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Cette première opération fé fait ou avec la drague
, ou avec la pointe du pinceau, ou avec une
plume ni trop dure ni trop molle, imbibée de la
couleur noire, tenue dans le plaque-fèin incliné à
découvert pendant qu’il remplois ; car alors le la-
.vis n’y doit plus furnager.
Le trait en retirant doit être plus nourri du cote
des ombres les plus fortes , 8c plus délié du cote des
clairs.
On doit déjà fentir, dans cette opération, la légèreté
de la main de l’élève, & la facilité de la touche
qu’il doit avoir acquife par le traitement fréquent
& bien entendu du crayon.
S i , faute d’avoir fuff.fâmment couvert la couleur
noire de lavis pendant la ceflation de l’ouvrage ,
elle venoit à fécher en tout ou en partie, il faut
nécefîâirement la relever du plaque-fèin, la rebroyer
pendant une bonne heure fur la platine de
cuivre avec de l ’eau bien claire, y mêler promptement
vers la fin un peu de gomme arabique bien
sèche, (ans difcontinuer de broyer le tout jufqu’à
ce que la gomme foife bien fondue 8c incorporée
avec la couleur qui, lorfqu’on la relève de deflus
la platine, ne doit .être ni trop molle , ni trop
épaiffè.
L a dofe de la gomme doit être de la gro fleur
d’une noifètte, s’il y a gros comme une noix de
couleur.
Quand tous les traits d’un deflin (ont retirés, il
faut laiffer fecher l’ouvrage pendant deux jours, de
manière que s’il y avoir pour trois jours d’ouvrage
à retirer, le peintre fur verre pût commencer le
quatrième jour à coucher de lavis , ou à croifèr les
premières hachures faites en retirant, ce que les
graveurs diftînguent par premières 8c fécondes tailles
, dont les premières font faites pour former , &
les fécondes pour peindre.
Cette première manière, qui demande à la fois
une touche ferme 8c libre, ne s’exerce guère que
dans les ouvrages plus hors de portée de la vue.
On y épargne le verre dans les endroits qui doivent
fervir de clairs & de rehaut, comme on épargne
le vélin §ç le papier dans la peinture de miniature*
Ces hachures dans les ombres fortes des draperies
, •& même dans les contours des membres & le
gros des chairs, fé font à la pointe du pinceau
garni de couleur noire. En ce cas , leurs extrémités
doivent toujours être plus déliées dans les
chairs« '
Celles qui çonduifént naturellement aux plus
grandes lumières, & qui doivent,fervir à fixer la
rondeur & le relief des chairs, fe terminent, comme
dans la ’ gravure , par des points imperceptiblement
liés les uns aux autres ; de manière que çes
hachures & ces points, amenés en tapant & en
adoucifïant vers les chairs avec le balai, fuivant la
touche du crayon du defïinateur & le. moelleux du
pinceau du peintre que l ’artifte fé propofé de copier
fur le verre , ou que le tout produifè fur lui l’effet
de l ’efîampe fur le papier.
On emploie auffi , dans cette première manière,
la pointe de la hampe du pinceau ou de la brofle
dure , pour découvrir , d’après le lavis, le fond du
verre, dans les endroits où il convient de le faire ;
& ces hachures doivent toujours fé terminer, comme
celles qui font faites en chargeant la pointe du
pinceau de couleur noire, en adoucifTant vers les
grandes lumières,.
Cette manière, qui paroît plus appartenir au fe*
cond traitement de la peinture fiirverre, fért beaucoup
auffi, dans le premier, pour les rehauts de la
barbe 8c des cheveux que les traits noirs , adoucis
parle lavis , peuvent également rendre, mais d’un©
manière plus dure.
Dans le premier, comme dans le fécond traitement
de la peinture fur verre, il eft d’ufage d©
coucher d’un lavis très-léger de rouge ou carnation
le revers des pièces fur lefquelles lfertifte aura,
peint des têtes ou d’autres membres.
Cette couche doit être égale par-tout. Elle fè
fait en tapant fur ce lavis encore frais avec le balai
de poil de gris«
Lorfque le lavis de carnation eft fée , fi le pein*
tre fur verre veut mieux faire fèntir le ton naturel
des. chairs , dans les têtes fùr-tout où la jufteffe on
l’irrégularité des proportions doivent exprimer la
beauté, la laideur 8c les caractères des paffions le
goût du deffm le conduira, ou à charger fur Je re-.
vers de quelques traits noirs, pu à emporter, avec
la. pointe de la ,hampe du pinceau , la partie de
lavis de carnation , qui lui paraîtra devoir mieux
faire fortir ces effets dans, les clairs 8c dans les lui-,
fans.
Il faut auffi qu’il-prenne garde de donner à ce
lavis de carnation un ton trop rouge.
Pour éviter cet inconvénient, il eft bon qu’il
en faffe des "effets fur de petits morceaux de
verre.
Il les introduira petit à petit dans le feu domestique
pour les faire recuire 8c en fèntir l ’effet après
la recuiffon, qui eft cenfée faite iorfqu’ils font de-*
venus hien rouges au feu.
Le fécond traitement de la peinture fur verre
ayant quelque chofe de plus délicat que le premier,
on s’en fért par préférence dans les morceaux les
plus expofes à la vue, comme dans les payfages ,
les grifàilles, 8c même dans les lointains des grands
vitraux. Ses effets pour le tendre font les mêmes
que ceux 4p la grayur© pn mao&tÇ «pire.
En effet, le peintre fur verre , après aVoir bien
purgé, comme nous l ’avons dit ailleurs , fâ pièce
de verre- de toute graiffe , humidité 8c pouflière , la
couvre en entier d’une teinte de lavis plus ou moins
foncée , félon que le fujet qu’il fé propofé de peindre
doit être plus ou moins chargé d’ombres.
