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cinquante reys gar livre ; il avoir été plus haut Tannée
précédente , & T o n avoit payé jufqu’à huit cent
foixante dix reys pour Técu de France de 3 liv.
Madère, fituée fur les côtes d’Afrique f au midi
des Canaries, du nombre defquelles les pilotes la
mettent, & dont elle n’eft éloignée que de 60
lieu e s , fut découverte' en 1410 , ou comme d’autres
prétendent, feulement en 1420.
. Les Portugais, qui la découvrirent , & qui en
furent les premiers habitans, la trouvèrent couverte
par-tout d’une forêt fi impénétrable , que dans le
deflein de s’y établir & de la cultiver, iis furent
obligés d’y mettre le feu.
Cet expédient , qui leur réuflit, penfà coûter la
v.ie à tous ceux qui compofoient alors cette1 colonie
naiflante , qui furent près de mourirde foi f dans
leurs barques ou ilss’étoient retirés, & où ils demeurèrent
tant que Tifle refta embrafée} mais enfin y
ayant fait leur établiflement, l’ifle eft devenue une
des plus peuplées & des plus fertiles de l’Océan.
Les bleds , les vins , le fucre , les gommes , le
m ie l , la c ire ,. les cuirs , toutes foutes de fruits
frais , fées ou confits , particulièrement des citrons,
des limons, d,es grenades} enfin . des planches de
bois d’i f & de cèdre , font les principales marchan-
difes qu’on- peut tirer de cette ifle.
Les vins de Madère, quoique excellens , n’égalent
pas la délicatefle de ceux de Canarie. Ce font
les Hollandois & les Angiois qui en enlèvent davantage
} il s’en tranfporte toutefois beaucoup en
Po rtu g a l, où lçs autres nations-'d’Europe vont les
prendre, s’ils ne veulent pas en faire le commerce
en droiture. -
L e plant des vignes GfBi produifent les vins, a
été apporté de Candie , & chaque grape de raifin
n’a guères moins de deux pieds de longueur, &
prefque autant de grofleur.
L ’expérience a fait connoître que les vins qu’on
en tire, font moins bons dans la .première année,
& qu’ils ne font dans leur véritable boitte qu’à la
rroiuéme feuille.
L e fucre y eft très-bon , & s’y fait en quantité :
on Ta long-temps préféré à tous les autres fucres
qui fe confommoient en Europe 5 mais quoiqu’il ne
loit point diminué de qualité , on convient préfen-
tement que ceux des ifles Antilles, & de quelques
autres lieux de l'Amérique , ne lui cèdent en rien.
L e commerce des bleds n’y eft pas moins -xonfî»
derable que celui des vins & des fucres, & les marchands
étrangers en tranfportent année commune,
jufqu’à trois mille mefures, pefant chacune environ
3 c o livres.
Les planches d’i f & de cèdre fe fcient dans p lu - ’
fleurs moulins conftruits fur les ruiffeaux , dont il
y a quantité dans Tille -, & s’envoient en P ortu gal,
où elles font eftimées. Les étrangers en font auffi ;
quelque commerce , mais de peu de conféquence.
Les fruits confits de Madère s’enlèvent particulièrement
parles Hollandois & les Angiois, la plupart
du temps en droiture } mais auffi quelquefois
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à Lifbonne, où ils font portés par les vaiffeauxde
Portugal.
A l’égard des gommes , le fang de 'dragon eft
la principale que l’on tire de Madere, & les arbres
qui la produifent, la répandent dans cette ifle plus
i abondamment qu’en aucun lieu du monde.
Mais-ce qui augmente la réputation du commerce
; qui fe’ fait à Madère, eft la franchife & l’honnêteté
que les habitans pratiquent avec tous les étrangers
qui y viennent trafiquer } ce qu’il faut avouer
qu’on ne trouve pas dans tous les lieux de l’Afie &
de l’Afrique où les Portugais font établis, la plupart
y confervant un certain fafte rebutant, qui eft
, anez ordinaire à cette nation.
Les ijles du. Cap- V e r d , découvertes par les Portugais
en 1472, font au nombre de dix } S. Jago,
S. Atonio, Sta. L u c ia , S. Vincente , S. Nicolao,
l’ifle Blanche, l’ifle du S e l, Tille du M a i, Tifle de
F o g o , & la Buona-Vifta.
On les appelle fouvent les ijles inertes, à caufe
de la verdure continuelle dont elles font couvertes ;
& quelquefois ijles Salées , à caufe de la quantité
de feTqui fe trouve dans celle de ces dix ifles qui
en a pris fon nom , auffi-bien que dans quelques-
1 autres.
