
différens morceaux , coupés d’une table à tel endroit
qu’on voudra, feront toujours de même poids,
s’ils font de même grandeur & de même condeîi-
fité. Ainfi point de matière fuperflue.
Si l ’on compare fur ce principe la dépenfe d’un
ouvrage fait de nouveau plomb , avec celle d’un
ouvrage de même nature, fait de plomb commun ,
Ton trouvera la différence d’un tiers de matière
pour certains ouvrages , & de moitié pour d’autres.
O11 pourra dire qu’à la vérité l’on porte pliis
d!argent chez le plombier ; mais qu’aufu- l’on remporte
plus de marchandife , & que cette marchan-
difé a une valeur réelle. *
La réponfe à cette objedion fe préfente natu-
. Tellement.
Ce n’eff pas perdre une fomme que d’en acheter
un effet don£ on peut toujours retirer la valeur.
Mais c’eft fe priver gratuitement de la jouif-
fance de cette fomme, que de l’échanger contre
un effet, qui ne peut être d’aucune utilité.
En fe fervant du plomb du laminoir, on épargne
fur la« foudure, auflï bien que fur la matière.
Les tables ayant, après qu’elles font laminées j
& coupées, vingt-cinq & trente pieds de long fur
quatre 'pieds huit pouces de large, ont une fois
plus de longueur & de largeur que lés tables ordinaires.
De cette différence il fuit qu’il faudra la moitié
de foudure de moins dans la plupart des ouvrages
de grand trait.
Non-feulement on dépenfe moins de matière &
de foudure, mais encore on diminue les frais de
la charpente & des réparations.
Le plomb commun furcharge • la charpente par
l ’excès d’un poids inutile. Le nouveau plomb ne
la chargé que du poids nécefiaire. Pour un moindre
poids il faüt un foutien.
Les inégalités du plomb commun, lorlqu’il ef-
fuie quelques fecouffes violentes , ou que fés endroits
les plus épais manquent de fupport, dcca-
.fîonrient néceflairement des cafîures aux endroits
foibles. .
Dans le nouveau plomb il n’efl point d’endroits
foibles, du moins eu égard à l ’épaiffeur , puifqu’elle
eft la même dans toutes les parties.
Les tuyaux, faits du premier , font fujets à des
éruptions fréquentes. Sa furface peu lifîè en efl une
caufe. Le limon y dépofe toujours quelque fédi-
ment, & ce fédiment intercepte dans la fuite le
paffage de l’air 8c l’écoulement des eaux.
Le fécond étant d’une furface très-unie, les,va- I
fes que l’eau cbarie , couleront plus aifément fur j
jpette furfaçe, & s’y arrêteront moins. ; J
On objede que les vafes, en s’arrêtant fur la fuiv
face du plomb Amplement fondu, doivent infetifi-
blement la rendre égale. Mais il eft évident qu’elle
ne peut jamais par-là le devenir autant que celle
du plomb laminé; & nous fommes en droit de
dire que celui-ci, puifqu’il éprouve moins d’acci-
dens que l’autre , exige moins de réparations.
Ces raifons d’économie ne feroient pas fuffifan-
tes pour faire préférer le plomb de la manufacture
à celui des plombiers, fi le plomb dans le laminage
fouffroit quelque altération , ou par le déchirement
, ou par la divifion de fes parties.
Op déchire les parties du métal, quand, après
les avoir couchées en un fens, on vient à les re-
broufïer en feus contraire.
On les divife, quand on les oblige de fe mou-*
voir, ou de côtés différens, ou du même côté „
mais plus vite les unes que les autres.
Comment on évite l'altération du métal,
C’eft dans le deflein d’éviter le premier incon-*
venient qu’on ne comprime jamais la table quç
dans la même direction.
C'eff dans la vue de prévenir le fécond que,
pour comprimer la table, on a choifi l’adion de
deux cylindres , & qu’on çbfèrve de prendre des
cylindres d’un grand diamètre & d’un égal volume,
& de les tenir exactement parallèles.
Toute prefïion met en mouvement les parties du
métal.
La prèfîîon continue a cet avantage, qu’elle les
meut toutes dans un même feus.
En . vain ces parties feront-elles mues dans un
même fens, fi les unes fe meuvent plus vite que
les autres;
Un moyen d’empêcher cette inégalité de mouvement
, c’eft de faire enforte que les cylindres
agiflent également, & fur les furfaces des tables,
& fur toute la matière qui fe trouve entre ces fur-
faces ; & que non feulement l ’une & l’autre furface,
mais chacune de leurs parties , fouffrent un même
degré de prefïion.
Si les cylindres n’ étoient pas d’un diamètre ■ proportionné
à l ’épaiffeur des tables, le levier par
lequel ils preffenf n’aurait pas affez de force , Çc
l ’on courroit rifque que le milieu de l ’épaiffeur du
métal ne demeurât en repos , tandis que les par-
’ ties qui terminent cette épaiffeur feroient en mouvement.
