
$44 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
•mure ; & que le milieu de la nuit foit pour le folitaire
8 ce que le matin eft pour les autres ; afin qu'il
profite du filencc de la nature, pour méditer dans
un plus grand recueillement les moïens de fe purifier
de fes pechez & d’avancer dans la perfe&ion. Cette
lettre eft comme l’abregé de ce que S. Bafile enfeigna
depuis dans fes réglés.
G*eg, Naz. orat. Il le pratiquoit le premier : il vivoit dans une ex-
10Gri/.5Lf. ¡n trême pauvreté , n’aïant pour fe couvrir qu’un feul
xZTep.t. habit, c’eft-à-dire , une tunique & un manteau , ne
vivant que de pain 8i d’eau , avec du fel & quelques
herbes. Il devint fi pâle 8c fi maigre , qu’il fembloit
-n’avoir prcfquc pas de vie : il portoit un cilice , mais
dont il n’ufoit que la nuit pour le mieux cacher : il
n’avoit pour lit que la terre , ne fe baignoit jamais,
Si ne faifoit point de feu. Comme il étoit naturellement
délicat, fes aufteritez lui attirèrent des maladies
fi fréquentes , quelles devinrent continuelles:
& dans fa plus grande fanté il étoit plus foibie que
les malades ordinaires.
Saint Grégoire de Nazianze vint enfin fe joindre à
fon ami & aux autres qui étoient avec lui dans cette
folitude. Ils y faifoient leurs delices de fouffrir : ils
ens-N«z.ep.?: priôient eniemble , ils étudioient l'écriture fainte,
ils travailloient de leurs mains portant du bois ,
taillant des pierres, plantant des arbres , les arro-
fant : portant du fumier dans leur jardin, pour y faire
venir quelques herbes ; & traînant un chariot fort
pefant, en forte que les.marques leur en demeurèrent
long-temps aux mains. Cependant leur maifon
n’avoit ni couverture ni porte : on n’y yoïoit ni
feu
L i v r e qj j à t o r z i e’m e . $4$
feu ni fumée ; le pain qu’ils mangeoient étoit fi dur
& fi mal cuit que les dents n’y entroient & n’en for-
toient qu’avec peine. Ils quittèrent les livres profanes,
dont ils s’étoient tant occupez pendant leur jeu-
neife, pour s’appliquer uniquement à l’écriture fainte ;
& afin de la mieux entendre , ils étudioient les anciens
interprètes, particulièrement Origene, dont ils Greg.ep. s7;
firent enfemble un extrait fous le nom de Philocalie,
que nous avons encore. Les habitans de Neocefarée Bafii.ep.64.
voulurent confier à S. Bafîle l’éducation de leur jeu-
nelfe, & lui députèrent leurs principaux magiftrats
pour le tirer de la folitude : mais il les refufa ; & même
étant venu dans la ville quelque temps après, il
refifta aux prières de tout le peuple aifemblé autour
de lu i , qui pour l’engager à cet emploi, lui promet-
toit toutes chofes. Grégoire frere de Bafile 8c depuis
évêque de Nyife n’eût pas la même fermeté ; & depuis
fa converfion étant déjà prêtre, il fe laiifa per-
fuader d’enfeigner la rethorique à de jeunes gens. Ses
amis & tous les Chrétiens en furent feandalifez ; & GrfZ. Naz.
faint Grégoire de Nazianze l’en reprit, par une lettre
pleine de vigueur 8c de charité.
Saint Bafîle eût bien-tôt dans fa retraite un grand ut-
nombre de difciples, qu’il élevoit à Dieu, & qu’il Bffii“ nqu£Sde
faifoit vivre dans une parfaite union. Il leur écrivit u.ep.9.
en divers temps plufieurs préceptes de pieté, que la
plûpart des moines d’Orient ont pris depuis pour
leur réglé , & que l’on nomme en gênerai les Afcé-
tiques de S. Bafile. Le premier traité eft un recueil
de paifages de l’écriture fous le nom de Morales ,
dont -voici l’occafion. Dans les voïages qu’il fit en
Tome I I I . TLït .