L ’îfle de Buona-Vifta , eft la plus proche du Cap-
V e r d , & n’en eft qu’ à 70 lieues , St celle de S.
Jago eft la capitale des dix ifles, & la demeure du
gouverneur, qui eft une efpèce de vice - roi qui
commande fur tout ce que pofiede la couronne de
Portugal en Afrique, depuis le C a p -V e rd , jufqu’au
Cap de Bonne-Efpérance.
Les nations d’Europe qui font le commerce des
Indes orientales & de T Afrique , abordent allez
ordinairement ces ifles -, pour s’y rafraîchir} touchant
à San-Jago, quand elles font en paix avec les Por-
tugais, & fe contentant de faire leur eau & leurs
autres rafraîchiflemens à l’ifle de Mai , à S . Antoine,
à S. Vincent, ou à l’ifle de S e l, lorfqu’elles
font en guerre } le peu de Portugais qui font dans
ces trois ifles, les recevant volontiers en tout temps,
& traitant- avec elles de leurs denrées en échange
de quelques marchandifes d’Europe} outre qu’ils ne
feroient pas en état de leur en dilputer la defeente,
en cas qu’ils ne vouluflent pas traiter avec elles.
Ce font les Portugais qui ont les premiers habité
& cultivé ces ifles, autrefois déferres, & qui pré-
fentement produifent’en abondance quantité de marchandifes
propres à y entretenir un commerce allez
confîdérabîe.
Les cuirs verds, particulièrement les peaux de
chèvres & de cabrils , font un des meilleurs négoces
de ces ifles, toutes nourrilfant quantité de ces
animaux ; mais fur-tont Tille de Mai en ayant en fi
grand nombre, que les habitans de San-Jago , qui
y font tous les ans une chafle générale, n’en rapportent
pas moins de cinq mille peaux , y ayant
même des années qu’ ils tuent jufqu’a 6000 betes.
On fait aulfi quelques cuirs de boeufs & de vaches
fauvages} mais peu, ces animaux étant fore
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difficiles à approcher & à tuer. Tous ces cuirs fe
portent en Portugal, ou ils fe confonvment dans di-
verfes de leurs manufactures, ou font vendus aux
étrangers. _ ^ / ;
Le'bétail domeftique s’y nourrit au AS en quantité,!
& Ton en chargé plufieùrs-Vailleaux pour le Brefil,
y ayant des marchands qui ne s’enrichilfent que de^
ce commerce, & des vaîiïeaux qui ne font qu’aller
& venir pour les- traiifporter,.
C’eft encore une marchandife propre pour les
colonies que les Portugais ont dans TAmérique, que
le poilfon qui fe pêche aux environs des ijle s du
Cap- V e r d , à la lalaifon duquel ils emploient une
partie dui fel qui-fe trouve en abondance dans Tille
de Sel, & dans Tille de Maï, ce qui occupe chaque
année une très-grande quantité de matelots, pour
en, faire la pêche, & de bâtimens pour les porter
à la baye de tous les Saints, ou à Fernambourg.
Les ifles de S. Vincent & de S. Antoine , font
en particulier un commerce aflez lucratif de l’huile
qu’ils tirent des tortues qui y terrifient en certain
temps de l’année} aufli-bien que des peaux de boucs,
qu’ils fçavent paflër à la manière - d’Efpagne & de
Portugal.
Enfin, le ris, le m il, le bled dé Turquie les :
oranges , les citrons , les ananas & plufièurs autres,
fruits délicieux, auffi-bien qu’un grand nombre; de
volailles domeftiques & de gibier, y fervent non--
feulement à la nourriture des habitans de ces ifles , :
mais auffi au trafic qu’ils en font avec les étran-
gers qui viennent s’y rafraîchir & y faire de l’eau,
du bois , -du fel & des vivres.
U ijle de Saint-Thomas, que «les Nègres dé la ;
côte appellent Yijle 'P o n e a s , a pris fon-noùvbau
nom de celui du faine apôtre , dont l’églife catho- ;j
lique célébroit la fête lorfque les Portugais la découvrirent
vers le milieu du feiziéme.fiecle.
Quoiqu’elle foit fituée précifément fous la ligne , ;
& que les chaleurs y foient excèfllves ,; les Portu- •
gais n’ont:pas laifle d’y établir une des plus florif-
fantes colonies qu’ils aient en Afrique} & fa fïtua-
tion même a paru ’ fi-'commode aux Hollandais,
pour Je. commerce d’Angolé', & des autres côtes qui
en font voifines, qu’ils s’en font rendus maîtres par
deux fois , l’une en 16.10 , & l’autre en 1641 ;
quoique pourtant ils n’ayent pu s’y maintenir , les
Portugais l’ayant reprife fur eux., & ayant , en peu
de temps réparé le dommage , prefque ineftimable ,
que leurs ennemis y avoient fait en- l’abandonnant j
Tayant prefque ruinée par lé fer & par le feu.
