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exceffifs .de fraude qui en réfuljoient. Il feroit bien I
trifte que l'inconvénient de la fraude fût quelquefois
un obftacle invincible aux opérations- les plus utiles
que. l’on yoijdroit faire y & i l feroit. bien fâcheux de
trouver çet obftaçle dans le commerce même qu'on
youdrojt fàyorjfer, Mais cet, inconvénient de fraude
eft-il aufli réel 8ç auffi fréquent ‘que ,femble l’annoncer
la requête fur laquelle eft intervenu l’arrêt
de 1688 ? Cela peut être vraifemblable, puifque
ç’eft le motif de la fuppreflîon des entrepôts , dont
on connoiffoif toute l’ utilité , & du çôté du commerce,
& du côté de la finance. Mais n’y a-t-il point
de remèdes? Les gros négocians. ne peuvent être
ioupçonués d’avoir trempé ni connivé dans ces fraudes
; leur bonne-foi & leur patriotifme eft .d’accord
avec leur intérêt, pour bannir la fraude , & con-
ferver l’entrepôt. N ’auroient-ils pas eux-mêmes de
précautions à indiquer -, pour contenir ceux q u i ,
dans le Commencement de leur fortune, font moins
difficiles fur les moyens ? C’eft le bien commun qu’il
s’agit d’opérer. Les obftacles qu’on peut y rencontrer
feront-ils donc invincibles ? Cela ne devroit pas
être , &. du moins on ne peut fe difpenfer.de fou-
îjaitei que cela, ne foit pas. .
I l .eft .vrai cependant que l’on en a jugé autrement
jufqu’àice jour , 8c c’eft fans doute , ce qui a donné
lieu au rétablifïèment & au maintien des ports
francs.
L a frapehife du port de Marfeille fut rétablie en
1669 , & debarrafl.ee d’une grande partie- des entra-
Y£s .qu’elle .s’étoit impofées : elle aürpit peut-être
çnçôre befoin aujourd’hui d’une nouvelle réforma-
tjpn. Les privilèges de Bayonne ont ' été étendus ;
là haute ville de Dunkerque a joui de la franchifè
la plus complexe ; & fi , en comprenant l’Alface
dans l'enceinte des bureaux de traites , on confervoit
ijqe, pareille franchifè à la ville de Strafbourg, il
y auroit aux quatre coins de la France quatre entrepôts
généraux.de majxhandifes, foit nationales ,
fort étrangères , prêtes à fe diftribuer par-tout , 8c
à fournir aux befoins , foit de l’intérieur , foit de
l ’étratigeri Ces quatre villes peuplées de négocians
habiles & grands fpéculqtéurs , auroient toujours
leurs magauns afloxtis des richeffes de tout le monde,
.& feroient â portée , par leur pofition & par l’activité
de leur commerce, de profiter de tous les débouchés,
que les variations du commerce ne manquent
jamais d’ouvrir à ce.ux qui les cherchent avec
affidiii,té , &, qui font prêts d’y fournir : les maga-
iw a g e ï, les voitures , foit par terre , foit par mer,
& les droits de commiffion formeroiejit feuls une
riclieffe aflurée pour tous les entrepôts. Mais comment
feront traités ces lieux privilégiés ? Placés hors
l’enceinte des barrières générales* ils ne paroiflènt
plus distingués d’avec l’etranger ; cependant ils font
citoyens , & plus intérefles que tous autres à la
prospérité y!e l’état dont ils font membres. Il eft
«fautant plus jufte qu’ils en fupportent les charges ,
qu’ils-profitent plus avantageufemeijt de la protection
du feniverain. Ils ne fou t, à proprement par-
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1er, tu étrangers , ni rçgnicoles , & on pourront le*
reo-arder comme une-colonie de citoyens, féparée
de la patrie principale. Comme membres de la colonie
, ils font fujets aux charges qu’elle doit porter;
comme Séparés de la patrie principale , ils doivent
être traités comme étrangers dans les bureaux de
; communication , qui font établis vis-à-vis d’eux cpm-
{ me vis-à-vis de l'étranger effeârif. Dans la règle
étroite , le bénéfice de l’entrepôt ou la franchifè ne
font accordés qu’à leur commerce, & non point à
leur confommation. Si cette diftinttion eft. poffible
à faire -dans la régie , elle eft jufte à maintenir :
mais, fi les circonftances locales s’y oppofent trop
fortement, fi elle entraine avec elle une régie'trop
pénible & trop hériflè.e de difficultés, il vaut mieux
y renoncer 8c regarder ces villes comme totalement
étrangères en fait de commerce , meme pour
leurs .fabriques j ce qui doit faire d’autant moins de
difficulté , que leur commerce Suffit pour les occuper
utilement., & que. les fabriques en général
ne font parfaitement utiles , que lorfque , répandues
dans les campagnes, elles rempîiuent les iiio-
mens oififs du laboureur, diftuibuent , pour ainfi
dire , par-tout la confommation , 8c an^nent -une
circulation générale dans toutes les -provinces.
