
P O U D R E S F U M I G A T 1 V E S
A N T I - P E S T I L E N T I E L L E S ,
Inventées a M o fcou p a r la commiffion contre la pefie q u i, en 177*3
ravagea ïempire de Rufiie , SC fu r-to u t M ofcou.
( A r t des )
Première recette , poudre forte.
X renïz des feuilles de genièvre hachées très-
menu , de la raclure de baies de gayac, des baies
de genièvre concafTées , égale quantité de chacun ;
du lbn de froment, fîx livres ; du nitre crud réduit
en poudre, huit livres; du foufre à canon pulvérifé,
iîx livres ; de la myrrhe, deux livres. Mêlez le
tout, & faites-en une poudre fumigative félon les
règles de l’art.
Comme cette poudre contient dans fà composition
une grande quantité de nitre crud & de foufre, c’eft
pour cette raifon qu'on T appelle poudre fumigative
anti-peftilentielie forte. Elle éfoit deülinée à nettoyer
l ’intérieur des maifons, les lieux où l’on avoit'formé
des dépôts de peftiférés, les habillemens quelconques
qui avoient recouvert quelque temps les malades
ou les morts , de quelque nature qu’ils fuffent,
pourvu que la couleur n’en fut point trop délicate.
Seconde recel te j poudre fumigative anti-peftilenticlle
foible.
Prenez des fommités d’arbrotanum hachées très-
menu , cinq livres ; des feuilles de genièvre hachées
de meme, quatre livres; des baies de genièvrecon-
caffées , trois livres ; du nitre crud réduit en poudre
, quatre livres ; du foufre à canon pulvérifé,
deux livres & demi ; de la myrrhe, une livre &
demie. Mêlez le tout , & faites-en une poudre fu-
migative félon les . règles de Part.
Cette poudre contient auflî du nitre crud & du
foufre ; mais comme la quantité en eft moins.grande
que dans la première, c ’efl pour cela qu’on l’appelle
foible , comparativement. Elle fervoit aux mêmes
ufages, avec cette différence néanmoins, qu’onl’a-
daptoit de préférence aux vêtemens d’une couleur
délicate & aux meubles , qu’on croyoit moins imprégnés
du venin peftilentiel,
Troifième recette ; poudre fumigative anti-peftilen\
tielle odoriférante.
Prenez racines de calamus aromatique hachées *
trois livres ; de l’encens deux livres ; du fuccin ,
une livre ; du ftorax , demi-livre ; des fleurs de
rofes demi-livre ; de la myrrhe, une livre ; du nitre
crud réduit en poudre, une livre & demie ; du
foufre à canon pulvérifé, demi-livre. Mêlez le tout
& faites-en une poudre fumigative félon les règles
de l ’art.
Il n’y a dans cette dernière qu’une petite quantité
de nitre crud & de foufre ; ce font les ingrédiens
odoriférans qui furabondent. Son ufage étoit defliné
aux étoffes dont les couleurs étoient les plus délicates
, ou à celles fur lefquellès on avoit quelque
doute feulement qu’elles funent imbues du^virus pef-
tilentiel. On l’employoit aufli pour parfumer agréablement
l ’intérieur des maifens , ne pouvant gâter
aucun ameublement, ni nuire à la poitrine. ■
Maniéré, de s’en fervir, '
Voici la méthode de fe fervir de ces poudres,
telle qu’elle eft preferite par la commiffion contre la
pefie.
On commençoit par fermer les fenêtres & les
portes de l ’appartement qu’on vouloit parfumer ;
on ,bouchoit enfuite jufqu’aux moindres fentes qui
pouvoient donner accès à l ’air.
Si c’étoient des linges ou des habits qu’on voulût
purifier du virus peflilentiel, on étendoit des cordeaux
dans «et appartement, fur lefquels on ex-
pofoit le tout ; on mettoit aux quatre coins des réchauds
remplis de charbons ardens, ou un au centre
, fi l’appartement n’étoit pas grand ; & le parfumeur
revêtu d’une grande redingotte de toile
cirée 8c bien foigneux de fe garantir du contaél,
verfeit fur çç§ charbons une affez grande quantité
fle poudre polir exciter une fumée epaiffe Sé Capable,
de pénétrer toutes les chofes expofées à fon aétion.
Il répétoit cette opération deux fois par jour,
matin & foir, & la continuoit quatre jours durant,
fi l’exiftence du virus dans les hardes etoit tres-
conftatée : fi au contraire elle n’étoit que douteufe,
la fumigation ne fe faifoit que deux ou trois jours
au plus.
A la fin on ouvroît les portes & les fenetres,
pour donner à l’air un libre cours ; & la femaine une
fois écoulée, on reprenoit l’tifage de ces chofes
parfumées, faris aucune crainte d’être atteint de la
contagion peftilentielle.
Une remarque effentielle à faire efl la neçeflîte
pour le parfumeur de s’évader promptement de
l’appartement, après avoir verfe la poudre fur les
charbons ardens.
Celle de la première recette fur-tout efl dange-
reufe pour la poitrine , à caufe de la quantité de
foufre qu’elle contient, & dont les émanations dans
l’air attaquent vivement les poumons , en caufant
une fuffocation qui pourroit devenir mortelle»