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rouge, & de la poudre d’une certaine pierre ou
caillou qui tire un peu fur le rouge. Un médecin
chrétien a dit, que cette pierre était une efpèce
d’alun qu’on emploie dans la médecine. On broyé
le tout dans un mortier , en y mêlant de l’urine d’un
jeune homme & de l’huile ; mais on n’a pu découvrir
la quantité de ces ingrédiens, ceux qui ont le
fecret font attentifs à ne le pas divulguer.
On applique cette mixtion for la porcelaine k>rf-
qu’elle n’eft pas encore cuite , &'on ne lui donne
point d’autre vernis. Il faut feulement prendre garde
que durant la cuite, la couleur rouge ne coule point
au bas duvafe. On aflure que quand on veut donner
ce rouge à la porcelaine, on ne fe fert point de pe-
t.m-tfe pour la former, mais qu’en fa place on emploie
avec le kao-lin de la terre jaune, préparée de
la même manière que le petumtfe. Il eft vraifembla-
ble qu’une pareille terre eft plus propre à recevoir
cette forte de couleur.
Peut-être fora-t-on bien aîfe d’apprendre comment
cette grenaille de cuivre fe prépare. On foit-
qu’à la Chine il n’y a point d’argent moniioy-é : on fe
fort d’argent en maffe dans le commerce , & il s’y
trouve beaucoup de pièces de-bas-aloi.. 11 y a cepen-
dant.des occahonsoù il faut les réduire en argent fin ;
comme, par exemple,, quand il s’agit de payer la
taille, ou de femblables contributions. Alors- on- a
recours à des ouvriers dont l ’unique métier eft d’affiner
l’argent dans les fourneaux faits à ce- deifoïn,
& d’en fépàrer le cuivre & le plomb. Ils forment la
grenaille de ce cuivre , qui vraifemblab 1 ement con-,
férve quelques parcelles imperceptibles d’argent ou
de plomb.
Avant que le cuivre liquéfié fe congèle, on prend
>in petit balai qu’on trempe- légèrement dans l ’eau ;
puis en. frappant furie manche du balai, on afper-ge
d’eau le cuivre fondu ;, une pellicule fe forme for la
fuperficie, qu’on lève avec de petites pincettes de
fer , & on la plonge dans l’eau froide, où fo forme la
grenaille qui fe multiplie autant qu’on- réitère l’opé-
-ration. Si-l’en empi-oyoît de l’eau-forte pour diïïoudre
le cuivre, cette poudre - de cuivre en foroit plus
propre pour faire le rouge dont, on parle,; mais les
Chinois n’ont point le focret des eaux-fortes & régales
: leurs inventions font toutes d’une extrême
fimplicité.
L ’autre efpèce de rouge fouffié fe fait de la manière
fuivante : on a du rouge tout préparé ; on prend un
tuyau, dont une des ouvertures eft couverte- d’une-.
gaie fort ferrée : on applique doucement le bas; du
tuyau for la couleur dont la gaze fé. charge après
qpoi on fouffie dans le tuyau contre la porcelaine.,
qui fe trouve enfuite toute femé-e de petits points rouges.
Cette forte de porcelaine eft encore.plus; chère
& plus rare que la précédente, parce que l’exécution
en eft plus difficile, fi l’on veut garder toutes les proposions.
réquifes*^
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On feuffle le bleu de même que le rouge contre
la porcelaine, il eft beaucoup plus aifé d’y réuffir.
Les ouvriers conviennent que fi l’on ne plaignoit pas
la dépenfe , on pourroit de même foufnër de l ’or &
de l’argent for de la porcelaine dont le fond féroit
; noir ou bleu, c’eft-à-dire, y répandre par-tout également
une efpèce de pluie d’or ou d’argent. Cette
forte, de porcelaine, qui foroit d’un goût nouveau,
ne laifferoit pas de plaire. On fouffie auffi quelque-
i fois les vernis : on a fait pour l’empereur des ou-
i vrages fi fins & fi déliés, qu’on les mettoit fur du
I coton, parce qu’on ne pouvoit-manier des pièces fi
délicates, fans s’expofor aies rompre; & comme il
n étoit pas poffible de les plonger dans les vernis,
parce qu’il eut fallu les toucher de la main, on
fôuffloit 1e- vernis, & on couvroit entièrement la
porcelaine.