Il eft bien .aifé de fentir, par ce que nous venons
de dire, combien la qualité de citoyen inherente
à tous les habitans du même état, & ,1’égalité
de protection due par le fouverain a tous les fujets,
; font difficiles' à concilier avec les privilèges des port«
I francs. Cela n’eft pourtant pas impoffible , en laifr
faut même les habitans. des ports francs maîtres du
I fort qu’ils voudront choifîr. Il faut obfervcir d abord
q u e , fi les ports francs mettent une différence entre
les citoyens , ,ce n’eft que pour le commerce. La
liberté du commerce à l’étranger , eft le feul fondement
de cette diftinCtion : c eft a eux a en regie ç
le degré. Cette liberté n’a-t-elle aucune reftriârion ?
Ils doivent être regardés totalement comme étran-?
o-çrs , 8c toute exception feroit vicieufe & iiijufte ,
parce qu’on ouvriuoic la porte a 1 etranger, fous la
proteCHon du port franc, & que le commerce interieur
de tout l’état, feroit la viérime de 1 abus de
ce privilège. Mais le port franc veut-il renoncer
lui-même à une portion de fa franchifè , & avoir
une communication libre avec 1 intérieur fur des
objets qu’il lui eft utile de tirer du royaume „ ou
que fès fabriques, peuvent lui fournir ? Par exemple
, eft-il intéreflant pour Marfeille de tirer des
foies ,8c des bois de l’intérieur, & d’y fournir des
favons & des étoffes de foie fabriquées? Elle n’a qu’a
confentir que la barrière établie entre le royaume &
l’étranger fur ces objets , ait lieu à l’entrée de fon
p o r t ; & ces-mêmes objets.ferontlibres.au paflage
de la barrière qui la fépare de l’intérieur : c’eft a
elle à voir ce qui eft le plus favorable à fon commerce
, & .à opter en conféquence. C ’eft maintenir
fa franchifè en entier, que de conferver cette franchise
dans tous les objets de commerce où elle peut
lui être utile ; c eft la f?ire jouir de tous les droits
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prérogatives des citoyens dans fous les cas où
ie voudra conferver Ce précieux titre.
Pour fè réfumer fur cet objet, on peut dire que
Quelques exceptions du t a r i f général font néceflai-
ies pour fe conferver la branche précieufè du commerce
de l’étranger à l ’étranger par entrepôt dans
le royaume ; que la meilleure façon d’y réuflir,
feroit le rétablifïèment de fèpt ou huit entrepôts
généraux, fi cela eft poffible ; finon qu’i l faut fe
contenter de conferver les ports francs qu’on peut
avoir, & même d’y ajouter quelqu’autre ville de
franchifè, pour animer le commerce par-tout.
Une fécondé exception au tarifa c’eft le tranfit
: fon utilité n’eft pas encore douteufe , mais les
inconvéniens font auffi connus; cependant ces in-
convéniens femblent plus faciles à parer. Ces tran-
fits en exemption de droits ne font faits que pour
faciliter la communication du commerce., & profiter
des frais de tranlpOrts. Toutes les routes ne font
pas également utiles : celles qui communiquent à :
de grands lieux de commerce , font feules nécefi- |
faires ; & en indiquant un petit nombre de grandes ,
routes & de bureaux, tant de chargemens que de
forties-, en ordonnant que le plomb de tranfit ne ;
feroit appofé dans les bureaux de chargemens,
qu’après la reconnoiflance exaéte des marchandifes
renfermées dans les ballots, & que ces mêmes ballots
feroient exactement vérifiés dans les bureaux
de fortie indiqués ; enfin en n’accordant, fi cela eft
néceflàire* la facilité du tranfîr, qu’à des voitures
établies exprès pour cét objet, de la fidélité defquel- i
les on pdt s’aflurer, il feroit peut-être poffible de
remédier aux plus grands abus ; & ceux qui pour-
roi en t fubfifter encore , feroient couverts avantageu- .
fement par les bénéfices qui réfulteroient du tranfit.
