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parce que l’enduit fur lequel on 1’ap.plîque doit êtrè
frais dans le moment où on travaille.
Elle a l’avantage de durer plus long- temps,
même que la peinture à l’huile, dans quelqu’enn*
droit qu’elle foit expofée.
Sa durée eft caufe qu’on l’emploie pour les per-
faedives, & dans les lieux où elle eft expofée aux
injures de. l ’air.
La peinture à Frefque demande à être travaillée
avec promptitude, avec beaucoup de sûreté de def-
fin , & une grande connoiflance de l’effet du coloris
; car on ne peut la toucher lorfqu’elle eft
ëèche , ou les moyens qu’on emploie pour y retoucher
n’ont aucune folidité , & rte peuvent faire
illufîon que pour quelque temps.
Voici les procédés qu’on eft obligé d’employer
îftans cette forte de peinture.
Avant de peindre , il faut appliquer deux enduits.
Si le mur fur lequel on veut peindre eft de brique,
l’enduit prend très-facilement ; mais s’il eft de pierres
de taille & qu’elles faient unies, il faut former dans
ces pierres de petites excavations, & y faire entrer
des clous ou des chevilles de bois, pour retenir le
premier enduit qu’on appliquera.
On fait le premier enduit avec de bonne fchaux
& du ciment de brique pilée, encore mieux avec
du gros fable de rivière, qui, formant un enduit
ifh peu raboteux, en retient mieux le fécond enduit
JifTe & poli qu’on applique demis.
Il y aura des expériences & des efTais à faire pour
trouver un enduit encore plus compade & plus indépendant
des variations de l’air ; tel étoit , par
exemple, celui dont on trouve revêtu les aqueducs
& les anciens référvoirs conftruits par les romains
aux environs dè Naples.
On recouvre de ce premier enduit l’efpace qu’on
jreut peindre.
Avant que d’appliquer le fécond fur lequel on-
'doit peindre, il faut que le premier foit parfaitement
fée; car il fort de la chaux, lorfqu’elle eft
encore humide, une odeur défàgréable & perni-
cieufe pour l’artîfle.
Lorfque cette première couche eft parfaitement
techée, on l’humede d’eau à proportion de fon aridité
, pour que le fécond enduit puîné fe lier &
s’incorporer avec le premier.
Ce fécond enduit fé fait avec de la chaux éteinte
â l’air depuis un an, & avec du fable désxivière
d’un grain fort égal, & qui ne foit ni trop gros ni
trop menu.
Il faut un maçon intelligent & adif pour étendre
cet enduit avec égalité : il doit faire cette opération
av.ee une truelle; -avoir grand foin d’oter, avec un
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petit bâton , tous les grains de fable les plus gros,
qui, en excédant, pourraient rendre la farface ra-
botéufé.
Pour faire cet enduit bien poli, on doit prendre
une feuille de papier, l’appliquer fur l’enduit, &
paffer & repafier la truelle fur la feuille de papier.
Par ce moyen on applanit les petites inégalités qui
nuiroient a la jufteiïe du trait, en produifant de
loin d^fauflès apparences.
L’ouvrier ne doit préparer d’efpace d’enduit qu’au-
tant que le peintre en peut peindre dans fa journée ;
cette peinture, comme on l’a dit, ne pouvant srexé-
cuter que fur l’enduit frais.
L’enduit étant donc préparé à l’endroit où le
peintre veut commencer fon ouvrage, il en deffine
tous les traits ; mais comme dans la peinture a
frefque il faut travailler rapidement , & que "Ton
n’a pas le temps de tâtonner fon deffin, le peintre
a fbin dé fé pourvoir de cartons fur lefquels il a
defïiné avec exactitude, dans leur grandeur naturelle,
les objets qu’il veut peindre ; en forte qu’il
ne relie plus qu’à calquer ces traits fur l’enduit.
Les cartons doivent être compofes de plufieurs
grandes feuilles de papier collées les unes fur les
autres, de manière qu’ils ne foient ni trop minces
ni trop épais.
Le firnple papier trop fùjet aux imprefïions de
l’air , a l’inconvénient de fé retirer Ou de s’allonger
; ce qui peut produire, lorfqu’on veut calquer
de grandes figures , des erreurs qui éloigneroient
dé l’extrême correction que l’on cherche à'avoir
en fé férvant de cette petite induftrie.
Le peintre trace les trâit-s de fès figures fiir l’enduit,
en paffant une pointe fur tous les traits de
fes cartons , ou bien il les ponce.
Ayant obtenu de cette manière un defïîn fidèle
& rapide, il ne lui refie plus qu’à peindre.
Mais il eft efiéntiel de connoître, lorfqu’on veut
faireNjuelque petit ouvrage dans ce genre de peinture
, les couleurs qui y font propres , & celles qui
ne peuvent y réufïirV
En général les couleurs tirées des terres, & celles
qui ont pafle au feu, font les fèulés qu’on puifïé
employer dans cette peinture.-
Ces couleurs font : le blanc de chaux, le blanc
de coquilles d’oeufs , 1‘outremer, le noir de charbôn }
l’ochre jaune 3 le vitfiol brûlé, la terne rouge , le
verd de Véronne, le noir de Venife, la terre d’ombre
, 6? Vo.ch.re brûlé.
Il y en a d’autres qui demandent des précautions
lorfqu’on les emploie ; tels font le bleu d1émail > le cinabre, & le blanc de marbre,
Lorfqu’on fait ufàge du bleu d'émail, il faut avoir
foin de couchercette couleur dès le premier moment^
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& tandis que la chaux eft bien humide ; autrement
elle ne s’incorpore point avec l’enduit , & fi l’on
retouche avec cette couleur, if faut le faire une
heure au plus après avoir ébauché , afin qu’elle ait
de. l’éclat.
