-neuf à quarante mille
moutons. A l’égard des chevaux, il n’y a point de
haras ; mais le payfan y élève beaucoup de poulains
, de ceux qui naifïent chez eux, ou qu’ils font
venir de dehors , & ce négoce eft confidérable.
I l y a aufïi quantité de diverfes manufactures.
Celle des draps fins , autrefois fi floriflânte par toute
la province , & q u i , fi on en croit la tradition, y
occupoit jufqu’à quatre mille métiers , ne fe Soutient
plus guères qu’à Yp res , B a i lle u l & Porperingue.
La^teinture en écarlate eft très-belle dans la première
de ces trois ville s , & l’on y fait aulïï, de
même qu’à Honfcotte & quelques autres lie u x , des
ferges ou fàyettes très-eftimées.
Les tanneries d’ Y p re s le font pareillement beaucoup
: on y prépare non-feulement les cuirs verds
du p a y s , mais encore ceux qu’on y apporte en
quantité d’Angleterre & d’Irlande.
Les toiles de toute forte, foie pleines , Soit ouvrées
, Soit de petite Venife & damaffées, pour l ’u-
làge de la table , fe fabriquent en grand nombre
dans tout le plat pays , où le laboureur prend ordinairement
la navette au retour de la cfiarue.
I l s’y fait aufïi beaucoup de fils de toute finéfle
& de toute qualité ; les femmes & les filles n’étant,
guères fans le rouet devant elles , ou la quenouille
au côté. I l s’en envoie quantité à l’étranger, partie
en écrù, partie blanchis, outre la Conïommation
de la province.
Les blanchifîeries de B a i l le u l , font les plus en
réputation pour le blanchiflàge des fils ; mais il y
en a encore plufieurs pour les toiles, dont le blanchiment
n’eft pas moins eftimé.
Les manufactures de dentelles façon d’Angleterre
, & celles que l’on appelle de B ru xe lles &
de Matine s , y fleurirent en plufieurs endroits ; &
c’eft de cette province que vient à Paris la plupart
de celles qui y panent pour véritables dentelles d’A ngleterre
& de Malines.
L e ïavon noir & blan c , les poteries de toute
efpèce & les pipes à tabac , font encore des fabriques
du pays , q u i , quoiqu’en apparence peu importantes
, ne laiffent pas d’y entretenir un bon négoce
, par la grande quantité qu’ il s’y en fait , qu’il
s’y en confomme & qu’il en fort.
Il y a à Y p r e s , Dunkerque & M e rv ille , des
raffinages des fels gris de France. Non-feulement
les ràffineurs les rendent extrêmement blancs, mais,
quoiqu’ils les faffent difioudre & bouillir dans l’eau,
ils'fçavent leur conferver leur grain 5 & c’eft en
quoi 'confifte tout le fin de cette fabrique. Ypres & Dunkerque ont aufïi des raffinages de
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fucres, où fe raffinent les fiucres bruts, qui Ieuif
viennent dés Ifles de l’Amérique;
Malgré tous les changemens qui font arrivés à
Dunkerque depuis le-traité d’U trech t, & quoiqu’il
femble qu’il ne lui foit plus refté que fon nom ,
avec fon ancienne réputation d’avoir fourni à la
France les plus hardis & les plus braves armateurs
dans le* temps de guerre , & de très-habiles & de
très-heureux négociais pour le commerce de mer
pendant la paix ; on ne laiflera pas de parler ici
en particulier du négoce d’une ville fi célébré, autant
pour en conferver le fouvenir, que parce que
j fes habitans , qui ne font plus capables d’infpirer
| ni crainte , ni jaloufie à leurs voifins , ne laiffent
pas de faire toujours avec eux & avec les nations
les plus éloignées , un négoce qui n’eft pas méprila-
ble, & qui fans avoir toute l’étendue & tout f’éclac
d’autrefois, a plus de tranquillité & de fureté.
Commerce de B ru xe lles & autres villes de Flandres.
& du B ra b a n t .
AN V E R S . V ille de B r a b a n t , capitale de cette
partie des Pays-Bas, qu’on nomme le marquifat du
Saint-Empire.
