
fel marin eft à bon marché, on en mêle avec la potajfe pour augmenter fon poids..
Dans quelques endroits de l’Allemagne, on purifie
la potajfe en la faifant dilToudre dans l ’eau pour ;
la débarraffer de fa terré , on fait évaporer en- ;
fuite la liqueur à fîccité. Cela forme de la po- ‘
tajfe purifiée , ou plutôt du fel de potajfe. C’eft ce j
que les droguifies vendent fous le nom d e fe l de
tartre, parce qu’il leur eîl envoyé fous ce nom.
Parmi les végétaux qu’on brûle pour préparer la
potajfe , on évite autant qu’on le peut de brûler les
arbres qui contiennent beaucoup de matières r-efî-
neufês, comme les pins, les lapins, les mélèzes
, &c. Ces efpèces de végétaux fourniflent une
cendre qui ne contient que très-peu d’alkaü.
Cendre gravelée.
On trouve dans le commerce une autre matière
faline alkaline de la meme nature que la potajfe ,
& que l’on nomme cendre gravelée.
On prépare la cendre gravelée en faifant brûler
des.farmens & des lies de vin defféchées, provenant
des vinaigriers. On nomme gravelle la lie de
vin deflféchée.
Lorfque ces matières font brûlées ,"“on les fait
calciner à un degré de chaleur qui eft capable de
faire fondre ïe fe l , 'mais qui n’eft pas affez fort
pour vitrifier la terre des cendres ï-c’eft dans cet
état qu’on nomme ce fel cendre gravelée. On la purifie
comme la potajfe pour s’en fervir dans le cas
où l ’on a befoin qu’elle foit purifiée. L e fel alkali
qu’on en tire eft pur & exempt de tout mélange de
fel neutre.
Soude,
L a foude eft la cendre de plufieurs-plantes maritimes
qu’on fait brûler en certains pays fur le bord
de la mer.
Les plantes qui font employées pour la préparation
de la foude, font le k a li, le varech, la roquette
, l ’algue marine, &c.
On fait fécher ces plantes fur le bord de la mer,
& on les fait brûler dans des foffes qu’on pratique
'exprès pour cet ufage.
La grande quantité de plantes que l’on brûle à
la fois forme un feu très-violent ; la cendre qui ré-
fulte de cette combuftion entre en fufîon, & elle
ne forme qu’une feule maffe de couleur ardoifée.
On cafte cette malfe par gros morceaux avec des
coins & des malles de fer , & on en emplit des
balles faites de nattes de jonc. Ces balles pèfent ordinairement
.depuis cinq cens jufqu’à mille 8c douze
cents livres.
JL,a. meilleure faade nous vient d’Alicante en
Efpagne ; elle ne contient ordinairement que très-
peu, ou point de fel marin.
Celle qu’on prépare dans la Normandie contient
une prodigieufe quantité de fel marin qui altère la
bonté de cette denrée.
On tire de la foude, par la lixivation, un fel
alkali de la même manière qu’on tire celui de la
potajfe & de la cendre gravelée. Cela forme ce
que l’on nomme fe l de foude , qui efl de nature alkaline
comme \?tpotaJfe 8c la cendre gravelée; mais
ce fel en diffère fïngulièrement par la propriété
qu’il a de fe cryftallifer, de fe defiecher à l’air,
& de s’y réduire en. pouflière , tandis qu’au contraire
les fels que l’on tire de la potajfe & delà
cendre graveléée attirent puiffamment l’humidité
de l’a ir , 8c fe réduifent en liqueur.
Ces différentes efpèces de fels font employées
dans une infinité d’arts ; ils fervent à faire du favori,
a dégraiffer la foie, 8cc. Ils font d’une très-grande
utilité pour la fufîon & la réduction des métaux,
& pour une infinité d’autres opérations.
Autres maniérés de préparer la potafie.
' La potajfe eft une marchandife également utile
& connue ; cependant la manière de la préparer a
! été ignorée jufqu’à préfent, même des favans.
Ceux qui pofsèdent l’art de préparer la potajfe
en font ordinairement un myftère, dans la crainte
de communiquer aux étrangers les avantages qu’ils
en retirent ; cependant comme cette matière eft
abfolument néceffaire pour la confedion du favon
& du verre, ainfî que pour la teinture,& les blan-
chifîèries, on ne fera pas fâché de trouver la manière
pratiquée chez les étrangers dont nous tirons
cette marchandife, d’autant plus que notre pays
abonde en matériaux propre a la fabriquer
La manière de faire la potajfe eft différente félon
la différence des nations : la meilleure eft
celle qui eft en ufage en Suède, d’où l ’on tranf-
porte tous les ans chez l ’étranger des quantités
prodigieufes de cette matière , fans compter ce qui
s’en eonfomme dans le royaume.
En Smaland il y;a des forêts immenfes remplies
4e hêtres, dont on fe fert pour faire de la potajfe :
dans d’autres provinces de la Suède on emploie
l ’aune au même ufage au défaut du hêtre.
On coupe le bois par morceaux ; on l’arrange
par pile , & on le réduit en cendre à petit feu ; on
fépare enfuite avec foin ces cendres des immondices
& des charbons qui y font mêlés , ce qu’on
appelle racler. Après quoi on les amaffe dans des
barils faits d’écorce d’arbre, pour les tranfporter
dans des cabanes bâties dans le bois , -exprès pour
cet uiàge. .