On a remarqué qu’en- foufflant le bleu , les ouvriers
prennent une précaution poilu conferver la
couleur qui tombe -for la porcelaine, & n?en. perdre
que le moins qu’il eft poffible. Cette précaution eft
de placer le vafe for un piédeftal, d’étendre fous
le piédeftal une grande feuille de.papier, ’qui fert
durant-.quelque temps,. Quand l’azur eftvfoc, ils le
retirent., en frottant le papier avec une- petite
broffo.,
Dë'la compojiuon des différentes couleurs.
Mais pour mieux entrer dans le détail de la manière
dont les peintres chinois mélââgenfr leur-sycou-
leurs, & en- forment- de nouvelles* il eft bon d’ex-
pliquer-quel'leèft la proportion & la mefore de poids
de la- Chine.
Le kin , ou la livre chinoîfé, eft de feize onces,
qui s’appellent léangs ou taéls.
Le. léang ou. tael., eft une once .ehinoife.-
Le tfien ou- le mas , eft la dixième partie du
léang-ou tael.
Le fuen eft la dixième, partie -du tfien ou du
mas,.
Le ly eft là dixième partie dü fuen-.
L e har eft la dixième partie du ly.
■ Cela- foppofo.., voici, comment fe. eempofe le
ro-uge qui fe fait aveo de la couperofe, qui s’emploie
for les porcelaines recuites ; fur un- tael ou
léang; de eérufe , on met deux mas de ce rouge ;;
on pafle la cêrufe & le rouge par un tamis , & on
les mêle, enfemble à foc ;* enfuite ...on les lie l’un
avec l’autre avec de l ’eau empreinte d’un peu de
colle de vache, qui fo.vend réduite à la confiftance:
de Ja colle de poifton. Cette colle fait qu’en peignant
la porcelaine , le rouge s’y attache St ne coule pas.
Comme les couleurs, fi on les appliquoit trop épaiftèî,.
ne manqueroient pas de produire des inégalités fur
h-porcelaine % ona foin de temps en temps de trern—
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per d’nne main légère le pinceau dans l’eau , &ett-
foite dans la couleur dont on veut peindre.
Pour /a-re de la couleur Blanche-, for un léang
de eérufe , on met trois-mas & trois fuens de poudre
de cailloux des plus tranfparens, qü’on a calcinés,
après les avoir luttés dans une caifte de porcelaine
enfouie dans-le gravier du fourneau-, avant que de
le chauffer. Cette poudre doit être impalpable. On
fe fort- d’éaufimple-, fans y mêler de la colle, pour
l ’incorporer avec la- eérufe.
On: fait'le verd foncé, en mettant for un tael de
cérüfe, trois mas & trots fuens de poudre de caillou,
avec huit fuens ou'près d’un mas de 'toug-
hoa pien, qui n’eft autre chofe que la; cràffe qui fort"
du cuivre lorfqu’on le fond. On vient d’apprendre
qu’én employant du toug-hoa-piett pcür le vetd , il
faut-le laver, &.en-féparer avec foin la grenaille de
cuivre qui s’y trouverait mêlée , & qui n’eft pas propre
pour leverdi II nefaut y employer que les écailles,^’
eft-à-dire , les parties de ce métal qui fe fe-
parent lorfqu’on les met en oeuvre.
Pour ce qui eft d'e la couleur jaune , on la fait en
mettant for, un tael de eérufe , trois mas & trois fueffs
de poudre de' caillou , &'un füen huit lys de rouge;
pur, qui n’ait 'point été' mêlé' ave b la eérufe’.
Un tael; de eérufe, trois mas &-trois1 fuens de!
poudre de caillou, & deux; lys-. d’azur-, forment .uni
bien foncé, qui tirent fur le violet.
Le mélange* &e vet# & de' blanc, ‘par exemple,
d’une, part -de verd for deux parts de blanc , fait- le
vetd d'eau', qui eft‘ très-cl air..
