
'une proportion politique, fi j ofe me fervir de ce
Jerme ; & l’on s’en convaincra facilement, lorlque
'on prendra la peine de comparer avec attention ,
i ° . les différentes dalles cntr elles ; i°* dans chaque
claffe le mri/'d’importation& letarifd'exportation;
3°. relativement à Timportation ou à l'exportation ,
les différentes marchandifes qu'on y a tarlffeesj 40. par
rapport à chaque efpèce de marchandifes en particulier
, les confidérations qui leur ont fait afïigner
une place dans telle ou telle claffe.
I l faut néanmoins convenir que tous ces avantages
ne feroient pas difparoître tous les inconvéniens ,
fi la lo i nétoit pas la même pour toutes les pro vinces
du royaume.
L ’uniformité feule peut aïïurer la juftice & la
tranquillité. Une province menagee feroit^la route
unique de la marchandife favorilée ; & c eft pour
cela que le ta r i f eft uniforme pour toute la nation*
C ’eft à quoi M. Colbert lui-même ayant
trouvé des obftaeles lors du^ t a r i f de i6 6 q } vouloir
amener infenfiblement, par le t a r i f de 16 6 j , Sç,
par les réglemens de droits uniformes intervenus
depuis. Quelques privilèges particuliers pour les
ports francs, que l’on jugeroit à propos de conferver
, ne détruiroient point le caractère effentiel
d’uniformité , qui confîfte moins a faire payer partout
le droit, qu’ à l’exiger par-tout ou on le paie
dans le même e fp r it , fur le même pied , fur les
mêmes objets & dans la même forme.
Enfin le nouveau ta r i f eft g én é ra l, c eft-à-dire
qu’il doit avoir lieu dans tout le royaume, fauf
quelques exceptions pour les villes franches ; exceptions
qui dans le fond j ne dérangent rien ,a,ux
principes de l’univerfali té.
U n t a r i f eft uniforme fans être général ^ lorfque,
{ans avoir lieu par-tout, il a feulement l’avantage
d’être le même pour^ous les endroits dans lefquels
i l a lieu. Il devient général non-feulement lorfqu’il
eft établi pour toute* une domination, mais encore
lorfqu’il ne reçoit dans aucun endroit aucunes variations
, ni aucunes interprétations, & qu’il fup-
prime l’ inconvénient de rencontrer à chaque pas de
nouveaux droits, de nouvelles formalités, de nouvelles
régies, & par conféquent de nouveaux fujets
de conteftation.
A v ec toutes ces qualités, réunies , il n’eft pas
difficile de fe convaincre que le nouveau ta r i f n’eft
point une loi burfale, mais un réglement avantageux
pour le commerce & formé de concert avec lui.
Nous venons de dire que ce t a r i f , quoique
général, fouffriroic quelques exceptions; & nous
avions prévu dans le fécond chapitre, les caufès de
ces exceptions, Lanéceffité de conferver le bénéfice
du commerce de 'l ’étranger à l’étranger, par entrepôts
dans le royaume, exige {’établiflement des
entrepôts généraux ou des ports francs t ils ont
même exifté enfemble ; mais depuis que les entrepôts
généraux ont été détruits > les villes & les ports
Francs, tels que Strafbourg, Dunkerque, Bayonne
8c Marfcille . ont joui des différens degrés de franchife
qui leur ont été confervés encore moins en
vertu des privilèges qui leur avoienc été accordés ou
confervés, qu’en conféquence des raifôns du bien
général de 1 état : motif bien légitime de la con-
ceffion ou de la confervation de ces privilèges, qui
ne font rien moins qu’exorbitans.
Ces villes franches auroient raifon de fe plaindre,
fi le nouveau t a r i f donnait atteinte\à leur franchife :
mais il eft trop travaillé dans l ’intérêt du commerce,
pour ne pas la refpeéter. Ces quatre villes fîtuées
précifément aux quatre coins du royaume, & dans
les lieux qui répondent aux principales branches de
notre commerce & de notre navigation, paroiffeut
devoir être maintenues dans leur franchife, pour
continuer à être le magafîn général de toutes lortes
! de marchandifes, & procurer à .tous les négocions
du royaume la facilité de faire le commerce de
l’étranger à l’étranger dans des lieux neutres, pour
ainfi dire , où la marchandife étrangère n’a pas pu
fe naturalifer Françoife, au moyen de la barrière
qui doir les féparer du royaume , & q u i, fans gêner
leur liberté, les empêche au moins a en abtifer.
