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que la cérufo a pafle au noir, ainfî que le blanc de
plomb en détrempe ; que ce même blanc à l’huile
eft plombé ; que le blanc de Crems eft devenu d’un
brurt noirâtre.
Je n’héfîte plus de prononcer que ces couleurs
font infidelles , & doivent être abandonnées.
Inutilement fe flatteroit-on de les défendre par
des vernis, ils ne peuvent que retarder pour quelque
temps le conta# de la vapeur phlogiftiqùe : la retraite
que ces vernis prennent en féchant, livrera tôt ou,
tard une infinité de pafîàges à ce fluide fubtil ; en un
mot, ces vernis tiennent eux-mêmes du phlogiftiqùe ;
ils deviennent rédudifs & altérans, à mefure qu’ils
perdent de leur humidité.
Ejfais de diverses matières pour trouver des blancs
plus sûrs.
Après avoir reconnu l’inftabilité des blancs en
ufoge, j’ai fonti que ce feroit alarmer gratuitement
les art?fies for le fort & la durée des tableaux où ils
les emploient, que de leur fournir les moyens de
s’en convaincre, fi je ne travaillois à leur donner
en même temps des matières plus dignes de leur
confiance.
Il ne fera pas inutile de rendre un compte foc-
«ind même des eflais qui ont été infrudueux, puisqu’ils
pourront épargner aux autres des tentatives,
& qu’ils amèneront l’occafîon d’établir à ce lu jet
quelques principes théoriques trop peu connus.
Il ÿ a trois conditions eflentielles pour avoir une
bonne couleur en peinture.
L a première , qu'elle le délaie facilement &
prenne corps, tant avec les huiles qu’avec les mucilages
, ou du moins avec l’une ou l’autre de ces
fubftances: ceci dépend<l’un certain degré d’affinité;
s'il eft trop fort, il y a diflolution : la couleur s'éteint
dans la nouvelle composition, & la maflè devient
plus ou moins tranfparente, ou bien la réadion fobite
■ abforbe le fluide, & ne laiffe qu’un .corps,aride qui
refufe de fo ramollir ; fi l’affinité eft trop foible,
le colorant à peine fofpendu dans le fluide , eft
porté far la toile comme un labié que rien ne fixe
Jk ne réunit.
La féconde condition eft que la matière de: cette
-couleur n’ait que très-peu d’affinité avec le phlo-
giftique, qu’elle ne fort'pas fofoeptible dé contrader
avec lui y du moins fans le focours du feu, & fans
intermède, une union qui change fa manière de
•réfléchir1 les rayons.
L ’épreuve à laquelle j’ai fournis les blancs de
plomb, eft un moyen infaillible de s’aflurer en quelques
inftans de cette qualité,. fans attendre l ’expérience
des années.
,Un,e troisième condition a,uffi efTentieUe, eft que
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le corps colorant ne foit point volatil qu’il fte fort
pas attaché à une matière d’un tifîù foible , fûfcep-
tible d’une dégénéréfcence Spontanée.
Cette confîdération exclut la plupart des^ fobf-
tances qui ont reçu leur teinte de l’organilâtion
végétale, à moins qu’on ne parvienne à faire entrer
leurs derniers débris dans une combinaifon plus
folide,
D’après ces réflexions, mes recherches ont été
dirigées en premier ordre for les cinq terres pures,
enfoite for les compofés terreux, en troifième lieu
for les fols terreux peu folubles, enfin for les terres
métalliques pures ou précipitées par l’alkali pruf
fîque.
M. Wenzel a fait connoître une fîxième terre
que j’appelle éburne j l’ayant préparée pour diverfes
expériences dont je rendrai compte dans la foite,
je crus devoir l’eflayer auffi pour la peinture; mais
je reconnus bientôt qu’elle auroit les mêmes défauts
que le calce & le barote ; & l ’on ne pourroit d’ail-,
leurs l’obtenir qu’à un prix trop confiderable.
Les cinq terres pures jouiflent éminemment de
la fixité , & en même temps font peu altérable*
par le phlogiftiqùe; mais la première condition leur
manque abfolument, c’eft-à-dire, qu’elles refufont
de s’unir à l ’huile ou aux mucilages, & que leur
blanc s’éteint quand on les broie avec ces liqueurs.
