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344 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e ,
des moines 8c des religicufcs : le tout au nombre de
cent vingt-huit perfonnes. On les chargea de fers, 8c
on les mit dans une prifon obfcure 8c incommode ,
où ils demeurèrent cinq mois dans de grandes fouf-
frances. On leur lioit les jambes avec des cordes, 8c
on leur ferroit les épaules 8c les reins avec des pièces
de bois pour les étendre : en forte que leurs os cra-
quoient, comme iî on eût prefle des fagots de bois.
En les tourmentant', on leur difoit: Adorez la foleil,
obéi'ffez au roi 8c vous vivrez. S. Sadoth répondoit
pour tous : qu’ils adoroient le Créateur , 8c'non le
foleil qui eft fon ouvrage , ni le feu que les Perfes
adoroient auffi. Enfin, ils furent condamnez à perdre
la téte : on les mena hors de la ville ; 8c ils ne
ceifercnt point de louer D ieu , jufques à ce qu’on
les eût tous executez. S. Sadoth fut mené chargé de
chaînes dans un païs nommé Bethufa, à la ville de
Bethlapat, ou Bethlabad, &-y eut la tête tranchée.
Les Latins honorent ces faints martyrs le vingt-
uniéme de Février, & les Grecs le dix-neuviéme
d’Oétobre.
En ce même temps la reine tomba malade ; 8c
les Juifs accuferent les foeurs de l’évêque S. Simeon
de l’avoir empoifonnée / pour vanger la mort de
leur frere. Elles étoient deux : l’une vierge facrée
nommée. Tarbula ou Pherbuta : l’autre veuve qui
avoit renoncé aux fécondés noces. La reine crut
facilement cette calomnie : tant par la difpofition
naturelle des malades , qui prêtent volontiers l’oreille
aux remedes extraordinaires/que par la confiance
particulière qu’elle avoit aux Juifs ; car elle
étoit
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étoit dans leurs fentimens, 8c pratiquoic leurs cérémonies.
On prit donc les deux foeurs, 8c avec elles
une fervante de Tarbula, vierge comme elle : on les
mena au palais, 6c on les mit entre les mains des mages
pour faire leur procès. Lemauptés, c’eft ainfi Aa.fmc.f. glt.
que 1 on nommoit le pontife des mages, vint les interroger
avec deux autres officiers. Comme on leur
parla de 1 empoifonnement dont on les accufoit,
Pherbuta rebondit, que la loi de Dieu condamne à
mort les empoifonneurs comme les idolâtres , 8c
qu’elles étoient autant éloignées de ce crime que de
renoncer à Dieu. Et cômme on difoit qu’elles l’a-
voient fait pour vanger leur frere , Pherbuta dit : Et
quel mal avez-vous fait à mon frere ? Il eft vrai que
vous l’avez fait mourir pat envie, mais il vit 8e regne
dans les cieux. Apres cet interrogatoire on les envoia
en prifon.
Pherbuta etoit dune beauté rare , 8c le mage en
avoit été frappé. Il envoïa donc fecretement le lendemain
lui dire, que fi elle vouloit être fa femme,
il obtiendioit du roi fa grâce 8c celle de fes compagnes
: mais elle le refufa avec mépris 8c indigna-
tion , difant quelle etoit epoufe de J . G. 8c ne crai-
gnoit point la. m o r t, qui la rejoindroit à fon cher
frere. Les juges firent leur rapport au roi, comme fi
les martyres euffent été convaincues de l’empoifon-
nement, 8c le roi ordonna de leur fauver la vie , fi
elles adoroient le foleil. Comme elles le refuferent,
on remit aux mages à-ordonner le genre de mort, 8c
ils dirent que la reine ne pouvoir être guerie qu’en
paffant au milieu de leurs corps coupez en deux. On
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