
que vous envoie le grand Atharide, afin que vous mangiez
& que vous;évitiez la mort. Nous n’en mangerons
point, dit le prêtre, il ne nous eft pas permis. Dites à
Atharide ,. qu'il nous faffe plutôt mourir en croix ou de
quelque autre maniere.. S. Sabas dit ; Qui a envo'ïé cela ?
Ils répondirent : C’eft le feigneur Atharide. Sabas dit : Il
n y a qu un Seigneur, Dieu qui eft au ciel. Ces viandes
pcrnicieufes font.impures & profanes, comme Atharide
lui- même qui les a envoïées. Un des ferviteurs d’Atha-
ride irrite de ce difcours , pouffa la pointe de fon dard
contre la poitrine de Sabas avec tant de violence , que
tous les afiiftans crurent qu’il en mourroit fur le champ.
Mars il lui dit : Tu crois m’avoir tué 1 fçachc que je n’en
ai pas fenti plus de m al, que fi tu m’avois jetté un flocon
de laine. En effet, il ne jetta aucun cri, & on ne
trouva fur fon corps aucune marque du coup. Atharide
aïant appris tout cela , commanda qu’on le fit mourir.
On Laiffa aller le prêtre , &c on mena Sabas pour le noie r
au fleuve nommé alors Mufée, aujourd’hui Muffous en
VaJachie., II. dit : Quel mal a fait le prêtre pour ne pas
mourir avec moi ? Les miniftres lui répondirent : Ce n’eft
pas a toi à en donner l’ordre. Alors il fe mit en priere ,.
& ne ceffa de louer Dieu pendant le chemin. Etant arrive
au bord du fleuve , les miniftres difoient entr’eux :
Que ne laiffons-nous aller cet homme ? il eft innocent :
Atharide n’en fçaura jamais rien. S. Sabas leur dir: A quoi
vous amufex- vous, au lieu de faire ce qui vous eft ordonne
? Je voi ce que vous ne pouvez voir : voilà de l’autre
côté ceux qui me recevront dans la gloire. Alors ils
le menèrent a l’eau,' &c il continua de loüer Dieu jufques
a la fin. L aïant jetté dans le fleuve, ils l’étranglerent
avfec la piece de bois qu’ils avoient attachée à fon cou.
Il etoit âge de trente-huit ans , & fouffrit le martyre le
L i v r e s e i z i e ’m e . *3/
jeudi de la femaine de pâques, le jour de devant les ides
d’A vril, fous le confulat de Modefte 8c d’Arinthée:-c’eft-
à-dire le douzième d’Avril l’an 37*.
Les miniftres de la perfecution retirèrent de l’eau le
corps du m artyr, & le laifferent fans fepuîcre. Mais ni
les bêtes, ni les oifeaux n’y touchèrent ; les fideles le gardèrent
-, & Junius Soranus duc de Scythie , c’eft-à-dire
commandant des troupes qui gardoient cette frontière
pour l’empereur, fit apporter ces reliques fur les terres
des Romains. Puis voulant gratifier fa patrie,qui étoit La
Cappadoce , il les y envoïa du confentement des prêtres.
Les reliques furent accompagnées d’une lettre de l’églïfè
de Cotbie à leghfe de Cappadoce , & à tous les Chrétiens
de l’éghfe univerfelle. Cette lettre contient la re-
îation du martyre de faint Sabas, & finit ainfi : C’eft
pourquoi offrant le faint facrifice le jour que le martyr
a été couronné, donnez part de ceci à nos frétés, afin
que le Seigneur en fou loiié par toute l’églife catholique
& apoftolique. Saluez tous les faints. Ceux qui foritper-
fecutez avec nous vous faluent. On croit avec raifon que
ce duc de Scÿthie eft celui à qui faint Bafile écrivit une
lettre, à la fin de laquelle il dit : Vous ferez bien' cl’cn-
voïer des reliques des martyrs à votre patrie : s’il eft vrai,
comme vous me l’avez mandé, que la perfecution qui
regne en. vos quartiers faffe encore à prefent des martyrs.
On croit aufli que la lettre de l’églife de Gothie à
celle de Cappadoce qui accompagna les reliques de faint
Sabas , fut dreffée par faint Afchole évêque de Theffa-
lonique capitale de la Macedoine : car nous avons deux
lettres de S. Bafile à S. Afchole fur ce fujet, dont la première
femble être la réponfe à la lettre de l’églife de
Gothie. Il le remercie des reliques qu’il lui envoie d’îifr
nouveau martyr, d’un païs barbare voifin des Rotnains,
Gg fi