Le mélange .-du verd '& du- jaune, par exemplè ,
de-deux taiTesde verd-foncé for une-.taaTe de jaune,
fait le- verd coulon * qui reffembie a une fouille-un
peu fanée*
P6ur faire le noir, on délaie l’azur dans de
l’eau ; il faut qu’il', foif tant foit peu épais-.: on y-
méle un peu dë colle' de vache , macéfee dans la
chaux, & cuite jüfqü’à confiftance dë colle de poif-
fon. Qùarid on a peint de' ce noir la porcelaine qu’on
veut recuire, on couvre de blanc les endroits noirs.
Durant la cuite, -ce blanc s’incorpore dans le noir,
de même que le vernis ordinaire s'incorpore dans.le
bleu de la porcelaine commune.
De 1a couleur appellée tfiu.
Il y a une autre couleur âppellée tfiu : ce tfiu eft
une pierre ou minéral, qui reftemble affez au vitriol
romain , & qui vraisemblablement fe tire de
quelque mine de plomb , & portant avec lui dés
parcelles imperceptibles de olomb ; il s’infînue de
lui-même 'dans la porcelaine, fans le fecours de la
eérufe , qui eft le véhicule dés autres couleurs
qu’on! donne à1 la porcelaine reeuiteï
C’éft dé ce tfiù qü’on a. fait le violet foncé\ On
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en trouve à Canton , & il en vient de- Feking,
mais ce dernier eft bien meilleur. Aufli fe vend"
il un taël huit mas la livre, c’eft-a-dire, 9 liv.
Le tfiu fe fond, & quand il eft fondu ou ramolli,
les orfèvres l’appliquent en forme d email, for des
ouvrages d’argent. Ils mettront , par exemple, un
petit cereW'de tfiu dans le tour d’une bague, ou bien)*
iis en rempliront le haut d’une aiguille de tête , &*
: l y enchalfent en forme de pierrerie. Cette ef-
pècè- d’émail- fe* détache à fo longue ; mais oip
tâche d’obvier à cet inconvénient en le- mettant-
for une légère couche de colle de poifton ou de
vache.
Le, tfiu, de même que les autres couleurs dont
! on vient de parler, ne s’emploie que for 1apone-
j laine qu’on recuit.
I Telle eft la préparation du tfiu : on He le rôtît
! point comme l’azur; mais on le brife & on le ré-
! duit en une poudre très-fine ; on le jette dans un
I vafe plein d’eau, on l’y agite un peu, enfoke on
j^te cette eau où il fo trouve quelque faleté, &
! Fon gardé le cryftal 'qui eft tombé au fond du
; vafo.
• Cette mafie ainfî délayée perd fa belle, couleur,.
& paroît en dehors un peu-cendrée. Mais le tfiù re-_ I couvre fa couleur violette dès q.ue Xa porcelaine eft
|| cuite. On conferve le tfiu auffi longtemps qu’on, le
fôtihffitè'.
| Quand on veut peindre en cette couleur quelques
■ yafes de porcelaine, il fuffit de fo deiayer avec de
Téàu, en y mêlant fi l ’on veut un peu de' colle;
de vache ; ce' qué quelques-uns ne jugent pas ne-
' ceftâire. C’eft de quoi Ion peut s’inftruire pft:
l ’eftai.
Pour dorer ou argenter la porcelaine, on. met
dèux fufens de eérufe fur deux mas. de feuilles d’or
ou d’ar-gent qu’on; a ëu foin de difîoudre. L ’argent
fur le-vernis tfikins a beaucoup d’éclat. Si l ?ôn:
peint les unes en or & les autres en argent, les
pièces- argentees ne doivent pas demeurer dans le-
petit fourneau autant de temps que les pièces dorées,
autrement l’argent difparoîtroit avant que l’or
. eu pu- atteindre le degré de cuite qui lui donne
fon éelât.-
De la porcelaine colorée & de fa fabrique.
Il y a une efpèce de p o r c e la in e colorée , qui fe
vend à'meilleur compte que celle qur eft peinte
' avec les couleurs dont on vient de parler.
Pour faire ces fortes d’ouvrages , il n’eft pas ne-
1 ceffaire que la matière qui doit y être employée
foit fi fine; on prend des taifes qui-ont déjà été
' cuites dans le grand fourneau , fans_ qu’elles y
aient été verniflees, & par conféquent qui font toutes
; blanches, & qui n’ont aucun iuftré : on les colore
en lés’ plongeant dans le vafe ou eft la couleur