Quoique le commerce de cette ville foit toujours
très - confidérable, il eft cependant certain qu’il n’eft
a peine que l’ombre de celui qui y floiiffoit autrefois.
L a fuperbe & fameufe maifon des Ofterlins
ou Ofterlingues, comme d’autres l ’appellent, eft une
marque de l’étendue de ce commerce ; .& les vaftes
magafins qu’on y voit, peut-être les. plus grands
qu’il y ait au monde, où chaque nation mettoit en
dépôt fes marchandifes, & qui fervent encore à‘ cet
ufage, feront un témoignage,éternel de la grandeur
d’un négoce , qui partagé entre Amfterdam, Roter-
dam & les autres villes les plus marchandes des fept
Provinces-Unies, fuffit encore pour les enrichir toutes
& leur donner la réputation de faire le plus grand
commerce de l’Europe.
I l fe tient à Anvers diverfes foires franches, qui
y attirent des marchands de toutes les parties du
monde. Les principales de ces foires font- celle de
la Pentecôte & celle d’entre la Saint-Remi & la Saint-
Bavon.
Les blanchiries établies au? environs de la v ille ,
font très-eftimées , & la prévention où l’on eft, que
les eaux de la petite rivière de Schenidt, font plus
propres qu’aucune autre pour le blanchiment des
toiles, eft caufe qu’on y envoie des cantons les
plus éloignés des Pays-Bas Autrichiens.
Les manufactures de tapifferies de hauteliffe y
font en réputation ; elles fe vendent fous une efpèce
de grande halle couverte, que de - là on nomme
tapifferies p an s .
On y Continue aufïi d’y exceller en imprimerie,
& quoiqu’il foit certain qu’elle a beaucoup dégénéré
depuis le fameux Plantm , qui avoit pouffé cet
art prefque à fa perfection, il eft toujours vrai que
les libraires S A n ver s pe. font pas indignes ’d’avoir
1 fuçcéçîé à un fi grand homme. ’
La
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L a principale de toutes les manufactures qui font
établies à Anvers , & qui en fondent davantage le
commerce, eft celle des dentelles de f i l , qui font
connues en France fous le nom de dentelles de
Matines, & il n’eft pas poffible de s’imaginer combien
la France & la Hollande en enlèvent tous les
ans, auffi-bien que des fils de toutes fortes , dont le
filage eft excellent dans cette ville & aux environs.
Les marchandifes que les étrangers y envoient,
fur-tout les François & les Hollandois,' & qui font
du meilleur débit, font :
Toutes fortes d’étoffes d’or , d’argent & de foie.
Des draps & étoffes de laine.
Des épiceries.
Des potaffes & vedafïès.
Des vins & des eaux-de-vie.
Des fels de France, d’Efpagne & de Portugal.
Du hareng & du ftockvis.
Des huiles d’olives, de baleine & de graines.
• Des toiles peintes & de moufîelines.
Des fucres foit rafinés, foit en cafïonade.
Il y a deux fortes de monnoies tant à Anvers que
dans tout le Brabant Se. la Flandre, ou plutôt c’eft
la même à laquelle on donne deux différentes valeurs.
L ’une eft celle que l ’on appelle argent de
change : & l’autre, celle à qui l’on donne le nom
j. D . d argent courant.
Suivant cette divifion, le patagon ou-richedale
vaut 8. fchellings ou 48 fols argent de change, & 7
argent courant.Enfin une livre de gros de fix florins
argent de change, fait 7 florins argent courant : de
forte qu’il faut 116 florins f ou 1 \6 livres de gros y
d’argent courant, pour faire- 100 florins ou 100 livres
de gros argent de change.
Les écritures mercantilles fe tiennent à. Anvers en
livres , fols & deniers de gros. L a livre de gros de
20. fols de gros ou fchellings , & le fol de gros de
42 deniers de gros.
L a livre d’Anvers eft plus foible que celle de
Paris & d’Amfterdam, d’environ 5 pour 100; en
forte qu’ il faut too livres d’Anvers pour pç livres
de ces deux villes; & que 100 livres de ces deux
villes en font 105 S Anvers.