Cet article, tout important qu’il eft, ne peut guères
être traité en général. Chaque tranfit demande à être
combiné entre le commerce & le fermier ; c’ eft
l’intérêt de l’un -& de l’autre, puifque c’eft l’intérêt
de tout l’état; & l’objet d’une adminiftration auffi
fage qu’ intelligente, eft de concilier les intérêts particuliers,
pour parvenir.au bien général. -
Pour achever en peu de mots ce qui peut concerner
les ta r i f s , il ne refte plus à parler que des
influences que peuvent avoir fur cet objet les traités
faits avec les puifïances étrangères. En général,
la loi de la‘ réciprocité à cet égard eft bien conforme
au droit des gens & aux grands principes de 1 humanité. Il eft prefqu’ inutile d’obferver que les
faveurs accordées aux etrangers dans un é ta t , peuvent
être convenables & légitimes , pourvu qu’elles
n’excédent pas les faveurs que le fouverain doit avec
plus de raifon à fes propres fujets : on ne croit pas
même qu’il y ait d exemples de pareilles claufes
dans aucun traité; & s’il a. pu arriver quelquefois
;«[ue les circonftances forcées aient donné naiflànee
a des ufages contraires, le droit public les prosc
r it, & leur ancienneté même ne fauroit les défendre.
Il eft bien des façons de r'econnoître les fervi-
.ces rendus par les étrangers'; mais il n’eft point ,d.e
Cwimitwe. Ts>m IL f#r.s> IL
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raifon qui puifïè faire préférer l ’étranger au citoyen r
la reconnoiflance eft le devoir d’un état , commei
d’un fimple citoyen; mais Ion premier devoir eft I2
défenfe & la protection qu’i l doit à fès fujets. T o u t
ce qui y eft contraire, 11e peut fè foutenir, & les
traités les plus authentiques feroient incapables de le
légitimer : c’eft tout ce qu’on peut dire des traités
par rapport aux ta r ifs . Nous avons vu , dans un
premier chapitre , qu’un bon t a r i f etoit utile : nous
avons examiné dans le fécond, quelles étoient les
qualités qui lui étoient néceflaires pour être eflen-
tiellement utile ; examinons dans le ttoifiéme quel
eft l ’état de la France fur cet objet important.
C h a p i t r e I I I .
D e l'é ta t actuel des ta r if s en France.
Nous avons vu l’utilité des ta r ifs en finance,
pour éviter les perceptions arbitraires & conféquem-
ment injuftes ; en commerce, pour en connoîcre
l’étendue, l ’augmenter, animer les branches vivantes
, foulager celles qui languiflènt, & en ouvrir
de nouvelles , en levant les obftacles qui s’oppofènt
à leur naiflance. Nous avons tâché de raflèmbler
fous les yeux les principales q ualités qui conftituent
la bonté réelle d’un t a r i f II feroit fort à defirer
de trouver ces qualités réunies dans les ta r ifs qui
fubfiftent actuellement en France : mais malheureu-
fement on fè convaincra facilement du contraire ,
en réfléchiflànt fur la multiplicité des ta r ifs qui font
en ufàge dans le royauxne , 8c fur les principes fur
lefquels ils font établis.
L a diftribution typographique du royaume, relativement
aux droits de traites , mettra fous les yeux , '
d’une manière également claire & frappante, les
différentes formes & les différens cas de perception
auxquels elle a du néceflàirement donner lieii.
L e royaume eft partagé actuellement, relativement
aux droits de traite, en trois fortes de provinces,
dont les diftinCtions ne peuvent paroître que
fort fingulières dans une étendue de pays fournis au
même fouverain.
On le divife, i ° . en provinces des.cinq groflès
fermes ; x°. en provinces réputées étrangères; 30. en
provinces regardées comme pays étranger.
Par provinces des cinq groflès fermes, on entend
les provinces qui fe font foumifes à la loi du t a r i f
de 1664; (çavoir, les provinces de Normand ie,
Picardie, Champagne, Bourgogne , Breflè, Poitou ,
A unis, Berry , Bourbonnois , Anjou , Maine ,
Thouars , Châtellenie de Champtonceau , Beau-
jollois, l’ifle de France, Orléannois , Perche , N i-
vernois & Touraine.
Les provinces réputées étrangères, font celles qui
fè font refufées à l’établiflèment du t a r i f de 1664,
8c qui lui ont préféré leurs anciens ta r ifs particuliers;
telles que Bretagne, Angoumois, la M arche,
Limoufin , oaintQjage, Guyenne, Gafcogne, Baflè-
Navarre, Be arn, RojiffiHon, Languedoc, Au ve rgne,
Rouergue *. F o re z , Vivarais, Provence, Daa*
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