S’ils étaient inégaux, le cylindre qui ferait d’un
plus petit volume, communiqueroitmoins de mouvement
à la fuperfieie qu’il toucherait, que l’autre
fuper^ieie n’en recevrait du cylindre , dont le volume
feroit .plus çonffdérable.
^ S’ils n’étoient pas parallèles, les différentes par- |
ties de chaque ligne comprimée auroient différens
■ degrés de viteffe.
Dans le premier cas, le lit fupérieur & le lit inférieur
de la table fe fépareroient néceffairement
des lits intermédiaires. Elle ne devroit fon accroif-
fement qu’à des feuilles détachées * qui, pouffées
par les cylindres, viendroient fe rabattre les unes
fur les autres à fon extrémité.
Ces feuilles feroient alors placées verticalement ;
& , quand on rapprocherait les cylindres , elles ne
pourroient plus paffer, fans fe plier & fe brifer.
Dans le fécond cas, le l i t , voifin du plus gros
; cylindre , recevroit une extenfion , & plus grande
& plus prompte que le lit voifin du cylindre plus
, foible.
Il en feroit de même des autres lits correfpon-
dans dans chaque moitié de l’épaiffeur de la table.
Tous ces lits marchant d’une inégale vîteffe ,
ceffèroient de faire corps.
Le métal ne feroit plus compofé que de plufieurs
couches entièrement défunies. Peut - être meme
la fin de la table fe rouleroit-elle fur un des cylindres.
Dans la troifième fuppofition ; il arriveront, félon
les apparences, ce qu’on voit arriver lorlqu’en forgeant
un morceau de métal, on ne frappe que fur
Van des bords.
Le côté de la table le plus comprimé, au lieu
de s’allonger en ligne droite , décriroit une courbe
, & la table infenfiblement formeroit un demi-
cercle, auquel le point du plus grand éloignement
des cylindres ferviroit de centre.
Plus on approcheroit de ce centre, plus on tfou-
. veroit d’épaiffeur , & moins les parties auroient de
mouvement.
Plus 011 approcheroit de la circonférence, plus
l ’épaifleur diminueroit, & plus auflï les parties
acquerroient d’accélération.
La plupart, contraints par la prefïion d’abandonner
leurs places, s’échapperoient du côté dont
elles éprouveraient moins de réfiftance , & elles
refouleraient celles qui feroient moins comprimées.
Nouvelle précaution importante.
Pour ne ,pas courir ce rifque , c’eft affez que les
cylindres foient parallèles. Tl faut auflï que la table
, autant qu’il eft poflïble , foit jettée d’une
égale épaiffeur.
Les anglois, & après eux les entrepreneurs de
la manufacture, ont reconnu cette néceflité. Ne
j pouvant éviter qu’il fe trouvât toujours quelque lé-
| gère différence, & fentant que cette différence deviendrait
d’autant moins importante que 1rs tables
feraient plus épaiffes, ils ne leur donnent jamais
moins de feize à dix-huit lignes.
Ils ont une fécondé raifon d’enufer ainfi. Quand
on coule le plomb , tous les vafes & les parties
les plus brûlées prennent le deflus, & c’efl à caufe
de cela que le lit fupérieur de la table s’appelle
le feu,
Elle eft d’autant plus parfaite que ce l i t , après
l ’écumage du râble, eft moins épais ; & plus la
table a d’épaiffeur, moindre eft répaiffeur de ce
l i t , relativement à celle de la table.
On ne doit point craindre du nouveau laminoir de
mauvais effets.
Par la précaution que nous venons de dire , &
par les autres marquées ci-deflus , les entrepreneurs
fe font mis en état de n’avoir point à craindre du
laminage les mauvais effets dont on a vu le
détail.
La figure régulière & l’égalité parfaite des tables
laminées montrent fuffÜamment que Je nouveau
laminoir ne produit pas le dernier de des
effets.
Deux expériences prouvent qu’il ne produit ni
le premier, ni le fécond;
Que fur les tranches des côtés d’une table , à
quelque diftance de fa fin, l ’on trace plufieurs
lignes droites qui coupent l ’épaiffeur du métal.
A quelque degré qp’on le lamine , ces lignes paraîtront
toujours .conferver la même re&itude à l’égard
des extrémités de la table.
Il eft prefque fuperflu de remarquer que le contraire
arriverait, fi les divers lits du métal ceffoient
d’être unis.
Il eft aufli fuperflu de faire obferver que , fi la
pofition demeure la même entre les divers lits du
métal, elle demeure , à plus forte raifon la même
entre les diverfes parties de chaque ligne comprimée.
Qu’à l ’extrémité de la table, du côté dont fe
fait fon principal accroiffement, l ’on marque d’un
figne reconnoîflable quelque endroit.
L ’on verra ce figne fubfifter encore après le laminage
; ce qui ne pourroit être , fi l’augmentation
de la longueur des tables'ne venoit que de
l’addition de la matière qui fe détacherait de leurs
fuperficies.
Une troifième expérience , répétée chaque tour
à la manufadure , fait voir combien peu les cylindres
agiflent inégalement , & fur les furfaces de la
table 5 & fur le milieu de fon épaiffeur.-