
Inutiles; la fécondé, de le deffécher, en procurant
un écoulement habituel à l’eau qui y féjournoit. L a .
. pofïtion du terrein fe trouvoit, favorable pour la dernière
opération , puifqu’il étoit fîtué entre deux petites
rivières, dont l’une a plus de largeur que l’autre :
elles le réunifient à fon extrémité. Ce pré repréfente
un triangle terminé par un angle aigu au confluent
des rivières.
Le temps a été fec pendant tout l ’été de 1781 ;cé
qui a fingulièrement facilité le travail. Au mois de
Mai de cette même année, on a commencé à écobuer
la terre 5 c’eft-à-dire, qu’avec une pioche à défrichement
, on en a pelé la couche fupérieure, en arrachant
les racines du gale & des autres plantes.
Le fol a été rendu aufli uni qu’il pouvoit l’être ;
on a fait fécher au foleil ce qui étoit pelé; on en a
formé des monceaux auxquels on a mis le feu à la fin
d’Aout & au commencement de Septembre. Les
cendres qu’ils ont produites, ont été répandues également
par-tout. La pioche à défricher eft, comme
on fait, un outil du poids de 15 ou 16 livres, com-
pofé d’iin manche de bois & d’un inftrument de fer,
dont une extrémité a la forme dune pioche, & l’autre
celle d’une coignée. Cet inftrument fert en effet à
fouiller, la terre & à couper les racines.
On a fait dans les cent arpens, deux folfés principaux;
Tun prend de la bafe du triangle, & continue
jufqu’à la pointe de l ’angle où les deux rivières,
fe joignent. Il partage le terrein en deux parties égales.
La terre de la fouille a été jettée aufïi loin qu’il
a été pofïible, fans qu’il en folrrefté fur les bords du
folfé. Cette manière s’appelle faire un folfé à terre
pur duc.
Il en réïùlte un double avantage ; c?eft que les
plantes qui peuvent croître fur les bords, ne font
point gênées, & qu’on a la liberté de faucher le
foin par-tout avec facilité. On a donné à ce premier
folfé quatre pieds de largeur & quatre pieds de profondeur.
L ’autre folfé principal fert de bornes au pré, à la.
bafe du triangle : il établit une communication entre
les deux rivières. Afin qu’il fervîfc de rempart
contre les beftiaux, on a mis en glacis, fur un de fes
bords, une partie de la terre qui en a été retirée.
Indépendamment de ces deux grands folfés, il y
en a deux qui n’ont qn’un pied & demi de largeur
fur un pied de profondeur ; ils font deftinés à recevoir
l’eau qui, en été, féjourneroit dans les parties
balfes du pré ; l’un , du grand folfé qui en eft la bafe,
fe rend obliquement à celui pour lequel le pré eft
partagé dans fa longueur; l’autrepartdece dernier,
&-va joindre une des rivières.
Dans l ’état aduèl le pré eft uni, fi l’on en excëpte
un endroit plus élevé que le refté , & qui eft moins
fertile.
La façon des grands folfés a coûté 5 fols la foife,
& celle des petits lin fol feulement. Dans le pays où
s’el^faite cette opération, le terrein eft formé de
fable à la furface, & de glaife fous le fable. Pour les
frais de l ’écobuage & dès folfés on a dépenfé 360.0
livres. .
On eftime que l’homme qui a entrepris l’ouvrage
a eu 600 livres de bénéfice. Il avoit demandé deux
ans pour le perfectionner ; mais voyant que le temps
étoit favorable, il l’a terminé en un été ; c’eft-à-dire,
du mois de mai à la fin de faptembre, en multipliant
les bras autant qu’il étoit nécelfaire.
Je n’ai plus qu’à rendre compte du produit du pré
depuis l’opération. On y a recueilli, en 1781, cinq
cens quintaux de foin, que le propriétaire a fait
manger à fes beftiaux , & qu’il n’a point penfé à
eftimer.
En 1783 la récolte a doublé ; les mille quintaux,
qu’on en a obtenus, ont été. vendus 2.500 liv.
En 1784, une crue des rivières, furvenue pendant
la fauchaifon, a perdu la plus .grande partie
du foin ; ce qu’on en a échappé a été donné aux
beftiaux, fans qu’on puiffe en dire la quantité, ni
l’économie que ce propriétaire a faites par-là fur fes
autres fourrages.