Quant au blanc de marbre, il eft fîijefc à noircir
fi on ne le mêle point dans une proportion convenable
avec du blanc de chaux.
Le cinabre qui a un éclat prefque fupérîeur à
toutes les autres couleurs, a des qualités .prefque
contraires avec la chaux. Cependant on peut risquer
d’en faire ufàge pour les peintures dans des
endroits renfermés, ayant recours à des moyens fini-
pies de préparation.
On prend du cinabre le plus pur ; on le réduit
en poudre, on le met dans un vafe de terre, &
ôn verfé deflus de cette eâu qui bouillonné lorsqu’on
éteint la chaux vive. On pfend cette eau la
plus claire qu’il eft poflible ; on la décante, & on
rev.erfe enfuite fur ce cinabre de nouvelle eau de
chaux.'
Par ce procédé ; le cinabre reçoit une petite im-
preffion de l’eau de chaux, qui le met en état de
pouvoir êtra-alors employé ;à la peinturé à frefque.
Une des couleurs les meilleures, 8c. dont on fait
le plus d’ufàge dans cette peinture, pour dégrader
les teintes & leur donner le ton que l’on defïre,
c’eft le blanc de chaux.»
Le blanc de chaux fé prépare, en faifant fondre
dans de l’eau d’excellente chaux éteinte à Pair
depuis long-temps; la chaux fe dépofe en fédiment
au fond du vafe ; on découte l’eau, & le dépôt formé
au fond du vafe eft le-blanc de chaux qu’on emploie
après avoir ôté la peau qui le couvre.
Il y a une autre efpèce de blanc, dont on pour^-
roit aufli faire ufàgé, & dont on apprendroit les
effets par l’expérièncë, c’eft le blanc de coquilles
d’oeufs.
Pour le préparer, on prend une grande quantité
de coquilles d’eeufs que l’on pile & que l’on fait
bouillir dans de Peau avec un, morceau de chaux
vive; on les met dans une chauffe, & on les lave !
bien avec de l’eau de fontaine.
On recommence a les piler encore de nouveau,
jufqu’à ce que'Peau que Pon emploie à cet ufage,
en- forte claire & limpide.
Lorfque ces coquilles fé font ainfi réduites en
poudre, on brifé .cette poudre de nouveau fur le
porphyre avec la molette, en y ajoutant un peu
d eau, & on en forme de petits points qu’on lailfe
lécher au faleil.
Toutes les ochres font d’excellentes' couleurs, &
prennent differentes nuancés, étant brûlées. & miles
au feu dans des boîtes de fer,
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Quant au jaitné de Naples , il y a de l’imprudence
à rifquer d’en faire ufàge au grand air. Les
noirs de charbon, de noyaux de pêche, de fàrment
font très-bons, il n’y a que le noir d’os qui ne vaut
rien.
Le vitriol romain cuit au fourneau, & qu’on appelle
brûlé, hroyé enfuite dans de l’efprit-de-vin ,
réfifte très-bien, employé fur la chaux. Il refaite de
cette préparation un rouge qui approche de celui
que donne là laque.
Cette couleur eft très-propre pour préparer les
enduits qu3on veut colorer avec du cinabre ; & les
draperies peintes avec ces deux couleurs peuvent
le' di fauter pour l’éclat à celles qui féroient peintes
i à l’huile avec la laque fine.
L ’outremer eft la couleur la plus fidelle, elle ne
change point du, tout, & a même l’avantage de
; procurer cette propriété aux couleurs avec lefquelles
j on la mêlé.
Quant a la manière d’employer les couleurs, on
les broie avec de l’eau commune, & l’on commence
i à former les teintes principales que l’on veut employer
: on les met par ordre dans des pots ; & on-
a plufîeurs grandes palettes dont les bords font relevés
pour y former les nuances intermédiaires, &
pour avoir faus fà main les nuances dont on a
befain.
Coxnme les teintes s’éclairciflént, à l’exception
de l’ochre brûlée, du rouge violet & des noirs ; il
eft bon d’avoir auprès de foi des briques ou tuiles
neuves bien sèches. On y applique avec le pinceau
un trait des couleurs avant de les employer.
L’eau s’imbibe far la tuile dans l’inftant, & l’on
voit la nuance faus laquelle reliera la couleur ,
lorfque la frefque fera sèche ( Diéï. de l'Ind, ).
Peinture éludorique, inventée par M, Vincent de
Montpttit,
Cette nouvelle manière de peindre -eft très-peu
connue, & eft fafceptible d’une grande perfedion.
Son principal avantage eft de pouvoir peindre à
l’huile de petits fajets du plus grand fini pofïibl-e,
en ajoutant au moelleux de ce genre la fineffe de
la miniature en détrempe, fans, touche sèche &
pointillée ; de manière qu’on femble voir un grand’
tableau à travers un verre qui diminue les objets.
Cette -peinture prend fà dénomination d'éludorique
de deux mots grecs, lignifiant huile & eau > parce que ces deux liqueurs concourent à fan exécution.:,
en voici les procédés.
On colle avec de l’amidon , le plus uniment
poflible,, de la toile très-fine ou du taffetas, blanc
far de petites.glaces d’environ deux pouces en quarré,
& dont les angles fant adoucis, afin que la toile
puiffe recouvrir par deffas, fans qu’il fait néceflàire
d’en couper l’excidanf,