
¿40 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
fa jcunciTe par de grands travaux : en jeûnant, en
retenant fes regards, en réprimant le ris & la co-
lere : couchant fur la terre dans des habits rudes t
& ne cherchant de remede à l’infonlnie que dans
fes larmes : le jour il courboit fon dos par le tra-
v a i l, il paifoit la nuit à loüer Dieu.. Tels furent fes
commencemens. De tous les biens temporels il ne
fe referva que l’éloquence , pour l’emploïer au fer-
Garni, i» p. 5. c.. y i c e de Dieu. Etant alors en âge de prendre pa rti,
il douta s’il de.voit fe retirer entièrement, à l’exemple
d’Elie, de S. Jean-Baptifte, des Recabites : ou demeurer
dans la focieté pour s’inftruire plus à fonds
des faintes lettres. Enfin il choifit une vie moïenne ,
qui joignît la tranquillité de l’une & l'utilité de l’au-
e*rm.i.p. jj.b. tre. Mais ce qui le détermina principalement à demeurer
dans le monde : fut le grand âge de fes païens
, qui l’obligea de prendre foin d’eux & de leurs
affaires. Il y éprouva de grandes peines, & par la
difficulté de gouverner des domeftiques , qui s’ai-
griffent contre la feverité des maîtres & abufent de
leur douceur •. & par le poids des tributs , dont les
terres étoient chargées , & la dureté de ceux qui en
faifoient le recouvrement : enfin par les procès, où
il avoir à combattre la mauvaife foi des parties & la
corruption des juges ; & où il reconnoît impoffible
de conferver la pureté de coeur fans une grâce particulière
de Dieu. Ces embarras l’empêcherent de
etts-rp-r- fuivre S. Balile dans fa retraite , comme il lui avoir
promis.
Saint Balile ne l’attendit pas ; & au retour de fes
voïages d’Egypte & d’Orient, aïant. refolu d’imiter
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les folitaires qu’il avoit vûs : il fe joignit d’abord à
des perfonnes qu’il1 trouva dans fon païs, pratiquant
à l’exterieur la même maniéré de vivre. C ’étoit Eu-
ftathe de Sebafte & fes difciples 8 dont l’habit grof-
fier , la vie auftere & l’éloignement de tous les plai-
firs, faifoit croire à S. Balile que leur intérieur étoit
faint, & que leur compagnie pourrait lui être utile
pour fon falut.
Plufieurs l’avertifloient de les éviter , comme des
gens fufpeéts ^ ’Arianifmê, à caufe d’Euftathe leur
maître : mais S. Balile prenoit ces avis pour des mé-
difances, & craignoit de juger temerairement de fon
prochain : il ne s’en defabufa que dans la fuite. Cependant
il choifit pour fa retraite un lieu defert dans
la province de Pont, près du fleuve Iris & d’Ibore f
petite ville épifcopale. Ce qui l’y attira, c’eft que
fainte Macrine fa foeur s’y étoit déjà retirée avec leur
mere fainte Emmelie , en une terre qui leur apparte-
noie. Sainte Macrine y avoit alfemblé plufieurs femmes
de fes domeftiques & de fes amies , & formé un
monaftere qu’elle gouvernoit : éloigné feulement de
fept ou huit ftades : c’e ft -à -d ir e un peu plus d’un
quart de lieuë d’une églife des quarante martyrs, à
qui toute cette famille avoit une dévotion particulière
•, & fainte Emmelie y avoit fait mettre de leurs
reliques, dont la tranflation fut accompagnée de
deux miracles. En ce monaftere elles vivoient toutes
dans une parfaite égalité , fans diftinélion de dignité
ni de rang : même table , des lits pareils, toutes
chofes communes : leurs delices étoient l’abfti-
nence leur gloire d’être inconnues : leurs richeffes
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Bajtl. ep> 7 ?s
Greg. Ntjf. v h à '
Macr• p. 3S4.