
86 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q^u e .
'?'? ~ pontife que celui d’empereürr Il faifoic tous les jours 3 Sfr ce que les autres faifoient tous les mois : il faluoit le
lever & le coucher du foleil par le fang des victimes : la
nuit il offrait encore des facrifices aux démons noélur-
nés. Ne pouvant aller au temple .tous les jours, à caufe
de fès occupations, il faifoic un temple de fon palais &
Gng. xüoe.w.4. de fon-jardin. Non content d’affifter aux facrifices , il
les offrait de fa main , allant & venant, fendant le bois,
fouflant le feu de fa bouche : portant les vi£times, prenant
le couteau pour les égorger, maniant leurs en-*
trailles pour les confiderer ; en forte qu’il en avoit les
;* s-.bs. doigts enfanglantez. On voïoit accourir de tous côtes
’ 5l 4 % à fa cour des magiciens, des devins & des impofixurs
de toutes fortes le palais étoit rempli d’artifans des
métiers les plus fordides , d’efclaves fu g itifs ,d e mifera-
bles qui après avoir été convaincus d’empoifonnemens
Si de maléfices, a voient langui long-temps dans les priions
ou dans le travail des mines. C ’étoit tout d’un
coup des hiérophantes & des pontifes venerables. L ’empereur
renvoïoit des gouverneurs de province & des.
magiftrats fans leur donner audience 3 & paroifïoit dans.
iesruçs au milieu d’une troupe d’hommes efféminez , &
dé femmes proftituées : fon cheval & fes gardes mar-
choient loin derrière ; & ces infâmes environnoienc l ’em-
pereUr éclatant de r ire , & tenant des difeours eonvena-
bles a. leurs moeurs. Saint Chryfoftome qui rapportoir
ceci vingt ans après , voïoit bien qu’on aurait peine à
fecroire o rnais il en prend a témoin cous fes auditeurs..
A u relie , cefoic le culte de Venus , de Cybelle & des
autres divinitez.femblablès, qui attiroit autour de Julien
tant de perfonnes infâmes : il ne fouffroit là débauche
dans les autres que par religion ; car pour fa perfonne
les Chrétiens ne l’en accufent pas ,& les païens fçn jnf-
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tifient. Il eft vrai qu’il fait.àiTcz entendre qu’il avoit
quelque concubine , en difant qu’il couche feul la plupart
des nuits , car il n’avoit plusde femme : mais chez
les païens ce n’étoit pas un reproche,. Il mangeoit &
dormoit très-peu, paffant la plus grande partie des nuits
à étudier. Il faifoit profeffion d’une philofophie aufte-
r e , qui méprifoit les délices & le foin du corps : il blâ-
moit les fpe&ables , & n’y affiftoit que pour la forme,
autant que fa religion & fa dignité l’y obligeoient ; &
comme Antioche étoit une ville délicieufe, il attribuoic
à fon éloignement des plailîrs l’averfion qu’elle avoit
pour lui.
Il fut extrêmement irrité de ces railleries. Car fa phi-
lofophicne l’avoit pas encore délivré des paifions : particulièrement
de lacolere. En rendant la juftice, il rem-
pliffoit le palais de fes cris , comme s’il eût été la partie
plutôt que le juge. Quelquefois des gens de campagne
l ’aïant abordé en public pour lui faire quelque priere ,
choqué de leur ruflicité, il les maltraitoit à coups de
poing &c de pied , enforce qu’ils s’eftiinoienc heureux de
fauver leur vie. D’abord il menaça la ville d’Antioche'
de toutes fortes de mauvais traitemens ; il dit qu’il n’y
reviendrait p lu s , & qu’au retour de fa campagne , il
établirait faréfidence à Tarfe en Cilicïe. Cependant il
fe contenta d’une vengeance plus philofophique , & publia
contre la ville d’Antiocheune iàtyrefous le nom de
Mifopogon : qui veut dire en grec ennemi de la barbe.
C ’eft une ironie perpétuelle , où faifant femblant de fe
tailler lui-même , & de convenir de fes défauts , il fe
mocque en effet du peuple d’Antioche , & lui reproche
tous fes vices: mais ajoutant beaucoup à la vérité,comme
die Ammian lui-même. Il compofa ce difeours en 363.
fept mois après fon arrivée à Antioche.
A n . 36 t .
X L I I .
Mifopogon.
'Greg. Naz.. 4. p.
l a i . A.
-A mm.xxn c. 14.
Socr. n i* e. 17.
Mifop»p. 66.
P a g in a $6 1 . ». 6,