Mais çette barrière paroît néceffaire : il paroîc
jufte & prefqu’ indilpenlable que lés marchandifes
tranfportées de ces villes dans l'enceinte du nouveau
t a r i f , ou qui fortiront de «ette enceinte pour être
tranfportées dans ces villes , acquittent les droits du
nouveau ta r i f \ comme celles qui paffent à l’étranger
, ou qui en viennent. -
I l n’eft pas difficile de prévoir que ces villes fe
plaindront de la rigueur apparente de ce traitement :
elles repréfenteront qu’habitées par les fujets du
même fouverain , elles doivent, pour l’acquifition
de leurs befoins & le débouché de leurs fabriques,
être admifes à jouir de l’avantage d’ une libre circulation
avec les autres provinces du royaume.
Mais on ne fàuroit jouir en même temps d’une
communication également libre avec le royaume Sç
avec l’étranger ; il eft ajfé de concevoir quels en
feroient les inconvéniens, tant à l’entrée qu’a la
fortie. A la faveur de certificats qu’on fe procure
fouvent fans beaucoup de peine, ori introduiroit
comme originaire dans l’enceinte du t a r i f , des
marchandifes étrangères en fraude des droits établis
en faveur de nos manufaébures & de nos fabriques;
on feroic fortir de l’intérieur , des matières premières
que le droit du t a r i f y retient ; quand elles feroient
arrivées dans un lieu de franchife , rien ne pourroit
plus ,en empêcher le transport à l’etranger, & les
vues les plus utiles du ta r i f feroient éludées.
L ’état de ces villes eft d’être commerçantes , &
non pas fabriquantes : fi quelques-unes d’entr’elles
ont des fabriques, leur communication libre &
franche avec l’étranger leur en offre le débouché ;
elles peuvent fe procurer les matières premières
par là même voie ; & cette liberté eft incompatible
avec la libre & franche communication avec le refte
du royaume , qui leur eft fermé par la barrière du
ta r if. T e l ëft le droit étroit & la feule façon de
cendre une-jufticç & d’accordçr une proteftion égales
5 tous les fujets du même fouverain. Nous avons cependant
prévu dans notre fécond chapitre, un moyen
de conciliation d’autant plus doux , qu’il ne touche
point à la liberté de ces villes qui en font l’ufàge
le plus complet, en choififTanç le fort qui leur
paroîtra le plus avantageux.
Pour développer encore mieux cette id ée, prenons
Marfeille pour exemple. Çette ville a des fabriques
d’étoffes de fo ie , de chapeaux , de favon
Sc des rafineries de fucre. Veut-elle faire entrer dans
le royaume en exemption’ de droits les ouvrages
-de ces fabriques, il n’y a qu’à affùjettir à l’entrée de
ces villes les ouvrages de pareille efpèce de fabrique
étrangère, & les matières premières qui les cora-
pofent, aux droits établis par le ta r i fa la frontière
extrême, & de même leur permettre de tiret librement
& en franchife de l’intérieur, les foies , les
poils, les lin s , les chanvres, les-huiles, & généralement
tous les objets qu’ils demanderont, pourvu
que ces mêmes objets foient affujettis aux droits de
{ortie du ta r i f , en paffant de cette ville à l’étranger.
En un mot, tout ce qui feroit libre en venant de
l ’étranger à Marfeille , ou en fortant de ■ Marfeille
À l’étranger, acquitteroit les droits d’entrée & de
fortie dans la communication de Marfeille avec le
royaume, aux bureaux de l’enceinte du tarif.; & ,
par le même p r in c ip e to u t ce qui feroic libre
dans la communication de Marfeille avec le royaume,
acquitteroit les droits de traites dans la communication
de Marfcille avec l’étranger. C ’eft peut-être
le feul moyen de conferver à ces villes l’ufa’ge entier
fie leur liberté, fans bleffer ni compromettre les intérêts
du commerce & de l’ état.
Marfeille n’ eft ic i préfenté que pour exemple ;
.& les mêmes principes décident le même fort pour
Dunkerque, Bayonne & Strafbourg : elles ne peuvent
jamais s’en plaindre, puifque c’eft à elles à le
déterminer.