Les Portugais Tont les premiers qui l’ont habitée
& cultivée , mais préfentement les Nègres yfont.en
plus grand nombre qu’eu x, & ils pourroient aifér
ment s’en emparer, fi leur lâcheté naturelle , Sé
l’habitude qu’ils ont à l’efclavage , ne lesi rendoir
incapables aune telle emreprifei-c j
Les cannes de fucre & le gingembre,! y eroiffenq
auffi-bien qu’en lieu du monde, & font le principal
objet du commerce intérieur de l’ifle } les Portugais
les cultivent avec foin extrême} malg' é les
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grandes choeurs - du ciel & du, fol , ils ne font
prefque jamais trompés , .la récolte de l’une & de
l’autre de ces drogues fe faifant tous les mois.
On compte jufqu’à 45 ou 50 moulins, à lucre ,
mais qui né travaillent qu’a-lternativement , & qui
-ont chacun leur mois marqué pour le travail.
, Ges moulins peuvent'fournir année commune ,
fi* ou fépt' tent charges de fucre noir, dont tous les
ans il en -fort dé Tifle environ, cçrit mille arobes,
poids' de Portugal, ■ à 3 2 liv. pefant chacun - : ce fucre
s’envoie: en Portugal enveloppé dans des feuilles.
Les autres marchandifes du crû de l’ifle, ou qui
s’y fabriquent, font diverfes étoffes de coton propres
pour la traitte des Nègre? de la côte j des fruits,
& particulièrement de celui qu’ils nomment cola ,
qui eft une efpèce de noix qui a le goût de châtaigne
, & qui fe troque aVëc' un grand profit à L ouan-
do , S. Paolôv • ôé d’àutres. endroits du royaume
d’Angole ; & de Congo , d’où il fe. tranfporte encore
plus loin , àinn qu’on l’a déjà dit en parlant
du commercé de . Guinée.
Les marchandifes d’Europe que les Portugais portent
à S . Thomé) font des toiles 'dé Hollande & de
Rouen, ou d’autres de femblable!qualité} du fil de
toute couleur', de petite ferge , dés bas de fo ie , des
xamelots de L e yd en , des'.fèrgeis'de Nfimes , des
ferges de Seigneur mêlçes., dès hachés., dès ferpes
de fer , du fel , de l’huile d’olive , du cuivre rougç
en lame , des chaudrons, du goudron, de la poix ,
du bray , des cordages , des ,moule,s à fucre , de
l ’eau-de-vie, & toutes" fortes de liqueurs diftillées ,
du-vin de Canarie , des’ olives ', des. câpres , de fine
fleur de farine , du beurré & .du fromage.', "
Outre la grande ifle -donFon . vient1.de parler -,
quelques pilotes nomment en général ijle s de Saint--
Thomas , plufièurs autres ifles qui en font proches,
& même d’autres qui en font aflez éloignées.
De ces ifles, les principales,Tout, l ’ifle du Prince,
celle " de Fernando-Pao , cèlle de TAfcenfion ,
celle d’Anobon , même" celle-de Sainte -H é lèn e ,
quoique dans une grande" diftapcè de Tifle de Saint-»
Thomas.--
A l’égard dés quatre autres il ne s’y fait aucun,
commerce , & les vaifieaux qui vont aux grandes
Indes;, n’y relâchent que pour faire de l’eau , du
bois , ou la pêché des tortues , lorfqu’ils ont.grand
béfoin de vivres-, & beaucoup dé malades } fi I’oi\
en excepte pourtant- Anobon , où les Portugais quî
y font établis;, font - commerce du coton qu’ils recueillent
en abondance dans leur ifléj aulfi-bien que
de.pourceaux , de boucs , de volailles, & de quantité
de fruits éxceïlens , comme oranges, limons,
, citrons, figues t cçeos , ananas} à quoi l’on peut
éheofe^ajouter du millet' Sc du bled de Turquie.
ISLES C A N A R IE S , en Afrique. (Commerce dçsj)
Les ijle s Canaries font lçs mêmes que les anciens
connoifibient! fous fe -nom S ijles Fortunées,
On ne compte néanmoins leur découverte aue
depuis l ’atviée 13 4 8 , ou > tout au plus 100 ans-4u-
Aaaaa i j .