A l’égard de l ’aunage , cent aunes S Anvers en
font 101 d’Amfterdam, & 100 aunes d’Amfterdam,
p 8 aunes - S Anvers.
On tire d’Amfterdam fur A n v e r s , & S Anvers
fur Amfterdam , par livres de gros & par florins,
ordinairement à cours jours, & quelquefois à un ôu
à-deux mois de date. L e change y eft allez fouvent
au pair , mais plus fouvent encore de deux à quatre
pour,cent de perte pour Anvers. Bruxelles. V ille capitale des P a y s -B a s A u -
trichiens. Le commerce de B r u x e lle s eft à peu
près fur le même pied que celui d’Anvers, foit pour
fes manufactures & les marchandifes qu’on en tire,
foit pour celles dont elle a befoin, & qu’on lui envoie
de l’étranger. L es monnoies & les poids de'ces
deux villes font aufli fêmblables.
Commerce. Tome I I . P a r t . 1'.
F R A 445*
A l’égard de faun e , elle y eft un peu plus fort®
que celle d’A n v ers, en forte que 100 aunes de
Bruxe lle s font pp aunes d d’Amfterdam , & io®
aunes d’Amfterdam , ic o aunes \ de Bru x e lle s .
Il fe fait peu de change entre B ru x e lle s & Amfterdam.
Voye\ ci-dejfus ce qu oh a dit . du commerce
d’Anvers.
L e port de B ru x e lle s eft toujours' rempli de
quantité de divers bâtimens qui y apportent les mar-
, chandifes, foit du côté de la t'erre , foit du côcé de
1 la m e r , par le moyen des canaux qui y aboutif-
1 ïent, particulièrement les deux que forme la Sinne.
On roit fur-tout quantité de barques de Hollande
& de Zelande, qui entretiennent le commerce de
ces deux riches provinces.
Malines. V ille du B r a b a n t , célèbre par la
beauté de fes dentelles & la fineffe du filage de fes
fils. I l y a peu de différence entre fon commerce &
celui d’Anvers, même mefure, même poids , même
monnoie. ' Voye-{ comme dejjus.
Ses manufactures de cuirs dorés font les plus efti-
mées de celles de Flandres , qui l’ont toujours emporté
fur toutes les autres, qui font établies dans
le refte de l’Europe. C ’eft aufli un des plus confi-
dérables objets de négoce , & l’on ne peut dire
combien les étrangers en enlèvent chaque année.
G a n d .-Capitale du comté de Flandre s, eft la ville
la plus grande des Pays-Bas„ & ue lé cède guères
a la plupart des plus grofles villes de l’Europe. Sa
fituation eft très-commode pour le commerce, à
caufe de la quantité de canaux qui s’y rendent de
tous les côtés de la Flandre ,-du Brabant, de la Z e lande
& de la mer.
Les principales marchandifes qu’on en tire, font
des grains , du lin , du chanvre & du colzat ou
graine de chou pour faire de l’huile. L e négoce de
cette dernière marchandife eft très-confidérable, &
eft d’un très-grand profit pour cette .ville.
Ses fils & tes dentelles approchent de la beauté
de celles de Malines, & fe vendent fous leur nom;
il y a aufli diverfes fabriques de toiles & un aflez
crrand nombre de manufactures de petites étoffes de
laine. ’
Les marchandifes qui font propres pour cette
ville , font les mêmes que pour Anvers. V oy e^ ci-
, dejfus. - ^
On change d’Amfterdam fur G an d à | ou à u»
pour cent de plus de perte que fur Anvers.
Ses mefures, fes poids & fes monnoies, ne font
point différentes de celles de cette dernière ville.
G an d eft une des trois villes des Pays-Bas de la
domination de la maifon d’Autriche , où les directeurs
de la nouvelle compagnie d’Oftende , doivent
réfider de trois ans en trois ans. .
Bruges. Cette ville eft une des plus marchandes
de tous les P a y s -B a s Autrichiens ; aufli cft-elle
avec Oftende & Gand, une des villes deftinées à la
réfidence des directeurs de la compagnie impériale
des Indes orientales.
, L a proximité d’Oftende & la commodité des ca