
On obtient irhe couleur grife , en mêlant dans
un godet plus d’eau de blanc que de couleur
noire.
Ou en mêlant de cette eau de blanc avec du
bleu, fiiivant les nuances que vous délirez.
Pour faire une couleur de fe r , couchez une eau
de bleu fur un lavis de noir.
Pour faire un jaune mat, couchez un lavis de
blanc , plus ou moins délié , du côté de l ’ouvrage
, & du jaune liir le revers.
Les dégradations de jaune le font en le couchant
plus ou moins épais.
On fait une couleur de rofe pâle , en couchant
un lavis d’eau de blanc du côté oppofé à l’ouvrage
, fur lequel la couleur rouge aura été couchée
allez claire.
On obtient un rouge tirant fur la couleur de
rofe foncée , fi , au lieu du rouge , on a couché
l ’ouvrage d’une eau pourpre, plus .ou moins chargée
de cette couleur, en procédant comme deflus par
rapport au lavis de blanc.
Le marbre s’imite en lai fiant tomber goutte à
goutte fur un lavis frais d’eau de blanc ; des taches >
de violet, de pourpre, de verd & de rouge, qui
doivent être promptement étendues avec la pointe
du pinceau, fiiivant le goût du peintre , & conformément
au marbre qu’il veut imiter»
' La pratique au fiirplus apprend mieux que les
préceptes dans quelle proportion fe doivent faire
ces différens mélanges ou affemblages.
Un peintre fiir verre intelligent ne doit ici eon-
fulter que le goût & l ’expérience.
Le moyen de s’afiiirer de l ’effet de ces mélanges
cff d’en faire des effais en petit à la cheminée.
Mais quoique dans toutes les recettes que nous
avons recueillies d’après les meilleurs maîtres, il
n’y en ait aucune dont le fucces ne lb.it certain ,
il n’eft pourtant rien de plus effentiel , fiiivant
Kunckel, que d’employer dans la eompofltion de
les couleurs, de bons matériaux dont le choix &
l ’exafte manipulation puiflent bien établir ce parfait
concert de fufibilité à un feu de même durée
, qui doit fe trouver entre les différentes couleurs
que le peintre fur verre emploie dans un
piôme duvrage.
Sans ce concert d’ou dépend tout le fucces dudit
puvrage, & que la feule expérience peut établir,
Certaines couleurs brûieroient, & fur-tout le jaune ,
avant que les autres fuffent attachées au verre.
C ’eft fans doute, ditM. le Vieil , 1a connoiffance
pratique de ce concert poflïble entre toutes les
differentes couleurs employées par mes ayeux, qui
Jçf porpoip a admettra ? relativement à çç degré
de fufibilité qu’ils avoient expérimenté dans leurs
autres couleurs à la recuiffon, trois fois plus d’o-
chre dans la préparation de leur jaune que les
autres n’en preïcrivoient.
Nous obfèrverons encore comme une pratique
effèntîelle à la peinturé fiir verre, que le noir ne
peut jamais être trop-fendant : c’eft en effet cette
couleur qui fait tout le corps de l’ouvrage ; c’eft
en elle que réfïde eflentiellement l’oeuvre du
peintre.
On ne peut pratiquer cet art , pas même le
concevoir , fans le fècours de la couleur noire,
Sans elle point de moyen durable de prendre le
trait des formes que le peintre fiir verre fe pro-
pofe d’exécuter.
La couleur noire eft à cet artifte ce que le crayon
eft au deflinateur, & le burin ou la pointe au
graveur.
Point d’imitation des objets de la nature fans
lignes , fans jours & fans ombres : dans- la peinture
fiir verre cette feule couleur, ou fon lavis,
fournit des lignes, des jours & des ombres.
Avec cette feule couleur , on peut , fans employer
les verres teints aux verreries ou colorés par
nos émaux tranfparens , mériter le titre de bon
peintre fur verre.
On connoît d’excellens ouvrages de cette manière
, fous le nom de grifailles,
.Cela fuppofé , la couleur noire qui n’eft pas
aflêz fondante à la recuifion, ne s’attachant point
fur le verre , tout le fond de l’ouvrage difparoît ,
fur-tout dans les carnations i Çc le tableau n’eft
plus qu’un amas informe de verre de cou leurs fans
trait, fans ombres & fans demi-teintes, lorfqu’on
vient à le nétpyer.
ÇonnoiJfaJices nêcejj.aires aux peintres fur verre.
Entre les connoiffànces principales dont les peintres
fur verre ont befoin pour réuflir dans leur 'art,
celle de la chymie , fur-tout-en ce qui concerne la
vitrification des métaux , doit tenir le premier
rang.
Cette fcience, d’où dépend le coloris de leurs
ouvrages, par la jufte préparation des émaux qui y
font propres , ne leur' fut jamais plus néceffaire
que lorfque les verreries, faute d’emploi de leurs
verres colorés, cefsèrênt de s’en occuper avec la
même aflîckiité.
Les manufaâures de Veniffe, de Genève & de
Londres nous fourniffent à la vérité des émaux de
toutes couleurs.
Celle d’Angleterre, excitée par les récompenfês
de la fociété pour l’encouragement des arts , e#
déjv^
déjà même parvenue à un tel degré de perfedîon
que, loin de les tirer des vénitiens & des genevois,
comme par le paffe, les Anglois en font à
préfent de fréquentes exportations.
