
¿74 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
fiant au Seigneur qui a vaincu le monde , qu’il parlera
en vous par fon efprit. Prenons garde qu’après
avoir tout quitté nous ne perdions le royaume des
cieux, pour quelque petit intérêt ; Si fi nous trouvons
quelque parc de l’argent, ne nous en mettons
non plus en peine que de la pouffierefurlaquellenous
marchons. Ne jugeons ni ne meprifons point ceux
qui vivent délicatement Si portent de la fuperfluité
dans leurs habits. Dieu eft leur maiftre comme le
nôtre Si peut les appeller à lui. Ils font nos freres,
puifqu’ils font fes créatures, & nos maîtres en ce
qu’ils aident les bons à faire penitence,en leur donnant
les befoins corporels. Vous trouverez des hommes
fideles Si doux qui vous recevront avec joy e, 8&
d’autres au contraire qui vousrefifterontavec emportement:
mettez-vous dans l’efprit de fouffrir tout avec
patience Se humilité. Mais ne craignez point, dans
peu de tems plufieurs fages Si plufieurs nobles viendront
fe joindre à vous, pour prêcher aux ro is , aux
princes 8c aux peuples.
Les difcîples de S. François encouragez par ce dif-
cours, alloient prêcher fimplement Se fans ornement,
exhortant tous ceux qu’ils rencontroient à
craindre Si aimer le créateur du ciel Sc de la terre ; Si
à garder fes commandemens. Leur figure extraordinaire
Sc leurs difeours fi differens de ceux des gens du
monde, ne plaifoient pas à tous. On leur demandoit
de quelle nation Sc de quelle profelfion ils étoient ; Sc
ils repondoient qu’ils étoient des penitens venus d’Af-
fife.Quelques-uns les recevoient volontiers dans leurs
maifons; d’autres craignoient de les loger , les foup-
çonnant d’être des yagabons Sc des yoleurs. Souvent
L i v r e S o i x a n t e -s e i z i e ’ m e : ¿7^
ils étoient obligez de paffer la nuit aux portes des
éghfes ou fous des portiques. Ils ne. diffiperent les
foupçons que l’on avoit d’eux, que par leur definte-
reiTement, leur douceur 8c leur patience.
Le faint homme voyoit augmenter peu à peu le
nombre de fes freres, car ils étoient déjà onze, dont
le dernier venu étoit un prêtre d’Affife nomme Sil-
veftre , le premier prêtre qui entra dans leur compagnie.
Alors François écrivit pour eux Scpour lui une
forme de vie d’un ftile fimple , mettant l’évangile
pour fondement, 8c y ajoutant quelques peu de préceptes
, qui paroiffoient neceffaires pour rendre leur
vie uniforme. Puis voulant faire aprouver par le pape
la réglé qu’il avoit écrite ,il reiofut des’aller prefen-
ter à lui avec la petite focieté, nes’apuyant uniquement
que fur la protection divine. Etant arrive a la
cour de Rome , il y trouva Gui évêque d’Alfife qui le
reçut avec grande joie, 8c promit de 1 aider dans ion
deifein ; Sc pour lui en faciliter l’éxecution, lui aprit
qu’il étoit ami particulier du cardinal Jean de S.
Paul évêque de Sabine. Ce prélat aimoit les perfon-
nes vertueufes, Sc ayant déjà oiii parler à l’évêque
d’Affife de François Sc de la fingularité de fon infti-
tu t , il defiroit ardemment de Je voir 8c l’entretenir
lui Sc fes confrères. Sçachant donc qu’ils étoient à
Rome , il les fit venir, les reçut avec grand honneur,
8c après les avoir entendus , les pria de le regarder
comme un d’entre eux.
Peu,de jours après François fe prefenta au pape Innocent
: q u i ayant l’efprit agité de grandes affaires ne
l’écouta pas Sc le rebuta. Mais la nuit fuivante il vit
en fonge un palme croître entre fes pieds Sc devenir
M m ij
An. izo8*
LIV.
Réglé de Saint
t rançois ap- .
prouvée.
JBenavent. c. m
Leg. ¡ . f i e . xf.
Vnding. 1 2.19.
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