
5 7 0 H I STO I RE ECCLES I AST I Q.UE.
j ’en connois auiïï plufieurs à Rome.Ils ne font à charge
à perfonne; mais à l'exemple des Orientaux, &fuivant
l’autorité de l’apôtre , ils s’entretiennent du travail de
leurs mains. J’ay appris auiïi que plufieurs pratiquent
des jeûnes incroyables ; non feulement en ne failànt
qu’un repas vers la nuit,ce qui eft par tout très-ufité;
mais en paflant trois jours de fuite' fans boire ni manger
,& encore davantage. Cependant on ne poulie
perfonne à des aufteritez qu’il ne puiflè porter ; on
n’impolè à perfonne ce qu’il refufè , & les autres ne
condamnent pas celui qui n’a pas la force de les imiter.
'•34- Ji avoüeenfuite qu’il y a des Chrétiens foibles, fu-
perftitieux, même dans la vraie religion, ou tellement
abandonnez à leurs pallions , qu’ils oublient ce qu’ils
ont promis à Dieu. Je fçai,dit-il, qu’il y a plufieurs adorateurs
de lèpulcres & de peintures : Je fçai que plufieurs
boivent avec excez à l’occafion des fèpultures, & y font
de grands repas, qu’ils attribuent à la religion. Ce n’eft
pas la vénération des Saints & de leurs reliques que
fàint Auguftin blâme ici; il s’en explique trop clairement
en plufieurs endroits, pour en lailïer le moindre
doute. On ne peut dire non plus qu’il condamne l’ufage
%-b i i ^CS Pe*ntures , puifqu’il fait mention lui-même de celles
evang. c. *i o, où J. C. étôit reprefenté avec S. Pierre & S. Paul ; 8c que
»• 43- l’ulage en étoit commun dans les églifès en Orient & Occident.
Ceux qu’il appelle donç adorateurs de fepulcres
& de peinturés, font ceux qui s’attachoient trop grofïie-
rëment aux tombeaux &aux images des Saints, fansé-
lever aftèz leur coeur aux Saints mêmes regnans dans le
ciel. L ’églifë les reprenoit & les inftruifoit, fans quitter
XVIII lès faintés pratiques.
MoeujsdcsMa- Dans le fécond liv re , qui eft des moeurs des Maiji-
L i v r e d i x - n e u v i e’ m e.’ 5 7 1
chéens, làint Auguftin réfuté leur erreur capitale touchant
la nature & l’origine du mal : puis il examine ce
qu’ils appelloient les trois ièàux, de la bouche, de la main
Sc du lèin : qui comprenoient toutes leurs abftinences 8c
leurs pratiques lùperftitieufes;& rapporte enfin plufieurs
crimes , dont ils étoient convaincus. En parlant de
l’abftinence des viandes, il montre qu’elle ne tire fon
prix que du motif. Si quelqu’un, dit-il, le contente par
jour d’un fèul repas, où on lui ferve des herbes alîâi-
fonnées d’un peu de lard, dont il ne mange que pour
appailèr là faim, avec deux ou trois verres de vin, qui
lui foit necellàire pour là lànté. Qu’un autre ne goûte
ni chair ni vin : mais qu’il mange deux fois, ànone&
au commencement de la nuit, & faflè un grand repas
de legumes recherchées & étrangères , aflaifonnées &
diverfifiées en plufieurs maniérés ; qu’il boive du vin
cuit ou miellé, du cidre, de la limonade & des liqueurs
ièmblables approchantes du vin, ou encore plus deli-
cieulès, qu’il en boive autant qu’il veut, & qu’il falfe
fon ordinaire de ces delices làns aucune neceffité, lequel
de ces deux vous paroîtra garder une plus grande abfti-
nencei II eft clair que S. Auguftin ne combat ici que
la fuperftition des Manichéens qui condamnoient le
vin & la chair comme mauvais en eux-mêmes, le donnant
toute liberté for les viandes & les breuvages qu’ils
permettoient. Mais‘il témoigne allez daps tout cet ouvrage
, combien il eftimoit les abftinences pratiquées
dans l’églilè en elprit de mortification, particulièrement
celles des moines. Lui-même depuis qu’il fut évêque, ne
mangeoit d’ordinaire que des herbes.& des legumes.
Il compolà encore à Rome un dialogue entre Evodius
& lui, où il examine plufieurs queftions touchant l’ame.
Mais parce que là grandeur y eft exactement dilcutée,
Ce cc ij
nichéens, Scc.
c, 1 j . n. zpm
c. 14.
Vcjpd.c.ÿi,