
mais les moines fe font relâchez de tems en tems, 8c ont fouvent abùfs
de leurs richeffes 8c de leurs privilèges. L'églife a le pouvoir de donner
des indulgences : mais les penitences canoniques étoient plusfalu-
raires. Les théologiens feolaftiques ne fonc pas des fophiftes mepri-
fables, iis ont conlcrvé la tradition de la fainte doéftine; mais il no
faut pas les admirer aveuglement, ni les préférer aux peres deléglifc.
Peut-être, car qui fait les deffeins de Dieu , & qui eft entré dans fon
confeil? Peut-être a-t’il permis ces defordres dans fon églife, pour
apprendre aux hommes par leur propre experience à fuivre à lalettrer
fis préceptes ;& à ne pas-vouloirmaiotenir fa religion par les maximes
d’une politique mondaine. Vous croyez que la richeife jointe à la vertu!
vous rendra plus heureuxjvous verrez la difficulté de conlerverla vertu
avec la richeife. Vous croyez-que lefacerdoce aura plus d autoriteetanc
foutenupar la puiffânee temporelle; Se vous perdrezda vraye autorité qui
ooniifte dans Teftime & la confiance. Vous croyez vous rendre ter-
ribles 8c vous faire obéir ponétuellement en prodiguant les cenfures ? •
8c par là vous les rendrez meprifables .& inutiles. Inftruifez-vous au
moins parles faits , 8c profitez des fautes de vos peres.
Deux fortes de perfonnes trouvent mauvais que l'on raporte ces faitS
-defavantageux à l’églife. Les premiers font des politiques prophanes, ■
qui ne connoiffant point la vraye religion, la confondent avec les fauf-
fes & la regardent comme une invention humaine; pour contenir le
vulgaire dans fon devoir; & craignent tout ce qui pourrait en diminuer
le refpeâ dans l’efprit du peuple ;c ’eft-à-dire félon eux le defabu-
fer. J e ne difpute point contre ces politiques, il faudroit commencer par
les inftruire & les convertir. Mais je eroi devoir fatisfaire , s’il eftpof-
fibie, les gens de bien fcrupuleux ! qui par un zele peu éclairé tombent
dans le même inconvénient de trembler lorfqu’il n’y a pas fujei
de craindre. Que craignez-vous, leur direis-je ? Eft-ce de connoître
la vérité ? Vous airrrez donc à demeurer dans l’erreur ou du moins dans
l’ignorance ? E t pouvez-vous y demeurer en fureté, vous qui devez
inftruire les autres? car je parle aux-ecclefiaftiques à qui il convient
principalement de fçavoir l’hiftoiredela religion . Peut-on encore dans
la lumière de notre fiecle foûtenir la donation de Conftantin & les
decretales d’Ifidore ? Et fi ces pièces font infoutenables, peut-on en approuver
les confequences ?
Reconnoiiïons donc de bonne foi que Grégoire VII. & Innocent
III. trompez par ces pièces 8c par les mauvais raifonnemens des théologiens
de leurs tems, ont pouffé trop loin'leur' autorité 8e l’ont ren-
duë odieufe à force de l’étendre; 8c ne prétendons pas foutenir des
excès, dont nous voyons lescaufes8cles funeftes effets. Car enfin quoiqu’on
puiffe dire, il eft évident que les premiers fiecles nous fournif-
fent un plus grand nombre de faints papes que les derniers; 8c que les
moeurs 8c la difeipline de l’églife Romaine étoient bien plus pures,
©r il n’eft pas croyable que les papes n’ayent commencé à connoître
ieurs-droits 8c à exercer leur puiflance dans toute fon étendue, que de-
Puisque leur vie a été moins édifiante, 8c leur troupeau particulier
moins bien réglé. Cette reflexion fournit un préjugé fâcheux contre
les nouvelles maximes. BBHMWi , . .
De tous les changemens de difeiplineI je nen vois point qui ait
plus décrié l’églife que la rigueur exercée contre les heretiques & les
autres excommuniez'. Vous avez vû comme Severe Sulpice blâme les
deux évêques ïdace 8c-Ithace de s’êtr* adreffez aux juges feculiers pour
faire chaffer des villes les Prifcillianiftes, 8c traite de honteufes les
pourfuites qu’ils firent contre eux auprès de l’empereur Gratien. On
fut bien plus indigné quand on les vit fuivre les coupables à Treves en
qualité d’accufateurs. S. Martin preffoit Ithace de fe defifter, & prioit
l’empereur Maxime d’épargner le fàng des heretiques : mais quand ils
eurent été executezrà mort,S. Ambroife 8c S; Martin ne communiquèrent
plus avec Ithace-, ni avec les évêques qui demeuroiént dans
fa communion , quoiqu’ils fuffent protégez par l’empereur ;8c ï évêque
Theoguofte ■ rendit publiquement une fentence contre eux. Enfin
faint Martin fe reprocha toute la vie d’avoir communiqué en paffant
avec ces Ithaciens pour fauVer la vie a des innôcens. Tant il paroif-
foit hoirible que des évêques euffent trempé dans la mort de ces heretiques
: quoique leur- feéte fût une branche ■ de l’herefie dtteftable
des Manichéens* '
Les Donatiftes 8c particulièrement leurs Cireoncellions exerçôient
contre les catholiques des cruautez inqüies ; 8c toutefois voici comme
S. Auguftin- écrit à Donat proconful d’Afrique fon ami chargé d’exécuter
contre eux lesloiximperiales: Quand vous jugez les caufesdel’églî-'
fe , quelque atroces que foieittlesfnjuresqu’ellea fouffertes, nous vous -
prions d’oubfier que vous avez le pouvoir d’ôter la vie ; 8c ne meprifez-
pas cette priereque nous vonsfailonspour ceux dont nous demandons à
Dieu la correétion. Outre que nous ne devons jamais nous écarterde
notre refolution , de vaincre le mal par le bien : confiderez qu’il n’y a
que les ecclefiaftiques qui prennent foin de porter devant Vous lescau-
fes de l’églife. De forte que fi vous puniffez de mort les coupables,vous
nOus ôterez la libertéde nous plaindre : 8c ils ledéchaînéront plus hardiment
contre nous : nous -voyant réduits à la neceffité de nous iaiffer
ôter la vie plutôt que de la leur faire perdre par vos jugemens.il finit fà
lettre par ces paroles remarquables : Quelque grand que foit le mal qu'on
veut tîire quitter, 8c le biçn qu'on veut faire embraffer, c’eft un travail
plus onéreux qu’utile d'y contraindre au lieu d’inftruire.
S. Auguftin écrivit de même, quelques années après, au comte Mar-
cellin en faveur des Donatiftes, qui avoient tué un prêtre d’Hippone
8c mutilé un autre. Il le conjure de*ne les pas traitter comme ils
avoient traitté les Catholiques, 8c ajoute: Nous pourrions diffimuler
leur mort, puifque nous ne les avons ni aceufez, ni amenez devant
vous : mais nous ferions fâchez que les fouffrances des ferviteurs de
Dieu fuffent vengées par la loi du Tallion. Il en écrivit auffi au pro-
cojjful Apringius, à qui il dit, qu’on fera lire dans l’églife les a êtes
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