J’ai eflayé la terre précipitée de la liqueur des
cailloux, la calcédoine rendue opaque par le feu,
l ’alumine ou terre bafo. de l'alun, I’argille de Cologne,
la terre calcaire, la magnéfie, le barote ou
terre du fpat pelant, ces trois dernières crues &
calcinées ; elles n’ont toutes laifle for la toile qu’une
matière, ou grumeleufo, ou demi-tranlparente qui
avoit perdu le beau blanc qu’elles préfontoient ayant
d’être délayées.
La terre d’alun étoît celle for laquelle je: comptais
davantage, non-foulement parce que M. Baume
en avoit déjà confoillé l’ufoge pour la peinture,
parce qu’elle entre dans la compofîtion du bleu de
PrulTe du commerce, mais encore parce qu’elle fak
le fond des ochres & autres terres bolaires, ce qui
foppofo qu’elle doit s’unir à un certain pointeaux
liqueurs délayantes; cependant, de quelque manière
que je l’aie traitée, elle n’a point donné de blanc,
& on fora moins forpris de ce peu de foccès, lorf-
qu’on; fera attention que dans les: bols, les ochres &
le bleu de Prufle, l’alumine n’eft réellement que
le véhicule du xorps colorant, qui eft d’une nature
toute différente ; au lieu qu’ici elle eft elle-même
la, couleur ; què dès-lors l’altération indifférente,
in fonfîble dans le premier cas , détruit 'complètement
l ’effet que l ’on cherche dans le fécond.
. :Pour fo convaincre .de la vérité de cette obfor-
vâtion , il foffit de mêler partie égale d’alumine,
ou même d’argüfo colorée, à la cérufo, ou.
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tout autre blanc, le mélange Cet a (ûfteptible de
fe broyer à l’huile & à la gomme,.fans s’éteindre ,
il ne ceffera pas d’être animé par le corps colorant
que l’on y aura porté, il n’aura aucun des mcon-
véniens des terres pures.
La nature & l’art nous préfontent un aflez grand
nombre de compofîtions terreufos auffi blanches que
l ’on peut le défîrër, tels font entr’autres , le jafpe
blanc, le feld-fpatblanc, le fchorlblanc, la marne,
le bifcuit de porcelaine, la porcelaine de Réaumur,;
&c; '
Mais toutes ces matières, tous les eflais de com-
binaifôns de terres que j’ai tentés par la fufîon , ont
eu le même défaut dont je viens de parler, & qui
tient à la même caufo; il manque toujours un corps
colorant fixe, qui ne change pas lorfqu’on le pul-
vérifo, qui ne s’éteigne pas lorfqu’on le délaie.
L ’outremer que l’on tire du jafpe bleu, connu
fous le nom de lapis-la^uli , fomble au premier
coup d’oeil garantir la poffibijité d’approprier à la
peinture toutes les compofîtions demi - vitreufos,
opaques , de la nature du jafpe.
Préoccupé de cette idée, je conçus l’efoerance
de produire un .vrai lapis blanc; mais je ne tardai
pas à fentir que cet exemple confirmoit lui-même
le principe que j’avois conclu de mes obforvations
.for les terres pures , puifque ce n’eft pas la fobfo
tance propre du jafpe qui conftitue l ’outremer, mais
la fobftance métallique qui colore accidentellement
cette efpèce particulière de jafpe.
Ainfi l’ art ne doit avoir pour but dans cette imitation
de la nature, que de donner une bafo fixe,
à une couleur toute formée, de l’y enchaîner fans
l’altérer, en augmentant peut-être fbn éclat & fbn
intenfîté, & non de produire une couleur.
En retranchant des fols terreux- & métalliques,
tous ceux dont l’acide n’eft pas complètement fa-
turé, qui attirent l’humidité de l ’air, ou même qui
fo laiflent facilement difloudre , i l n’en eft refté
qu’un très-petit nombre à examiner.
