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Theod. n i . c
Sozom* y. <?
z i H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
fans-rapport a la religion. Les images des empereurs
m étoient ordinairement accompagnées de viètoires, de
captifs ou d autres femblables figures indifférentes : mais
Julien fit joindre aux fiennes des idoles, afin qu’on ne
pût leur rendre les honneurs ordinaires fans idolâtrie :
Jupiter qui fortoit du c ie l, Se lui prefentoit la couronne
& la pourpre: Mars & Mercure qui le regardoient, comme
pour rendre témoignage à fa valeur Se à fon éloquence.
La plûpart n’y firent point de reflexion, & les adorèrent
: quelque peu évitèrent ce piege-, étant mieux inf-
truits & plus pieux ; & ils en furent punis comme d’un
manque de refpect envers l’empereur. Il furprit encore
plufieurs foldatspar cet artifice. C etoitla coutume qu’en
certaines occafions l’empereur aflis fur un tribunal élevé
diftr ibuoit de fa main des largeffes à fes troupes : leur
donnant des pièces d’or , félon leur rang & leur mérité.
| >«■ Julien y ajoûta une ceremome extraordinaire. Il fit met-
' i7‘ tre auprès de lui un autel avec des charbons ardens, &
de l’encens fur une table : voulant que chacun mit de
de l’encens fur le feu avant que de recevoir fon or. Ceux
qui furent avertis évitèrent le piège en feignant d’être
malades ; quelques-uns par intérêt ou par crainte négligèrent
leur falut : la plûpart ne s’apperçurent point de
l ’artifice. Quelques-uns de ces derniers s’en allèrent manger
enfuite ; & voulant boire, ils invoquoient à leur ordinaire
le nom de J. C . levant les yeux au ciel, & fai-
foient le ligne de la croix fur la coupe. Un de leurs camarades
s’en étonna, Se leur dit : Qu’eft-ceci : vous invoquez
J. C . après l’avoir renoncé. Comment, répondirent
les autres demi, morts d’étonnement : Que voulez-
vous dire ? Parce, dit-il, que vous avez mis de l’encens fup
le feu. Aufli-tôt ils s’arrachèrent les cheveux, jettant de
grands cris, fe levèrent de table, Se coururent dans la
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place tranfportez de zele, criant Se difant : Nous fourmes
Chrétiens dans le coeur tque tout le monde l’entende,
& Dieu premièrement à qui nous vivons, Se pour
qui nous voulons mourir. Nous ne vous avons point
trompé Sauveur Jésus : nous n’avons point renoncé à la
bienheureufe confeflïon. Si la main a failli, le coeur ne
l ’a point fuivie. L’empereur nous a trompez : nous renonçons
à l’impiété, nous voulons l ’expier par notre fang.
Ils coururent jufqu’au palais, Se jettant aux pieds de
l’empereur l’or qu’ils avoient reçu, ils s’écrièrent : Vous
ne nous avez pas fait un prefent, vous nous avez con-
damnezàmort : faites-nous grâce, immolez-nous à J. C .
jettez-nous dans le feu , coupez nos mains criminelles :
donnez votre or à d’autres, qui le prendront fans regret.
L ’empereur fut tellement irrité de leur hardieffe, que
dans le premier mouvement, il commanda qu’on leur
coupât la tête. On les mena hors la v ille , Se le peuple les
fuivit, admirant leur courage. Quand ils furent arrivez
au lieu de l’exécution, le plus âgé de tous pria le bourreau
de commencer par le plus jeune., de peur que le füpplice
des autres ne le décourageât. Ce jeune homme nommé
Romain s’étoit déjà mis à genoux, Se le bourreau à voit
l’épée nue à la main quand on vint annoncer la gracé, Se
crier de loin de ne les pas executer. En effet, Jülien'y
aïant fait reflexion , ne Voulut pas leur donner la gloire
du martyre. Le jeune foldat en fut pénétré de douleur,
Se dit: C ’eftque Romain n’étoit pas digne de porter le
nom de martyr. L’emperèur ne leur fit grâce qtié de la
vie ; Se les bannit aux extrémitez de l’empire : leur défendant
de demeurer dans les villes.
Entre les officiers Chrétiens qui prefererent leur religion
à leur fortuné : on remarque les empereurs qui
fuccederent les premiers à Julien : fçavoir Jovien , Va-
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