Inutilement voudroient-elles oppofer l’intérêt de
leurs fabriques. En effet, ou les fabriques c établies ;
dans? ces villes, formeront un objet important &
confîdérable\, ou le produit, de: leurs .ouvrages
fera médiocre : dans ce dernier'cas, ce ne feroit
-qu’un vain prétexte un mafque pour introduire
dans le royaume les marchandifes.étrangères
en exemption de droits au préjudice de l’état; &
c e ft l’abus le plus dangereux auquel on a voulu
s’oppofer par le tarif.
. Dans le premier cas , leurs manufaétures ont les
mêmes befoins que les maiiu factures dm royaume ,
foit pour gêner l’introduérion des marchandifes
étrangères , foit pour la confervation des matières
premières nationales.
Enfin , fi’ çette idée eft adoptée , ce n’eft point une
loi qu’on impofe aux villes franches , c’eft un arrangement
qu’on leur 'permet de faire: elles - mêmes
pour leur plus grand bien : maîtreffes de 'choifir la
tégle qu’elles fe propoferont de fuivre , il - n’eft pas
,jufte que l e . rrefie du. royaume foit faerrfié à leurs
Intérêts perfqnnels o.u à leurs caprices ; fi elles
. (sommej ce. Tome I I . Part* I l %
optent pour conferver leur liberté avec l ’étranger
dans toute l ’étendue qu’elles en jouiffent , il parois
indifpenfàble que ce qu’elles voudront introduire
dans l’intérieur , ou ce qu’elles voudront en tirer ,
foit traité comme s’il venoit effectivement de l’ étranger
, ou qu’ il y fut tranfporté.
Nous ne parlerons ici des tranfics , que pour ne
rien oublier d’éffentiel ; le nouveau ta r i f n’y déroge
point ; & les faveurs que le- gouvernement a répandues
fur le commerce depuis zo ans , lui font
un sur garant qu’on étendra fa liberté , plutôt que
de la reftreindre. C’eft à lui-même à connoître fes
véritables intérêts , à contenir ceux qu’une avidité
condamnable conduit fouvent par des voies blâmables
à' une fortune précipitée à les chafler des
bourfes comme des faillis, & à les retrancher d’un
corps dont Ta candeur & la bonne foi font tout le
luftre , & qui ne doit faire’ fou bien particulier- ,
qu’en travaillant utilement au bien général du commerce
& de l’état.
I l eft inutile d’en dire davantage fur le nouveau,
projet de ta r i f II eft utile , s’il eft bien fa it; il
paroît raflêmbler toutes les qualités néceffaires pour
produire tout l’avantage qu’on en peut efpérer ; il
remédie , autant qu’il eft poffible , aux inconvéniens
accumulés' de l’état aétuel; toutes ces difpofîtioris
font pour le plus grand bien du commerce , & concertées
avec lui.
I l ne feroit pas jufte qu’une opération fi intéref*
fante pour le commerce me fût pas difeutée avec
ceux qui , par état, en conrioiflent les détails , &
doivent en ftipuler les intérêts : mais , en fuppofant
tous les éclairciflemens hécefîàires fuffifàmment pris,
tous les avis recueillis & conciliés , toute idée de
burfalité eft certainement bannie ; & il ne feroit ni
jufte: ni raifonnable que des intérêts perfonnels ou
des préjugés particuliers empêchaffent de recueillir
le fruit d’une opération faite pour devenir utile £
.toute la nation.
| : ; C h a p i t r e V.
D e s ob fidèles qui peuvent s ’oppofer à Vexécution
’ du tarif, &' des moyens de les lever.
Si ce que nous avons dit jufqu’à préfent eft prouvé ,
fi l’utilité des ta r ifs en général a été encore plus
démontrée par les principes qui ont établi avec
quelque détail les qualités eflentiellement nécef*
{aires à un ta r i f pour produire tous les avantages
qu’on en doit attendre , fi l’ori a bien vérifié que le
projet d’un nouveau ta r i f eft. aufli conforme à ces
principes , que l’état aétuel des ta r ifs en eft éloigné ,
on ne devroit pas rencontrer de grandes difficultés
dans l’exécution ■; mais il en eft d’inévitables , le préjugé
& l’intérêt particulier ; & il peut s’en préfenter
de plus refj)e<ftables dans des circonftances locales.
C ’eft ce qu il s’agit' d’éxâmirter ; & pour cet effe t,
nous piiiferons les objets dans les ouvrages publics
qui? ont jufiju’à préfent contredit le nouveau ta r if.
t a première' qualité de ce t a r i f eft d’être
Ssss