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fourni aux peintres fur verre l’idée d’employer quelquefois
ces deux couleurs pour en faire des verds
de différens tons , & fur-tout du verd de terrafle :
voici comment ils s’y prennent.
Après avoir couché du côté du travail, c’eft-à-
dire, du côté où le delfin , les ombrés & lès clairs
font tracés lùr le verre avec la couleur noire ; après
avoir couché , dis-je , la couleur bleue qu’ils veulent
rendre verte, ils couchent de jaune lùr le revers
delà pièce de verre, c’eft-à-dire, lùr le côté
où elle n’eft point travaillée, l’endroit qu’ils veulent
faire paraître verd.
Cet ulàge donne , après la recuifîon , deux différentes
nuances de couleur verte , à proportion que
l’une ou l’autre de ces deux couleurs ont été couchées
plus ou moins épaifles.
Couleur bleue•
KunckeLs’étant beaucoup étendu dans lès différentes
recettes lùr la eompofîtion d’june couleur
bleue, dont l’ufàge fut commun aux peintres fur
verre comme en faïence , je me contente d’extraire
Ici celles qui m’ont paru plus fondantes , & par
«onlequent plus propres à la peinture lùr verre.
J’ai excepté de ce nombre, ajoute M. le Vieil,
celles dans lefquelles il prelcrit l’ufàge du tartre.,
par la railon qu’il en donne lui-même, c’eft-à-dire,
à caufè de l’oblcurité que peut y porter l’abondance
des lèls que le tartre contient.
Prenez une partie de litharge , trois parties de
iable , une partie de làffre, ou , à fèn défaut , de
bleu d’émail.
Ou prenez deux livres de litharge , un quarteron
de cailloux & un quarteron de làffre..
Ou quatre livres de litharge, deux livres de
cailloux & une livre de'làffre.
Ou quatre onces de: litharge trois onces de
cailloux pulvérifés, une once de làffre & une once
de verre blanc.
Quelque recette que Vous choifilfiez, faites fondre
ce mélange V fâites-en l’extinéiion dans l'eau;
remettez-le en fuite en fufion; répétez cette opération
au moins trois fois.
Il lèroit bon de faire calciner ce mélange, le
laiffant jour & nuit , pendant quarante-huit heures
a chaque calcination dans un fourneau de verrerie.
Pour faire la même couleur, félon Haudicquer
de Blancourt , prenez deux onces de làffre, autant
de mine de plomb , & huit onces de labié blanc
très - fin. Mettez ces matières dans un mortier de
bronzé, pour les y piler le plus que vous pourrez.
Mettez-les eçfuîte dans un bon creulèt couvert
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& luté, au fourneau à vent, auquel vous donnerez
un feu v if pendant une heure.
Retirez votre creufèt du feu ; & lorlqu’il fera
refroidi, verlèz la matière dans le même mortier ;
pilez-la bien; a joutez-y la quatrième partie.de Ion
poids de làlpètre en poudre; mêlez bien le tout
enlèmble ; rempliffèz-en le creulèt, que vous couvrirez
& que vous mettrez au même fourneau pendant
deux heures, donnant le feu comme ci-devant.
La matière étant refroidie, vous la rebroierez ,
&-y ajoutant une fixième partie de làlpètre, vous
ferez recalciner de. nouveau au même feu pendant
trois heures.
Vous retirerez enlùite la matière du creulèt avec
la fpatule de fer rougie. au feu , comme pour le
verd.
Félibien , en parlant de la préparation de la couleur
bleue propre à peindre lùr le verre, fè contente
de dire que l ’azur ou le bleu, le pourpre &
le violet fè font de même que le verd, en changeant
. lèulement la paille de cuivre en d’autres
matières ; làv.oir, pour l’azur ou le bleu en làffre ,
pour le pourpre en périgueux , & pour le violet
en faffre & périgueux, à mêmes dofes, autant de
l’un comme de l’autre.
Suivant M. le V ie i l , fes lecrëts de famille en
difent davantage, & donnent lùr cette couleur les
trois recettes luivantes.
Prenez trois onces de bleu d’émail, du meilleur
qu’on tire de la Saxe par la Hollande; ajoutez-y une
once & demie de fonde de Gênes -ou d’Angleterre,
qui néanmoins nous vient meilleure d’Alicante en
Elpagne : mettez le tout' calciner à un fourneau
de verrier, de fàyencier ou d’un potier ç!e terre*
Les calcinations réitérées rendront cet émail plus
fondant. On peut en ulèr comme aü verd, quoique
deux calcinations puiflent lùffire pour rendre cette
couleur fondante.
Autre*
Prenez, du lèl gemme , trois onces de bleu -d’email
de Hollande, environ la quatrième partie de
làlpètre & autant de borax. Mettez lé tout bien
pilé & mêlé enlèmble calciner dans un creulèt :
vous le lai lierez refroidir : vous pilerez de nouveau
dans le mortier de bronze ; Vous y ajouterez
une quatrième partie de làlpètre , autant de borax,
& ferez calciner une féconde fois ; ce qui lùffira»
Autre.
Prenez une livre d’azur ou bleu de- cobat, une
quatrième ^partie de cryftal de Venilè , auquel on
peut lùbftituer celui de Bohême, une .fixième partie
de oeercure, autant d’étain de glace ou bifmutfe.