La félénite naturelle & artificielle n’a donné.avec ;
l ’huile qu’une pâte fans couleur & comme miel-
leufo; fon blanc, s’eft un peu plus.conferyé avec la.
gomme , mais çe n’étoit encore qu’une bouillie:
demi-tranfparente.
Le fpat pefant, natif ou régénéré , promettoit ;
d’autant plus, qu’il eft de tous les fols teyreuîj le
plus infoluble ; il était après lai pulvérifatiqo du
plus beau blanc; à peine a - t - i l été touché..pari
l ’huile, qu’il eft devenu gris , demi-tranfparent; le
mucilage l’a auffi altéré, quoique plus foiblement,<
il n’a pas même repris fon, blanc en séchant for la :
toile, . ;
Il en a été de même du' borax calcaire y formé
dans la- diflolution do boiaç pat l ’eau de çbaux \
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fon blanc s’eft éteint complétementavec l’huile,
moins avec la gomme, mais il fo durcit for le champ
avec celle-ci, de manière qu’il n’eft plus poflible
de le redélayer & de l’étendre.
Le tartre calcaire obtenu en jettant de la chaux
vive dans la diflolution bouillante de crème de
tartre, fo comporte avec l’huile comme la félénite ;
avec l ’eau mucilagineufo il donne un aflez beau
blanc, feulement un peu mat & comme plâtreux;
il s’applique fort bien for la toile, & je ferai voir
dans un inftant qu’il réfifte à l’épreuve de la vapeur
phlogiftiqùe concentrée.
J’ai encore eflayé le faccharte calcaire ou chaux
focrêe ; mais quoique très-infbluble, fbn blanc s’éteint
avec tous, les délayans. Il en eft de même de l’oxalte
calcaire.
Suivant M. Weber, dans fon ouvrage intitulés
Fabriken undKunfte, imprimé à Tubinge en 1781 ,
le blanc qu’on nomme en Allemagne, krembfer
weiff, n’eft autre chofo-qu’un vitriol de plomb qu*
fofait en diflolvant le plomb dans l’acide nitreux,
& le précipitant par l’acide vitriolique, & que l’oa
réduit enfoite en tablettes fblides très-lourdes, par
l’addition d’un peu d’eau gommée. Il eft certain que
cela ne reflemble nullement à ce qui fo débite en
France fous le nom de blanc de crems ; du moins
n’en ai-je trouvé aucun qui ne fût fbluble. dans le
vinaigre ; mais j’ai répété, l ’eflai for le vitriol de
plomb préparé exprès,,; fjiivant le procédé décrit
par M. Weber; & le réfoltat a été le même que
la première fois, c’eft-à-dire, qu’il a noirci comr
plétement.
Les vitriols de plomb & de bifmuth s’altèrent
encore plus promptement que les chaux de ces métaux.
Ainfi, à la réferve du tartre calcaire qui pourroit
être de quelque ufage pour la détrempe , lès
fols terreux les mieux indiqués,peuvent tout, au plus,
comme les terres, donner une bafo à quelque.cou-
' leur, mais non conftituer eux-mêmes une couleur
utile à la peinture.
Des quinze fobftances métalliques connues, il
y en a neuf qui peuvent donner des chaux blanches ;
favoir, l ’argent, le mercure , le* plomb , l’étain,
l’antimoine, le bifmuth, le zinc , l ’arfenic & la
mafiganèfo.';i '
Qn concoijt qu’il ne peut être ici queftîon;que
de terres métalliques, & nbh des précipités folins
métalliques , dont l’acide n’eft pas même neutra-
iifé^; -‘tëperidànt je ferai1'éfat des précipités par l’al-
kali - prufliquë-qui fo rapprochent Opour la plupart
des éflaux1 pfires -pàr leur, infolubilité,
;D.e jçef: neqf ..fohftanc^s ^ il faut d’abord retrancher
.U.argtM & Ae..ip.ercure : à la vérité i i s ‘donnent
,jàje bj^au^preçipités^^cs. par l’alkali ; végétal cryfo
^al.lifo d^çis ipqrdi^iu4ganitreufo,,en Sbfervant,
P l fe # meïètHP ? 4e fe d’une diflolutipn faite