
370 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
gneurs qu’il voïoit prêts à lui faire la guerre peur ce
fu je t , leur demanda terme jufques à Pâques clofes,
pour délibérer fur.unc affaire fi importante, & fa rii -
faire à la dignité de fa couronne. Les feigneurs l’ac-
cordcrent & fe retirèrent. Cependant le jour de la.
Chandeleur le roi prit la croix de pelerin comme
pour aller à la terre-fainte, afin de fe mettre plus en
sûreté par le privilège de la croifade. Pendant la fe-
maine de Pâques les feigneurs s’affemblerent en armes
au nombre de deux mille chevaliers & le refte des troupes
à proportion, agiffant de concert avec l’archevêque
de Cantorberi Etienne de Langton ; qui toutefois étoit
auprès du roi. Le lundi après l’oâtave de Pâques, c’eft-
à-dire le vingt-feptiémed’Avril 1115 . le roi leur envoïa
l’archevêque demander quelles étoient les libériez
qu’ils prétendoient. Ilsenenvoïerent le mémoire,
6c quand il en eut oiii 1e contenu, il dit outré de colere:
Et que ne me demandent-ils aufli le roïaume ?
puis il jura qu’il ne leur accorderoit jamais de telles
Übertez, qui le rendroient leur efclave.
Sur ce refus les feigneurs prirent pour chef Robert
fils de Gautier , qu’ils nommèrent maréchal de l’armée
de Dieu 5c de la fainte églife, & commencèrent
à faire la guerre au roi, attaquant & prenant quelques
uns de fes châteaux : ils entrèrent même dans
Londres & s’en rendirent maîtres le dimanche avant
l’Afcenfion vingt-cinquième de Mai ; & le roi fe
trouva tellement abandonné, qua peine lui reftoit-t’ij
fept chevaliers. Alors diflimulaht la haine mortelle
qu’il portoit aux feigneurs , il leur envoïa dire que
pour le bien de la paix il leur accorderoit les libertez
qu’ils demandoient, & le jour de la conférence fut
L i v r e s o i x a n t e - d i x - s e p t i e ’me. 371
ÿûarqué au quinzième de Juin. Ce jour le roi Jean “
donna une charte contenant les libertez dont il étoit N' l i I ï ‘
queftton : à la tête de laquelle il dit les avoir accordées
par le confeil de l’archevêque de Cantorberi, de fept
évêques 6c du nonce du pape Pandolfe, outre plufieurs
feigneurs qui y font nommez. Le premier article
étoit pour la liberté des églifes , dont le roi donna une
charte féparée, par laquelle il déclare que quelque!
coutume qui jufques alors ait été obfervée en Angleterre,
les élections feront libres déformais, tant dans»
les églifes cathédrales, que dans les conventuelles
fauve au roi la garde des églifes 6c des monafteres pendant
la vacance. il promet d’accorder la permifliom
d’élire ; S i veut, s’il la refufoit, qu’on ne laiffé pas de
procéder à l’éle&ion. Cette charte particulière en faveur
de l’églife fut depuis confirmée pat une bulle?
du pape.-
Les autres articles accordez par le roi Jean touchant
lès fiefs, les forêts 6c femblables affaires temporelles,
ne contiennent rien qui ne paroiffe jufte & op-
pofé à divers abus : toutefois il s’en repentit bientôt
, pouffé par les reproches 5c les railleries des médians
qui l’envitonnoient, & qui lui difoient qu’il
Ê’étoit plus roi que de nom, 6c qu’il s’étoit réduit à
Une miferable fervitude. Il rentra donc en fureur : il
maudiffoit le jour de fa naiffance , grinçoit-les dents,
rongeoit des bâtons, puis les rompoit. Il commença
adonner des ordres fccrets pour foutenir la guerre
contre les feigneurs, 6c fe retira de nuit à- l’ifle de
Oüigt, où il demeura quelque temps caché. Delà il
envoïa à Rome lefoudiacre Pandolfé avec quelques-
autres-, pour demander au pape la caffation des chair
A a a ij'