Enfin, la prairie a donné à la dernière récolte
ifoo quintaux,''ou 1^60 fois cerit livres de foin
qu’on efpère vendre au moins izoqo livres.
On conçoit que la valéur du pré he peut être ef-
timée fur ce dernier prix, qui eft exceffif, & qui de-»
pend d’une difette de foin telle que de mémoire
d’homme on n’en a pas vu de pareille.
Mais ce terrein étant encore fufceptible de quelque
amélioration , & capable de produire , années
communes,.trois milliers de foin à 1 livre iofols
le cent, on croit qu’il peut être loué à un fermier
3000 livres par an ; d’où il - réfulte , i°. que les
3600 livrés dépenfées pour le rendre praticable &
fertile, font de l’argent placé à un gros intérêt; i°.
qu’avec de l’intelligence on amélioreroit beaucoup
de terreins, chacun de la manière dont il,doit être
amélioré; 30. qu’il faut Lavoir faire des facrifices ,
pour avoir enfuite des rentrées qui dédommagent
amplement;. 40. enfin, que le terrein qu’on fait
■ pafiTer de l’état de ftérilite à celui de fertilité, de -
vient utile & profitable , d’abori au particulier qui
opère ce changement, & enfuite au public, en augmentant
la fomme des productions nationales.
Il n’eft pas inutile de dire, en finiiïànt ce mémoire,
que les voifins du propriétaire du pré dont je
viens de parler, encouragés par l’amélioration qu’ils
voient, & à laquelle ils ne. vouloient pas croire, fe
propofent d’en tenter de femblables fur des terreins qui leur appartiennent, & qui fe trouvent dans la
même pofîtion, ou dans une pofition analogue. Plu-
fîeurs ont /déjà fait leurs marchés avec les ouvriers
qui commenceront au printemps prochain.
On peut s’en fier à l’appât du gain, fi puilfant fur
l ’efprit des hommes 3 pour efpérer qu’ils feront des
elfais & des avances même, fi on leur en découvre
tous/les avantages ; mais on n’y réuflira jamais en
exigeant d’eux qu’ils emploient des méthodes ou
pratiques nouvelles, en les gênant de quelque maniéré
que ce foit, & enfin , en leur lailfànt craindre qu ils
11e jouilfent pas entièrement du fruit de leur m-
duftrie.
Moyens pour faire un bon Pré d'une mauvaife vâture
’ inondée.
Je viens de portera fa perfection un ouvrage a-peu-
près femblable à celui qui a été entrepris fous l’inf-
peCtion de M. l’Abbé Tejfier. En 1765 , mon père
acquit onze à douze journées de fauche, dont partie,
eft-il dit dans le contrat, eft de mauvaife pâture, y .
ayant du jonc, & un fo l qui n‘a point de folidité ;
dans lefquels prés pdjfe la rivière de * * * , & font bornés
du côté du couchant, par l'ancien canal de ladite
rivière ^ & au levant, par le chemin de * * *. Cette
même année -, le fermier vendit, moyennant fix
francs, la tonte de cette partie de pré, couverte de
jonc. ; & 011 n’y fit pâturer aucuns beftiaux, dans la
crainte de les perdre. Quant à moi, l’année paffée
j’y ai cueilli fix charrettes de foin, & quatre de regain
: l’un & l’autre fe font trouvés d’excellente qualité;
& tout m’annonce pour cette année pne récolte
fupérieure à celle de 178?.
Dès que mon père fut devenu propriétaire de ce
terrein., il fit arracher toutes les Touches d’auîies
dont il étoit couvert ; on en brûla les racines fur là
place, & on le fit couper par plufîeürs rigoles , d’un
8c de deux pieds de largeur, fur autant de profondeur
. qui toutes alloient fe rendre à l ’ancien canal
de la rivière de * * *. Cette opération finie, on fuma
tout ce mauvais pré ; & la première récolte fut très-
bonne. Jufqu’en 1782., celles qui ont fuivi ne lui
ont pas été fort inférieures, au moyen du foin qu’on
a pris dè le fumer & de curer les petits folfés qui fèr-
vpient à en tirer les eaux.
