
¿ 4 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e ."
vint aux menaces ; mais les martyrs répondirent genc-
reuièment : Que pouvez-vous nous donner , qui é-
gale ce que vous voulez ôter-, votre pouvoir ne s’étend
que fur nos corps , vous voulez dominer fur nos
ames, & vous regardez comme une grande injure
fi nous ne vous préferons pas à nôtre Dieu. Vous
n’avez pas affaire à des lâches, ni à des gens qui aiment
la vie. Le gouverneur s’aviia d’un nouveau
fupplice. L ’Arménie eft un pa'is froid ; c’étoit l ’hy-
ver ; le neuvième de Mars, & le vent de bife fouffloit
par une forte gelée. Il les fit mettre pendant une nuit
fur un étang, qui étoit au milieu de la ville 5 tellement
glacé ; que l’on y pafloit à pied furement. Il commanda
qu’ils y fufîènt expofez tout nuds, & afin de
les tenter plus violemment par la facilité difremede ;
il fit préparer un bain chaud dans une gymnafe qui
étoit proche.
Les martyrs iè dépoüillerent gayement de tous
leurs habits , & s’encourageoient l’un l’autre, comme
pour une faéhion militaire 5 difànt qu’une mau-
vaifè ■ nuit leur vaudroit l’éternité. Ils faifoient
tous la même priere : Seigneur, nous ibmmes entrez
quarante au combat , qu’il n’en manque pas
un. Cependant ils eurent la douleur de voir un d’entre
eux perdre courage , & fortir de deilus l’étang
pour fe jetter dans le bain chaud. Il y avoit-là un
garde qui fe chauffoit en attendant , & qui obfèr-
voit fi quelqu’un des martyrs iè viendroit rendre.
Il vit un fpeétacle iurprenant. Des anges qui défi-
cendoient du c ie l, &.qui diftribuoient des reeom-
peniès à ces genereux ioldats , excepté à un feul ;
&
L l"v R e D i x i ï ’ me.’ è f
& c’étoit ce lâche qui fe laiiïoit vaincre à la' douleur. A n . 320*.
Mais il n’y gagna rien 5 car fi-tôt qu’il eut'touché
l’eau ch au d e il mourut. Quand le garde le vit venir
touché de la vifion célefte, il ôta tous iès habits,
& fè mit à ià place avec les martyrs qu’il conibla
ainfi de la perte de ce malheureux.
Le jour étant venu comme ils refpiroient encore,,
on les mit fur des chariots, & on les jetta dans le
feu, qui rendit leurs douleurs plus cruelles, les fai-
iànt palier d’une extrémité à l’autre. Il y en eut un
que les bourreaux laifferent, qui fembloit plus vigoureux
, & qu’ils efperoient de faire changer ; mais
la mere qui fè trouva préfènte, le mit de fes propres
mains dans le chariot avec les autres, en difant :
V a s , mén fils, achevé cet heureux voyage avec tes
camarades, afin que tu ne te préfèntes pas à Dieu
le dernier. Apres qu’ils eurent été brûlez, on jetta
leurs cendres dans le fleuve ; & toutefois leurs
reliques furent conièrvées & portées en diveriès
provinces, 0Î1 depuis on bâtit des églifes en leur
honneur, Scon célébra leur mémoire avec grande
iolemnité.
En Afrique Téglife iouffroit une autre.perfècu- xxm.
tiôn de la part des Donatiftes, particulièrement à contrC°™n™-a
Conftantine, capitale de Numidie, 011 ils avoient deGil*
Silvain pour évêque & pour chef de la fedition,
mais il fut alors puni. Il avoir dépofë un nommé
Nondinaire,ion diacre& fon éleve, prétendant en
avoir été offenfé. Celui-ci avoit eilaié de l’appaifèr,
par le moyen des autres évêques, amis de Silvain,
fuis avoir pû rentrer dans fes bonnes grâces. De
Tome ÜI. I