
- aïo H t S TO I R E E C C L E S I A S T I Q;U E.
A n. 391. alors de fe retirer. Valere étoit évêque d’Hippone s
comme il parloir un jour à fon peuple de la, néceffité
où il fe trouvoit d’ordonner un prêtre pour ion ég life ,
eux qui connoiffoient déjà la vertu ôc la doctrine de
S. Auguftin, mirent la main fur lui, ôc le prefenterent
pour être ordonné. Car il étoit prefent au milieu d’eux,
ne fe doutant de rien ; ôc il évitoit feulement de fe rencontrer
dans les églifes qui manquoient d’é vêque , craignant
qu’on ne le choisît pour cette dignité. Le peuple:
d’Hippone s’étant donc faifi de lui,leprefenta à l’évê-
que Valere , le priant tout d’une voix avec beaucoup
d empreffement ôc de cris, de l’ordonner prêtre. S. Au-,
guftin fondoit en larmes : quelques - uns les interpre-
to ie n t , comme s’il eût été affligé de n’être queprêtre,
& lui difoient pour le confoler : Il eft vrai, que vous méritiez
une plus grande place , mais la prêtrife approche
de l’épifcopat. Lui cependant pleuroit par la confédération
des grands périls qui le menaçoient dam le
gouvernement de l’églife: où les prêtres avoient alors
grande part. Enfin le defir du peuple fut accompli, ôc
S. Auguftin ordonné prêcre vers le commencement de
l'an 391.
p°fi. c.s. Il conferva toujours l’amour de laretraite , & voulut
jj. v ivre à Hippone dans un monaftere, comme il avoit fait
à Tagafte. L’évéque Valere fachant fon deffein, lui
donna un jardin de l’églife , où il commença à raffem-
bler des ferviceursde D ieu , pauvres comme lui. Car il
avoit vendu fon petit patrimoine, Ôc l’avoit donné aux
pauvtes , enibrte qu’il n’apporta à Hipponeque l’habit
dont il etoit vêtu, ils vivoient apparemment de leur
SÉ iy. ji. trav a il, & obfervoient la reglejétablie fous les Apôtres,
c eft-a-dire que perfonne n’avoit rien en propre : tout
étoit commun, & on diftribuoic à chacun félon fon be-
L i v r e d i x - n e u v i e ’ m e . d u
foin. Cependant Valere rendoit grâces à Dieu, d’avoir An 391
exaucé fes prières. Car il lui avoit fouvent demandé un
homme , qui pût édifier l’églife par fes inftru&ions :
connoiffanc ce qui lui manquoit, parce qu'il étoit Grec
de naiffance, ôc n’avoit pasaffez d’ufage de la langue latine,
ni pour la parole, ni pour laleéture. Il donna
donc à S. Auguftin le pouvoir d’expliquer l’évangile en
fa prefence, contre l’ufage de l’églife d’Afrique, où
les évêques feuls avoient accoutumé de prêcher. Auffi
quelques évêques le trouvoient mauvais. Mais Valere
fachanc qu’il fuiyoit l’ufage des Orientaux ôc des églifes
orientales, & cherchant l’utilité de l’é g life , ne fe
mettoit pas en peine deces difcours.
S. Auguftin ne fe rendit pas d’abord à cet ordre de «f. »«,
fon évêque ; il lui demanda du tems pour s’inftruire en- * ' I+‘
core , ôc lui écrivit en ces termes : Je vous prie de con-
fiderer avant toutes chofes, qu’il n’y a rien dans la vie ,
principalement en ce tem s , de plus facile ôc de plus
agréable que la fonction d’évêque, de prêtre ou de diacre,
fi on la fait par. maniéré d’a cq u it, Sc en fe rendant
complaifant : mais que rien n’eft devant Dieu plus
miièrable , plus injufte & plus condamnable. Au contra
ir e , rien »’eft plus difficile, plus laborieux ôc plus
dangereux que ces emplois, ôc rien plus heureux devant
D ieu , fi on y fert de la maniéré qu’ij l ’ordonne. Jenel’af
pas apprife dans ma jeuneffe quand je commencois
a l’apprendre , on m’a fait violence pour me mettre
a la fécondé place. Je croy que Dieu m’a voulu châtier,
de ce que j ’ofois reprendre les fautes des autres :
& j ’ai bien reconnu depuis ma témérité. Que fi je n’a ï
Vu ce qui me manquoit, que pour ne pouvoir plus
î acquérir : vous voulez donc, mon pere, que je périffe.
Dû eft votre charité pour moi & pour l’églife > Il con-
I i i i i i j