Je voyois cependant avec peiné que, lbrfqué les
«aux étoient grandes, elles remontaient dans le pré
par ces mêmes foliés, & qu’à'forcé d’y palier, elles
les àvoient fort agrandis ; que tout le fol du pré étoit
• inégal ; que pendant-l’hiver il étoit fi mouillé-,
qu’on étoit obligé d’en retirer l'es beftiaux de* bon ne
heure. L ’eau, dont la fuperficie étoit alors couverte',
venant à gëler, faifoit périr la meilleure herbe , & j
rendoit moins durable l ’effet des fumiers; ■ '
la petite rîviere d e * *% & l ’ai,fait Creufer jufqu’à..
Pour remédier à ces inconvéniens, après m’être .
afliiré que ce terrein"compofé d’un lit de tourbe!
de cinq à fix pieds dans fa plus grande épaiffeur,
fous lequel il, s’en trouve tin autre d’un fable gris &
très-fin, & qu’entre les deux coulent les.eaux de la
colline voifînè,' j?ai:fait-ouvrir un folfé de fix pieds ,
à égale diftance de l’ancien & du nouveau cariai de
ce que l’eau y fourçât par le fond & non par
les cotés.
Je fis réparer les anciens petits folfés ou rigoles ,
mats fans les creufer ; on y plaça des madriers d'aune,
& des branchages du même bois, de maniéré à offrir
un .palfage continuel à l’eau : le tout fut recouvert
de ia terre tirée du grand folfé, & femé dans la fai-
fon convenable. Ces rigoles vont toutes le décharger
ou dans le folfé du milieu , ou dans le canal. Au
point-où l’un & l’autre fe réunilfent, j'ai foin à l’entrée
du printemps, de faire faire une digue qui tient
les eaux allez hautes pour entretenir dans tout le pré
pré une fraîcheur fuffifante. Cette digue, qui fera iiî-
celfamment remplacée par une petite éclufe, eft rompue
après la tonte des regains; & les beftiaux restent
dans ce pré aufïi long-temps que dans tous les
autres.
Je ne permets aux charretiers de la traverfer avec
leurs charrettes, que dans les temps fecs, & je continue
encore à en faire apporter l’herbe à bras fur les
endjoits les plus fôlides. Pour m’épargner la dépenfe
des fumiers, j’ai réfolu de faire cette année couper
de la tourbe dans un des plus mauvais morceaux. Le
trou qu’on fera à cet effet, fera rempli par d’autre
terre que j’y ferai tranfporter ; la tourbe, réduite
en cendre, fera répandue fur tout le fol auprintemps
prochain.
J’habite un pays où il y a trop de bois, pour qu’on
fonge à fe chauffer avec ma tourbe ; & la veine que
j’en pofsède , eft fi peu étendue ! Je crois cependant
qu’on en*pourroit découvrir d’autres dans le même
vallon-; mais comme nous n’avons pasalfez de prairies,
il feroit defavantageux, quant à préfeiit, d’exploiter
les tourbières qu’il renferme.
Moyens de détruire dans les près la pla,nte nomntè
queue de cheval ou la prèle.
L a plante , nommée par les botaniftes equife-
tum y queue de cheval ou prèle, dont il y a deux
efpèces très communes en France, devient fi abondante
dans beaucoup de prés bas , très-humides,
•qu’elle en fait bientôt une très grande partie de
l’herbe. Mais comme là prêle n’eft pas un bon fourrage,
on regarde , .avec raifon v comme déteriorc-s ,
les.prés- où elle:>eft abondante , & à proportion de ce
qu.’eüé y eft multipliée. Les vaches qui en mangent
beaucoupdonnentun lait peu crémeux, bleuâtre : le
beurre que l’on fait de cette crème eft fans goût & de
couleur de plomb.
é Un auteur moderne , hollandois , prétend qu’en
couvrant le pré de fumier de cochon, ou y faifant
entrer l ’eau de la mer, on détruit la prêle en grande
partie: d’autres ont confeillé de l’arracher. Le fumier
de cochon eft un engrais trop fertile pour le
prodiguer ainfi; d’ailleurs, très-peu de gens en ont
de quoi couvrit feulement un demi-arpent : l’eau de