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une poignée dans la main. On le met pour lors en
magafin ; & avant que de le mettre en vente, on le
trie pour en réparer les grains trop petits, malnourris
& plats. On l’enfutaille quand on veut le
conferver parfaitement.
Quoique le cacao qui vient de la côte de Ca-
raque foit plus onétueux, d’une pâte plus fine, &
moins asner que celui des ifles françoifes, la variété
de goût qui fe trouve entre les elpagnols, les
françois & les habitans du nord, fait préférer le
dernier à ceux-ci, & le premier aux autres.
On nous apporte de l’Amérique des petits pains
de pâte de cacao d’une livre pelant, pour faire du
chocolat.
On fait avec le cacao des confitures, du chocolat,
& une huile qu’on nomme beurre de cacao , qui
eft très-nourriffant.
Lorlqu’on veut confire du cacao , on met pendant
quelques jours tremper dans de l’eau de fontaine,qu’on
a foin de changer foir & matin, les amandes qu’on
a tirées des cônes à demi mûres. Retirées de l ’eau
& bien elïuyées, on les larde de citron & de ca-
nelle, on les jette dans un léger fyrop de fucre tout
bouillant & bien clarifié. Sorties de ce fyrop , on
les laifle égoutter quelques temps, & on les fait
tremper pendant vingt-quatre heures dans un fyrop
un peu plus fort de fucre que le précédent. On réitère
cinq à lîx fois cette opération, en ajoutant à
chaque fois un peu plus de fucre,au fyrop.On obferve
de ne mettre jamais ces amandes fur le feu, & de
ne leur donner d’autre cuifîbn que la première
qu’elles ont eue. On finit par leur donner un fyrop
fort épais qu’on verfe par-deilus; & lorfqu’il eft
refroidi, on y met, li l’on veut, quelques gouttes
d’elîence d’ambre.
Quand on veut faire cette confiture au fec, après
avoir imprégné les amandes du premier fyrop, &
les avoir plongées dans un nouveau fyrop bien clarifié
& fort de fucre, on les met dans une étuve pour
leur faire prendre le candi.
L ’huile ou beurre de cacao fe fait de cette manière.
Le cacao étant rôti, mondé, pafîë fur une
pierre, & réduit en une pâte bien fine , on la met
dans une bafline p eine d’eau bouillante, fur un feu
clair où on la laiffe jufqu’à la confomption prefque
entière de l’eau. Pour lors on remplit la bafline de
nouvelle eau ; à mefiire que cette eau fe refroidit,
l ’huile monte à fa furface & fe fige comme du
beurre : lorfqu’elle n’-eft pas bien blanche, on la
fait fondre de nouveau pour la dégager des parties
groflières qu’elle contient.
De tous les fruits de l’Amérique le cacao eft
celui qui rapporte le plus de revenu, & dont la
dépenfe eft la moindre. Vingt nègres fuffifent à l’entretien
de cinquante mille cacaoyers, quiproduifent,
annee commune, cent mille livres pelant d’amandes
qui, étant vendues au plus bas prix , donnent
trente-fept mille cinq cens livres de notre mon-
noie.
C a chou ( Préparation du ).
Le cachou, nous vient du Malabar, de Surage ,
du Pégu, & des autres côtes des Indes. C’eftun fuc
gommo-réfineux, durci par art, d’un roux noirâtre
à l’extérieur, 8c marbré de gris extérieurement,
fans odeur, d’un goût d’abord amer & aftringent,
plus doux enfuite, & d'une faveur d’iris ou de violette,
fondant en entier dans la bouche & dans l ’eau,
s’enflammant & brûlant dans le feu, quelquefois
mêlé de fable, qu’une fupercherie induftrieufe y a
inféré pour en augmenter le poids.
On le confond quelquefois, mais mal-à-propos,
avec l ’extrait de la noix d'acajou, qui eft un fuc
épaifli de ce fruit, & dont la faveur eft bien différente
de celle du cachou.
