
A n. 387. feule vertu. On a renversé vos ftaruës: mais vous pou?
v e z endreiferdeplusprécieafes danslecceurde Vos fu.
j ets, & avoir autant de ftatuës qu’il y aura j amais d’hommes
fur la terre. Enfuite il lui porta l’exemple deCon-
ftantin , qui nefe vengea de ceux qui avoient jetté des
pierres à faftacuë, qu’en portant la main à fon vifage,
c.Th'ïein. & difant qu’il rien avoit rien fenti; il allégua à Theo-
duii.trim. dofe ies propres lo ix , pour délivrer à pâque lesprifon-
niers ; &c cette belle parole qu’il avoit ajoutée : Plût à
Dieu que je puife auffi reifufciter les morts ? Vous le
pouvez maintenant, continua Flavicn, & vous reffuf-
c ite re z toute la ville d’Antiochc. Elle vous aura plus
d ’obligation qu’à fon fondateur : plus que iî vous l’aviez
délivrée , après avoir été prife par des barbares.
Coniîderez qu’il ne s’agit pas feulement ici de cette
v ille , mais de votre gloire, ou plûtôt de celle du chri-
ftianifme. Lesjuifs & les payens font informez de cet
accident, & vous regardent attentivement. Si vous fui-
v e z laclemence, ils fe diront les uns aux autres: Voy e z
quelle eft la force de la religion Chrétienne : elle a
retenu un homme , qui n’a point d’égalfur la terre, &c
lui a infpiré une fagefle, dont un particulier ne feroit pas
capable, Aflurément le Dieu des Chrétiens eft grand,
puis qu’il éleve les hommes au deifus de la nature. Et
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n écoutez point ceux qui diront que les autres villes
en feront plus infblentes. Vous le pourriez craindre, fi
vous pardonniez par impuiifance : mais ils font déjà
morts de peur, & n’attendent à tous momens que le
fupplice. Si vous les aviez fait égorger , ils n’auroient
pas tant iouffert. Plufieurs ont été la proye des bêtes
farouches en fuyant dans les deferts: d’autres ont palfé
les jours & les nuits cachez dans les cavernes : non feulement
des hommes, mais des petits enfans & des fem-
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mes nobles & délicates. La ville eft réduite en un état
pire que la captivité : tout le monde le fait, & vous ne
donneriez pas un fi grand exemple aux autres en la ren-
verfartt de fond en comble. Laiffez-la donc déformais un
peu refpirer: il eft facile de punir quand on eft le maître,
mais il eft rare de pardonner.
Quelle gloire pour y o u s , quand un jouron d iraqu’une
Û grande vil le étant Coupable, tou t le monde épouvanté,
les gouverneurs,,les juges, perfonne n’ofant ouvrir la
bouche : un feul vieillard revêtu du facerdoce de D ieu ,
s’eft montré & a touché le prince, par fa feule prefence
&parfonfimple difeours! Car notre v ille , Seigneur, ne
vous fait pas peu d’honneur, en me chargeant de cette
députation: puifqu’ellejuge,que vous eftimez plus que
tout le refte de vos fujets les prêtres de Dieu , quelque
méprifables qu’ils foient. Mais je ne viens pas feulement
delà part de ce peuple; je viens de la part du maître des
anges, vous déclarer, que fi vous remettez aux hommes»
leurs fautes, votreperecelefte vous remettra auffi vos
pechez. Souvenez - vous donc de ce jour où nous rendrons
tous compte de nos a ¿lions. Songez que fi vous»
avez quelques pechez à expier, vous le pouvez fans aucune
peine en prononçant une parole. Les autres députez
vous apportent de l’o r , de l’argent, des prefens::
pour moi je ne vous offre que les faintesloix, vous exhortant
à imiter notre m aître, qui ne laiffe pas de nous»
combler de fes biens , quoique nous l’offenfions tous les
jours. N e trompez pas mes efperances & mes promeffes;
& fçaehez que fi vous pardonnez à notre v ille,j’y retour-
neray avec confiance î mais fi vous la re je tte z , je n’y
rentrerai plus, je la renoncerai pour ma patrie.
Flavicn ayant ainfi parlé, Theodofe eut peine à retenir
fes larmes, & ditrQu’y a-t-il de merveilleux, fi nous
pardonnons aux hommes, nr-us qui ne fommes que des
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vr*-
Theodofe pardonne
à Antio*-
che*.