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~ ~ mais Grégoire refifta avec un tel zele , que le capitaine
5 ' f u t obligé d’abandonner l’entreprife , & de fe retirer au
plus vite , pour le mettre en sûreté. Le S. vieillard fai-
foit faire des prières publiques pour obtenir la délivrance
de leglife & la fin de la perfecution : mais en particulier
il prioit durant la nuit ; couchant fur la terre ,
nonobftant fon grand âge & arrofant le pavé de fes larmes.
Ce qu’il continua pendant près d’une année , & iï
fecrettement, qu’il s'en leroit caché même à fa fam ille ,
fi fon fils Grégoire ne l’eût découvert.
s. Grejoire de avo*c ordonné prêtre vers le commence-
Nazianze & faint ment de cette année , mais avec une extrême répu-
2 eprcIKS' gnance : car outre des,raifons générales de la dignité
du facerdoce, de la fainteté & de la capacité qu’il demande
: il v c ïo it des difficultez particulières dans un
temps, où leglife étoit fi cruellement déchirée au dedans
par les heretiques , & attaquée au dehors par les
païens. Son pere n’ignoroit pas fes fentimens, 6c tou-.,
tefois le peuple confpirant avec lu i , il l’éleva au fécond
rang du facerdoce, le chargeant de l’inftrudion
des catecumenes & du miniftere de la parole, dont il
c*rm. 1.1.6. c. ne pouvoit prefque plus s’acquitter à caufe de fon grand
âge. Le fils accablé de ce coup inopiné , fe retira peu
de jours après dans la folitude du Pont auprès de faint
Bafile : mais aïant un peu digéré fon chagrin , preifé
par l’affedion de fon pere & de tout le peuple fidele ,
frappé de l ’exemple de Jonas, 6c craignant de refifter à
l ’ordre de Dieu ; il revint à pâque , qui cette année
361. étoit le trente-un de Mars. Il parla dans le g life
le jour de la fê t e , dont il prit occafion pour fe pardonner
réciproquement la violence qu’ils lui avoient
faite en fon ordination , & le chagrin qu’il leur
a voit donné par fa retraite. Plufieurs de ceux qui
avoient
L i v r e q j u i n z i e ’m e . 33
avoient defire Grégoire avec plus d’cmpreflement, ne --------------
fe trouvèrent pas à ce premier ferenoh. Il en fut touché, A n ' 3 6 z "
6c par un fécond difeours il leur en fit des reproches
animez d’une charité fincere. Mais comme il fçavoit que or«t.z.f. +<.
plufieurs avoient blâmez fa retraice, l’accufant de méprifer
les ordres, ou d’afpirer à un plus haut rang que
la prêtrife : il fit quelque temps après fon apologie par 0,»t. 1.
un grand difeours, où il traite à fonds la dign ité , les
devoirs & les périls du facerdoce ,6c rend ck folides raifons
de la crainte ôc de fa fuite , de fa foumiifion 6c de
fon retour.
Saint Bafile fut ordonné prêtre vers le même temps.
Il étoit revenu à Cefarée , 6c aftifta à la mort -de l’évê-
que Dianée. Eufebe qui étoit Neophite voulut s’appuyer
du fecours d’un homme vertueux, inftruit 6c
éloquent comme Bafile, &c déjà éprouvé dans le miniftere
ecclefiaftique ; car il avoit l’ordre; de ledeur.
S. Bafile écrivit fur ion ordination à ion ami faint Gre-
goire, qui lui répondit : Vous avez auilî été pris. On
nous a mis par force au rang des prêtres, que nous ne
délirions pas. Car nous fommes- témoins l’un 6c l ’autre
combien nous cheriffons la philofophie humble
6c cachee, Peût-etre eut-il mieux valu que cela ne
fut point arrive : mais je ne fqai qu’en dire, jufques
à ce que je connoiife la conduite de l’efprit. Puis que
la choie eft faite , il faut s’y foumettre, principalement
a caufe du temps, qui noüs attire les langues
des hereticjues ; 6c ne pas faire honte à ceux qui nous
ont confie le miniftere , ou au genre de vie que nous
avons embraiïe. On croit que le premier fermon de
S. Bafile fut l’explication du commencement des proverbes.
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Eufebe fon évêque , par un effet de la foibleiTe hii-
Tome IV . £