
14 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
autres à la croifade par leur exemple auffi-bien que
parleurs paroles.Ilordonnaenmême-temsque tout
le clergé payeroit le quarantième de fes revenus ec*
clefiaftiques : mais il fe taxa lui & les cardinaux au
dixième. Il fit faire un navire dont la conftruéhion
lui coûta i j o o . liv res, le fit charger de vivres
&c l’envoya à Meifine fous la conduite d’un Templier
, d’un Hofpitalier 8c d’un moine.
En même-tems il publia une lettre circulaire adref-
fée à tous les évêques, les feigneurs , le clergé 8c
le peuple, de France, d’Angleterre, de Hongrie ôc
de Sicile , où il dit en lubftance : Depuis la perte
lamentable de Jerufalem le S. fiége n’aceifé de crier
pour exciter les peuples chrétiens à vanger l’injure
faite à J. C. banni de fon héritage. Autrefois Urie
ne vouloit point entrer dans fa maifon ni voir fa
femme tandis que l’arche du Seigneur étoit dans le
camp ; 8c maintenant nos princes en cette calamité
publique s’abandonnent à des amours illicites, fe
plongent dans les delices, abufant de leurs richeffes
& fe pourfuivenc mutuellement par des haines implacables,
ne cherchant qua vanger leurs injures
particulières. Et ils ne confiderent pas que nos en-i
nemis nous infultent en difant : Oh eft votre Dieu ,
qui ne fe peut délivrer lui-même de nos mains?
Nous avons profané votre fanétuaire 8c les lieux
où vous prétendez que votre fuperftition a pris naifi-
fance.Nous avons brifé les armes des François, des
Anglois, des Allemans, & dompté une fécondé fois
les fiers Efpagnols ; &c après avoir raifemblé contre
nous toutes vos forces, vous n’avez prefque rien
avancé. Que nous refte-t’il donc finon de chaffeï
L i v r e S o i x a n t ë -qju i n 2 i e’ m ê .
ceux que vous avez laiffez en fuyant chez vous , 8c
à qui vous avez donné en garde le peu qui vous ref-
te ; Se de paffer dans vos terres : pour effacer à jamais
Votre nom 8c votre mémoire.
Le pape continue: Prenez donc courage mes en-
fans , & vous confiant en la puiffancedeDieu marchez
à fon fecourslelon vosfacultez, puifqu’il vous
a donné l’eftre, la vie 8c tout ce que vous avez. Quiconque
en uneoccafionfipreffante refufera fon fer-
vice à J . C. quelle excufe pourra-t’il porter à fon
terrible tribunal? Si Dieu eft mort pour l’homme,
l’homme craindra-t’il de mourir pourDieuirefufera-
t-il les biens temporels à celui qui lui donne les
richeffes étern.elles?Quetous fetiennent doneprefts
pour le mois de Mars prochain , enforte que les
villesôcles feigneursenvoy erent à leurs dépenscha-
cun un certain nombre de gens de guerre à la terre
fainte pour y fervir au moins deux ans, ou au lieu des
hommes une certaine fomme d’argent.
Ceux qui feronc le fervice en perfonne 8c à leurs
dépens-auront l’indulgence pleniere de tous les pë’-
chez, dont ils auront fait penitence débouché 8c de
coeur: ceux qui auront fourni la dépenfe, oufervi
de leurs perfonnesaux dépens d’autrui pendantdeux
ans, auront la même indulgence. Les biens des croi-
fez feront fous notre proteétion 8c celle de tous les
prélats del’égliie. Si quelqu’un des croifez oft obligé
par ferment à payer desufures,ilenfera abfous
par les évêques ; 8c les créanciers ne pourront plus
les éxiger, fous peine de reftitution.
Quant aux Juifs, nous ordonnons auxpuiffan-
ces temporelles de les contraindre à remettre les
An. i 158.