
3©4 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .’
m~~~~ celui quemontoit Neftorius, & qui étoit le plus
An. 342. ¿eux fe jetta fur Balacius, le mordit & lui déchira
la cuiffe à belles dents. On le rapporte à la ville,
il mourut en trois jours ; & tout le monde admira le
prompt accompliiTement de la prediéfion de fàint
c.in.f.w Antoine. Auffi les autres officiers avoient un merveilleux
refpeét pour lui. Tous les juges le prioient
de deicendre de la montagne, puiiquils ne pou-
voient l’aller trouver , à caufe de ceux qui les iui-
voient pour leurs affaires.Ils demandoient feulement
à le voir;& comme il s’en excufoit, ils lui envoïoient
des criminels conduits par des foldats. Ainii forcé
par la compaiiion qu’attireroit leurs plaintes, il ve-
noit à la montagne extérieure : &. ce n’étoit pas iàns
fruit. Il confeilloit aux juges de preferer la juftice à
toutes choies ; de craindre Dieu , ôc de ie iouve-
nir qu’ils feroient jugez comme ils auroient jugé
les autres : mais rien, ne lui étoit fi cher que le fe-
jour de famontagne. Un jour donc ayant été forcé
de defcendre par les prières d’un capitaine qui portait
le titre de duc; il lui donna en peu de mots des
avis fàlutaires , & comme le duc le preiïoit de de-
meurer plus long-tems, il dit : Comme les poiffons
meurent s’ils font long-tems fut la terre ; ainfi-les
moines fe relâchent en demeurant avec, vous; il faut
nous preifer de retourner à la montagne , comme
le poiifon à la mer.
XVI Saint Antoine avoit alors quatre-vingt-dix ans ; &
Mo« de 5.’Paul fi lui vint en penfée qu’il n’y avoit point dans le de-
wii, fert d’autre moine parfait que lui, La nuit, comme
ij dormoit, il lui fut révélé, qu’il y en avoit plus
^vant
L i v r e d o u z i e ’m s : 30?
avant un autre plus excellent, & qu'il devoir l’aller
voir. Si-rot quelejour parut, lefaint vieillard commence
a marcher appuyé fur un bâton, fans favoir
où il alloit ; mais fe confiant que Dieu lui feroit
voir fon ferviteur. En effet, comme il le lui avoit
fait connoître, il lui fit trouver le chemin de fa de-
; meure; & le troifieme jour de grand matin il arriva
[ a la caverne ou S. Paul le premier hermite s’étoit re-
| tiré, il y avoit quatre-vingt-dix ans, à peu prés en
meme temsqueS. Antoine etoit né. S. Antoine ne v
| vit rien d’abord tant l'entrée en étoit obfcure. Il
avançoit doucement, s’arrêtant de tems en tems
pour ecouter, marchant legerement & retenant ion
I haleine. Enfin, il apperçut de loin quelque lumière,
cela le fit hâter; il choqua des pieds contre une
■ pierre & fit du bruit. Alors S. Paul ferma au ver-
I roüil fa porte qui étoit ouverte. S. Antoine fe prof-
ite rn a , Sc y demeura jufques à plus de midi ; le
I priant d’o uv rir, & lui difant : Vous favez qui je
I fuis, d ou je viens 5c pourquoi. Je fai que je ne meri-
I rite pas de vous v o ir ; toutefois je ne m’en irai point
■ fans vous avoir vû. Je mourrai à votre porte , au
■moins vous enterrerez mon corps. Paul lui répondit:
■On ne demande point en^menaçant; vous étonnez-
■ vous que je ne vous reçoive pas, puifque vous ne veinez
que pour mourir.
I Alors il lui ouvrit fa porte en fouriant. Ils s’em- ¡M
I raflèrent, fê faluerent par leurs noms, eux qui
■ jamais n’avoient oiii parler l'un de l’autre, ôc ren-
f enfemble grâces à Dieu. Apres le iaint bai-
I cr s et2nt aflis, Paul commença ainfi : Voici celui
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