On continue jufqu’à ce que l’on ait amaffé
quantité fuffifante de ces cendres ; alors on choifît
un endroit convenable où l’on fait une efpèee de
pâte de ces cendres, en y mêlant de Peau que l ’on
y verfe peu-à peu , comme quand on veut faire du
mortier. On drefle enfuite à terre un lit de Touches
de pin verd, que l’on enduit par-tout de cette pâte
de cendres. v <
Sur cette première couche on en étend une
fécondé de ces mêmes fouches difpofée en travers,
& enduite d’une pâte de cendres comme la première,
8c l’on continue d’élever ainfî couches fur
couches , jufqu’à ce que toute la pâte foit employée.
Ces piles font fouvent aufli hautes que des mai-
fons.
On met après cela le feu à cette mafîè avec du
bols fec , & on le rend aufîfi violent qu’il eft pof-
fible , ayant foin d’augmenter fa force de temps en
temps, jufqu’à ce que 'ces cendres comùiencent à
rougir & à devenir fluides.
Auffi-tôt on renverfe promptement la pile avec
de longues perches ; & tandis que les cendres font
encore en fufîon, on les bat avec des bâtons longs
& flexibles faits exprès pour cet ufage, afin que
les fouches de bois s’incruftent de ces cendres. Par
ce moyen celles-ci forment autour du-bois une
croûte folide, qui, fî l’opération eft bien faite., eft
aufli dure qu’une pierre : on appelle cette opération
wa.Ua , qui veut dire drejfer.
Enfin on racle ces cendres , ou plutôt ce fel
ainfî préparé , avec des inftrumens de fer : c’eft
ce qu’on vend fous le nom de potajfe.
Ce fel eft d’un noir bleuâtre, & refiémble affez
aux fcories de fer , ayant par-ci par-là des points
de pur fel d’un blanc verdâtre.
Nous obferverons par ce détail que la difficulté
de faire la potajfe d’une manière convenable, con-
fifte d'abord à réduire en cendres le bois dont elle
eft tirée, & à conferver en même temps à ces
Cendres leurs parties volatiles & fulphureufes qui
font totalement détruites par un certain degré de
feu.
La féconde difficulté eft de pouvoir calciner ces
cendres au point de rendre leurs féls fluides , de
vitrifier leurs parties terreftres, & de tenir en même
temps toutes ces parties féparées les unes des autres,
afin d’empêcher qu’elles ne fe fondent & ne s'unifient
enfemble comme un verre indiftolubie. Il
femble que le feu qui donne à la bonne potajfe
quelques-unes de fes propriétés effentielles , doit
naturellement la priver totalement de certaines
autres.
La manière la plus afîurée de lui conferver fes
propriétés, eft fans contredit celle que nous venons
de décrire ; car tandis que les fels alkalins
renfermés dans les cendres font mis en fufîon dans
le feu ouvert, de en quelque façon vitrifiées avec
leurs parties terreftres, ce qui donne à la matière
fa confîftance & fa dureté, les parties fulphureufes
du bois verd l’empêchent de fé tranfmuer en véritable
verre ou en chaux morte.
C ’eft la réunion de toutes ces parties dans le feu
qui compofe cette fubftance favonneufe que nous
trouvons dans la potajfe préparée d’une manière
convenable ; ç’eft elle qui empêche la vitrification
de la mafie, & qui lui communique plufîeurs de Tes
propriétés particulières & très-aâàves.
Par-là nous comprenons la raifon pourquoi nous
n'avons jamais pu faire jufqu’ici de potajfe qui égalât
en bonté celle de Suède, de Ruflie, & des
autres pays du nord, quoique d’ailleurs nous ayons
chez nous une quantité beaucoup plus grande de
matériaux, peut-être de meilleurs. Ce défaut vient,
fans contredit, de ce que la manière convenable
de la préparer , telle qu’on vient de la décrire *
n’a pas encore été pratiquée parmi nous.
Cependant il peut fe trouver des circonftances
où ce procédé foit impraticable; dans ce cas on
peut avoir recours au procédé indiqué par Kunkel,
dans fon art de la verrerie. Voici comme il s’exprime.
Plus la cendre eft vieille , plus elle fournit de
potajfe.
Il faut mettre la cendre dans un lieu humide ;
elle donne enfuite une leffive plus forte, & de
meilleure potajfe.
Les meilleures cendres font celles qui viennent
d’un bois d u r t e l que le chêne 3 le hêtre & le
bouleau, & elles fourniflent plus de potajfe que
celles des bois mous.
En été l’on verfe de l ’eau froide fur les cendres ;
en hiver il faut fe fervir de moitié d’eau chaude &
de moitié d’eau froide , afin qu’elle foit tiède. Si
l’on ne prenoit que de l ’eau froide en hiver elle fé
geleroit dans les cuves, & l’on ne pourrait enlever
la graiffe à la cendre. D’un autre côté, fi l’eau
étoit trop chaude, yla cendre fe gâteroit, & fa
graiffe ne pourrait s’ en féparer.
La cendre dont on a tiré les fels eft encore bonne
à employer dans les jardins & les prairies ; elle a
la propriété de faire difparoître la moufîe 8c de
faire croître de bon trefîe. L ’on peut aufli s’en fervir
pour fumer les terres, pourvu que ce ne foit pas
dans les années humides, & non dans celles de
féchereffe. Quant à l’eau dont on fis fert pour laver
la cendre, la meilleure efl celle qui a féiôurné &
croupi ; elle donne le double de potajfe de celle
qui eft claire & crue ; l’eau Talée n’eft point du
tout propre à cet ufage.
La potajfe ne peut fouffrir ni graiffe ni fe l, & il
faut bien fe garder de prendre des cendres graflès.
Avant que de mettre les cendres dans la cuve,