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8c autant de bon borax de Venife. Faîtes calcinef
le* tout à un feu très - vif pendant deux ou trois
heures, 8c vous aurez un très-beau bleu & très-
fondant.
Autre.
Prenez unê. once de mine de plomb rouge, fix
onces d’azur en poudre grolfière & foncée, & deux
onces de làlpètre raffiné , ou quatre onces d’azur
d’émail, & une once d’aigue-marine, ou fix onces
d’azur de mer, deux onces de làlpètre raffiné, &
demi-once de borax de Venife ; ou deux onces d’azur
d’émail, autant d’aigue-marine , & une once
de. làlpètre.
Quelque recette que vous choififfiez, pilez, ta-
mifez, calcinez une bonne fois à feu vif, & broyez
lùr la table dç verre avec la molette de verre,
comme au blanc.
Couleur violette.
Pour faire le violet, prenez une once' de faffre,
une once de périgueux bien pur & bien net, deux
onces de mine de plomb, & huit onces de fable
fin. Broyez ces matières dans un mortier de bronze,
pour les réduire, en poudre la plus fine que vous
pourrez ; mettez ces poudres dans un bon creù-
fet couvert & luté, au fourneau'à vent , & leur
donnez bon feu pendant une heure; puis retirez
votre creulèt.
Lorlqu’il fera refroidi, vous en broierez la matière
dans le même mortier; vous y ajouterez la
quatrième partie de làlpètre en poudre : procédant
au fùrplus, comme il a été indiqué ci-devant par
M, dé B-lançourt pour le verd.
Autre,
Prenez un poids de pierre de périgueux avec
autant de faffre, que vous mettrez dans un creulèt:
faites fondre, pilez enfuite la matière; ajoutez-y
un tiers pelànt de làlpètre; calcinez le tout quatre
ou cinq fois à un feu vif, en ajoutant à chaque calcination
le même poids de falpêtre.
Autre.
Prenez une once de périgueux le plus clair &
le plus luilànt , car le noir vaut moins ÿ autant de
mine de plomb rouge, & fix onces de làble ou de
cailloux calcinés. Suivez au reftetout ce qu’on a dit
ci-devant pour la couleur verte. Ajoutez-y feulement
une quatrième calcination avec une fixième .
partie de làlpètre.
Quand vous emploierez le violet, fi vous le
voulez un peu couvert, couchez-le fort épais : il
n’eft pas alors fi lùjèt à noircir.
Si vous voulez avoir du violet très-haut en cou-
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leur, quand vous en ferez à la dernière calcination ,
partagez toute la couleur vitrifiée par- les trois premières
calcinations en deux parties égales; calci-
nez-en une pour la quatrième fois avec la dofè
ordinaire de làlpètre partagez cette moitié en
quatre autres parties ; ajoutez-y une quatrième partie
d’azur déjà calciné ; recalcinez de nouveau avec
une huitième partie de làlpètre ; mêlez, pilez , ta-
milèz & broyez comme à la couleur blëue.
Enfin, lùppofé que vous manquiez de violet,
& de tems pour en préparer, couchez lùr votre tra-
| vail de l’azur un peu clair, & par derrière le travail
couchez de la carnation toute pure , ce qui
vous donnera un violet foncé.
Couleur pourpre.
Pour faire la couleur pourpre, prenez une portion
de périgueux, deux portions de làble blanc ,
quatre de làlpètre & quatre de mine de plomb. Pilez
, mêlez, calcinez julqu’à cinq fois , 8c mêlez à
chaque calcination de nouveau làlpètre.
Autre.
Prenez une once de la couleur bleue, & une
once de la couleur violette, calcinées comme d e f- lus; pilez, mêlez, recalcinez, en y ajoutant une
quatrième partie de làlpètre , & broyez comme à
l’azur :. vous aurez une très - belle couleur de
pourpre.
Lorlque vous n’en avez pas de -préparé , prenez
de l’azur & du violet calcinés; mêlez le tout
enlèmble,. en broyant fur la table de verre avec
la molette de même matière.
Si vous couchez clair ce pourpre, il vous donnera
une fort belle couleur de vinaigre.
Les. émaux ou couleurs propres à peindre lùr
verre, dont je viens de donner les recettes, fur-
tout le blanc, le verd , le bleu , le violet & le
pourpre, étant produits par des calcinations & vitrifications
des differentes lùbftahces dont ils font
compofés, j’aî cru, dit M. le Vieil, à l’exemple
des grands maîtres , dont j'ai lùivi les en feigne-
mens, ne devoir pas conclure ce chapitre, làns parler
de la nature & du choix des creulèts & des
fourneaux propres à cet effet ; &'comme les cinq
émaux lùfdits s’emploient tous de la même façon ?
je-finirai par la manière de les préparer avant de
s’en, lèrvir pour peindre..
Les curieux , lùivant la remarque de M. de Blancourt,
pourront éviter les inconvéniéns de voir les
creulèts lè rompre avant que la matière foit cuite 8c purifiée, & de,courir nique de la gâter, en la ver-
lànt dans un autre creulèt, fi , au lieu des Creulèts
ordinaires, ils en font faire de la même terre dont
les verriers font leurs pots , qui réfiftent plus de