Dans le mémoire que M. de JuJJieu donna à l’Académie,
& qui a été imprimé en 1710 , il prétend
que le cachou n’eft qu’un extrait dû arec, rendu folide
par évaporation,
U arec ou l'areca, dont on extrait le cachou, eft
une efpèce de grand palmier des Indes orientales
qui ne croît que fur le bord de la mer ou dans des
terres légères & fàblonneufes.
Son fruit reflèmble à un oeuf de poule pour là
forme & la-gr-ofleur : fon écorce, de couleur un
peu jaunâtre, eft molle & garnie d’une efpèce de
bourre, au centre de laquelle eft un noyau qui s’en
fépare facilement lorfque le fruit eft fec. Les indiens
, qui en font extrêmement amateurs & qui en
mâchent- continuellement, le préparent ainfi. Ils
coupent en deux ou trois morceaux la noix de faufel
ou d'areca , après l’avoir cueillie pendant qu’elle eft
encore verte, & ils la-font bouillir dans de l’eau
avec un peu de chaux de coquillages calcinés, jufqu’à
ce que les morceaux de la 'noix Puent devenus
d’un rouge obfcur. Ils pafTent cette décodion pendant
qu’elle eft chaude ; & lorfqu’elle eft refroidie,
ils la féparent de la lie qui va au fond du vaifleau :
ils y ajoutent de l ’eau de l’écorce verte du fianra,
qui eft une efpèce d’acacia des Indes dont l’écorce
eft aftringente & rougeâtre, qu’ils pilent & font macérer
pendant trois jours.
Quand le fuc de Y areca eft épaifli, ils l’expofent
au foleil fur des nattes, & le réduifent en paftilles.
Les grands & les riches y mêlent du cardamome,
du bois d'aloès , du mufe, de l’ambre, & tout ce
qui peut contribuer à le rendre plus agréable au
goût.
Celui que font les portugais dans la ville de Goa,
: & qui a une trop violente odeur aromatique, nous
! parvient fouvent fous différentes-figures, mais plus
communçiïient fous celle de crottes de fouris. Il eft
p r o p r o
rare qu’elles ne foi eut pas mélangées de quelque
matière éftangère, & qu’elles fortent pures de leurs
mains.
Le cachou fîmple ^ naturel & fans aromates , n’eft
qu’un pur extrait de Y arec, rendu folide par l’évaporation
de toute l ’humidité. Pour le faire, il fuffit
de couper par tranches les graines d'arec vertes ;
on les met bouillir dans l’eau jufqu’à ce qu’elles
foient chargées d’une forte teinture d’un rouge
brun ; on la. fait enfuite évaporer jufqu’à confîftance
d’extrait auquel on donne la forme qu’on veut, &
qui fe durcit bientôt après. Il eft employé en mé‘
decine.
M. Garcin 3 célèbre naturalifte, prétend que le
cachou n’eft point tiré de Y arec, mais d’un arbre
nommé caté 3 qui croît dans les Indes, & qui porte
encore le nom de caté indien, lycion, 8tkaath.\jes
raifons qu’il en apporte font que dans le pays où
l’aréquier eft commun, on n’y fait point de cachou,
& qu’on l’y fait venir d’ailleurs ; qu’à Bengale,
d’où on le tire , il n’y Croît point d’aréquier, parce
que cet arbre, qui craint la féchereffe & le froid,
11e peut guère Venir au-deffws de la latitude de
quinze degrés ; que Y arec qu’on porte au Bengale
par mer, s’y vend plus cher que le cachou brut, 8c
qu’il eft rare qu’ils y foient tous les deux au même
prix ; que le mot' cachou dérive de celui de caté-
chou, compofé de caté, qui eft le nom de l’arbre ,
& de chou 3 qui fîgnifie fuc dans la langue du pays.
Quoi qu’il en foit de la validité de ces railôns,
il eft certain que les préparations du fuc du caté
font les mêmes que celles de Y arec.