Cpendant, ajoute M. V ie il, je me crois en droit
d’aflurer que jamais un peintre fur verre, qui aime
fon art , n’atteindra à cette parfaite pratique du
concert de fufibilité de fes émaux par la même
recuiffon , que par les effais réitérés de leurs differentes
préparations.
Ceux que nous tirons de l’étranger, font la plupart
plus particulièrement deftinés à la peinture
fur verre, & par conféquent applicables fur un
fond bien différent.
Ceux-ci ne doivent fê parfondre qu’une fois à
un même feu & tous enfemble ; ceux-là font dans
le cas de fimffrir le feu plufieurs fois 8c à différentes
reprifès.
Ce n’eft donc pas trop pour rendre un peintre
fiir verre sûr de fon fiiçcès dans les opérations fî
incertaines de fbn art, qu’une étude un peu étendue
de l’hiftoire naturelle, de la phyfîque expérimentale
& de la chymie.
Je voudrois que cette étude fût le premier objet
de fbn application, & comme le fondement de lès I
progrès futurs.
Le temps que lui demandera la correction du
deffin, & les autres parties qui font l’habile peintre
, lui en laiffèroient trop peu pour s’appliquer à
la fois à ces connoiffànces & à celle des fubftances
propres à la eompofltion de fes,couleurs.
C’eft cette vue qui m’a dirigé dans l ’ordre de
eette partie , en donnant aux recettes propres à
colorer le verre , envifàgées par rapport au peintre
fur verre , le pas fiir les autres connoiffànces qui font
partie de fbn art.
J’ai voulu le mettre en état de préparer lui-
même fès couleurs avant de lui enfeigner l’art
de les employer.
Si le fucces n’eft pas fans difficulté pour ceux-li-
même qui s’en occupent avec le plus d’attention,
que fera-ce pour des artiftes qui, peu inftruits des
propriétés des émaux qu’ils emploient à tout rifque
fbus le fîmple diredoire d’une recette telle quelle,
ignorant les principes qui ont dirigé ceux qui les
ont^ préparés ^ 8c les différentes vues qu’ils s’y
etoient propofées , travaillent aveuglément 8ç fans
aucune certitude de réuflir ?
Que notre peintre fur verre ne fe décourage
pas par les pénibles opérations qui doivent précéder
fbn fhecçs.
Qu’il apprenne de M. Taunai, fî habile dans
1 art de préparer & d’employer des émaux également
propres à fe parfondre fur un fond de verre
^ §* Métiers, Ton},
& d’émail, & à endurer l ’adion du feu fans fe
ternir & s’éteindre, que cet art n’eft pas encore
pour lui fans difficulté ; quil na peint que parce
qu'il avoit des couleurs, & qu'il n en a eu que
parce que fon père, très-verfé dans la chymie, qui
ckerchoit peut-être queIqu autre chofe, a trouve ces
couleurs qu'il lui a laijfêes avec le fecrei den préparer
d'autres.
Comme dans la grande quantité 'des émaux qui
nous viennent de Venifè , fuivant M. Taunai,
tous ne peuvent fè trouver d’une égale perfeéHon,
il faut en avoir fait ufàge pour connoître à peu
près a l’oeil leurs défauts & leurs bonnes qualités.
O r , voici les marques qu’il nous donne pour re-
connoître leur plus ou moins de bonté.
On peut connoître la qualité des différens émaux
de Vénifè parles cachets que les vénitiens appliquent
deffus.
Le plus tendre n’eft marqué que de deux cachets
, & le dur de trois ou même de quatre, félon
le degré de dureté qu’ils lui connoiffent.
Celui qui eft marqué aux trois cachets, eft le
plus uflté pour les fonds blancs de peinture en
émail, qui fervent de toile au tableau.
Suivons cet auteur dans ce qu’il nous en feigne,
pour bien juger des émaux clairs , tranfparens, colorés
de différentes couleurs."
L ’émail bleu tranfparent eft facile à connoître.
Il faut caffer le pain , en prendre un morceau de
médiocre épaiffeur, en regarder le tranfparent au
grand jour.
Pour qu il rende un bel effet, il doit donner un
bleu comme celui des anciens vitrages , tel qu’oa
en voit encore à la fainte4 chapelle de Paris , pur ,
fans ondes.
Sur le bord , dans l ’endroit mince , il doit être
blanc comme du cryftal.
S’il confervoit fa teinte dans fa moindre épaiffeur
, il fèroit trop dur à la façon, & par xonfé-
quent mauvais à l ’effèt.
J’omets ici ce que notre auteur preferit fur le
choix de l’émail jaune , qui n’a pas lieu entre les
couleurs propres à la peinture fur verre.
L ’émail verd, dit verd gni\ montre fbuvent à
fbn feul afped s’il fera d’un emploi favorable.
Si Fon remarque deflus ou deffpus un ton de cou»
leur d’or changeant, c’eft-à-dire, imitant la gorge
de pigeon, il eft rare qu’il foit défedueux ; & l ’on
peut, après l’épreuve de la caffe , comme je Fai
dit au bleu, s’en fervir avec avantage,
^Si au contraire il n’offte à l’oeil qu’un noir Wen
luifant, on eft bien certain qu’il eft dur, 8c qu’i l
brûle plutôt qu’i l ne fond*
C e