En ce cas, il doit eflâyer fâ teinte , ou fur un
morceau de papier , bu fur un morceau de verre ,
pour en fèntir l’effet. Lorfqu’il fèra fée , il doit
coucher de lavis le plus proprement qu’il lui eft
poflible, 8c fé fèrvir des plus gros pinceaux ufîtés
pour laver fur le papier à l ’encre de la Chine. |
• On étend ce lavis fur toute la fupërficie du carreau
de verre avec un-des plus longs balais de poil
gris, avec beaucoup d’égalité, 8c en halénant continuellement
defliis , fur-tout dans les grandes chaleurs
, ou lorfque l’air eft plus vif.
Quand le lavis eft bien fec , c’eft-à-dire au bout
dë deux jours, le peintre fur verre ayant pofé devant
lui à plat , fù r la pancarte, le deffm d’après
lequel il veut peindre, y applique la pièce ou carreau
couché dé lavis , avec les précautions que nous
ayons indiquées, crainte qu’il ne fe dérange.
Enfliite il efface de ce lavis avec la broffe dure,
ou la pointe de la hampe du pinceau , autant qu’il
en faut pour faire paroître les jours 8c les clairs du
deffm qu’il apperçoit à travers le verre, en ménageant
le lavis de façon qu’il ne. faffe que l’adoucir
avec la broffe dans les demi-teintes, qu’il l’efface
entièrement pour les plus clairs 8c les luifans, 8c
qu’il le laiflè en entier quand il s’agit des maffes
d’ombres.
. Cette première opération finie , on couche pour
la fécondé fois toute la pièce d’un lavis plus fort,
fi la première teinte eft foible ; ou plus foible, fi
la première teinte eft forte. On la laiffe fécher
pendant deux autres jours.
1 ~ en cuiiiiiieiiçant par
lumières 8c les parties qui fé détachent généralemei
en clair de deflus un fond plus brun : on va pet
a petit dans les reflets ; enfin on prépare léger
ment le tout par grandes parties, jufqu’à ce qi
1 effet de tout fe faffe fentir.
Le peintre fur verre ceflânt d’être affujetti à fui-
vre^Sc copier ftriétement le deflin qu’il n’a pris ju'fi-
qu a prefént qu au travers du verre, peut rendre fâ
touche plus ferme & plus favante, en y appliquant
ce goût de deflin dont il aura contradé l’heureufé
xacilite par une ancienne 8c continuelle application
a cette partie de fon art.
- --- vie jjrfjjier Diane qui.
reüeter tout l’ouvrage , les yeux portés de temp
autre fur fon deffm qu’il tient à côté de lui .
Arts & Métiers. Tom* V L
peut, en Commençant toujours parles grandes lumières
, conduire fon ouvrage à fâ fin.
Mais le defir d’avancer ne doit jamais lui permettre
de s’empreffèr à ôter du lavis dans les clairs ,
de façon qu’il en emporte trop ; car, autre qu’il
lui féroît trop difficile d’en remettre , celui qu’il y
remettroit après coup pourrait n’avoir pas la teinte
néceffâire.
La pointe de la hampe, du pinceau , ou celle
d’une aiguille inférée au bout du manche de; la
broffe dure, lui fèrvira pour éclairer le« plus petites
parties, fur lefquelles il ne doit point refter
de lavis.
Dans les parties les -plus larges , elle fèrvira à:
attendrir 8c adoucir , 8c la pointe du pinceau chargée
de la couleur noire fournira les maffes d’ombres
qui demanderont plus de force.
Enfin le peintre fur verre doit toujours conférveV,
dans les chairs, une légère vapeur de ce lavis de
carnation , qui, comme nous l’avons dit dans le
premier traitement, fért avec les rehauts à en exprimer
la rondeur 8c les reliefs.
Nos artiftes récollets deflinoient le fujet qu’ils
dévoient peindre fur verre, fuir un papier bleu clair
avec un crayon blanc ou charbon fin.
Ils fiiivoîent, dans les ouvrages les plus élevés
8c les moins en vue , notre première manière de
traiter la peinture fur verre.
Leur verre étant coupé 8c bien net, ils l ’appli-
quoient fur le deflin, ils en. retiraient les principaux
traits fur le verre 8c ombraient par hachure
8c demi-teintes fondues à la pointe du pinceau
au-lavis de noir, plus clair 8c plus adouci
vers les extrémités dans les draperies, 8cc. 8c dans
les chairs, avec ce même layis.mêlé d’un peu des
fondrilles de leur carnation , qu’ils rebroyoient en-
femble, en y ajoutant deux ou trois grains de fel 8c peu de gomme , ces couleurs étant déjà gom-
méfes.
. Quant aux ouvrages plus délicats 8c plus ex-
pofés à la vue, ils retiraient d’abord les traits fuc
le verre appliqué fur le deflin. Lorfque ces traits
étoient fées, ils couehoient le revers de la pièce
d’un fond de lavis .de la couleur noire, fort dél
i é , le plus promptement & le plus uniment qu’ils
pouvoient, en l’étendant avec le balai*
Ce fond étant fé e , ils y traçoient, en l’enlevant,
avec la hampe du pinceau , ou une plume
de corbeau non fendue' , le trait qu’ils avoient
tracé en noir de l’autre côté; puis effeçoient ce
premier trait , en nettoyant la .place , & eonti-
nuoient leur ouvrage fur ce fond, en enlevant le
lavis dans lies,; clairs, . po.ur donner les rehauts , &
en portait dans les ombres un lavis plus fort pour
donner du relief à la peinture. •
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