Le cachou de la Chine eft formé quelquefois en
boules aufli grofles que le poing & fort dures. Les
Chinois le mettent infufer & s’en fervent à la place
du thé. Les Ruiïes, qui font le commerce de la
Chine , l’appellent thé de pierre.
Le cachou paye trois livres par cent pefant pour
droit d’entrée.
C a s s a v e ( Préparation de la ).
La cajfave eft une fubftance farineufe, tirée de la
racine d’une plante appellée manioc. Cette racine,
mangée fans préparation , eft un poifon mortel.
Lorfqu’on en a féparé la partie nuifîble, on en fait
un pain dont les lauvages, les nègres, les européens
& même les dames créoles les plus délicates,
préfèrent quelquefois le goût à celui du pain de
froment.
Pour faire la cajfave, lorfqu’on a recueilli la
racine de manioc , on la dépouille de fa peau, on
la râpe fur de groffes râpes de cuivre ; & , après
l’avoir mife dans un fac fait d’écorce d’arbre on la
place fous une prefie faite avec une grofle branche
d arbre attachée au tronc, 8c qu’on charge d’un fort
poids«
Quand la matière n’a plus de Hic, & qu’elle oft:
bien deiïechée, on la paffe par un crible un peu
gros, on l’étend enfuite fur des platines de fonte,
fous lefquelles on fait du feu pour là cuire.
On diftinguela cajfave d’avec la farine de marioc,
en ce que celle-ci eft un amas de grumeaux de
manioc dèfféchés & divifés, & que la cajfave eft
faite dès mêmes grumeaux liés & joints les uns aux
autres par la cuilfon, ce qui forme des efpèces de
galettes larges & minces, à-peu-près comme du
croquet, efpèce de pain d’épices qui eft fort fec &
fort dur.
Les. fauvages font leurs galettes plus épaiffes ; la
farine & la cajfave leur fervent également de pain.
Lorfqu’o.n veut en faire ufage, on l’humede avec
un peu d’eau pure ou avec un peu de bouillon.
De la fécule que dépofe le fuc de cette racine,
on en fait une efpèce d’amidon qu’on appelle mou-r-
chache , qui.- fert aux mêmes ufages que le nôtre.
On en fait encore des gâteaux qui reffemblent beaucoup
à nos échaudés.
L ’édit de 1685 ordonne aux habitans des ifles
françoifes de fournir pour la nourriture de chacun
de leurs efclaves, âgé au moins de dix ans , trois
cajfaves par femaine , chacun pefant deux livres &
demie , ou la valeur de quatre pintes de. farine de
.manioc.
C o R A I L L E U R OU C o R A I L L E R .
On appelle Corailleurs ceux qui font tous les ans
la pêche du corail.
L e corail, qui fait une des branchés du commerce
des marfeillois, & qui fe trouve plus fréquemment
dans la Méditerranée que dans l’Océan,
eft une produâion marine qui naît fous l’eau, qui
a la dureté de la pierre, & qui eft la plus beile &
la plus précieufe de toutes les fubftances qu’on appelle
improprement plantes marines. Celui de la
Méditerranée eft ordinairement rouge., couleur de
chair, jaune, blanc ou panaché,
Lorfqu’on fait cette pêche fur les côtes de la Provence,
on emploie communément des plongeurs
qui, pour mieux arracher le coiail qui eft attaché
à la furface des rochers couverts par la mer, fe
fervent de deux machines, dont l ’une eft une grande
croix de bois au centre de laquelle ils attachent un
poids très-pefant pour le précipiter au fond de l’eau.
Cette croix, qui eft fufpendue par une longue &
groffe corde , a à chaque extrémité un filet orbi-
culaire.
Dès que les corailleurs ont jetté cette croix dans
l ’endroit que les plongeurs ont indiqué , & où il y
a des rochers couverts de corail, le plongeur, qui
eft chargé de gouverner cette machine, pouffe une
ou deux branches de cette croix dans ùn des creux
du rocher; par.ee moyen il embrafle dans les filets